Le prêt à intérêt : licite ou pas?

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Re: Le prêt à intérêt : licite ou pas?

par mikesss » lun. 15 nov. 2021, 10:19

Riou a écrit :
mer. 10 nov. 2021, 17:55
mikesss a écrit :
mer. 10 nov. 2021, 13:15
Bonjour à tous,

Ayant un peu étudié le sujet de l'économie capitaliste et de l'économie catholique, je me permets d'intervenir sur ce fil afin d'expliquer ce que j'ai compris sur la moralité des pratiques usuraires.

[...]

L'argent n'étant qu'un moyen d'échange.
Bonjour,

Je crois que le problème se situe précisément ici : l'argent, dans ce qu'Aristote et Saint Thomas nomment "chrématistique", n'est pas un simple moyen d'échange où se pose la question éthique du "juste prix", mais une fin en soi qui produit un désir illimité d'acquisition à travers un art expressément consacré à cette fin.
Et si nous considérons le capitalisme et son économie, force est de constater que le système financier repose intégralement sur cette chrématistique et toutes les formes d'usures impliquées par elle ( y compris celle dont parle Cinci plus haut). Or, c'est ce capitalisme financier qui étrangle les Etats en imposant ses lois et ses mœurs à toute une société en vue de satisfaire aux exigences de cet art chrématistique dans lequel l'argent n'est plus un moyen d'échange, mais la finalité - ce qui donne la cupidité et qui nous éloigne du juste prix.
Combien de travailleurs ne voient-ils jamais le juste prix de leur travail? Combien de locataires paient une somme exorbitante pour un cachot? Quelles sont les intentions du prêteur et de l'employeur ici? Le juste prix ou l'argent recherché comme une fin en soi?
Il me semble donc que dans l'usure, Saint Thomas d'Aquin considère aussi l'intention de l'usurier en prenant en compte la finalité de l'acquisition.
Ce qui est certain, c'est que pour Saint Thomas, l'économique n'est pas séparable du politique et d'une réflexion sur la justice. Or, cette unité est niée par beaucoup de capitalistes, qui déclarent que leur système est amoral et qu'il devrait subir le moins possible les régulations politiques des gouvernements.
Bonjour Riou,

Tout à fait d'accord avec vous, c'est bien là l'un des fondements du capitalisme, la recherche de richesse pour elle-même et non plus pour l'usage qu'on peut en faire. De la même façon que la révolution française a retourné les valeurs (l'homme au centre à la place de Dieu), le capitalisme a fait d'un simple moyen une fin en elle-même, ce qui conduit forcement à des problèmes, l'ordre de la nature n'étant pas respecté. Et celà se traduit par une multitude d'application concrètes: le prêt à intérêt, la spéculation en bourse, les hausses des prix dans tous les domaines, la baisse des salaires... et dans l'industrie en elle-même, alors que dans un système normal on devrait produire ce dont on a besoin ( donc avoir une production limitée par notre consommation), on raisonne maintenant à l'inverse, puisque c'est la production qui enrichit: on va hausser la consommation des gens pour pouvoir produire plus...

Concernant St Thomas, je ne pense pas qu'il prenne tant que ça en compte l'intention du préteur pour juger de la moralité du prêt à interet, car celui-ci est absolument immoral, c'est à dire quelques soient les circonstances (ce qui ne veut pas dire qu'il y ait forcement faute de la part du prêteur, car effectivement, l'intention est essentiel pour caractériser un péché).
Je pense effectivement comme vous que l'économie n'est pas dissociable du politique sur certains domaines, mais je pense surtout que le problème est l'amoralité proclamée par certains (et là on tombe dans le relativisme) cette prétendue amoralité vient en fait du fait que comme le monde nous répète sans cesse chacun sa morale (en gros, plus de morale objective), il est impossible de pour eux de définir une morale globale (ce qui, soit-dit en passant, est surtout une bonne excuse pour faire ce qui nous chante).

Re: Le prêt à intérêt : licite ou pas?

par Ombiace » jeu. 11 nov. 2021, 5:30

Bonjour,

Il me semble qu'un obstacle non négligeable peut retenir d'infléchir le comportement usurier.

