L'Église sur la laïcité

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Re: L'Église sur la laïcité

par Cinci » mar. 27 juil. 2021, 17:56

Salut Riou,

C'est très bien vu. Je souscris à vos observations plus haut naturellement.

Re: L'Église sur la laïcité

par Cinci » dim. 25 juil. 2021, 16:50

Bonjour Prodigal,


Vrai que les chrétiens ont perdu la bataille idéologique. Pour ce qui s'ensuit ? Je suis d'accord, aussi, pour dire que les laïcistes ne toléreront qu'un christianisme faible et édulcoré. Mais vous ne verriez pas de changement notable là-dessus qu'il faudrait porter au compte du dernier concile lui-même.

C'est à dire que la volonté de nos puissants dans le monde de pousser l'Église catholique dans la marginalité commence bien avant les années 1960. Et cette volonté séculière n'entretient pas de rapport avec ce que fait l'Église de son côté bien entendu. On a affaire à une lame de fond autonome. L'Église n'est pas coupable de l'apostasie des dirigeants c'est certain.

Merci pour le commentaire posté plus haut.




Néanmoins, il y a bien un réel changement dans le discours de l'Église catholique. Un changement qui, lui, se trouve consacré à l'occasion du concile. C'est la position de l'Église par rapport à ce système philosophique de gouvernance séculière qui change et sur le plan des principes. L'Église catholique renonce à une position magistérielle en surplomb, comme pour enseigner en maître et condamner franchement le problème à sa source, comme pouvaient le faire encore les papes antérieurs. Au contraire ! Voici maintenant que le principal du système adverse s'en trouve dorénavant légitimé dans ses fondations, l'Église se bornant à faire valoir qu'il serait quand même un bien pour le monde si les dirigeants et le peuple écoutaient les merveilleux enseignements éthiques de l'Église portant sur l'homme, Dieu, etc.

L'Église dira que le mieux serait de l'écouter certainement, tout en acceptant comme normal et souhaitable que l'école n'aille pas enseigner à tous que la seule vraie religion c'est le catholicisme, le Christ, etc. La conséquence qui en découle pour tous et toutes (même si ce n'est pas ce que le pape eût désiré consciemment ou même inconsciemment) : le bon peuple comprend que la foi chrétienne est facultative, optionnelle, pas du tout indispensable, pas meilleure que le judaïsme qui nie le Christ, que l'islam, etc.



Quand l'Église consacrait l'ancien régime monarchique dans ses fondations, il consacrait en même temps un régime qui se calait lui-même sur la religion chrétienne et ses valeurs. Consacrant maintenant dans ses fondations le laïcisme de l'Union européenne, l'Église fait un pacte de collaborations active avec un régime qui repousse et marginalise la foi et ses valeurs cf. post-christianisme. C'est là «quelque chose» de très différent.

Pie XII signait des concordats avec des États-nations, qui reconnaissaient et accordaient encore une place particulière et prépondérante à la foi de l'Église (Allemagne, Italie, Espagne). L'Église ne signait pas un pacte de reconnaissance des idées de Lamennais au début du XIXe siècle ("une Église libre dans un État libre", etc.) Non, Lamennais était excommunié !

:p

Pour moi l'Église a bien voulu consacrer les assises du régime globaliste qui est sorti des cendres de l'après-guerre, en faisant sien les principes des libéraux aux États-Unis. Et cela officiellement à l'occasion du concile. Pour un changement ce fut tout un changement. Le gouvernement de Pie XII n'aurait pas pu faire cela.

Re: L'Église sur la laïcité

par Perlum Pimpum » sam. 24 juil. 2021, 21:48

Mon cher Riou, Je vous renvoie au message envoyé à Cinci ou, mis en bleu et en grand caractères, l’enseignement littéral de DH et de la CDF. À la lecture de quoi, répondez enfin à cette question : reconnaissent-ils le devoir des États à être catholiques ? Quand vous aurez enfin répondu à cette simple question - ça ne fait jamais que dix fois qu’on vous la pose - on pourra reparler de l’interprétation idoine de l’Encyclique.

