Contre les doctrines évangéliques - Matériel argumentaire

« Dieu leur donnera peut-être de se convertir et de connaître la vérité. » (2Tm 2.25)
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Forum de débats dialectiques entre personnes de bonne volonté autour de la religion chrétienne (catholicisme) et des objections formulées à son encontre

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Contre les doctrines évangéliques - Matériel argumentaire

Message non lu par VexillumRegis » sam. 14 mai 2005, 21:47

Bonjour,

Inscrit depuis le 16 octobre 2004 sur les forums de discussion du Topchrétien, j'ai eu largement le temps depuis cette date de me familiariser avec la dialectique évangélique.

En inaugurant ce nouveau fil, j'ai l'intention de vous présenter une sorte de florilège de mes meilleures interventions sur le forum du Topchrétien, c'est-à-dire les textes que j'ai rédigé avec le plus de soin (ce qui ne signifie certes pas qu'ils soient pour autant de grande qualité...). Je tiens à préciser qu'aucune volonté bassement querelleuse ne préside à la naissance de ce compendium ; il s'agit juste pour moi de faire partager mon expérience en matière de dialogue théologique avec les évangéliques.

Puisse cette modeste contribution concourir à aider certains catholiques confrontés au problème évangélique, voire, si Dieu le veut, à éclairer certains évangéliques en recherche.

NB : toutes les personnes désireuses d'utiliser l'ensemble ou une quelconque partie de ces textes peuvent bien entendu le faire sans autorisation : ces textes sont libres de droit.

- VR -
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Du salut - (1) Sola fide ?

Message non lu par VexillumRegis » sam. 14 mai 2005, 22:01

Pour nous catholiques, nous pensons que nous sommes justifiés par la grâce, grâce qui s'obtient par la foi agissante en charité (Gal. V, 6) - La doctrine de la justification par la foi seule (sola fide) est récente ; elle date de Luther, qui l'élabora au XVIème siècle en falsifiant Rom. III, 28. Jacques, dans son épître, écrit tout le contraire, sans aucune ambiguïté : "Que sert-il, mes frères, à un homme de dire qu'il a la foi, s'il n'a pas les oeuvres ? Est-ce que cette foi pourra le sauver ? Si un frère ou une soeur sont dans la nudité et n'ont pas ce qui leur est nécessaire chaque jour de nourriture, et que l'un de vous leur dise: "Allez en paix, chauffez-vous et vous rassasiez" sans leur donner et qui est nécessaire à leur corps, à quoi cela sert-il ? Il en est de même de la foi : si elle n'a pas les oeuvres, elle est morte en elle-même. Mais on pourrait même dire : ''Tu as la foi, et moi, j'ai les oeuvres. "Montre-moi ta foi sans les oeuvres et moi, je te montrerai ma foi par mes oeuvres. Tu crois qu'Il y a un seul Dieu, tu fais bien ; les démons le croient aussi..., et ils tremblent ! Mais veux-tu te convaincre, ô homme vain, que la foi sans les oeuvres est sans vertu ? (...) De même que le corps sans âme est mort, ainsi la foi sans les oeuvres est morte." (Jacques II, 14-26).

De nombreux autres passages des Ecritures confirment les propos de l'apôtre Jacques ; les voici cités en vrac :

"Ce n'est pas celui qui m'aura dit : "Seigneur,Seigneur !" qui entrera dans le royaume des cieux, mais celui qui aura fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux." (Matthieu VII, 21)

"Pourquoi m'appelez-vous : "Seigneur, Seigneur !" et ne faites-vous pas ce que je dis ? Quiconque vient à moi, entend mes paroles et les met en pratique, je vous montrerai à qui il est semblable. Il est semblable à un homme qui bâtit une maison, qui a creusé bien avant, et en a posé le fondement sur le roc; une inondation étant survenue, le torrent s'est rué contre cette maison, et il n'a pu l'ébranler, parce qu'elle était bien bâtie. Mais celui qui entend et qui ne met pas en pratique est semblable à un homme qui a bâti sa maison sur le sol, sans fondement; le torrent s'est rué contre elle, et elle s'est écroulée aussitôt, et grande a été la ruine de cette maison." (Luc VI, 46-49)

"Et voici que quelqu'un, l'abordant, dit : "Maître, que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle?" Il lui dit : "Pourquoi m'interroges-tu sur (ce qui est) bon? Un seul est le bon. Que si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements. " Il lui dit : "Lesquels ?" Jésus dit : "C'est : Tu ne tueras point; tu ne commettras point l'adultère; tu ne déroberas point; tu ne porteras point de faux témoignage; honore ton père et ta mère, et : tu aimeras ton proche comme toi-même." Le jeune homme : "J'ai observé tous ces (commandements); que me manque-t-il encore ?" Jésus lui dit : "Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux; puis, viens et suis-moi." (Matthieu, XIX, 16-22)

"Que si quelqu'un n'a pas soin des siens, surtout de ceux de sa famille, il a renié la foi et il est pire qu'un incroyant." (1 Tim. V, 8 )

"C'est pour cela aussi que nous nous efforçons d'être agréable à Dieu, soit que nous demeurions dans ce corps, soit que nous le quittions. Car nous tous, il nous faut comparaître devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive ce qu'il a mérité étant dans son corps, selon ses œuvres, soit bien, soit mal." (2 Cor. V, 10)

"Or quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, il s'assiéra alors sur son trône de gloire, et toutes les nations seront rassemblées devant lui, et il séparera les uns d'avec les autres, comme le pasteur sépare les brebis d'avec les boucs, et il mettra les brebis à sa droite et les boucs à sa gauche. Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : "Venez, les bénis de mon Père : prenez possession du royaume qui vous a étépréparé dès la création du monde.Car j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger; j'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire; j'étais étranger, etvous m'avez recueilli; nu, et vous m'avez vêtu; j'ai été malade, et vous m'avez visité; j'étais en prison, et vous êtes venus à moi. "Alors les justes lui répondront : " Seigneur, quand vous avons-nous vu avoir faim, et vous avons-nous donné à manger; avoir soif, et vous avons-nous donné à boire ? Quand vous avons-nous vu étranger, et vous avons-nous recueilli; nu, et vous avons-nous vêtu ? Quand vous avons-nous vu malade ou en prison, et sommes-nous venus à moi que vous l'avez fait." Alors il dira aussi à ceux qui seront à sa gauche : "Allez-vous-en loin de moi, les maudits, au feu éternel, qui a été préparé pour le diable et pour ses anges. Car j'ai eu faim, et vous ne m'avez pas donné à manger; j'ai eu soif, et vous ne m'avez pas donné à boire; j'étais étranger, et vous ne m'avez pas recueilli; nu, et vous ne m'avez pas vêtu; malade et en prison, et vous ne m'avez pas visité." Alors eux aussi lui répondront : "Seigneur, quand vous avons-nous vu avoir faim, ou avoir soif, ou étranger, ou nu, ou malade, ou en prison, et ne vous avons-nous pas assisté ?" Alors il leur répondra : "En vérité, je vous le dis, chaque fois que vous ne l'avez pas fait à l'un de ces plus petits, c'est à moi que vous ne l'avez pas fait." Et ceux-ci s'en iront au supplice éternel, et les justes à la vie éternelle." (Matthieu XXV, 31-46)

"Que celui à qui on enseigne la parole fasse part de tous ses biens à celui qui l'enseigne. Ne vous y trompez pas : on ne se rit pas de Dieu. Ce qu'on aura semé, on le moissonnera. Celui qui sème dans sa chair moissonnera, de la chair, la corruption; celui qui sème dans l'esprit moissonnera, de l'esprit, la vie éternelle. Ne nous lassons point de faire le bien; car nous moissonnerons en son temps, si nous ne nous relâchons pas. Ainsi donc, pendant que nous en avons le temps, faisons le bien envers tous, et surtout envers les frères dans la foi." (Gal. VI, 6-10)

S. Paul, dont la doctrine mal interprétée forme la pierre angulaire de la doctrine protestante de la justification par la seule foi, n'hésite pas à mettre la charité au-dessus de la foi : "Maintenant ces trois choses demeurent : la foi, l'espérance, la charité ; mais la plus grande des trois c'est la charité." (1 Cor. XIII, 13)
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Un intervenant évangélique a écrit :En gros, tu as raison: les Réformateurs ont négligé certains aspects bibliques par réaction contre la religion catholique fondée sur les oeuvres.