Notamment, si l'on considère Matthieu 18, le débiteur impitoyable, on peut supposer que le roi qui y règle ses comptes avec ses serviteurs a prêté avec une largesse royale envers ses emprunteurs.

Or, le souci d'un roi, qui est peut-être aussi celui d'un usurier, c'est de se montrer juste.

Au regard de la remise de dette.. :
Si l'usurier remet une dette de 1000 sous à celui qui en a emprunté 1000, doit il remettre une dette de 1000 sous à celui qui en a emprunté 10000, ou remettre la totalité des 10000 à ce dernier ?

Si on considère le prêt, au moment où il a été consenti,
pèse également déjà dans l'équation, comme certains l'ont évoqué, le souci pour l'usurier de se montrer juste, neutre, équitable, etc.., au regard du montant du prêt.

Comment, avec quels critères s'y prend donc l'usurier pour consentir un prêt, remettre une dette avec ces critères logiques de justesse ?

Re: Censure pour antisémitisme !

par Yohan » jeu. 11 nov. 2021, 3:11

PaxetBonum a écrit :
ven. 13 août 2021, 23:42
dire qu'il était légitime de condamner les juifs pour leur pratique de l'usure n'est pas de l'antisémitisme mais une référence historique de l'enseignement de l'Eglise qui devrait remettre cela à jour et aujourd'hui cela ne condamnerait pas que les juifs (donc pas de crainte d'antisémitisme selon vos critères).
Les juifs pratiquaient l'usure, mais c'était considéré de manière très négative, car l'usure était alors moralement inacceptable dans la société. Mais les choses ont changé avec l'apparition du protestantisme. Calvin fut le premier à autoriser l'usure. Ce sont les protestants qui ont permis l'essor de l'usure et du capitalisme. C'est le protestantisme qui a fait émerger l'esprit du capitalisme.

Re: Le prêt à intérêt : licite ou pas?

par Riou » mer. 10 nov. 2021, 17:55

mikesss a écrit :
mer. 10 nov. 2021, 13:15
Bonjour à tous,

Ayant un peu étudié le sujet de l'économie capitaliste et de l'économie catholique, je me permets d'intervenir sur ce fil afin d'expliquer ce que j'ai compris sur la moralité des pratiques usuraires.

[...]

L'argent n'étant qu'un moyen d'échange.
Bonjour,

Je crois que le problème se situe précisément ici : l'argent, dans ce qu'Aristote et Saint Thomas nomment "chrématistique", n'est pas un simple moyen d'échange où se pose la question éthique du "juste prix", mais une fin en soi qui produit un désir illimité d'acquisition à travers un art expressément consacré à cette fin.
Et si nous considérons le capitalisme et son économie, force est de constater que le système financier repose intégralement sur cette chrématistique et toutes les formes d'usures impliquées par elle ( y compris celle dont parle Cinci plus haut). Or, c'est ce capitalisme financier qui étrangle les Etats en imposant ses lois et ses mœurs à toute une société en vue de satisfaire aux exigences de cet art chrématistique dans lequel l'argent n'est plus un moyen d'échange, mais la finalité - ce qui donne la cupidité et qui nous éloigne du juste prix.
Combien de travailleurs ne voient-ils jamais le juste prix de leur travail? Combien de locataires paient une somme exorbitante pour un cachot? Quelles sont les intentions du prêteur et de l'employeur ici? Le juste prix ou l'argent recherché comme une fin en soi?
Il me semble donc que dans l'usure, Saint Thomas d'Aquin considère aussi l'intention de l'usurier en prenant en compte la finalité de l'acquisition.
Ce qui est certain, c'est que pour Saint Thomas, l'économique n'est pas séparable du politique et d'une réflexion sur la justice. Or, cette unité est niée par beaucoup de capitalistes, qui déclarent que leur système est amoral et qu'il devrait subir le moins possible les régulations politiques des gouvernements.

Re: Le prêt à intérêt : licite ou pas?

par mikesss » mer. 10 nov. 2021, 13:15

Bonjour à tous,

Ayant un peu étudié le sujet de l'économie capitaliste et de l'économie catholique, je me permets d'intervenir sur ce fil afin d'expliquer ce que j'ai compris sur la moralité des pratiques usuraires.