Re: L'Église sur la laïcité

par Riou » sam. 24 juil. 2021, 19:08

Perlum Pimpum a écrit :
ven. 23 juil. 2021, 14:36
Pour bien le lire, commençons par le paragraphe 1 de a).

« 28. Pour définir plus précisément la relation entre l’engagement nécessaire pour la justice et le service de la charité, il faut prendre en compte deux situations de fait fondamentales:

« a) L’ordre juste de la société et de l’État est le devoir essentiel du politique. Un État qui ne serait pas dirigé selon la justice se réduirait à une grande bande de vauriens, comme l’a dit un jour saint Augustin: «Remota itaque iustitia quid sunt regna nisi magna latrocinia ? »[18]. La distinction entre ce qui est à César et ce qui est à Dieu (cf. Mt 22, 21), à savoir la distinction entre État et Église ou, comme le dit le Concile Vatican II, l’autonomie des réalités terrestres[19], appartient à la structure fondamentale du christianisme. L’État ne peut imposer la religion, mais il doit en garantir la liberté, ainsi que la paix entre les fidèles des différentes religions. De son côté, l’Église comme expression sociale de la foi chrétienne a son indépendance et, en se fondant sur sa foi, elle vit sa forme communautaire, que l’État doit respecter. Les deux sphères sont distinctes, mais toujours en relation de réciprocité. »

Je vous ai mis en rouge ce qui fait immédiatement sursauter. Mais inutile de crier au démon : un tour de passe-passe va suffire à catholiciser le propos.

  • « L’État ne peut imposer la religion ». Oui, mais en quel sens ? Le seul sens compatible à la Tradition est : l’État ne peut pas imposer la foi, en tant que la foi est un assentiment au for interne, sur lequel personne n’a prise. Par contre, évidemment, il peut imposer la foi en ce sens qu’il peut être officiellement catholique et réprimer les atteintes à l’ordre public juste, juste car conforme à l’ordre moral objectif.
  • « Il doit… garantir la liberté, ainsi que la paix entre les fidèles des différentes religions«. » Oui, mais en quel sens ? En celui qu’il leur doit ce qu’il leur doit tant que restent sauves les justes limites de l’ordre public, justes si conformes à l’ordre moral objectif.
Bonjour,
Ce que vous appelez "bien lire" repose en effet sur cette méthode du "tour de passe-passe" consistant à "catholiciser" (comprendre : ajuster à vos vues) le propos d'un pape (propos tenu dans une Encyclique, d'ailleurs...) ! Et cette méthode est pour le moins très "libre" dans la marge de manœuvres qu'elle se laisse à elle-même.
En effet : quand Benoit XVI écrit "religion", il faudrait entendre "foi". Et quand il écrit "loi naturelle", il faudrait entendre "surnaturelle" (mais le pape ne le dirait pas vraiment, comme s'il était animé par une obscurité volontaire, une sorte de manie à s'exprimer en langage chiffré).
De même, quand un pape (ou DH) tient un propos positif sur la laïcité bien comprise (à distinguer du laïcisme, condamné par les papes antérieurs et par Jean-Paul II lui-même), il faudrait comprendre que "laïcité" désigne en fait le concept de "théocratie" - bien que personne ne le dise jamais dans les textes officiels, et qu'il faudrait par conséquent que le lecteur en vienne à comprendre ce que les papes n'expriment jamais... De même pour la "liberté religieuse", pour le pluralisme religieux que DH présuppose comme un fait et une conséquence nécessaire de la liberté religieuse (cette dernière notion trouvant son fondement dans la révélation, selon DH, et non dans la subjectivité).
Ne trouvez-vous pas étrange qu'un nombre important de vos thèses personnelles ne soient jamais vraiment exprimées par les textes que vous mobilisez pour les justifier, textes qui disent parfois l'inverse de ce que vous écrivez?