1° - L'Eglise catholique n'a jamais enseigné que l'homme n'était justifié que par ses seules oeuvres, sans participation de la foi : "Si quelqu'un dit que l'homme peut être justifié devant Dieu par ses œuvres, accomplies seulement selon les lumières de la nature humaine, ou selon les préceptes de la Loi, sans la grâce de Dieu méritée par Jésus-Christ : qu'il soit anathème." (premier canon sur la justification, concile de Trente)

2°- De même, l'Eglise catholique rejette la doctrine selon laquelle l'homme n'est justifié que par sa seule foi, sans qu'il y ait besoin d'autre chose : "Si quelqu'un dit que l'homme est justifié par la seule foi, en sorte qu'on entende par là, que pour obtenir la grâce de la justification, il n'est besoin d'aucune autre chose qui coopère ; et qu'il n'est en aucune manière nécessaire que l'homme se prépare et se dispose par le mouvement de sa volonté : qu'il soit anathème." (neuvième canon sur la justification, concile de Trente)

La position de l'Eglise catholique a toujours consisté en un juste milieu fondé sur l'Ecriture, enseignant que la foi est absolument nécessaire à la justification, mais qu'elle est vaine et comme morte si elle ne s'accompagne pas de la charité, mère des bonnes oeuvres.
Un intervenant évangélique a écrit :Il n'en reste pas moins que l'article 837 du nouveau catéchisme de l'Eglise catholique n'est pas conforme à ce qu'enseigne la Bible au sujet du salut
Cet article n° 837 du CEC est en réalité tiré du §14 de la constitution dogmatique Lumen Gentium (21/11/1964).

Sur ce qu'il est dit que l'incorporation à l'Eglise catholique est nécessaire au salut : cela découle du fait que Jésus-Christ a fondé son Eglise en la personne de ses apôtres, à qui il a dit : "celui qui vous écoute, m'écoute, et celui qui vous méprise, me méprise ; or celui qui me méprise, méprise Celui qui m'a envoyé." (Luc X, 16). Par la voie de la succession épiscopale, l'Eglise fondée par le Christ subsiste toute entière dans l'Eglise catholique. On y est incorporé par le baptème, qui est nécessaire au salut, car "nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu" (Jean III, 5). L'Eglise est le corps du Christ ; elle est "la colonne et le fondement de la vérité" (1 Tim. III, 15).

Sur ce que la charité est nécessaire au salut : cela découle du fait qu'elle rend agissante la foi, qui sans elle est morte. Jésus-Christ nous a demandé de mettre ses commandements en pratique en faisant le bien autour de nous, et non de nous renfermer en nous-même en ayant la vaine présomption que nous serons sauvés par notre seule foi. "Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux." (Matthieu XIX, 22).
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Du salut - (2) Le rôle des sacrements

Message non lu par VexillumRegis » sam. 14 mai 2005, 22:14

Il a déjà été répondu au sujet de ce passage du CEC [le § 837] en première page : tu fais une fixation où quoi ?

Par ailleurs, Je n'y trouve pas de contradiction avec les passages que tu cites.

"En vérité, en vérité, je te le dis, nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Car ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l'Esprit est esprit." (Jn III, 3-6) - Le baptême est nécessaire au salut parce qu'il nous incorpore au Christ sauveur.

"Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement; et le pain que je donnerai, c'est ma chair, pour le salut du monde." (Jn VI, 51) - L'Eucharistie est objet de salut parce qu'elle est le corps du Christ sauveur.

De même l'Eglise est nécessaire au salut, parce qu'elle est le corps du Christ (Eph. I, 22-23) qu'il a établi pour guider le troupeau vers la Cité sainte, la Jérusalem céleste.

De ce fait, l'Eglise, comme le baptême et l'Eucharistie, tire toute sa vertu du seul Jésus-Christ, l'unique Sauveur.
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VR a écrit :"En vérité, en vérité, je te le dis, nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Car ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l'Esprit est esprit." (Jn III, 3-6) - Le baptême est nécessaire au salut parce qu'il nous incorpore au Christ sauveur.

Un intervenant évangélique a écrit :"Que voulait dire Jésus ? Beaucoup affirment qu’il s’agit d’eau au sens littéral, et que le Seigneur Jésus parlait de la nécessité du baptême pour le salut. Toutefois, cet enseignement se révèle contraire à l’ensemble de la Bible. D’un bout à l’autre de la Parole de Dieu nous lisons que le salut est reçu uniquement par la foi au Seigneur Jésus-Christ. Le baptême est destiné à ceux qui ont déjà été sauvés, et n’est jamais présenté comme un moyen d’être sauvé." (Bible On Line).
Je ne peux que constater que cette interprétation est contraire à l'Ecriture ainsi qu'à toute la Tradition reçue et enseignée depuis toujours dans la sainte Eglise catholique.

1°- Contraire à l'Ecriture :

- "Puis il leur dit : " Allez par tout le monde et prêchez l'Evangile à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé; celui qui ne croira pas, sera condamné." (Mc XVI, 15-16) - Une nouvelle fois foi et baptême sont présentés par le Seigneur comme nécessaires au salut.

- "Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, du Fil et du Saint-Esprit." (Mat. XXVIII, 19) - On se demande bien pourquoi le Seigneur ressuscité ordonna à ses apôtres de baptiser tous les hommes si ce baptême ne sert en rien au salut...

- "Il nous a sauvés, non à cause des oeuvres de justice que nous faisions, mais selon sa miséricorde, par le bain de la régénération et en nous renouvelant par le Saint-Esprit." (Tite III, 5) - Le "bain de la régénération" a toujours été compris dans l'Eglise comme le baptême qui nous fait naître de nouveau (Jean, III, 3-6).

- "Quelqu'un peut-il refuser l'eau pour baptiser ces gens qui ont reçu l'Esprit-Saint aussi bien que nous? " Et il commanda de les baptiser au nom de Jésus-Christ." (Actes X, 47-48 ) - L'eau est donc autant nécessaire que l'Esprit.

etc....

2° - Contraire à la Tradition constante de l'Eglise de Dieu :

- La Didachè, texte catéchétique du Ier siècle de notre ère, enseigne déjà la nécessité du baptême d'eau (§ 7) : "Pour ce qui est du baptême, donnez-le de la façon suivante: après avoir enseigné tout ce qui précède, "baptisez au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit"(Mt 28,19 ) dans de l'eau vive. S'il n'y a pas d'eau vive, qu'on baptise dans une autre eau et à défaut d'eau froide, dans de l'eau chaude. Si tu n'as ni de l'une ni de l'autre, verse de l'eau sur la tête trois fois" au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit". Qu'avant le baptême jeûnent le baptisant, le baptisé et d'autres personnes qui le pourraient; du moins ordonne au baptisé de jeûner un jour ou deux auparavant."

- Voir aussi : http://pages.globetrotter.net/mleblank/ ... sance.html
VR a écrit :"Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement; et le pain que je donnerai, c'est ma chair, pour le salut du monde." (Jn VI, 51) - L'Eucharistie est objet de salut parce qu'elle est le corps du Christ sauveur.