Tout d'abord, même si ça semble évident, il convient de redéfinir le prêt à intérêt: il s'agit d'un prêt d'argent, ou plus précisément de monnaie pour lequel la somme remboursée sera supérieur au montant emprunté; je tiens à rappeler cette définition car il est important de noter que des loyers exorbitants (cf le post de Cinci), ne rentrent pas dans cette catégorie et ne peuvent donc être traités de la même façon.

Comme certains l'ont dit plus haut, les juifs avaient interdiction de d'exiger des intérêts à leurs frères mais ils pouvaient le faire pour les autres; les pères de l'Eglise expliquent que cette différence n'est non pas une autorisation du fait que le prêt usuraire ne serait pas mauvais en lui-même, mais plutôt une tolérance due à la faiblesse des juifs (de la même façon que la polygamie a été tolérée non pas parce que bonne mais pour les mêmes raisons que le prêt). Alors pourquoi le catholicisme n'a pas suivi la même voie? tout simplement parce que d'après St Paul, je crois, nos sommes tous frères dans le Christ.

Mais cela ne répond pas à la question de pourquoi le prêt usuraire est immoral.
Il existe 2 façons d'arriver à la réponse; la première consiste à dire que seul le travail peut produire de la richesse et que toute richesse qui ne provient pas d'un travail est une richesse volée ou qui n'existe pas; il est vrai que l'on peut se demander de quel droit je gagnerai 50 sans rien faire après un an de prêt de 1000 euros. Il y a une injustice criante la dedans, d'autant plus qu'elle va conduire à enrichir sans travail ceux qui le sont déjà et qui donc ont le capital pour prêter et à appauvrir le travailleur qui n'aura pas es moyens de ne pas emprunter.
La deuxième façon vient de St Thomas d'Aquin: il existe 2 catégories d'objets: ceux dont l'usage est lié à la possession et ceux dont cet usage en est séparé.
Je m'explique: on peut user d'une maison sans en être le propriétaire, et être propriétaire d'une maison en en laissant l'usage à un tiers: donc on peut dire que pour une maison, la possession est séparée de l'usage. En revanche, il existe des biens dont l'usage ne peut se faire que par la possession et pour lesquelles la possession implique l'usage: si j'ai du vin, c'est pour le consommer; quand je vais chez un marchand de vin et qu'il me cède la propriété d'une bouteille, il me laisse le loisir de la consommation de ce vin.

L'argent n'étant qu'un moyen d'échange, il appartient à la deuxième catégorie: si j'ai de l'argent, je peux le dépenser comme je l'entends. Quand on prête de l'argent à quelqu'un, on est censé lui transférer la propriété de cet argent ; or, les intérêts consistent à faire payer à l'emprunteur l'usage de cet argent (d'ailleurs, l'usure vient du mot usage): on ne lui donne plus la propriété de l'argent, on lui donne juste l'usage. Et quand l'emprunteur rembourse au préteur, il lui rends la somme empruntée (il lui rend donc la propriété) et lui paye les intérêts (donc lui paye l'usage).
Je ne sais pas si c'est très clair, j'espère que oui :-)

L'Eglise n'a pas changé sa morale (comment le pourrait-elle, la morale n'est pas à géométrie variable), seulement, de même que ce procédé de prêt usuraire était toléré chez les juifs, il l'est à nouveau de par l'impossibilité physique de passer outre dans le système dans lequel nous vivons.

Re: Le prêt à intérêt : licite ou pas?

par Thurar » mer. 10 nov. 2021, 8:31

Cinci a écrit :
mar. 17 août 2021, 1:04
Altior :

Un fil sur la moralité des pratiques usuraires serait très intéressant et opportun
Je ne sais pas si un tel fil serait intéressant. Peut-être, peut-être pas ...mais il est vrai que «tout le monde» reste sous l'impression (justifiée sans doute) que la doctrine de l'Église aura changé entre l'époque médiévale et aujourd'hui.