Bref, selon votre méthode du "passe-passe", il faudrait sans cesse changer les mots, modifier leurs sens, substituer un passage à un autre, faire comme si le singulier était équivalent au pluriel (quand cela vous arrange) ou très différent du pluriel (si l'inverse devait vous déranger), tirer des conclusions (les papes n'en sont pas capables, apparemment), parler à la place du texte pour faire correspondre les textes officiels à votre idéologie personnelle.
Cela fait des pages que vous faites cela en écrivant des messages infinis. Voilà pourquoi la question devient nécessairement inintelligible et impossible. Il faudrait s'arrêter sur chacun de vos paragraphes pour y déceler le tour de passe-passe du jour, et cela prend un temps fou.

Et il faudrait en plus, après ces tours de "passe-passe", subir vos questions censées séparer le faux du vrai..., et accepter vos questions comme si elles ne présupposaient pas, dans leur énonciation même, le problème dont il s'agit de discuter dans le fil en question.
C'est pourquoi je m'arrête également sur ce sujet, car il est impossible d'exprimer clairement ses idées dans ce contexte.

PS: je n'ignore pas que le problème des deux herméneutiques (continuité et rupture) donne lieu à un langage dont il est fait usage dans beaucoup de textes depuis fort longtemps, mais lorsque Benoit XVI fait intervenir ces catégories, il mentionne leur généalogie et leur sens contextuel : elles naissent du conflit intellectuel et pratique qui agite l'Eglise, ce qui signifie que ce sont bien des catégories polémiques - ce que je disais plus haut.

Re: L'Église sur la laïcité

par Cinci » sam. 24 juil. 2021, 17:17

Perlum Pimpum :

Encore une fois vous vous êtes de mauvaise foi et vous vous cherchez des prétextes… Je vous ai suffisamment démontré dans mon précédent post que vous faites dire à DH l’inverse de ce qu’elle dit pour que je n’ai plus à y revenir. Libre à vous de nier les évidences. Vous n’êtes pas un interlocuteur sérieux.
... de mauvaise foi; cherchez des prétextes; suffisamment démontré ... ; nier les évidence ; pas un interlocuteur sérieux ...

Dans vos rêves, tout cela ... dans vos rêves ... mis à part pour l'interlocuteur «sérieux » bien entendu. Une concession que je peux bien vous faire. Une appréciation subjective restant toujours subjective, n'importe qui (ou presque) sera toujours susceptible de "manquer de sérieux" aux yeux de qui vous voudrez.

Maintenant, je n'avais pas terminé avec la revue de votre message plus haut; une question pour moi de n'assommer personne (entre autres choses) avec une réponse kilométrique. J'ai bien fait de prendre une pause. Pourquoi ? Je n'ai pas encore lu vos derniers messages édités. Mais, déjà, voyant ce que vous venez d'écrire (cf. mauvaise foi, suffisamment démontré, pas sérieux ...), je peux vous dire que je ne lirai pas plus avant votre prose, ni dans ce fil-ci ni ailleurs sur ce forum. Ce serait vraiment inutile. Ma décision est prise. Votre statut vient de passer à celui d'ignorer, en ce qui me concerne. Parce que vous ne discutez pas vraiment, mais pas autant que cherchez surtout à pratiquer une forme de bullying virtuel, à tenter de «punir» quiconque contestera l'un ou l'autre de vos dires. Je ne suis pas dupe de ce genre de dynamique malfaisante.

Bye !

Re: L'Église sur la laïcité

par prodigal » sam. 24 juil. 2021, 16:50

Cher Cinci,
vous avez incontestablement raison sur ce que vous dites, et à quoi en réalité je ne me suis pas opposé, n'ayant émis aucun avis mais seulement une rapide analyse.
L'avortement est un exemple des plus cruciaux pour ce genre de débat, car c'est un rare cas, peut-être le seul avec la contraception, où la morale humaniste s'oppose diamétralement à la morale chrétienne. L'humaniste comme le chrétien sont persuadés que le droit naturel est de leur côté, c'est pourquoi le sujet est passionnel, et le dialogue extrêmement difficile.
Pourquoi dans ces conditions, comme vous le dites très justement, même un conservateur n'oserait-il jamais remettre en cause le droit à l'avortement? Tout simplement parce que les chrétiens ont perdu la bataille idéologique. Il faut dire qu'ils sont très inférieurs en nombre.
Mais alors, que s'ensuit-il de là du point de vue de la laïcité?
D'une part que le gouvernement d'un pays catholique s'efforcerait de lutter contre l'avortement, et d'une façon générale contre tout ce qui de son point de vue est désordre sexuel. Le gouvernement ou même l'opposition d'ailleurs.
D'autre part qu'un partisan de la laïcité stricte sait que les catholiques ne constituent guère une menace pour son projet politique, sauf sur ces questions touchant de près ou de loin à la morale sexuelle. Ces questions étant cependant capitales, les mêmes défenseurs de la laïcité ne toléreront le christianisme que faible et édulcoré.
Je ne vois pas de changement notable là dessus qui serait dû au concile.

