par zelie » sam. 21 déc. 2019, 14:40
Trinité a écrit : ↑ven. 20 déc. 2019, 13:57
Chère Zélie,
Il m'étonne cependant que vos parents n'aient pas conscience, malgré leur âge, de tout ce qu'ils vous demandent.
Cher Trinité,
Je vais encore faire long mais ça peut servir à d’autres. Il faut comprendre le profil des personnes qui nous entourent, fussent-ils nos père et mère. Et dans le nécessaire jugement que l’on doit avoir d’eux pour ne pas s’y perdre et en devenir fou, garder un espace pour relever leurs qualités, même si ne nous apparaissent que leurs défauts, et pas des moindres.
Vous vous étonnez de la conduite de mes parents ?... C’est tout un poème, ma mère en particulier. Il fut un temps où ma mère me hurlait tellement dessus au téléphone ou de vive voix qu'elle exigeait que je lui demande pardon à genoux de ce qu'elle inventait de toutes pièces comme griefs. Elle éructait parce que calmement, posément, je démontais face à elle et à la famille entière, prise comme public, tous ses mensonges. Mais pour l’affronter ainsi, tout ne s'est pas fait en un jour.
Adolescente, face à ses colères telles que je n'en ai jamais vus chez qui que ce soit d'autre, j'en souffrais "ma race" comme disent les jeunes, et j'en pleurais des mois entiers, sidérée, bloquée et n'osant répondre, prenant tout ce qui venait d’elle comme autant de reproches que je croyais justes. Mon père était pétrifié n'a jamais bougé, ne m'a jamais défendue.
Puis je suis devenue adulte, et dès mes 18 ans je suis partie de la maison, et tout a été pensé pour que je sois autonome le plus vite possible; je lui ai alors "bouffé la gueule" à la hauteur de ce que j'avais subi. Les hurlements, les insultes fusaient des deux cotés : elle me cherchait, elle me trouvait dans la seconde, et des quatre enfants, bien que la plus jeune, j'ai été la seule qui a osé lui répondre ton pour ton et mauvaise foi pour mauvaise foi. C'était une époque où la colère et la rancune ont fini par dominer ma vie, la dominer partout ; je suis devenue colérique, à l'instar de ma mère. D'une enfant douce et timide, que les proviseurs encensaient pour sa "trop grande gentillesse", et son" esprit de service", je suis devenue une autre personne, calculatrice, stressée, toujours dans l'anticipation et la défensive, mais cachée sous plein d'autres aspects bien rebutants.
J'aurais pu, comme ma mère, en rester là. Construite comme elle, aussi caractérielle qu'elle dans une famille de gentils, traumatisée par nos affrontements, en premier mes enfants, tout bébés. Mon père était systématiquement pris à partie comme témoin, obligé de se ranger de son coté même dans le mensonge tellement il avait peur de se retrouver face à un divorce pour une simple brouille mère-fille. J'ai eu des brouilles de plusieurs mois avec ma mère et je n'ai jamais fait le premier pas pour revenir. Je voulais tout simplement ne plus jamais la revoir.
Et puis... devinez quoi... Un Papa venu d'ailleurs s'est rappelé à moi, m'a prise dans Ses bras et m'a expliqué que j'avais le droit de déposer les armes, que je n'étais pas obligée d'être prisonnière d'un tel système, que je pouvais aller explorer des tas d'autres choses dans mon unique vie. Ne connaissant absolument rien à ma religion de naissance, parce que j'avais reçu les sacrements sans passer par tout le cursus catéchétique normal -parce que ma mère l'avait exigé pour se faciliter la vie et ne plus avoir à m'amener au caté quand mon frère aurait fini son propre cursus- (j'ai été confirmée à 10 ans, et tout le reste avant), je ne savais même pas que la messe avait de l'importance, ni ce qui s'y jouait, bref, une vraie catastrophe. Je gardais un souvenir désastreux de la totalité des prêtres que j'avais côtoyé, en lesquels je ne voyais que des fonctionnaires rugueux et pressés de se débarrasser de la moindre obligation.
Non croyante, un jour je me suis retrouvée seule à Paris. Et ces quelques jours m'ont permis de reprendre un souffle que je n'avais jamais vraiment connu. Il m'est apparu que Dieu existait vraiment, que ce n'était pas une représentation, une "béquille" de l'être humain, comme je l'avais appris en philo ou dans ce genre de cours.