Mais il reste condamnable d'exiger des taux de location exorbitants (pour l'argent) comme tous les usuriers du monde le font, des usuriers qui seront plutôt de vrais bandits, des membres du syndicat du crime organisé. Ça existe !
C'est vrai, on n'entend plus jamais l'Eglise parler de cette pratique, pourtant explicitement condamnée par le pape Benoît XIV dans l'encyclique Vix Pervenit. Ni chez les ''modernistes'', ni chez les ''tradis'', malheureusement...
Le prêt à intérêt est toujours un péché d'usure, quel que soit le taux d'intérêt. Rien ne justifie qu'on soit rémunéré pour avoir prêté de l'argent à quelqu'un. Or toute notre société (en France, en tout cas) est fondée sur ce système : depuis la fameuse loi de 1973 (loi Pompidou-Rothschild), l'Etat ne peut plus emprunter à taux zéro à la Banque de France, il est obligé de s'endetter auprès de banques privées qui touchent des intérêts au passage. On nous rebat sans cesse les oreilles avec la ''dette publique'' qui en réalité n'existe pas, ce ne sont que des intérêts que nous devons à des usuriers, autrement dit, de la pure extorsion.
Voir la célèbre vidéo de Paul Grignon, ''L'argent-dette'' : https://www.youtube.com/watch?v=-QK33eDeCew
ou celle-ci : https://www.youtube.com/watch?v=syAkdb_TDyo&t=10s
il serait aujourd'hui absolument impossible au moindre petit entrepreneur privé d'entreprendre quoi que ce soit, sans devoir recourir à la banque et contracter un prêt, une avance d'argent. Et les banques ne vont pas prêter de l'argent à taux zéro à tous ceux qui leur demande.
Comment faire pour monter une entreprise aujourd'hui, ou acheter une maison, sans avoir recours aux banques ? La doctrine de l'Eglise enseigne pourtant que c'est un péché de s'endetter auprès d'usuriers (sauf si on y est contraint, en cas de besoin vital par exemple, comme l'explique saint Thomas d'Aquin)

Re: Le prêt à intérêt : licite ou pas?

par Cinci » mar. 17 août 2021, 1:04

Altior :

Un fil sur la moralité des pratiques usuraires serait très intéressant et opportun
Je ne sais pas si un tel fil serait intéressant. Peut-être, peut-être pas ...mais il est vrai que «tout le monde» reste sous l'impression (justifiée sans doute) que la doctrine de l'Église aura changé entre l'époque médiévale et aujourd'hui.

Il faut dire que l'argent n'occupait pas une position aussi centrale dans l'activité humaine anciennement. Mais de la manière dont notre société consommatrice et productiviste est organisée, il serait aujourd'hui absolument impossible au moindre petit entrepreneur privé d'entreprendre quoi que ce soit, sans devoir recourir à la banque et contracter un prêt, une avance d'argent. Et les banques ne vont pas prêter de l'argent à taux zéro à tous ceux qui leur demande.

Mais il reste condamnable d'exiger des taux de location exorbitants (pour l'argent) comme tous les usuriers du monde le font, des usuriers qui seront plutôt de vrais bandits, des membres du syndicat du crime organisé. Ça existe ! Les grandes compagnies de cartes de crédit versent aussi très souvent dans ce même péché véritable, avec des frais de pénalité pour les retards qui sont une excuse pour siphoner un maximum de sous à ceux qui ont des difficultés. Même nos honnêtes institutions affichent cette tendance peccamineuse à vouloir faire payer plus aux pauvres, à vouloir les épocher davantage encore, mais alors qu'elles allégeront en contrepartie le coût de leurs services pour les riches et ultra riches. Un comportement putassier qui ne cherche qu'à récompenser et racoler les "winers" tout en méprisant et châtiant ceux qui ne sont rien.

Le dieu Mamon et ses adorateurs : on n'inventera rien sous ce rapport. Il est vrai que notre époque en est une très fastueuse pour cette divinité.

Re: Censure pour antisémitisme !

par Altior » lun. 16 août 2021, 0:31

PaxetBonum a écrit :
sam. 14 août 2021, 16:24
six siècles avant notre ère, le taux d’intérêt annuel sur les prêts qui jouissaient de la meilleure notation financière se situait entre 16 et 18 %. Ce niveau a ensuite baissé à 10-12% au cours des deux siècles suivants et à 6-12% par la suite pour atteindre 8-9% durant le premier siècle chrétien. Parallèlement, à Rome, le taux d’intérêt équivalent se situait à 8,5 % du cinquième au troisième siècle avant notre ère, à 6-8 % au deuxième siècle et à 4-12 % aux premiers siècles avant et après l’ère chrétienne. Également en Asie Romaine, le taux d’intérêt sur les prêts comparables se situait entre 8% et 12% deux siècles avant Jésus Christ."