Un intervenant évangélique a écrit :"Il ne s'agit pas d'une anticipation de la cène (ou eucharistie). Jésus se présente ici comme la Sagesse qui invite les passants à se joindre à son festin, à manger son pain et à boire son vin (Pr 9.5)." (Bible d'étude Semeur)"
Interprétation risible s'appuyant sur une démonstration des plus mince. Il suffit de se reporter au récit de la cène dans Matthieu ou Luc : cela est nettement plus convaincant que le passage des Proverbes allégué par la Bible Semeur. D'ailleurs, Jésus insiste sur ce que ce pain est réellement son corps : "Car ma chair est vraiment une nourriture, et mon sang est vraiment un breuvage" (Jean, VI, 55) ; et les disciples ont compris dans ce sens les paroles de Jésus, au point que certains en furent choqués : "Beaucoup de ses disciples l'ayant entendu dirent: "Cette parole est dure, et qui peut l'écouter ?" Jésus, sachant en lui-même que ses disciples murmuraient à ce sujet, leur dit: "Cela vous scandalise? Et quand vous verrez le Fils de l'Homme monter où il était auparavant?… C'est l'Esprit qui vivifie; la chair ne sert de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et vie. Mais il y en a parmi vous quelques-uns qui ne croient point." (Jean, VI, 60-64).
VR a écrit :De même l'Eglise est nécessaire au salut, parce qu'elle est le corps du Christ (Eph. I, 22-23) qu'il a établi pour guider le troupeau vers la Cité sainte, la Jérusalem céleste.
Un intervenant évangélique a écrit :Le fait que l'Eglise est le corps de Christ ne signifie pas qu'elle est "nécessaire au salut".
Le Christ a établi son Eglise comme société universelle de salut. Il a donné les clefs du royaume des cieux à Pierre (Matthieu XVI, 19), et par lui à tous ses apôtres. Il leur a donné le pouvoir de remettre les péchés (Jean XX, 23) et d'administrer la grâce des sacrements. Il a promis d'être toujours avec eux (Matthieu XX, 20) et leurs successeurs. L'Eglise est la colonne inébranlable de la Vérité (1 Tim. III, 15) et le Corps du Christ. Pour toutes ces raisons, il est légitime de croire et de professer que l'Eglise du Christ, qui subsiste en plénitude dans l'Eglise catholique (par la voie de la succession apostolique), est nécessaire au salut.

"Celui qui vous écoute, m'écoute, et celui qui vous méprise, me méprise ; or celui qui me méprise, méprise Celui qui m'a envoyé." (Luc X, 16)
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Du salut - (3) Réponses à diverses objections

Message non lu par VexillumRegis » sam. 14 mai 2005, 22:20

Un intervenant évangélique a écrit :1. Le brigand sur la croix n’a pas été baptisé ; pourtant, il avait reçu l’assurance de se retrouver au paradis avec Christ (#Lu 23.43)


"Depuis toujours, l’Église garde la ferme conviction que ceux qui subissent la mort en raison de la foi, sans avoir reçu le Baptême, sont baptisés par leur mort pour et avec le Christ. Ce Baptême du sang, comme le désir du Baptême, porte les fruits du Baptême, sans être sacrement." (CEC, n° 1258) - Ainsi S. Augustin écrit dans La Cité de Dieu : "Tous ceux, en effet, qui meurent pour la confession de Jésus-Christ obtiennent, sans avoir reçu le baptême, le pardon de leurs péchés, comme s’ils avaient été baptisés. Il est écrit, à la vérité, que « personne n’entrera dans le royaume des cieux, qu’il ne renaisse de l’eau et du Saint-Esprit". Mais l’exception à cette règle est contenue dans ces paroles non moins formelles: "Quiconque me confessera devant les hommes, je le confesserai aussi devant mon Père qui est dans les cieux".
Un intervenant évangélique a écrit :2. Les païens de Césarée furent baptisés après avoir été sauvés (#Ac 10.44-48 )


Il n'est pas dit qu'ils ont été sauvé mais qu'ils ont reçu le Saint-Esprit.
Un intervenant évangélique a écrit :3. Jésus lui-même n’a pas baptisé (#Jn 4.1, 2) ; quelle étrange omission si le baptême était nécessaire au salut !


"On l’a dit plus haut : les sacrements tiennent de leur institution le pouvoir de conférer la grâce. Il semble donc qu’un sacrement est institué au moment où il reçoit le pouvoir de produire son effet. Or le baptême a reçu ce pouvoir lors du baptême du Christ. C’est donc alors vraiment que le baptême a été institué, quant au sacrement lui-même. Mais l’obligation de recevoir ce sacrement ne fut imposée aux hommes qu’après la Passion et la résurrection. D’abord parce que la passion du Christ mit fin aux sacrements figuratifs, que remplacent le baptême et les autres sacrements de la loi nouvelle. Puis parce que le baptême configure l’homme à la passion et à la résurrection du Christ, en le faisant mourir au péché et renaître à une vie nouvelle dans la justice. Aussi fallait-il que le Christ souffre et ressuscite avant que soit imposée aux hommes la nécessité de se configurer à sa mort et à sa résurrection." (S. Thomas d'Aquin, Somme Théologique, III, q. 66, a. 2)
Un intervenant évangélique a écrit :4. Paul rendit grâces à Dieu de ce qu’il avait baptisé peu de Corinthiens (#1Co 1.14-16) ; une telle action de grâces ne se comprendrait pas si le baptême était essentiel au salut


"Le Seigneur a confié aux Apôtres et aux évêques qui tiennent leur place la double mission d’enseigner et de baptiser, mais à des titres différents. Le Christ leur a confié la charge d’enseigner pour qu’ils l’exercent par eux-mêmes, comme leur fonction principale. Aussi les Apôtres eux-mêmes ont-ils dit : "Il ne convient pas que nous laissions la parole de Dieu pour servir aux tables" (Ac 6, 2). Mais il a confié aux Apôtres la charge de baptiser pour qu’ils l’exercent par d’autres ; aussi l’Apôtre dit-il (1 Co 1, 17) : "Le Christ ne m’a pas envoyé baptiser, mais prêcher l’Évangile." La raison en est que dans le baptême le mérite et la sagesse du ministre ne font rien, à la différence de l’enseignement, nous l’avons montré plus haut. On en trouve un signe dans le fait que le Seigneur "ne baptisait pas lui-même, mais c’étaient ses disciples" (Jn 4, 2). - Et cela n’exclut pas que les évêques puissent baptiser : ce que peut un pouvoir inférieur, le supérieur peut aussi le faire. Et l’Apôtre au même endroit dit qu’il a baptisé quelques personnes." (S. Thomas d'Aquin, Somme Théologique, III, q. 67, a. 2)
Un intervenant évangélique a écrit :5. Env. 150 passages néo-testamentaires affirment que le salut s’obtient par la foi seule. Aucun verset ni groupe de versets ne pourraient contredire une vérité aussi bien établie


Il n'est jamais dit que le salut s'obtient par la foi seule : c'est une falsification de Luther, qui a rajouté le mot "seul" dans sa traduction allemande de Rom. III, 28. La seul fois où le mot "seul" accompagne le terme "foi", c'est dans Jacques II, 24 : "Vous le voyez : c'est par les œuvres que l'homme est justifié et non par la foi seule".

Toute la théorie protestante de la justification par la foi seule est basée sur une mauvaise interprétation de Paul. Pourtant l'Apôtre Pierre nous prévient : "Croyez que la longue patience de Notre Seigneur est pour votre salut, ainsi que Paul, notre bien-aimé frère, vous l'a aussi écrit, selon la sagesse qui lui a été donnée. C'est ce qu'il fait dans toutes les lettres où il aborde ces sujets; il s'y rencontre des passages difficiles à entendre, et que des personnes ignorantes et mal affermies détournent, comme elles font les autres Ecritures, pour leur perdition, Vous donc, bien-aimés, qui êtes prévenus, tenez-vous sur vos gardes, de peur qu'entraînés par l'égarement de ces impies, vous ne veniez à déchoir de votre fermeté." (II Pi. III, 15-16)
Un intervenant évangélique a écrit :6. Dans le N.T., le baptême est associé à l’idée de mort et d’ensevelissement, et non à celle d’une naissance spirituelle.