Re: L'Église sur la laïcité

par Cinci » sam. 24 juil. 2021, 16:11

Pardon, cher Cinci, mais votre exemple est techniquement fautif, si toutefois vous admettez que l'avortement est une faute du point de vue de la morale universelle. En ce cas aucune conscience ne peut l'approuver.
Un exemple qui conviendrait serait que l'Eglise ne peut contraindre légitimement les bouchers à fermer boutique le vendredi. Personnellement je m'en réjouis, je l'avoue.

Salut Prodigal,

Fautif ? Ah bon ?

Votre propre cas d'espèce avec le boucher est correct. C'est vrai. Je vous l'accorde.

Mais je ne vois pas - à partir du mien - en quoi l'Église devrait avoir plus de facilité, pour imposer aux cliniques d'avortement leur fermeture permanente dans le contexte actuel. Quoi ? à raison soi-disant d'une loi naturelle ? La réalité nous montre le contraire, je pense.

La loi naturelle ne veut plus rien dire aux citoyens d'aujourd'hui, les gens approuvent les politiques de contrôle des naissances ainsi que l'avortement en guise de moindre mal. Aucune conscience de pourrait approuver l'avortement, vous me dites. Il se produit l'inverse chez nous.

Même le parti politique de la droite la plus conservatrice flanque dehors le candidat, de son côté, qui irait dire aux journalistes qu'il serait franchement contre l'avortement. «Dehors ! »; «Nous ne voulons pas de candidat toxique dans notre parti.» La droite ! Même la droite jugée suspecte. Il semble que nos politiciens raisonnent philosophiquement à l'instar du roi Henri IV au XVIe siècle, pragmatiquement, se disant que «Paris vaut bien une messe». «La gouverne du pays vaut bien un avortement !» Une question de priorité, ce semble.

Re: L'Église sur la laïcité

par prodigal » jeu. 22 juil. 2021, 17:33

Cinci a écrit :
jeu. 22 juil. 2021, 17:11
Encore :
«La foi permet à la raison de mieux accomplir sa tâche et de mieux voir ce qui lui est propre. C'est là que se place la doctrine sociale catholique : elle ne veut pas conférer à l'Église un pouvoir sur l'État. Elle ne veut pas même imposer à ceux qui ne partagent pas sa foi des perspectives et des manières d'être qui lui appartiennent.»
Benoit XVI, lettre encyclique sur l'amour chrétien «Dieu est Amour», le 25 décembre 2005, no 28
Traduction :
Il serait désormais hors de question de contraindre "quelque peu" des athées ou des mal-croyants (dissidents, hérétiques) à devoir se plier minimalement à une perspective ou manière d'être catholique, qui respecterait, en tout cas, pour vrai, les valeurs de la pensée catholique.
Ex : pas question de contraindre des apostats de ne pas avorter les enfants à naître. Il faudra respecter la conscience de l'autre qui se situe "ailleurs" moralement, intellectuellement, philosophiquement, etc.
Pardon, cher Cinci, mais votre exemple est techniquement fautif, si toutefois vous admettez que l'avortement est une faute du point de vue de la morale universelle. En ce cas aucune conscience ne peut l'approuver.
Un exemple qui conviendrait serait que l'Eglise ne peut contraindre légitimement les bouchers à fermer boutique le vendredi. Personnellement je m'en réjouis, je l'avoue.