Vous m'avez fait relire L'Avare, la scène dans laquelle Harpagon fait une estimation de ce que Cléanthe pourrait gagner avec un bon placement financier:
C’est fort mal fait. Si vous êtes heureux au jeu, vous en devriez profiter, et mettre à honnête intérêt l’argent que vous gagnez, afin de le trouver un jour. Je voudrais bien savoir, sans parler du reste, à quoi servent tous ces rubans dont vous voilà lardé depuis les pieds jusqu’à la tête ; et si une demi-douzaine d’aiguillettes ne suffit pas pour attacher un haut-de-chausses ? Il est bien nécessaire d’employer de l’argent à des perruques, lorsque l’on peut porter des cheveux de son cru, qui ne coûtent rien. Je vais gager qu’en perruques et rubans, il y a du moins vingt pistoles; et vingt pistoles rapportent par année dix-huit livres six sols huit deniers, à ne les placer qu’au denier douze.

« Au denier douze », cela veut dire que le prêteur reçoit 12 deniers pour 11 prétés. Autrement dit, l'intérêt est d'environ 9%. Bon, d'accord, c'est du théâtre: par rapport aux taux de nos jours, c'est vraiment de la fiction. Ni même les casions ne rapportent autant.

Re: Censure pour antisémitisme !

par Altior » sam. 14 août 2021, 20:00

Un fil sur la moralité des pratiques usuraires serait très intéressant et opportun, parce qu'il s'agit d'un argument dont certains abusent pour soutenir que la doctrine morale a changé: dans le fait que, pendant des siècles, l'Église a condamné l'usure comme immorale tendis qu'elle ne dit plus un mot de nos jours, eux ils comprennent que la loi morale est à géométrie variable.

Re: Censure pour antisémitisme !

par PaxetBonum » sam. 14 août 2021, 16:24

Merci au modérateur de ne pas m'avoir censuré à nouveau, j'apprécie en connaisseur !

Pour information la définition de l'usure est : " Intérêt que produit l'argent prêté"
Le taux n'a rien à faire là-dedans.
La justification biblique ne parle pas de taux :"St-Luc chapitre 6, versets 34 et 35 : « Et si vous prêtez à ceux dont vous espérez recevoir, quel gré vous en saura-t-on ? Même des pêcheurs prêtent à des pêcheurs, afin de recevoir l’équivalent."
Ici c'est le taux zéro qui est même considéré comme sans mérite !

L'usure de l'époque évoquée est bien juste le fait de prêter de l'argent avec intérêt de remboursement.

"Appliquée au cas des prêts monétaires, l’usure a tradi- tionnellement désigné la pratique d’exiger le paiement d’un montant d’intérêt en plus du remboursement du montant prêté initialement, alors que dans les temps modernes, elle est devenue synonyme de l’imposition d’un taux d’intérêt supérieur à celui qui est légalement ou socialement permis.(...)
L’histoire nous apprend que bien avant l’ère chrétienne, l’activité finan- cière du prêt à intérêt était répandue dans l’Antiquité. Ainsi, d’après Homer et Sylla (1991) dans la Grèce ancienne, six siècles avant notre ère, le taux d’intérêt annuel sur les prêts qui jouissaient de la meilleure notation financière se situait entre 16 et 18 %. Ce niveau a ensuite baissé à 10-12% au cours des deux siècles suivants et à 6-12% par la suite pour atteindre 8-9% durant le premier siècle chrétien. Parallèlement, à Rome, le taux d’intérêt équivalent se situait à 8,5 % du cinquième au troisième siècle avant notre ère, à 6-8 % au deuxième siècle et à 4-12 % aux premiers siècles avant et après l’ère chrétienne. Également en Asie Romaine, le taux d’intérêt sur les prêts comparables se situait entre 8% et 12% deux siècles avant Jésus Christ."
https://www.erudit.org/fr/revues/agr/20 ... 1314ar.pdf

Vous remarquerez que le taux d'usure pratiqué par les juifs de l'époque n'était pas éloigné de ceux que nous avons connu avant la crise de 2009.
Ce qui était condamné à l'époque c'est bien et uniquement le fait de prêter de l'argent avec intérêt et cette pratique était effectuée par des juifs, c'est un fait historique qui n'a rien d'antisémite.
D'ailleurs certains souverains faisaient venir des juifs dans leur royaume pour pouvoir en bénéficier.