Parce que cette mort et cet ensevelissement sont le prélude nécessaire à la régénération spirituelle en Jésus-Christ : c'est une mort au péché et une renaissance dans la grâce : "Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême en sa mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous aussi nous marchions dans une vie nouvelle." (Rom. VI, 4)
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Les fondements de l'Eglise

Message non lu par VexillumRegis » sam. 14 mai 2005, 22:27

L'Eglise est à la fois visible et spirituelle, sans que l'on puisse jamais séparer ce qui est visible de ce qui est spirituel, ni ce qui est spirituel de ce qui est visible. En vertu d'une analogie qui n'est pas sans valeur, on peut la comparer au mystère du Verbe incarné. Tout comme en effet la nature prise par le Verbe divin est à son service comme un organe vivant de salut qui lui est indissolublement uni, de même le tout social que constitue l'Eglise est au service de l'Esprit du Christ qui lui donne la vie, en vue de la croissance du corps (Eph. IV, 16).

Le Seigneur a désigné ses apôtres pour être les fondements visibles de l'Eglise, dont lui-même est la pierre angulaire (Eph. II, 19-20). Dans Apo. XXI, 14, S. Jean décrit l'Eglise comme une ville constituée de "douze pierres fondamentales sur lesquelles sont douze noms, ceux des douze apôtres de l'Agneau". Que l'on enlève les pierres fondamentales ou la pierre angulaire, et tout l'édifice de l'Eglise s'effondre ; de sorte qu'il n'est pas possible de séparer l'Eglise apostolique, constituée des pasteurs désignés pour paître le troupeau, de Jésus-Christ, le Bon Pasteur, le Pasteur suprême.

Or les apôtres, par l'imposition des mains, ont transmis à leurs successeurs leur charge, pour que l'Eglise apostolique du Seigneur se perpétue jusqu'à la fin des temps. Ce principe de la succession apostolique est clairement affirmé par S. Paul : " C'est pourquoi je te rappelle de raviver le don de Dieu, qui est en toi, (conféré) par l'imposition de mes mains (2 Tim. I, 6)ou : "N'impose (trop) vite les mains à personne, et ne te rends pas complice des fautes d'autrui ; toi-même, garde-toi pur" (1 Tim. V, 22). C'est à ces seuls pasteurs légitimes qu'a été confié le soin de garder le dépôt de la foi (2 Tim. I, 14) et de paître le troupeau (Actes XX, 28 ).

Il existe une continuité historique - fondée sur la succession apostolique - entre l'Eglise instituée par le Christ et l'Eglise catholique : c'est là l'unique Eglise du Christ que notre Sauveur, après sa résurrection, remit à Pierre pour qu'il en soit le pasteur (Jn XXI, 17), qu'il confia, à lui et aux autres apôtres, pour la répandre et la diriger (Mt XXVIII, 18 s.), et dont il a fait pour toujours la "colonne et le fondement de la vérité" (1 Tim. III, 15).

Les Églises qui, quoique sans communion parfaite avec l'Église catholique, lui restent cependant unies par des liens très étroits comme la succession apostolique et l'Eucharistie valide, sont de véritables Églises particulières (comme les églises orthodoxes). Par conséquent, l'Église du Christ est présente et agissante dans ces Églises, malgré l'absence de la pleine communion avec l'Église catholique, provoquée par leur non-acceptation de la doctrine catholique du Primat, que l'Évêque de Rome, d'une façon objective, possède et exerce sur toute l'Église conformément à la volonté divine.

En revanche, les Communautés ecclésiales qui n'ont pas conservé l'épiscopat valide et la substance authentique et intégrale du mystère eucharistique, ne sont pas des Églises au sens propre (ainsi la plupart des églises protestantes, dont les évangéliques) ; toutefois, les baptisés de ces Communautés sont incorporés au Christ par le baptême et se trouvent donc dans une certaine communion, bien qu'imparfaite, avec l'Église. Le baptême en effet tend en soi à l'acquisition de la plénitude de la vie du Christ, par la totale profession de foi, l'Eucharistie et la pleine communion dans l'Église.

[NB : ce texte fait appel à de très larges emprunts à la déclaration de la congrégation pour la doctrine de la foi Dominus Iesus...]

_______________

Chers frères en Christ,

Que l’Eglise fondée par Jésus-Christ soit édifiée et sur la succession apostolique, et sur l’Eucharistie, c’est là une vérité révélée par la Sainte Ecriture et par toute la Tradition sacrée de l’Eglise.

Le Seigneur a désigné ses apôtres pour être les fondements visibles de l'Eglise, dont lui-même est la pierre angulaire (Ep II, 19-20). Dans Ap XXI, 14, S. Jean décrit l'Eglise comme une ville constituée de "douze pierres fondamentales sur lesquelles sont douze noms, ceux des douze apôtres de l'Agneau". Que l'on enlève les pierres fondamentales ou la pierre angulaire, et tout l'édifice de l'Eglise s'effondre ; de sorte qu'il n'est pas possible de séparer l'Eglise apostolique, constituée des pasteurs désignés pour paître le troupeau, de Jésus-Christ, le Bon Pasteur, le Pasteur suprême.

Or les apôtres, par l'imposition des mains, ont transmis à leurs successeurs leur charge, pour que l'Eglise apostolique du Seigneur se perpétue jusqu'à la fin des temps. Ce principe de la succession apostolique est clairement affirmé par S. Paul : " C'est pourquoi je te rappelle de raviver le don de Dieu, qui est en toi, (conféré) par l'imposition de mes mains" (2 Tm I, 6) ou : "N'impose (trop) vite les mains à personne, et ne te rends pas complice des fautes d'autrui ; toi-même, garde-toi pur" (1 Tm. V, 22). C'est à ces seuls pasteurs légitimes qu'a été confié le soin de garder le dépôt de la foi (2 Tm. I, 14) et de paître le troupeau (Ac XX, 28).

Attesté par l’Ecriture, le principe de la succession apostolique des évêques l’est encore par la Tradition de l’Eglise, ainsi que l’attestent ces quelques auteurs :

** S. Clément de Rome, Épître aux corinthiens, XLII, 4-5 ; XLIV, 1-4
[XLII] 4. A travers les campagnes et les villes, ils proclamaient la parole, et c'est ainsi qu'ils prirent leurs prémices ; et après avoir éprouvé quel était leur esprit, ils les établirent évêques et diacres des futurs croyants. 5. Et ce n'était pas là chose nouvelle : depuis de longs siècles déjà l'Écriture parlait des évêques et des diacres ; elle dit en effet: " J'établirai leurs évêques dans la justice, et les diacres dans la foi" (Is. 60, 17) (...) [XLIV] 1. Nos Apôtres aussi ont su qu'il y aurait des contestations au sujet de la dignité de l'épiscopat ; 2. c'est pourquoi, sachant très bien ce qui allait advenir, ils instituèrent les ministres que nous avons dit et posèrent ensuite la règle qu'à leur mort d'autres hommes éprouvés succéderaient à leurs fonctions. 3. Ceux qui ont ainsi reçu leur charge des Apôtres, ou, plus tard, d'autres personnages éminents, avec l'assentiment de toute l'Église, s’ils ont servi le troupeau du Christ d'une façon irréprochable, en toute humilité, sans trouble ni mesquinerie, si tous ont rendu un bon témoignage depuis longtemps, nous pensons que ce serait contraire à la justice de les rejeter de leur ministère. 4. Et ce ne serait pas une petite faute de déposer de l'épiscopat des hommes qui présentent à Dieu les offrandes avec une piété irréprochable.

** Hégésippe (113-175), rapporté par Eusèbe IV, 22, 2
Et l'Église des Corinthiens demeura dans l'orthodoxie jusqu'à ce que Primus devînt évêque à Corinthe. Lorsque je naviguais vers Rome, j'ai vécu avec les Corinthiens et j'ai passé avec eux un certain nombre de jours pendant lesquels nous nous sommes réconfortés de leur orthodoxie. Étant arrivé à Rome, j'y établis une succession jusqu'à Anicet, dont Eleuthère était diacre. Soter a succédé à Anicet et, après lui, il y a eu Eleuthère. Dans chaque succession et dans chaque ville, il en est comme le prêchent la Loi, les prophètes et le Seigneur.