Comment faire pour assouvir cette soif à nulle autre pareille de connaître Dieu dans une telle situation d’ignorance? Ben je suis restée sur ce que je connaissais ; je suis allée dans une de ces immenses librairies citadines me faire conseiller un bouquin. Et c'est ainsi qu'assez rapidement, après deux essais, je suis tombée sur les écrits de Maria Valtorta. Et cela a tout changé. Pas en un jour, en vingt ans. Mais pas après pas, jour après jour, je me suis accrochée, j'ai suivi tout ce que ces livres contenaient, j'ai pleuré sur tout ce que j'avais fait et construit de ma vie, comprenant combien j'avais été dans l'erreur la plus totale. Je n'ai pas lu seulement "l'évangile tel qu'il m'a été révélé" (10 volumes), mais aussi les "cahiers", le "livre d'Azarias", "leçons sur l'épitre de Saint Paul aux Romains", les "carnets", tout. J'ai tout dévoré, puis j'ai recommencé à lire, et j'ai tout savouré. Ce sont ces ouvrages qui m'ont ramené à la Bible, à la messe, à la prière, et à d'autres lectures, plus hermétiques, mais très belles, "avec imprimatur". Parce qu'à l'époque, je ne savais même pas ce que pouvait être un imprimatur, ni même que l'Eglise avait son mot à dire dans ce qui se publiait de religieux !
Et j'en suis donc arrivée à tenir tête à ma mère avec sang-froid et détermination, sans basculer dans la facilité de la colère par laquelle j'avais le dessus sur elle. Je suis devenue plus simple, plus calme surtout; mes enfants me trouvent plutôt douce malgré ce fort caractère qui m'est resté, mais même ça je l'ai transformé en bien ; je ne renonce jamais, j’ai cette chance de croire que tout est possible, même devant une mule. Chargée d'accompagner et de former à mon tour, je suis sans concession, très rigoureuse sur le cadre, mais jamais dans le reproche, toujours dans l'exemple et l’encouragement, et mes collègues me le font ressentir. Je vérifie tout, j'accompagne tout, je contrôle tout, et je crève un peu tout le monde. Mais au moins, les choses marchent bien et le sourire accompagne ceux qui me sont confiés. Par contre je suis beaucoup moins "rusée" qu'avant.
Avec le temps, (30 ans quand même) ma mère a abandonné ses exigences et ses hurlements à mon égard. Elle houspille les autres, mais pas moi. Elle a vieilli aussi, la fatigue, la lassitude jouent pour moi. Plus jamais je ne lui ai « parlé entre quatre yeux » en hurlant, parce que pour elle, lui parler c'est la prendre en choc frontal; toute parole sonne le reproche à ses yeux, tellement sa fragilité est grande. Ne pouvant lui parler, j'ai agi. Je me suis tue, je l'ai supportée et j'ai fait ce que Jésus voulait que je fasse, pas plus, mais pas moins. Et oui, c'est beaucoup d'efforts en forme de couleuvres à avaler, mais c’est aussi un chemin libératoire. Ses agissements ne m’ont plus emprisonnée dans la culpabilité ou des ascenseurs émotionnels. Je fais ce qu’il est décent de faire, je ne me sens pas obligée de tout faire, je peux dire non sans culpabiliser, parce qu’au fond, je ne laisse jamais tomber mes parents sur les points importants. Je ne me sens pas indispensable, ni obligée, et j’ai réalisé que mes parents n’ont pas besoin de moi pour continuer leur bout de chemin, même s’ils prétendent le contraire, même s’ils prétendent que moi j’ai besoin d’eux, ou que je leur dois quoi que ce soit. Je les laisse se fatiguer tout seuls de leurs propres prétextes. Dieu ne me demande pas de me laisser manipuler ou de croire des mensonges, il me demande de prier pour discerner, et de m’en tenir à sa loi. Loi qui est service, mais pas aliénation.
Mais tout cela, c’est de la construction et du temps. Ce n’est pas un modèle livré clé en main. Ma mère, de son coté, s’est quand même nettement calmée. Elle a toujours son coté fantasque, pénible et colérique, mais à force d’arguments silencieux, ou quelquefois d’arguments tout courts quand vraiment il faut recadrer ses mensonges, elle aussi a fini par comprendre qu’on peut grandement se faciliter la vie et s’économiser de la fatigue en arrêtant de vouloir soumettre le monde entier.