Censure pour antisémitisme !

par PaxetBonum » ven. 13 août 2021, 23:42

Bonjour, je m'adresse particulièrement au modérateur qui a censuré mes propos pour "antisémitisme"… alors qu'il s'agit juste d'ignorance historique et théologique de sa part. Je le remercie toutefois d'avoir énoncé la raison de sa censure car c'est extrêmement rare et souvent arbitraire.

Donc, j'avais répondu à un jeune homme qui s'étonnait que les juifs aient été accusés de pratiquer l'usure.
Oui les juifs pratiquaient l'usure (prêt d'argent avec intérêt aux non juifs) ce qui était en opposition avec la doctrine de l'Eglise.
Cela provient de la Bible :

Deutéronome chapitre 23 verset 21, on peut lire «A l’étranger tu pour- ras prêter à intérêt, mais tu prêteras sans intérêt à ton frère, afin que Yahvé ton Dieu te bénisse .». => justification de l'usure par les juifs pour les non juifs.

St-Luc chapitre 6, versets 34 et 35 : « Et si vous prêtez à ceux dont vous espérez recevoir, quel gré vous en saura-t-on ? Même des pêcheurs prêtent à des pêcheurs, afin de recevoir l’équivalent. Au contraire, aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien attendre en retour. Votre récompense alors sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car Il est bon, Lui, pour les ingrats et les méchants ».
=> Condamnation de l'usure par l'Eglise.

Alors oui il était légitime à l'époque de condamner ceux qui pratiquaient l'usure.
Comme il se trouve que c'étaient les juifs qui usaient de cette pratique, se sont eux qui étaient condamnés pour cela.

D'ailleurs cette pratique devrait toujours être condamnée car elle a conduit à cet endettement sans fond de bien des états qui produisent ces effets délétères sur toute la vie de la cité.
Les musulmans et la Russie proposent des prêts sans intérêts conformes à ce principe religieux.

Alors non monsieur le modérateur, dire qu'il était légitime de condamner les juifs pour leur pratique de l'usure n'est pas de l'antisémitisme mais une référence historique de l'enseignement de l'Eglise qui devrait remettre cela à jour et aujourd'hui cela ne condamnerait pas que les juifs (donc pas de crainte d'antisémitisme selon vos critères).

Pour vous cultiver sur le sujet : https://www.erudit.org/fr/revues/agr/20 ... 1314ar.pdf
Les pères de l’Église : Saint Léon (vers 450) : « Le profit usuraire de l’argent, c’est la mort de l’âme. »
Saint Ambroise dit aussi : « Qu’est-ce que le prêt à intérêt, sinon tuer un homme ? »
Saint Jean Chrysostome : « Rien n’est plus honteux, ni plus cruel que l’usure. »
Saint Léon : « C’est une avarice injuste et insolente que celle qui se flatte de rendre service au prochain alors qu’elle le trompe... Celui-là jouira du repos éternel qui entre autres règles d’une conduite pieuse n’aura pas prêté son argent à usure... tandis que celui qui s’enrichit au détriment d’autrui, mérite en retour la peine éternelle. »

[Réponse de la Modération : L’usure, c’est de prêter de l’argent à un taux abusif. Votre message a été censuré parce que vous avez utilisé le mot « usure » dans un sens ancien, différent du sens commun actuel, comme vous l’expliquez ici. Sans préciser ces nuances, des accusations générales d’usure visant une population ne sont pas acceptables.