** S. Irénée, Contre les hérésies, Livre III
Mais comme il serait trop long, dans un ouvrage tel que celui-ci, d'énumérer les successions de toutes les Églises, nous prendrons seulement l'une d'entre elles, l'Église très grande, très ancienne et connue de tous, que les deux très glorieux apôtres Pierre et Paul fondèrent et établirent à Rome; en montrant que la Tradition qu'elle tient des apôtres et la foi qu'elle annonce aux hommes sont parvenues jusqu'à nous par des successions d'évêques, nous confondrons tous ceux qui, de quelque manière que ce soit, ou par infatuation, ou par vaine gloire, ou par aveuglement et erreur doctrinale, constituent des groupements illégitimes (...) Voilà par quelle suite et quelle succession la Tradition se trouvant dans l'Église à partir des apôtres et la prédication de la vérité sont parvenues jusqu'à nous. Et c'est là une preuve très complète qu'elle est une et identique à elle-même, cette foi vivifiante qui, dans l'Église, depuis les apôtres jusqu'à maintenant, s'est conservée et transmise dans la vérité.

*** Tertullien, Traité de la prescription contre les hérétiques
Apostolicité des origines et successions apostoliques. XXXII. [1] D'ailleurs, si quelques-unes [des communautés chrétiennes] osent se rattacher à l'âge apostolique pour paraître transmises par les apôtres, sous prétexte qu'elles existaient à l'époque des apôtres, nous sommes en droit de leur dire : « Montrez l'origine de vos Églises; déroulez la série de vos évêques se succédant depuis l'origine, de telle manière que le premier évêque ait eu comme garant et prédécesseur l'un des apôtres ou l'un des hommes apostoliques restés jusqu'au bout en communion avec les apôtres. » [2] Car c'est ainsi que les Églises apostoliques présentent leurs fastes. Par exemple, l'Église de Smyrne rapporte que Polycarpe fut installé par Jean; l'Église de Rome montre que Clément a été ordonné par Pierre. [3] De même encore, d'une façon générale, les autres Églises exhibent les noms de ceux qui, établis par les apôtres dans l'épiscopat, possèdent la bouture de la semence apostolique.

** S. Cyprien, Lettre XXXIII
Notre Seigneur, dont nous devons révérer et garder les commandements, réglant ce qui concerne les égards dus à l'évêque, et le plan de son Église, parle dans l'évangile et dit à Pierre : "Je te dis que tu es Pierre, et que sur cette pierre je bâtirai mon Église et les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. Je te donnerai les clefs du royaume des cieux, et ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans le ciel, et que tu auras délié sur la terre sera délié dans le ciel". (Mt 16,18-19). De là découle, à travers la série des temps et des successions, l'élection des évêques et l'organisation de l'Église : l'Église repose sur les évêques et toute sa conduite obéit à la direction de ces mêmes chefs.

** S. Augustin, Contre un adversaire de la loi et des prophètes, I, 39
Notre adversaire a tiré le passage qu'il a cité des livres apocryphes que l'on attribue à André et à Jean. Si ces livres étaient véritablement l'oeuvre de ces apôtres, l'Église les aurait reçus, cette Église qui, par la succession visible de ses évêques, descend des Apôtres jusqu'à nous (...)

L’Eucharistie, Mystère de l’unité, n’est légitime que si elle est célébrée en communion avec l’évêque local, lui-même uni au successeur de Pierre, fondement et principe de l’unité de l’Eglise universelle : « Que cette eucharistie seule soit regardée comme légitime, qui se fait sous la présidence de l'évêque ou de celui qu'il en aura chargé » (S. Ignace d’Antioche, Lettre aux Smyrniotes, VIII, 1).

« Le pain que nous rompons, n'est-il pas communion au corps du Christ ? Puisqu'il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain » (1 Co X, 16-17) - Bien plus qu'analogie, il y a relation d'identité entre la participation au pain eucharistique et l'intégration au corps ecclésial unique. C'est pourquoi l'expression "Corps du Christ" désigne à la fois l'Eglise et l'Eucharistie, une correspondance ontologique s’établissant entre elles. Le rassemblement du peuple de Dieu invité à la "fraction du pain" (Ac 2, 42) fait que l'Eglise devient hic et nunc ce qu'elle est : le corps du Christ vivant. S. Jean Chrysostome exprime parfaitement cette fonction unificatrice de la communion eucharistique : « Qu'est donc ce pain ? C'est le corps du Christ. Que deviennent ceux qui le reçoivent ? Le corps du Christ : non pas plusieurs corps, mais un seul corps. En effet, comme le pain est tout un, bien qu'il soit constitué de multiples grains qui, bien qu'on ne les voie pas, se trouvent en lui, tels que leur différence disparaisse en raison de leur parfaite fusion, de la même manière nous sommes unis les uns aux autres et nous sommes unis tous ensemble au Christ » (Homélies sur la première Lettre aux Corinthiens, 24, 2).

Les prières eucharistiques de la Sainte Messe expriment aussi parfaitement cette doctrine traditionnelle :

**Prière eucharistique II :
Humblement, nous te demandons qu'en ayant part au corps et au sang du Christ, nous soyons rassemblés par 1'Esprit Saint en un seul corps.

** Prière eucharistique III :
Regarde, Seigneur, le sacrifice de ton Église, et daigne y reconnaître celui de ton Fils qui nous a rétablis dans ton Alliance ; quand nous serons nourris de son corps et de son sang et remplis de l'Esprit Saint, accorde-nous d'être un seul corps et un seul esprit dans le Christ.

** Prière eucharistique IV :
Regarde, Seigneur, cette offrande que tu as donnée toi-même à ton Eglise ; accorde à tous ceux qui vont partager ce pain et boire à cette coupe d'être rassemblés par l'Esprit Saint en un seul corps, pour qu'ils soient eux-mêmes dans le Christ une vivante offrande à la louange de ta gloire.

La boucle est bouclée. Les évêques ordonnés dans la succession apostolique sont les garants de la légitimité de l’Eucharistie, laquelle, par la participation au même pain eucharistique, édifie les fidèles en un seul corps, le corps mystique et vivant du Christ Jésus, l’Eglise une, sainte, catholique et apostolique.
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Sacerdoce des fidèles et sacerdoce ministériel

Message non lu par VexillumRegis » sam. 14 mai 2005, 22:39

Lorsque Jésus-Christ dit : "Celui qui vous écoute m'écoute, et celui qui vous rejette me rejette; or celui qui me rejette, rejette celui qui m'a envoyé" (Luc X, 16), c'est bien à ses apôtres qu'il s'adresse, et rien ne permet d'étendre cette déclaration à l'ensemble des chrétiens.

Le Seigneur a donné une autorité spécifique à ses apôtres, c'est une évidence. Il les a désigné pour être les fondements visibles de l'Eglise, dont lui-même est la pierre angulaire (Eph. II, 19-20). Dans Apo. XXI, 14, S. Jean décrit l'Eglise comme une ville constituée de "douze pierres fondamentales sur lesquelles sont douze noms, ceux des douze apôtres de l'Agneau". S. Paul, en 1 Cor. III, 10, ne s'exprime pas autrement à propos de son rôle dans la création de l'Eglise de Corinthe : "Selon la grâce de Dieu qui m'a été donnée, j'ai, comme un sage architecte, posé le fondement, et un autre bâtit dessus."

Bien que les chrétiens forment "une race choisie, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple que Dieu s'est acquis" (1 P. II, 9), Jésus-Christ n'en a pas moins désigné des pasteurs pour paître le troupeau (Jn XXI, 15-17 ; Actes XX, 28 ). Des pasteurs pour paître le troupeau ! cette seule image suffit amplement à démontrer l'existence d'une hiérarchie sacerdotale établie pour gouverner le Peuple de Dieu. L'auteur de l'Epître aux Hébreux qualifie quant à lui les pasteurs de conducteurs auxquels les fidèles doivent obéissance (Hb XIII, 17, 24).

