Bonjour Fée
,
le témoignage de l'ex-religieuse est assez long mais je peux le résumer.
Andréa Richard est née en 1934 au Nouveau-Brunswick à une époque, comme il est écrit dans l'article, ''où le clergé catholique exerçait une grande autorité morale sur les Acadiens''. (comme sur les Québécois)
Dès son jeune âge elle a été entraînée par sa mère à la piété et à aider les pauvres sur une base régulière. Son conditionnement religieux l'a conduite à désirer devenir une sainte.
Elle a été vite repérée par un prêtre et une religieuse qui l'ont recrutée pour entrer dans les ordres religieux, malgré la réticence de son père.
Elle est entrée chez les religieuses à 16ans, où elle a commencé sa formation.
Sa vie chez les religieuses était faite d'une foule d'interdictions de toutes sortes, d'obéissance et de soumission totale. Elle était étroitement surveillée et contrôlée, comme les autres religieuses d'ailleurs. Le courrier qu'elle recevait était ouvert et censuré.
La mentalité religieuse de l'époque était faite de culpabilité et de pénitence.
Sa formation complétée, son ordre religieux (Les Petites Soeurs des Pauvres) l'a envoyée dans un couvent de Paris (France) où elle a continué de s'occuper des pauvres.
Cinq ans plus tard, elle a vécu une expérience tragique. Elle était très proche d'une autre religieuse, soeur Adrienne. Or Adrienne était amoureuse du prêtre qui venait les confesser.
La mère supérieure a compris ce qui se passait et a menacé Adrienne de l'envoyer dans un autre pays. Bouleversée et en détresse, Adrienne s'est suicidée devant Andréa.
La mère supérieure a interdit à Andréa d'en parler. Toute cette ''opacité religieuse'' a beaucoup affecté Andréa et a semé le doute dans son esprit.
N'arrivant pas à se remettre de ce drame, elle a demandé à être transférée chez les Carmélites, croyant qu'une vie contemplative lui serait bénéfique. Elle a alors été transférée au couvent Notre-Dame-du-Carmel, à Rouen.
Je cite: '' Coupée du monde extérieur, elle consacrait ses journées à la prière et à l’étude de textes religieux. Du reste, elle dormait sur une paillasse, se lavait à l’eau froide, pratiquait le jeûne et se fouettait deux fois par semaine.''
Cette vie austère l'a rendue malade (tuberculose) et sa famille l'a fait rapatrier au Canada.
Pendant sa convalescence elle a pris conscience qu'elle n'était pas heureuse et qu'elle vivait dans l'illusion.
Elle a toutefois continué sa vie religieuse jusqu'à ce que l'évidence qu'elle devait en sortir lui apparaisse clairement.
Je cite : ''Remise sur pied, elle est retournée en communauté, cette fois-ci à Dolbeau. Chaque nouveau jour renforçait un peu plus sa révolte face aux règles «absurdes» de l’Église. «Un jour, j’ai confié à l’aumônier mon intention de quitter la vie religieuse. Il m’a répondu que je n’avais pas à être traitée comme une petite fille obéissante. Il a intercédé auprès de l’évêque pour que je puisse sortir des ordres.» En 1974, sœur Xavier redevenait Andréa. Elle avait alors 40 ans.''
Le retour à la vie laïque a été difficile car elle n'avait pas de formation professionnelle . Mais à cette époque elle avait encore la foi.
Je cite: '' Malgré tout, sa foi n’en était pas moins intacte. Elle a fondé une association laïque prônant une vision «positive» de la spiritualité. Les conférences qu’elle donnait lui ont permis de subvenir à ses besoins pendant plusieurs années.''
Elle a ensuite vécu un amour partagé, interdit et impossible avec un évêque qui était venu à une de ses conférences pour s'assurer qu'elle respectait la doctrine de l'Eglise. Ils sont d'abord devenus amis, puis amoureux. Il est décédé peu après d'un cancer.
Je cite: ''Ce drame a porté un dur coup à ses convictions religieuses. Dans les mois et les années qui ont suivi, sa foi s’est estompée peu à peu. «Je ne croyais plus en un dieu et je ne voyais plus aucune raison d’être membre d’une église qui cherchait à conditionner ma façon de vivre ou de penser. J’ai demandé à ce qu’on retire mon nom de la liste des catholiques. J’étais enfin libre!», raconte celle qui se décrit comme agnostique.''
Elle milite maintenant pour la laïcité, la séparation de la religion et de l'État.
En 1995, Andréa a publié le livre ''Femme après le cloître''.
Voilà.
Le récit de la vie d'Andréa m'a rappelé douloureusement le cas d'un participant de ce forum qui a été lui aussi plongé jusqu'au cou dès son plus jeune âge dans une pratique religieuse qui frise l'obsession (et le déséquilibre mental).
Il a lui aussi perdu la foi à l'âge adulte, mais son histoire se termine beaucoup plus mal que celle d'Andréa. Personne ne sait où il se trouve présentement et ce qu'il est devenu, s'il est encore vivant ou s'il s'est suicidé.
Je pense souvent à lui et malgré l'horreur de ce qu'on le soupçonne d'avoir fait, j'éprouve de la compassion pour la solitude de cette âme errante qui a perdu son chemin.
Pour ce qui est de l'article du journaliste Mathieu Bock-Côté, il est plus court que le précédent et j'aimerais le partager en ''copier-coller'' mais je veux m'assurer de pouvoir le faire sans me mettre les pieds dans les plats concernant les droits d'auteur.
Quelqu'un peut-il me renseigner à ce sujet ?
Ce article met en lumière une ambivalence concernant la religion, ambivalence un peu étonnante chez des gens de cette génération.
Ils ne veulent pas et savent qu'ils ne peuvent pas, de toute façon, retourner en arrière, à l'époque où le catholicisme de leurs parents gérait tous les aspects de notre existence, mais en même temps il y a là une certaine tristesse, un besoin de retrouver un sens sacré des choses et de la vie .
Il donne en exemple les funérailles : ''Il suffit d’assister aujourd’hui à un enterrement pour s’en convaincre. Il y avait quelque chose de beau à savoir que, depuis 2000 ans, les hommes accompagnaient leurs morts en récitant les mêmes prières, en murmurant un Notre Père.
Trop souvent, désormais, les funérailles donnent une impression de dévastation symbolique. On improvise des prières qui n’en sont pas, on cherche un peu de décorum, à défaut de trouver du sacré. On enterre nos morts dans un décor de carton-pâte et en écoutant une chanson qui, demain, sera démodée.''
Bonne journée, Fée.