Re: Le prêt à intérêt : licite ou pas?

par Altior » mar. 18 févr. 2020, 18:24

Thurar a écrit :
lun. 17 févr. 2020, 17:01

Je n'ai pas bien compris votre explication. Qu'est-ce que cela change qu'il n'y ait plus de ''monnaie réelle''. Vous voulez dire qu'il n'y a plus d'étalon ? (or, argent... ) Cela ne change rien pour moi. Si quelqu'un me prête 10 kilos de pommes de terre, je ne vois pas pourquoi je devrais lui en rendre 11. Le onzième kilo de pommes de terre d'intérêt représente du temps et de la peine en plus.
Mais alors, pourquoi le prêteur s'en priverait de 10 kilos de pommes de terre pour vous les prêter pour un mois, ou 6 mois ou un an ?
Une banque est une entreprise privée qui ne produit aucune richesse. Vos demandez un prêt à la banque pour un monter une entreprise ou autre, le banquier crée l'argent sans bouger de son fauteuil, d'un simple clic sur son ordinateur. Tandis que vous vous travaillez dur, vous produisez de la richesse réelle (nourriture, bâtiments, services... ) pour rembourser le capital + les intérêts. Et si vous ne remboursez pas elle saisit vos biens. Cela s'appelle de l'extorsion et du parasitisme tout simplement.
Les banques sont spoliatrices, là je suis d'accord. De plus, l'État, de connivence avec le monde bancaire, m'oblige à ouvrir un compte, chose qui n'existait pas il y a peu d'années. Là, je suis encore d'accord.
Pourtant, je suis beaucoup plus spolié par l'État que par les banques. L'État, et non les banques est le plus grand cambrioleur.

Au cours de 2019, la banque m'a spolié de 272 euros. 72 euros de mon compte personnel, le reste de mon compte professionnel. J'ajoute 800 euros d'intérêt pour le prêt immobilier que j'ai acquis pour m'acheter la maison où j'habite. J'ajoute 516 euros de primes d'assurances imposées par la même banque pour le même crédit. Au total, cela fait 1588 Euros partis de mes poches dans les poches de la banque. Bon, ça fait pas mal. Mais ça fait peu si je tiens compte qu'à chaque 15 du mois l'État me subtilise 1163 Euros d'impôt sur le revenu. Pour ne pas mentionner les impôts de fin d'année, dont le plus curieux est un impôt pour le remboursement de la dette de l'État, qui ne cesse pas de grossir. Pour ne pas mentionner les cotisations à l'URSSAF (environ 2000 Euros pas trimèstre). Pour ne pas mentionner la TVA, qui, à ce que j'estime, dépasse toutes les autres impôts et assimilés (taxes, assurances obligatoires, cotisations imposées, amendes). Pour ne pas mentionner les impôts cachés dans le prix de l'essence, dans les factures d'energie et d'eau et ainsi de suite.

J'ai été cambriolé par des bohémiens en Roumanie. Mon bureau a été cambriolé par des drogués en France. Tous les dommages que les voleurs m'ont infligés, auquels j'ajoute le dommage infligé par les voleurs à col blanc des banques, sont loin, très loin de ce que j'ai payé au plus grand voleur: l'État.

Re: Le prêt à intérêt : licite ou pas?

par gerardh » lun. 17 févr. 2020, 22:34

«Ne devez rien à personne» (Romains 13 v. 8) est une exhortation à ne pas oublier à notre époque où le crédit est entré dans les mœurs! Les dettes peuvent constituer un piège à plusieurs points de vue. 1° En engageant un avenir qui ne nous appartient pas. 2° En nous liant aux hommes plutôt qu’à Dieu (Jér. 17 v. 7). 3° En traduisant un esprit d’impatience et de propre volonté. Dois-je faire un achat pour lequel le Seigneur ne m’a pas encore donné l’argent nécessaire ? Une seule dette doit nous lier: l'amour qui résume toutes les instructions de ce chapitre: amour pour le Seigneur (1 Pier. 2 v. 13), pour nos frères, pour tous les hommes.

Re: Le prêt à intérêt : licite ou pas?

par prodigal » lun. 17 févr. 2020, 21:40

Cher Gerardh,
le prêt à intérêt pose un problème non pas à celui qui emprunte mais à celui qui prête, me semble-t-il.
Celui qui essaie de faire de l'argent avec de l'argent, il me semble que c'est très légitimement qu'il est gêné, si toutefois il l'est. :)

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