par archi » ven. 17 sept. 2010, 19:05
Théophane a écrit :Néanmoins, la forme ordinaire peut se prévaloir, comme vous le reconnaissez vous-même, de l'autorité de l'Eglise, laquelle est infaillible. Si à un moment donné le Pape a décidé d'instaurer ce missel, comme il en fut de même au XVIème siècle avec le missel de saint Pie V, nous n'avons pas le droit de remettre en cause cette décision.
Cher Théophane. Ne seriez-vous pas en train de tomber dans un excès d'ultramontanisme?
Je viens de relire Pastor Aeternus, la très belle constitution du Concile Vatican I sur le Pape, qui dogmatise notamment son infaillibilité. Nulle part elle ne décrit le fait de régler la liturgie comme le rôle propre du Pape, elle le décrit encore moins comme quelqu'un d'infaillible. Et bien sûr, ses décisions prudentielles peuvent tout à fait être mauvaises et être critiquées.
Je me demande si on n'avait pas déjà à l'époque un "Esprit du Concile" - en l'occurrence ultra-montain - très différent de la lettre du même Concile. Bilan, à force de ne pas discuter les décisions du Pape (de l'avis général, après Vatican I, le Pape a vraiment été perçu, de façon excessive, comme celui qui dirige tout et autorise tout dans l'Eglise), on en est arrivé à un Pape sacrifiant volontairement et imprudemment la Tradition liturgique de l'Eglise romaine, bouleversant tout à un rythme ahurissant, pour aboutir paradoxalement une crise de l'autorité comme on n'en a jamais vu dans l'Eglise. Crise de l'autorité qui fait qu'au bout de compte, les évêques n'en ont cure de ce que dit le Pape...
Bref, un excès entraîne un excès encore plus fort en sens inverse.
Evidemment, je ne dis pas là que le Pape n'a aucun pouvoir sur la liturgie, ne serait-ce que parce qu'il est évêque. Mais son rôle et son charisme n'est pas d'innover, mais de conserver la tradition - c'est ce qu'a fait Saint Pie V à son époque en rendant légal son missel en place de liturgies locales dangereusement altérées et s'écartant de la Tradition, tout en reconnaissant les droits légitimes des rites pratiqués depuis longtemps.
Au passage, quand on pense aux conséquences désastreuses de la réforme du Patriarche Nikon dans l'Eglise russe, qui au nom de l'unification de quelques usages relativement mineurs comme le nombre de doigts pour le signe de croix ou le nombre d'alleluias, a provoqué un schisme sanglant qui n'est toujours pas résolu, on se dit que chez nous, et d'un on a été très sages quand l'ensemble des rites a été bouleversé de fond en comble, et de 2 c'est à la base une très mauvaise idée que de forcer des innovations liturgiques.
Je ne suis certes pas un spécialiste de la liturgie mais il me semble :
- d'une part, que le missel de Paul VI est plus proche de la liturgie des débuts du christianisme et qu'il a le mérite d'avoir supprimé certains éléments superflus et d'avoir amené le peuple à une plus grande participation
Euh, il ne faut pas prendre pour argent comptant les prétentions des auteurs de la nouvelle liturgie, qui ne résistent pas à la moindre analyse honnête...
- d'autre part, qu'on ne saurait attribuer à ce nouveau missel les dérives et les abus liturgiques dont l'Eglise a souffert. Les responsables ne sont autres que les prêtres et les fidèles laïcs qui, sans doute de bonne foi mais avec une grande ignorance, ont contribué à amoindrir et à désacraliser la liturgie.
Disons que quand on se nois dans une forêt de choix multiples autorisés, on a du mal à ne pas se dire qu'en fin de compte on peut ajouter tous les autres choix qu'on veut... c'est la notion même de rite qui est atteinte par ce trop grand nombre d'options.
J'assiste quotidiennement à la Messe dans la forme ordinaire, en français ou en latin, et je puis vous assurer que de nombreux prêtres apportent tout le soin nécessaire pour que le saint sacrifice soit célébré dignement. En outre, vous n'ignorez pas que le Souverain Pontife célèbre la Messe selon le nouveau missel, que ce soit en public ou en privé.
Je suis convaincu que certains célèbrent la FORM avec une grande révérence. Ceci dit, je pense que même dans ce cas, elle est défectueuse. La liturgie, d'une part, nous unit avec les chrétiens des siècles précédents, d'autre part, c'est une des principales sources de la théologie, et de la théologie vécue. D'où l'importance de transmettre aussi fidèlement que possible les textes anciens, et l'insuffisance à cet égard de textes inventés ou redécoupés en fonction de la théologie du moment (parfois très limite) des nouveaux liturgistes.
Bref, entre la notion de rite amoindrie et la pauvreté des éléments transmis, je pense qu'il faudra beaucoup de réformes avant que la FORM, même célébrée avec tout le soin et tout l'apparat possibles, puisse commencer à être satisfaisante. Et je constate que la "réforme de la réforme" en tant qu'elle prétend réformer la FORM, a beaucoup de mal à démarrer...
In Xto,
archi.