Il y a eu aussi les petits-enfants, et ce fut un des leviers majeurs ; si elle veut les voir, elle a intérêt à être gentille et à se tenir à carreaux. Sinon on lui rappelle sans un mot qu’on peut vivre sans elle sans limite dans le temps, comme un jour où elle s’en est prise avec une mauvaise foi affreuse de colère et de reproche à ma fille de 10 ans, déversant sur elle un bouillon venu d’ailleurs. J’ai calmé et re-calmé le jeu en défendant ma fille sans rien lâcher sur aucun argument, avec beaucoup de fermeté, et bien sûr elle n’a rien voulu reconnaître. Nous avons poliment, l’air de rien, écourté la visite et nous ne sommes pas revenus tant que ma fille a eu peur de sa grand-mère. Et au téléphone, quand elle demandait ses pourquoi indécents d’oubli, je ne me gênais pas, mais calmement, pour lui rappeler les faits. Je ne peux nier que dans mes rapports, j’ai quand même gardé un coté direct, mais dans mon cas, avec quelqu’un comme elle, ou c’est un « ace », ou on se fait démonter. Quand elle en fait une belle et qu’elle sait qu’un ace va la cueillir à l’autre bout du fil, elle fait téléphoner mon père, qui se prend le même ace (et oui ; au début, ça a marché un temps, de se refaire dévorer les bras, puis on est passé à la vitesse supérieure) et est chargé de transmettre. Du coup, il met le haut-parleur, comme ça il n’est plus obligé d’affronter ma mère, la transmission est faite.
Aussi, devant toutes les exagérations, qu’elles soient parentales ou de qui ce soit, il faut savoir mettre un stop, voire des fois couper les ponts si la perversité anime son parent. Je ne souhaite cela à personne, mais c’est une forme de protection qu’on ne peut exclure et qui est préconisée (au cas par cas) par les thérapeutes. Ce dosage entre les limites et ce qu’on doit à nos parents, c’est un chemin long, fait de grande fermeté, mais aussi de patience et d’acceptation, de bienveillance et de recul sur toutes les situations qui se présentent. C’est facile à dire.
Mais refuser, de toutes ses forces, de ne voir que ce qu’ils laissent voir d’eux et qui les dessert, c’est grandir là où Jésus nous a mis, et quelle que soit la situation, il faut savoir Lui en rendre grâces. Car si certains ont oublié le cadeau immense que Dieu nous fait de nous faire faire l’expérience d’une vie avant de retourner « à la maison » près de Lui, nous avons le droit, nous, de ne pas l’oublier, et de hiérarchiser tout ce qu’il nous arrive à l’aune de la joie de vivre notre unique moment de vie incarnée, sur la terre créée dans l’Amour et par Amour et de ne rien laisser nous ôter ce grand amour de cette vie donnée, et la gratitude et la joie pour lesquels Dieu nous a créés.
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Chère Zélie,
Il m'étonne cependant que vos parents n'aient pas conscience, malgré leur âge, de tout ce qu'ils vous demandent.
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Cher Trinité,
Je vais encore faire long mais ça peut servir à d’autres. Il faut comprendre le profil des personnes qui nous entourent, fussent-ils nos père et mère. Et dans le nécessaire jugement que l’on doit avoir d’eux pour ne pas s’y perdre et en devenir fou, garder un espace pour relever leurs qualités, même si ne nous apparaissent que leurs défauts, et pas des moindres.
Vous vous étonnez de la conduite de mes parents ?... C’est tout un poème, ma mère en particulier. Il fut un temps où ma mère me hurlait tellement dessus au téléphone ou de vive voix qu'elle exigeait que je lui demande pardon à genoux de ce qu'elle inventait de toutes pièces comme griefs. Elle éructait parce que calmement, posément, je démontais face à elle et à la famille entière, prise comme public, tous ses mensonges. Mais pour l’affronter ainsi, tout ne s'est pas fait en un jour.
Adolescente, face à ses colères telles que je n'en ai jamais vus chez qui que ce soit d'autre, j'en souffrais "ma race" comme disent les jeunes, et j'en pleurais des mois entiers, sidérée, bloquée et n'osant répondre, prenant tout ce qui venait d’elle comme autant de reproches que je croyais justes. Mon père était pétrifié n'a jamais bougé, ne m'a jamais défendue.
Puis je suis devenue adulte, et dès mes 18 ans je suis partie de la maison, et tout a été pensé pour que je sois autonome le plus vite possible; je lui ai alors "bouffé la gueule" à la hauteur de ce que j'avais subi. Les hurlements, les insultes fusaient des deux cotés : elle me cherchait, elle me trouvait dans la seconde, et des quatre enfants, bien que la plus jeune, j'ai été la seule qui a osé lui répondre ton pour ton et mauvaise foi pour mauvaise foi. C'était une époque où la colère et la rancune ont fini par dominer ma vie, la dominer partout ; je suis devenue colérique, à l'instar de ma mère. D'une enfant douce et timide, que les proviseurs encensaient pour sa "trop grande gentillesse", et son" esprit de service", je suis devenue une autre personne, calculatrice, stressée, toujours dans l'anticipation et la défensive, mais cachée sous plein d'autres aspects bien rebutants.