Re: L'Église sur la laïcité

par Cinci » jeu. 22 juil. 2021, 17:11

Encore :



«La foi permet à la raison de mieux accomplir sa tâche et de mieux voir ce qui lui est propre. C'est là que se place la doctrine sociale catholique : elle ne veut pas conférer à l'Église un pouvoir sur l'État. Elle ne veut pas même imposer à ceux qui ne partagent pas sa foi des perspectives et des manières d'être qui lui appartiennent.»

Benoit XVI, lettre encyclique sur l'amour chrétien «Dieu est Amour», le 25 décembre 2005, no 28




Traduction :

Il serait désormais hors de question de contraindre "quelque peu" des athées ou des mal-croyants (dissidents, hérétiques) à devoir se plier minimalement à une perspective ou manière d'être catholique, qui respecterait, en tout cas, pour vrai, les valeurs de la pensée catholique.

Ex : pas question de contraindre des apostats de ne pas avorter les enfants à naître. Il faudra respecter la conscience de l'autre qui se situe "ailleurs" moralement, intellectuellement, philosophiquement, etc.

La seule chose à faire en dehors de prier, essayer de dialoguer, parler ... Et puis c'est là une position étrangère à ce qu'aurait jamais pu souhaiter un pape Pie IX viz. s'interdire par principe l'usage de la loi pour contraindre.

Re: L'Église sur la laïcité

par Cinci » jeu. 22 juil. 2021, 15:35

Vous voulez voir qu'il y a bien changement ? déplacement sur une nouvelle trajectoire ?


Voici :
La liberté religieuse au défi de l'histoire

par

Denis Donetzkoff (L'abbé, communauté Saint-Martin)


Le 7 décembre 1965, les Pères de Vatican II adoptaient la déclaration sur la liberté religieuse, Dignitatis Humanae, par 2308 placet (oui), contre 70 non placet (non)

Il y est précisé au paragraphe 1, que «tous les hommes sont tenus de chercher la vérité, surtout en ce qui concerne Dieu et son Église, et, une fois qu'ils la connaissent, de l'embrasser et de la sauvegarder. Le saint concile professe également que ces devoirs touchent les hommes dans leur conscience et qu'ils lient celle-ci, et aussi que la vérité ne s'impose pas autrement que par la force de la vérité elle-même.» Le paragraphe suivant indique qu'en matière religieuse nul ne doit être «forcé d'agir contre sa conscience ni empêché d'agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou en association avec d'autres

Ces affirmations, qui aujourd'hui nous semblent aller de soi, ont cependant provoqué des réactions de rejet violentes. Pourquoi ?

Devenu religion officielle de l'Empire sous Théodose à la fin du IVe siècle, le christianisme est malheureusement déchiré par la crise donatiste. Donat refusait de reconnaître la validité des sacrements célébrés par les ministres ordonnés qui, par crainte, avaient accepté de sacrifier aux dieux lors de la persécution de Dioclétien.

Comment réagit saint Augustin face à cette crise ? «Primitivement, écrit-il, mon avis se ramenait à ceci : personne ne devait être contraint à l'unité du Christ ; c'est par la parole qu'on devait agir, par la discussion qu'on devait combattre, par la raison qu'on devait vaincre.» Pourquoi donc a-t-il changé d'avis ? On lui a opposé l'exemple de sa propre cité «qui, jadis tout entière acquise au parti de Donat, se convertit à l'unité catholique par crainte des lois impériales.»

«Pourquoi, demande-t-il alors, l'Église ne forcerait-elle pas ses fidèles perdus à lui revenir, si les fils perdus en ont forcé d'autres à se perdre ? » Et d'ajouter : «Il ne faut pas considérer la contrainte en soi, mais considérer ce à quoi vise la contrainte, si c'est au bien ou au mal.» Augustin appuie en dernière analyse son argumentation sur la parabole des invités au noce : «Ceux que tu trouveras, contrains-les d'entrer - compelle intrare.» (Luc 14, 23)

Cette position a accompagné aussi bien l'Église que la politique confessionnelle des États au travers des siècles. Elle fonde par exemple le principe adopté en 1533 lors de la conclusion de la paix d'Augsbourg : «Cujus regio, ejus religio» : la religion du prince détermine la religion que doivent adopter ses sujets.