[quote="Théophane"]Néanmoins, la forme ordinaire peut se prévaloir, comme vous le reconnaissez vous-même, de l'autorité de l'Eglise, laquelle est infaillible. Si à un moment donné le Pape a décidé d'instaurer ce missel, comme il en fut de même au XVIème siècle avec le missel de saint Pie V, nous n'avons pas le droit de remettre en cause cette décision. [/quote]
Cher Théophane. Ne seriez-vous pas en train de tomber dans un excès d'ultramontanisme?
Je viens de relire Pastor Aeternus, la très belle constitution du Concile Vatican I sur le Pape, qui dogmatise notamment son infaillibilité. Nulle part elle ne décrit le fait de régler la liturgie comme le rôle propre du Pape, elle le décrit encore moins comme quelqu'un d'infaillible. Et bien sûr, ses décisions prudentielles peuvent tout à fait être mauvaises et être critiquées.
Je me demande si on n'avait pas déjà à l'époque un "Esprit du Concile" - en l'occurrence ultra-montain - très différent de la lettre du même Concile. Bilan, à force de ne pas discuter les décisions du Pape (de l'avis général, après Vatican I, le Pape a vraiment été perçu, de façon excessive, comme celui qui dirige tout et autorise tout dans l'Eglise), on en est arrivé à un Pape sacrifiant volontairement et imprudemment la Tradition liturgique de l'Eglise romaine, bouleversant tout à un rythme ahurissant, pour aboutir paradoxalement une crise de l'autorité comme on n'en a jamais vu dans l'Eglise. Crise de l'autorité qui fait qu'au bout de compte, les évêques n'en ont cure de ce que dit le Pape...
Bref, un excès entraîne un excès encore plus fort en sens inverse.
Evidemment, je ne dis pas là que le Pape n'a aucun pouvoir sur la liturgie, ne serait-ce que parce qu'il est évêque. Mais son rôle et son charisme n'est pas d'innover, mais de conserver la tradition - c'est ce qu'a fait Saint Pie V à son époque en rendant légal son missel en place de liturgies locales dangereusement altérées et s'écartant de la Tradition, tout en reconnaissant les droits légitimes des rites pratiqués depuis longtemps.
Au passage, quand on pense aux conséquences désastreuses de la réforme du Patriarche Nikon dans l'Eglise russe, qui au nom de l'unification de quelques usages relativement mineurs comme le nombre de doigts pour le signe de croix ou le nombre d'alleluias, a provoqué un schisme sanglant qui n'est toujours pas résolu, on se dit que chez nous, et d'un on a été très sages quand l'ensemble des rites a été bouleversé de fond en comble, et de 2 c'est à la base une très mauvaise idée que de forcer des innovations liturgiques.
[quote]Je ne suis certes pas un spécialiste de la liturgie mais il me semble :
- d'une part, que le missel de Paul VI est plus proche de la liturgie des débuts du christianisme et qu'il a le mérite d'avoir supprimé certains éléments superflus et d'avoir amené le peuple à une plus grande participation[/quote]
Euh, il ne faut pas prendre pour argent comptant les prétentions des auteurs de la nouvelle liturgie, qui ne résistent pas à la moindre analyse honnête...
[quote]- d'autre part, qu'on ne saurait attribuer à ce nouveau missel les dérives et les abus liturgiques dont l'Eglise a souffert. Les responsables ne sont autres que les prêtres et les fidèles laïcs qui, sans doute de bonne foi mais avec une grande ignorance, ont contribué à amoindrir et à désacraliser la liturgie.[/quote]
Disons que quand on se nois dans une forêt de choix multiples autorisés, on a du mal à ne pas se dire qu'en fin de compte on peut ajouter tous les autres choix qu'on veut... c'est la notion même de rite qui est atteinte par ce trop grand nombre d'options.
[quote]J'assiste quotidiennement à la Messe dans la forme ordinaire, en français ou en latin, et je puis vous assurer que de nombreux prêtres apportent tout le soin nécessaire pour que le saint sacrifice soit célébré dignement. En outre, vous n'ignorez pas que le Souverain Pontife célèbre la Messe selon le nouveau missel, que ce soit en public ou en privé.[/quote]
Je suis convaincu que certains célèbrent la FORM avec une grande révérence. Ceci dit, je pense que même dans ce cas, elle est défectueuse. La liturgie, d'une part, nous unit avec les chrétiens des siècles précédents, d'autre part, c'est une des principales sources de la théologie, et de la théologie vécue. D'où l'importance de transmettre aussi fidèlement que possible les textes anciens, et l'insuffisance à cet égard de textes inventés ou redécoupés en fonction de la théologie du moment (parfois très limite) des nouveaux liturgistes.
Bref, entre la notion de rite amoindrie et la pauvreté des éléments transmis, je pense qu'il faudra beaucoup de réformes avant que la FORM, même célébrée avec tout le soin et tout l'apparat possibles, puisse commencer à être satisfaisante. Et je constate que la "réforme de la réforme" en tant qu'elle prétend réformer la FORM, a beaucoup de mal à démarrer...
In Xto,
archi.