J'aurais pu, comme ma mère, en rester là. Construite comme elle, aussi caractérielle qu'elle dans une famille de gentils, traumatisée par nos affrontements, en premier mes enfants, tout bébés. Mon père était systématiquement pris à partie comme témoin, obligé de se ranger de son coté même dans le mensonge tellement il avait peur de se retrouver face à un divorce pour une simple brouille mère-fille. J'ai eu des brouilles de plusieurs mois avec ma mère et je n'ai jamais fait le premier pas pour revenir. Je voulais tout simplement ne plus jamais la revoir.
Et puis... devinez quoi... Un Papa venu d'ailleurs s'est rappelé à moi, m'a prise dans Ses bras et m'a expliqué que j'avais le droit de déposer les armes, que je n'étais pas obligée d'être prisonnière d'un tel système, que je pouvais aller explorer des tas d'autres choses dans mon unique vie. Ne connaissant absolument rien à ma religion de naissance, parce que j'avais reçu les sacrements sans passer par tout le cursus catéchétique normal -parce que ma mère l'avait exigé pour se faciliter la vie et ne plus avoir à m'amener au caté quand mon frère aurait fini son propre cursus- (j'ai été confirmée à 10 ans, et tout le reste avant), je ne savais même pas que la messe avait de l'importance, ni ce qui s'y jouait, bref, une vraie catastrophe. Je gardais un souvenir désastreux de la totalité des prêtres que j'avais côtoyé, en lesquels je ne voyais que des fonctionnaires rugueux et pressés de se débarrasser de la moindre obligation.
Non croyante, un jour je me suis retrouvée seule à Paris. Et ces quelques jours m'ont permis de reprendre un souffle que je n'avais jamais vraiment connu. Il m'est apparu que Dieu existait vraiment, que ce n'était pas une représentation, une "béquille" de l'être humain, comme je l'avais appris en philo ou dans ce genre de cours.
Comment faire pour assouvir cette soif à nulle autre pareille de connaître Dieu dans une telle situation d’ignorance? Ben je suis restée sur ce que je connaissais ; je suis allée dans une de ces immenses librairies citadines me faire conseiller un bouquin. Et c'est ainsi qu'assez rapidement, après deux essais, je suis tombée sur les écrits de Maria Valtorta. Et cela a tout changé. Pas en un jour, en vingt ans. Mais pas après pas, jour après jour, je me suis accrochée, j'ai suivi tout ce que ces livres contenaient, j'ai pleuré sur tout ce que j'avais fait et construit de ma vie, comprenant combien j'avais été dans l'erreur la plus totale. Je n'ai pas lu seulement "l'évangile tel qu'il m'a été révélé" (10 volumes), mais aussi les "cahiers", le "livre d'Azarias", "leçons sur l'épitre de Saint Paul aux Romains", les "carnets", tout. J'ai tout dévoré, puis j'ai recommencé à lire, et j'ai tout savouré. Ce sont ces ouvrages qui m'ont ramené à la Bible, à la messe, à la prière, et à d'autres lectures, plus hermétiques, mais très belles, "avec imprimatur". Parce qu'à l'époque, je ne savais même pas ce que pouvait être un imprimatur, ni même que l'Eglise avait son mot à dire dans ce qui se publiait de religieux !
Et j'en suis donc arrivée à tenir tête à ma mère avec sang-froid et détermination, sans basculer dans la facilité de la colère par laquelle j'avais le dessus sur elle. Je suis devenue plus simple, plus calme surtout; mes enfants me trouvent plutôt douce malgré ce fort caractère qui m'est resté, mais même ça je l'ai transformé en bien ; je ne renonce jamais, j’ai cette chance de croire que tout est possible, même devant une mule. Chargée d'accompagner et de former à mon tour, je suis sans concession, très rigoureuse sur le cadre, mais jamais dans le reproche, toujours dans l'exemple et l’encouragement, et mes collègues me le font ressentir. Je vérifie tout, j'accompagne tout, je contrôle tout, et je crève un peu tout le monde. Mais au moins, les choses marchent bien et le sourire accompagne ceux qui me sont confiés. Par contre je suis beaucoup moins "rusée" qu'avant.