Tous ces pasteurs participent du sacerdoce unique du Christ, "le grand Pasteur des brebis" (Hb XIII, 20), et trouvent leur origine dans le collège des douze apôtres, qui est comme la souche du sacerdoce de la Nouvelle Alliance éternelle. C'est à eux seuls que s'adresse Jésus en Luc X, 16, et, à travers eux, à leurs successeurs dans leur charge pastorale.

Car il ne fait aucun doute que les apôtres ont pouvu à leur succession. De quelle manière ? On voit dans les Ecritures que les apôtres se sont associés de nombreuses personnes qui, après leur décès, devaient très logiquement poursuivre leur oeuvre d'évangélisation. Cela est particulièrement net dans les épîtres de Paul, qui nous renseignent avec précision sur la manière dont l'apôtre transmettait à ses collaborateurs le don spirituel qui s'est communiqué jusqu'à nous à travers la consécration épiscopale : "C'est pourquoi je te rappelle de raviver le don de Dieu, qui est en toi, (conféré) par l'imposition de mes mains." (2 Tim. I, 6-7) ; "N'impose (trop) vite les mains à personne" (1 Tim. V, 22) ; "Ne perds pas de vue le don spirituel qui est en toi, qui t'a été donné par action prophétique avec l'imposition des mains du collège des anciens" (1 Tim. IV, 14). Ce "don spirituel", c'est le sacrement de l'ordre.

La succession apostolique est donc très clairement attestée dans le Nouveau Testament. Elle est le fondement d'une autorité ecclésiale légitime, qui remonte ainsi aux apôtres. Seules l'Eglise catholique et l'Eglise orthodoxe procèdent de cette sucession apostolique ; elles forment de ce fait comme les deux poumons de la véritable Eglise du Christ. Les communautés ecclésiales qui n'ont pas maintenu le sacrement de l'ordre - et donc la succession apostolique - se sont séparés de l'Eglise et forment des groupement illégitimes.
______________________
La thèse selon laquelle la perfection de l'Alliance Nouvelle scellée dans le sang de Jésus-Christ rendrait caduque la nécessité d'un sacerdoce ordonné et spécialisé - du fait du sacerdoce universel des croyants - ne me semble pas résister à un examen attentif et minutieux des Ecritures (sans même parler de la Tradition et de l'histoire de l'Eglise primitive....).

1 Pierre II, 5, 9 : "(...) et, vous-mêmes comme des pierres vivantes, entrez dans la structure de l'édifice, pour former un temple spirituel, un sacerdoce saint, afin d'offrir des sacrifices spirituels, agréables à Dieu, par Jésus-Christ. [...] Mais vous, vous êtes une race choisie, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple que Dieu s'est acquis afin que vous annonciez les perfections de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière (...)".

Ce passage du prince des apôtres semble très clair : il y affirme sans ambiguïté le sacerdoce universel des croyants. Faut-t-il en déduire de facto le caractère désormais obsolète du sacerdoce ordonné et spécialisé ? - Rien n'est moins sûr.

Il faut d'abord rappeler que les formules employées par S. Pierre ne constituent pas en soi une nouveauté. Le peuple de l'Ancienne Alliance, Israël, était déjà un peuple saint et consacré : "vous serez pour moi un royaume de prêtres et une nation sainte" (Ex. XIX, 6 ; cf. aussi Is. LXI, 6). Pourtant, ce sacerdoce commun du peuple juif n'abolissait pas pour autant le besoin d'un sacerdoce spécialisé, bien au contraire, puisque Dieu jugea bon de ne confier le ministère sacré qu'à une seule des douze tribus, celle de Lévi (Nb. I, 48-53).

Ce cas de figure est-t-il rendu inopérant par la perfection de l'Alliance Nouvelle en Jésus-Christ ? On pourrait a priori le penser. Un examen plus approfondi des sources scripturaires nous prouvera cependant qu'il n'en est rien.

L'apôtre Pierre, celui-là même qui affirme avec tant de force le sacerdoce universel des chrétiens, n'en affirme pas moins dans la même épître : "J'exhorte les anciens qui sont parmi vous, moi ancien comme eux, témoin des souffrances du Christ, et qui prendrai part avec eux à la gloire qui doit être manifestée : paissez le troupeau de Dieu qui vous est confié, veillant sur lui, non par contrainte, mais de bon gré ; non dans un intérêt sordide, mais par dévouement ; non en dominateurs des Églises, mais en devenant les modèles du troupeau." (1 Pierre V, 1-3). On voit clairement ici se manifester au sein du peuple de Dieu une hiérarchie ecclésiastique : les anciens (presbyteroi) sont chargés de paître le troupeau des fidèles. Comme je l'ai déjà souligné, cette image tirée du pastoralisme est en elle-même très significative...

Il est donc évident pour S. Pierre que le sacerdoce universel des fidèles ne s'oppose nullement à la nécessité d'un sacerdoce spécialisé (ordonné au peuple de Dieu) capable de diriger l'Eglise.

Autre exemple.

Jérémie, XXXI, 31-34 : "Des jours viennent, dit Jéhovah, où je ferai avec la maison d'Israël et avec la maison de Juda une alliance nouvelle, non comme l'alliance que je conclus avec leurs pères le jour où je les pris par la main pour les faire sortir du pays d'Egypte, alliance qu'eux ont rompue, quoique je fusse leur époux. Car voici l'alliance que je ferai avec la maison d'Israël, après ces jours-là, dit Jéhovah : Je mettrai ma loi au dedans d'eux et je l'écrirai sur leur cœur, et je serai leur Dieu et ils seront mon peuple. Un homme n'enseignera plus son prochain, ni un homme son frère, en disant: "Connaissez Jéhovah !" car ils me connaîtront tous, depuis le plus petit jusqu'au plus grand, dit Jéhovah ; car je pardonnerai leur iniquité, et je ne me souviendrai plus de leur péché."

"Un homme n'enseignera plus son prochain, ni un homme son frère, en disant: "Connaissez Jéhovah !" car ils me connaîtront tous, depuis le plus petit jusqu'au plus grand (...)". Alors, égalité absolue des croyants ? Fin du sacerdoce des prêtres ? Difficile à croire ! - L'auteur de l'Epître aux Hébreux, qui cite pourtant dans son intégralité ce passage de Jérémie (cf. Heb. VIII, 8-12), n'en écrit pas moins à la fin de sa lettre : "Obéissez à ceux qui vous conduisent, et ayez pour eux de la déférence, car ils veillent sur vos âmes comme devant en rendre compte" (XIII, 17). Ce terme de "conducteurs", plusieurs fois employé, est lui aussi très significatif, vous en conviendrez ! - S. Paul, en divers endroits de ses épîtres, insiste sur l'autorité et le rôle des différents ministres. En Rom. X, 14-17, par exemple, il affirme la nécessité des prédicateurs ; en Eph. IV, 11 s., il est encore plus explicite, énumérant les différents ministères et affirmant leur utilité. C'est que S. Paul se fait une haute idée du ministère sacrée. Il qualifie les pasteurs de "dispensateurs des mystères de Dieu" (1 Cor. IV, 1). Lui-même n'hésite pas à sévir et à faire montre d'autorité : "Que voulez-vous ? Que j'aille chez vous avec la verge, ou avec amour et dans un esprit de douceur ?" (1 Cor IV, 21) ; il excommunie sans hésitation un incestueux qui souillait par sa présence l'Eglise de Corinthe (1 Cor. V, 4-5), cette Eglise de Corinthe qu'il a lui-même engendré dans le Christ, selon sa belle expression (IV, 15).

Ce sacerdoce ne fait pas des ministres de simples délégués des différentes communautés chrétiennes : les pasteurs reçoivent leur mandat de Dieu par les apôtres. J'ai déjà mentionné le rôle de l'imposition des mains, tel qu'il est développé par S. Paul dans ses deux lettres à Timothée (voir mon précédent message). Le cas des sept diacres de Jérusalem ordonnés par les apôtres est encore plus explicite (cf. Actes VI, 2-6).