Vatican II a donc estimé qu'il était temps de l'abandonner :

«Le saint concile demande aux catholiques, mais prie aussi instamment tous les hommes d'examiner avec le plus grand soin à quel point la liberté religieuse est nécessaire, surtout dans la condition présente de la famille humaine.» (DH, paragraphe 15)

Source : D. Donetzkoff, «La liberté religieuse au défi de l'histoire» dans Chemin d'éternité, janvier/février 2014 - la revue du sanctuaire de Montligeon en France.
La liberté religieuse n'était pas nécessaire hier, elle serait nécessaire maintenant. Un changement ? Oui. Encore : L'abbé qui signe l'article parle d'avoir jugé bon d'abandonner la position précédente. Un abandon. Pas une continuité. Pas un approfondissement dans la même veine. «On change !»

Re: L'Église sur la laïcité

par Cinci » jeu. 22 juil. 2021, 14:44

Quant à votre affirmation ...
Perlum Pimpum :

L’affirmation conciliaire que tous les hommes ont le devoir de rechercher la vérité de la foi catholique, de l’embrasser et de lui être fidèles devient, au prisme déformant de votre délire obsessionnel schismatique, le droit de contester le catholicisme et de professer l’erreur…
Je me trouverais ici en présence d'une manifestation d'un mélange de terrorisme intellectuel et de paralogisme (technique de l'homme de paille), dirait-on.

Le terrorisme, cela vous branche-t-il ?



Parce que l'affirmation conciliaire n'est que l'affirmation conciliaire, et rien d'autre. Et ce n'est certainement pas le concile ou les pères conciliaires qui vont défendre l'idée - le principe, ici - que l'on serait fondé en droit de réfuter réellement le catholicisme, Jésus-Christ ainsi que de professer l'erreur. Non. Ce n'est pas ainsi que les choses se présentent. Des Jean-Paul II ou des Benoit XVI n'auraient jamais eu la balourdise de verser dans une grossièreté semblable.

Personne ne dit que l'Église catholique prétendrait fondé un quelconque droit de rejeter Jésus-Christ réellement.

Le point n'est pas là. Le point c'est plutôt que le concile opère un changement de perspective. Si le droit de professer des erreurs (hérésies, etc.) n'est toujours pas reconnu en principe, le fait est aussi que l'Église veut adopter une toute nouvelle posture (oui, du nouveau pour l'Église) par rapport à ceux qui errent, se trompent, véhiculent de l'hérésie, professent de fausses religions, etc.

L'Église se dirait désormais comme «plus soucieuse» du respect intégral de l'autre, désireuse de dialoguer, d'accompagner sans rien imposer, pour ne pas faire de forcing sur les personnes, à l'égard de ceux qui prennent le faux pour du vrai. En pratique, comme pour le droit civil dans la société : cela se traduit par le droit qui est accordé aux Juifs, aux protestants, aux musulmans, aux Témoins de Jéhovah, 1) de s'exprimer 2) professer leur culte acatholique sur la place publique 3) avoir pignon sur rue, disposer de la jouissance de leur temple, pour faire fleurir leur fausse religion, eux en vivre et pouvoir organiser leur communauté selon leurs principes (la sharia islamique, tiens !), mais en autant bien sûr que tout se passe bien, que les uns n'en profitent pas pour franchement aller pourrir la vie des autres, les maltraiter, les décapiter, battre les enfants.

Ce changement de disposition, de perspective, de politique, maintenant entériné par Paul VI et les autres les 7 et 8 décembre 1965 : c'est un changement de cap majeur qui annule l'orientation de pensée qui était celle enseignée traditionnellement par les papes antérieurs.

Ce changement n'est nié par personne dans l'Église.

De quoi s'agit-il ?

De ce que Léon XIII aurait dit que «nul n'a le droit de professer l'erreur» et que Jean-Paul II pourrait maintenant proclamer le «droit à tous de faire passer le faux pour le vrai, le vrai pour le faux» ? Non. Le point n'est pas là. Le pape actuel dirait la même chose que Léon XIII sous ce rapport. Évidemment !