Avec le temps, (30 ans quand même) ma mère a abandonné ses exigences et ses hurlements à mon égard. Elle houspille les autres, mais pas moi. Elle a vieilli aussi, la fatigue, la lassitude jouent pour moi. Plus jamais je ne lui ai « parlé entre quatre yeux » en hurlant, parce que pour elle, lui parler c'est la prendre en choc frontal; toute parole sonne le reproche à ses yeux, tellement sa fragilité est grande. Ne pouvant lui parler, j'ai agi. Je me suis tue, je l'ai supportée et j'ai fait ce que Jésus voulait que je fasse, pas plus, mais pas moins. Et oui, c'est beaucoup d'efforts en forme de couleuvres à avaler, mais c’est aussi un chemin libératoire. Ses agissements ne m’ont plus emprisonnée dans la culpabilité ou des ascenseurs émotionnels. Je fais ce qu’il est décent de faire, je ne me sens pas obligée de tout faire, je peux dire non sans culpabiliser, parce qu’au fond, je ne laisse jamais tomber mes parents sur les points importants. Je ne me sens pas indispensable, ni obligée, et j’ai réalisé que mes parents n’ont pas besoin de moi pour continuer leur bout de chemin, même s’ils prétendent le contraire, même s’ils prétendent que moi j’ai besoin d’eux, ou que je leur dois quoi que ce soit. Je les laisse se fatiguer tout seuls de leurs propres prétextes. Dieu ne me demande pas de me laisser manipuler ou de croire des mensonges, il me demande de prier pour discerner, et de m’en tenir à sa loi. Loi qui est service, mais pas aliénation.
Mais tout cela, c’est de la construction et du temps. Ce n’est pas un modèle livré clé en main. Ma mère, de son coté, s’est quand même nettement calmée. Elle a toujours son coté fantasque, pénible et colérique, mais à force d’arguments silencieux, ou quelquefois d’arguments tout courts quand vraiment il faut recadrer ses mensonges, elle aussi a fini par comprendre qu’on peut grandement se faciliter la vie et s’économiser de la fatigue en arrêtant de vouloir soumettre le monde entier.
Il y a eu aussi les petits-enfants, et ce fut un des leviers majeurs ; si elle veut les voir, elle a intérêt à être gentille et à se tenir à carreaux. Sinon on lui rappelle sans un mot qu’on peut vivre sans elle sans limite dans le temps, comme un jour où elle s’en est prise avec une mauvaise foi affreuse de colère et de reproche à ma fille de 10 ans, déversant sur elle un bouillon venu d’ailleurs. J’ai calmé et re-calmé le jeu en défendant ma fille sans rien lâcher sur aucun argument, avec beaucoup de fermeté, et bien sûr elle n’a rien voulu reconnaître. Nous avons poliment, l’air de rien, écourté la visite et nous ne sommes pas revenus tant que ma fille a eu peur de sa grand-mère. Et au téléphone, quand elle demandait ses pourquoi indécents d’oubli, je ne me gênais pas, mais calmement, pour lui rappeler les faits. Je ne peux nier que dans mes rapports, j’ai quand même gardé un coté direct, mais dans mon cas, avec quelqu’un comme elle, ou c’est un « ace », ou on se fait démonter. Quand elle en fait une belle et qu’elle sait qu’un ace va la cueillir à l’autre bout du fil, elle fait téléphoner mon père, qui se prend le même ace (et oui ; au début, ça a marché un temps, de se refaire dévorer les bras, puis on est passé à la vitesse supérieure) et est chargé de transmettre. Du coup, il met le haut-parleur, comme ça il n’est plus obligé d’affronter ma mère, la transmission est faite.
Aussi, devant toutes les exagérations, qu’elles soient parentales ou de qui ce soit, il faut savoir mettre un stop, voire des fois couper les ponts si la perversité anime son parent. Je ne souhaite cela à personne, mais c’est une forme de protection qu’on ne peut exclure et qui est préconisée (au cas par cas) par les thérapeutes. Ce dosage entre les limites et ce qu’on doit à nos parents, c’est un chemin long, fait de grande fermeté, mais aussi de patience et d’acceptation, de bienveillance et de recul sur toutes les situations qui se présentent. C’est facile à dire.
Mais refuser, de toutes ses forces, de ne voir que ce qu’ils laissent voir d’eux et qui les dessert, c’est grandir là où Jésus nous a mis, et quelle que soit la situation, il faut savoir Lui en rendre grâces. Car si certains ont oublié le cadeau immense que Dieu nous fait de nous faire faire l’expérience d’une vie avant de retourner « à la maison » près de Lui, nous avons le droit, nous, de ne pas l’oublier, et de hiérarchiser tout ce qu’il nous arrive à l’aune de la joie de vivre notre unique moment de vie incarnée, sur la terre créée dans l’Amour et par Amour et de ne rien laisser nous ôter ce grand amour de cette vie donnée, et la gratitude et la joie pour lesquels Dieu nous a créés.