Comment donc concilier le sacerdoce universel des croyants, très clairement établi, et le ministère particulier des différents ministres, tout aussi clairement attesté ? - Je cite l'explication que nous donne le catéchisme du concile de Trente, explication qui, au vue de ce que l'on vient de voir précédemment, me semble tout à fait recevable : "(...) Lorsqu’on dit des Fidèles purifiés par l’eau du Baptême qu’ils sont prêtres, c’est d’un Sacerdoce intérieur que l’on veut parler. Dans le même ordre d’idées, tous les justes sont prêtres, qui ont l’esprit de Dieu en eux, et qui sont devenus par un bienfait de la Grâce, membres vivants du souverain Prêtre qui est Notre-Seigneur Jésus-Christ. En effet, ils immolent à Dieu, sur l’autel de leur cœur, des hosties spirituelles, toutes les fois que, éclairés par la Foi et enflammés par la Charité, ils font des œuvres bonnes et honnêtes qu’ils rapportent à la gloire de Dieu. (...) Quant au Sacerdoce extérieur, il n’appartient point à tous les Fidèles, mais seulement à certains hommes qui ont reçu l’imposition des mains d’une manière légitime ; qui ont été ordonnés et consacrés à Dieu avec les Cérémonies solennelles de la Sainte Eglise, et qui, par le fait, se trouvent dévoués à un ministère sacré, et d’une nature toute particulière".
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Marie - (1) Prolégomènes

Message non lu par VexillumRegis » sam. 14 mai 2005, 22:47

Je crois qu'il est avant tout nécessaire que les évangéliques comprennent bien que l'Eglise catholique ne "déifie" pas Marie. La doctrine catholique a toujours pris soin de préciser que tous les privilèges dont jouit Marie lui viennent directement et uniquement de son divin Fils ; elle ne les tient nullement d'elle-même.

Appuyons cela sur des textes issus du magistère :

"Ce que la foi catholique croit au sujet de Marie se fonde sur ce qu'elle croit au sujet du Christ, mais ce qu'elle enseigne sur Marie éclaire à son tour sa foi au Christ" (CEC, n°487)

"Nous n'avons qu'un Médiateur, selon la parole de l'Apôtre: "Il n'y a qu'un Dieu et qu'un Médiateur entre Dieu et les hommes, l'homme-Christ Jésus, qui s'est lui-même donné pour tous comme rançon" (I Tim. 2, 5-6). Le rôle maternel de Marie envers les hommes ne voile ni ne diminue en aucune manière cette médiation unique du Christ, mais elle en montre l'efficacité. En effet, toute l'action de la bienheureuse Vierge sur les hommes dans l'ordre du salut ne provient pas d'une quelconque nécessité: elle naît du bon plaisir de Dieu et découle de la surabondance des mérites du Christ. Elle s'appuie sur la médiation du Christ, elle en dépend et en tire toute sa vertu. Ainsi cette action, loin d'empêcher de quelque manière une union immédiate des croyants avec le Christ. la facilite bien plutôt." (Lumen Gentium, n°60)

"En fait, aucune créature ne peut jamais figurer sur le même plan que le Verbe incarné, notre Rédempteur. Mais, de même que les ministres sacrés et le peuple fidèle participent, selon des façons variées, au sacerdoce du Christ, et que la bonté unique de Dieu est réellement répandue selon une grande variété de manières, dans les créatures, de même également la médiation unique du Rédempteur n'exclut pas, mais suscite plutôt chez les créatures une coopération variée, qui provient de la source unique." (Lumen Gentium, n°62)

Et lorsque Pie IX définit en 1854 le dogme de l'Immaculée Conception, il précise bien que ce privilège inouïe a été conférée à la mère de Dieu "en vue des mérites de Jésus-Christ" (Bulle Ineffabilis Deus).

Voilà un premier point qu'il me paraît indispensable de bien assimiler et comprendre avant de poursuivre plus avant le débat.
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Marie - (2) La parallèle Marie/Eve

Message non lu par VexillumRegis » sam. 14 mai 2005, 22:51

Le parallèle entre Marie et Eve me semble très éclairant, d'autant plus qu'on le rencontre très tôt dans le christianisme :

"Nous comprenons enfin qu'il s'est fait homme par la vierge, de sorte que c'est par la voie qu'elle avait commencée que prit fin aussi la désobéissance venue du serpent. Eve était vierge, sans corruption : en concevant la parole du serpent, elle enfantait désobéissance et mort. Or la vierge Marie conçut foi et joie lorsque l'Ange Gabriel lui annonça la bonne nouvelle que l'Esprit du Seigneur viendrait sur elle, et que la Puissance du Très-Haut la couvrirait de son ombre, et qu'à cause de cela l'Etre saint qui devait naître d'elle serait Fils de Dieu; et elle répondit: "Qu'il m'arrive selon ta parole." (S. Justin, martyrisé vers 165)

"Parallèlement au Seigneur, on trouve aussi la Vierge Marie obéissante, lorsqu'elle dit « Voici ta servante, Seigneur, qu'il me soit fait selon ta parole ». Eve, au contraire, avait été désobéissante elle avait désobéi, alors qu'elle était encore vierge. Car, de même qu'Eve, ayant pour époux Adam, et cependant encore vierge — car « ils étaient nus tous les deux » dans le paradis « et n'en avaient point honte », parce que, créés peu auparavant, ils n'avaient pas de notion de la procréation il leur fallait d'abord grandir, et seulement ensuite se multiplier — de même donc qu'Eve, en désobéissant, devint cause de mort pour elle-même et pour tout le genre humain, de même Marie, ayant pour époux celui qui lui avait été destiné par avance, et cependant Vierge, devint, en obéissant, cause de salut pour elle-même et pour tout le genre humain. (...) Ainsi également le nœud de la désobéissance d'Eve a été dénoué par l'obéissance de Marie, car ce que la vierge Eve avait lié par son incrédulité, la Vierge Marie l'a délié par sa foi. (S. Irénée, évêque de Lyon, mort vers 202)

"Dieu, par une opération contraire à celle du démon, a voulu reprendre son image dont le démon s'était rendu le maître. Eve étant encore vierge, une parole était entrée dans son âme, qui y avait élevé l'édifice de la mort; il fallait donc que le Verbe de Dieu entrât dans une vierge pour y rétablir l'édifice de la vie, afin que ce qui s'était perdu par le sexe de la femme fût recouvré par le même sexe (...)" (Tertullien, mort vers 222)

Cette mise en rapport Marie/Eve se trouve d'ailleurs déjà dans les Evangiles, quoique de manière implicite. Le colloque entre Marie et l'Ange Gabriel (Luc, I, 26-38 ) peut être rapprocher de la scène de la tentation dans la Genèse (I, 1-5). De même que dans l'ordre de la chair Eve est notre mère (Genèse, III, 20), de même Marie est la mère de Jean et de tous les hommes dans l'ordre de la grâce (Jean, XIX, 27).

"Par Eve la mort, par Marie la vie" (LG 56 ; CEC n°494) : voici la raison profonde de l'honneur tout particulier que les catholiques rendent à la mère de notre Seigneur (Luc, I, 43) ; c'est une dette d'honnêteté et de gratitude envers celle qui, par sa foi, a été "cause de salut pour elle-même et pour tout le genre humain" selon la belle expression de St Irénée.
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Marie - (3) Quelques fondements bibliques du culte marial

Message non lu par VexillumRegis » sam. 14 mai 2005, 22:57

Je continue à présenter mon point de vue (que j'espère orthodoxe du point de vue catholique) sur le rôle de Marie et les fondements du culte qui lui doit être rendu.

Les catholiques pensent que Marie, mère du Seigneur (Luc, I, 43), "pleine de grâce" (Luc, I, 28 ), est très propre à être une médiatrice efficace auprès de son divin Fils ; et c'est pour cette raison qu'elle mérite les titres d'avocate, d'auxiliaire ou de secourable (LG 62).