Le changement est ici :
Quête de sens et don de sens

par

René Latourelle s.j.

«Face au thème des droits de la personne, on peut schématiser comme suit l'évolution du Magistère de l'Église : le pontificat de Pie XII est encore prudent; ceux de Jean XXIII et de Paul VI sont nettement ouverts, surtout avec Vatican II dans Gaudium et Spes et Dignitatis Humanae. [...] Parmi les droits fondamentaux, essentiels et supérieurs, il faut mentionner : la vie, la dignité et l'égalité de la personne, la liberté de pensée, de conscience, de religion. La base sur laquelle reposera ces droits, c'est la réalité et la reconnaissance de la nature de la personne, comprise dans sa totalité philosophique et théologique, naturelle et surnaturelle. Ces droits, de même que la personne, se situent avant tout État, et au-dessus de tout État. »

- Publié chez Novalis en 1995

« ...doyen de la faculté de théologie de l'Université Grégorienne à Rome pendant douze ans » (quatrième de couverture)
La "novelleté" consiste à placer les droits de la personne avant l'État, et au-dessus de l'État.

Il ne sera donc plus question que l'État puisse faire la police religieuse. Non pas, ici, dans le sens que «l'État ne pourrait plus mâter des intégristes déjantés et déposant des charges de dynamites dans le métro», mais dans le sens que l'État ne va pas emprisonner, ni mettre à l'amende ni simplement "sermoner" ou contredire avec autorité un Juif ou un protestant hérétique ( comme de juste) qui irait se fendre de nombreuses publications, pour expliquer au bon peuple à quel point le culte de la Sainte Vierge serait une bêtise, un gros blasphème, un scandale.

Jadis, le caudillo en Espagne aurait passé un coup de fil au directeur de la revue «Virez moi ce type svp ! On ne peut pas laisser des ennemis du Christ continuer ainsi de corrompre le peuple, vous comprenez». Et notre protestant se serait retrouvé au chômage, ses livres bannis des librairies.

Maintenant, le contradicteur sera respecté, invité sur les plateaux télé, promu, les journalistes vont pouvoir annoncer la sortie de ses écrits, les présenter avec chaleur comme ceux d'un auteur intelligent et intéressant, un autre avec qui le pape va pouvoir faire copain, chercher à découvrir le vrai dans la prose de l'autre, etc.

Non, le pape ne va pas déclarer que le culte de Marie serait du pur blasphème et donner raison à l'hérétique. Mais c'est juste que les idées (fausses) de l'autre auront le droit de circuler, d'être reprise à l'école de façon neutre (le blasphème devenant une «autre façon de voir», un point de vue qu'on peut ne pas recevoir pour vrai, sans pour autant remettre en cause la liberté de celui-là, de penser ce qu'il pense, de le dire, sans être embêté ou tracassé par les autorités.

Ce genre d'approche n'aurait jamais été avalisée par Grégoire XVI, Pie IX, Léon XIII, etc. Il n'aurait jamais été question d'aller placer les droits d'un hérétique au-dessus de l'État, prioritaires au bien commun de la société chrétienne par exemple (cf. le Bien du royaume de France, etc.)

Est-ce que je suis dans l'affabulation ? Non. Changement, il y a bien eu.
Jean-Paul II :

«La requête moderne d'autonomie n'a pas manqué d'exercer aussi son influence dans le domaine de la théologie morale catholique. Si celle-ci n'a jamais entendu opposer la liberté humaine à la Loi divine , ni remettre en question l'existence du fondement religieux ultime des normes morales, elle a cependant été amenée à repenser entièrement le rôle de la raison et de la foi dans la détermination des normes morales qui se rapportent à des comportements précis «dans le monde». c'est à dire envers soi-même, envers les autres [...] »

- La Splendeur de la vérité, 6 août 1993, numéro 36
Jean-Paul II dit que l'Église, par le biais de sa théologie morale, a été amenée à repenser entièrement le rôle de la raison et de la foi dans la question du rapport à autrui.

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