Nous fondons cette conviction principalement sur deux passages de l'Evangile de Jean :

1° - "Près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la soeur de sa mère, Marie, femme de Clopas, et Marie-Madeleine. Jésus, ayant vu sa mère, et auprès d'elle le disciple qu'il aimait, dit à sa mère : "Femme, voilà votre fils." Ensuite il dit au disciple : "Voilà votre mère." Et depuis cette heure-là, le disciple la prit chez lui" (Jean, XIX, 25-27)

Je crois qu'il faut se garder de ne voir dans ce passage qu'un simple détail d'ordre domestique et pratique ; c'est cela pour une part, évidemment, puisque Jésus confie à Jean le soin de s'occuper de sa mère après son départ. Mais ce n'est pas que cela. Jésus confie d'abord son disciple préféré, Jean, à sa mère, et c'est là, semble-t-il, le point essentiel. Les Pères ont toujours interprété ce passage en mettant en valeur que le Sauveur ne confiait pas seulement Jean à Marie, mais tous les hommes. De même qu'Eve fut notre mère commune dans l'ordre de la chair, de même Marie est notre mère commune dans l'ordre de la grâce, elle qui justement reçut cette grâce divine en plénitude (Luc, I, 28 ). C'est donc parce que sur la croix Jésus nous a confié à sa Mère que nous l'honorons et l'invoquons comme notre protectrice (autant qu'il est juste d'honorer sa mère).

2° - "Et le troisième jour, il se fit des noces à Cana en Galilée ; et la mère de Jésus y était. Jésus fut aussi convié aux noces avec ses disciples. Le vin étant venu à manquer, la mère de Jésus lui dit: "Ils n'ont plus de vin." Jésus lui répondit: "Femme, qu'est-ce que cela pour moi et pour vous ? Mon heure n'est pas encore venue." Sa mère dit aux serviteurs: "Faites tout ce qu'il vous dira." Or, il y avait là six urnes de pierre destinées aux ablutions des Juifs, et contenant chacune deux ou trois mesures. Jésus leur dit: "Remplissez d'eau ces urnes." Et ils les remplirent jusqu'au haut. Et il leur dit: "Puisez maintenant, et portez-en au maître du festin ; et ils en portèrent. Dès que le maître du festin eut goûté l'eau changée en vin (...) Tel fut, à Cana de Galilée, le premier des miracles de Jésus (...)" (Jean, II, 1-11)

Voici encore un récit qui, derrière son aspect trivial, est très précieux. C'est d'abord un miracle extraordinaire, le premier miracle, celui qui inaugure le ministère de Jésus dans le monde : l'eau changée en vin. Et ce premier miracle, c'est Marie qui le demande et l'obtient, malgré semble-t-il les réticences du Seigneur : "Mon heure n'est pas encore venue". Et pourtant ce Fils divin, se soumettant à la Loi qu'il a lui-même établie, obéit à sa mère, et l'heure qui n'est pas encore venue, à savoir le ministère public, débute par la foi de Marie : "Faites tout ce qu'il vous dira".

Mais il y a plus me semble-t-il ; il y a cette symbolique puissante du vin : "Ils n'ont plus de vin". Le vin n'est pas simplement cette boisson indispensable à toute fête (en l'occurence des noces), c'est aussi un signe divin chargé de sens dans les Ecritures. Le vin réjouit le coeur de l'homme (Ps., CIII, 15 ; Eccli., XXXI, 27) ; il est un instrument à la première alliance de Dieu avec l'humanité (Gen., XIV, 18 ). La vigne soignée et choyée par Dieu représente son peuple élu (Jérémie, II, 21 ; Is., V, 1-7 ; Ps. LXXIX, 9-19) ; dans plusieurs paraboles, elle représente le royaume de Dieu (Matt., XX, 1-16 ; XXI, 28-31 et 33-41). A deux reprises, le "vin nouveau" a, dans l'Evangile, un sens eschatologique : il ne faut pas le verser dans les vieilles outres (Mc., II, 22) et Jésus, en faisant circuler la première coupe, qui n'est pas encore celle de l'Eucharistie, annonce : "Je ne boirais plus désormais de ce fruit de la vigne, jusqu'à ce jour où je le boirai avec vous, nouveau, dans le Royaume de mon Père" (Matt., XXVI, 29).

"Je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron" (Jean, XV, 1). Le vin que demande Marie à Cana, ce vin qui ouvre ainsi le ministère de Jésus, et qui le clot (lors de la cène), ce vin, donc, fruit de la vigne qui est Jésus, c'est la grâce divine répandue sur les hommes pour les sauver : en un mot, c'est la Rédemption. En demandant du vin à Cana, Marie, la Mère de Dieu, a contribué d'une manière décisive à nous obtenir la Rédemption ; elle a été associée à ce mystère d'une manière étroite et singulière. Par cette acte de médiation efficace et salvateur, Marie mérite notre amour et notre dévotion ; elle est, par la volonté de son Fils (et non par nécessité), un intermédiaire efficace auprès de son divin Fils, et elle a été prédestiné à cela.

"Voilà votre mère" (Jean, XIX, 27)
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Marie (4) - Marie, Reine du Ciel: une explication catholique

Message non lu par VexillumRegis » mar. 06 déc. 2005, 13:21

On accuse souvent l’Église catholique de déformer les saintes Écritures, voire même de professer des doctrines explicitement et formellement contraires à l’enseignement biblique.

Parmi ces dogmes “qui viennent des hommes, et non de Dieu”, ceux qui touchent à la personne de Marie attisent particulièrement les passions, par leur nombre et leur importance : Immaculée Conception, Assomption, maternité divine, virginité perpétuelle, rôle d’intercession, etc.

Le titre de Reine du Ciel (qui n’est point un dogme au sens propre) est sans doute celui qui provoque le plus de réactions épidermiques au sein des évangéliques. On me permettra de le prendre à titre d’exemple et de l’examiner de plus près.

Je laisse d’abord la parole à Pie XII : il fût pape, et tout le monde reconnaîtra sans peine son autorité dans la définition de la foi catholique. Voici donc ce qu’il écrivit dans son encyclique Ad Coeli Reginam (11 octobre 1954) :

Sans doute, seul Jésus-Christ, Dieu et homme, est Roi, au sens plein, propre et absolu du mot ; Marie, toutefois, participe aussi à sa dignité royale, bien que d'une manière limitée et analogique, parce qu'elle est la Mère du Christ Dieu et qu'elle est associée à l'oeuvre du Divin Rédempteur dans sa lutte contre ses ennemis et dans son triomphe remporté sur eux tous (...)

Sans doute, nous dit Pie XII, Jésus-Christ est le seul à être Roi au sens plein, propre et absolu du mot; il est même le Roi des rois (Ap XIX, 16), la Source de toute royauté, de tout pouvoir. Comme l’écrivit fort justement saint Louis-Marie Grignon de Montfort, l’apôtre de la dévotion mariale :

J'avoue avec toute l'Église que Marie n'étant qu'une pure créature sortie des mains du Très-Haut, comparée à sa Majesté infinie, est moindre qu'un atome, ou plutôt n'est rien du tout.

L’écart est si grand entre Dieu et sa créature, qu’on ne peut jamais les mettre sur le même plan sans risquer de blasphémer. De ce fait, lorsque l’on proclame Marie Reine du Ciel, on n’entend nullement en faire l’égale de son Divin Fils et Créateur, ce qui serait un blasphème attentatoire à la Majesté divine. Comme le dit fort justement Pie XII dans son encyclique Marie n’est Reine que d’une manière limitée et analogique, c’est-à-dire qu’elle tire sa dignité royale de Celui qui est Roi par essence, en plénitude, et d’une manière incomparable : Jésus-Christ, Notre-Seigneur et notre créateur.

Pie XII écrit que Marie participe aussi à sa dignité royale. Cette notion de participation, sur laquelle j’ai déjà insisté, est la clef pour comprendre toute la mariologie catholique. S. Pierre écrit dans sa deuxième épître que par le Christ et dans le Christ nous sommes rendus participants de la gloire divine (2 P I, 4). C’est ainsi que Marie, et tous les saints avec elle, par la grâce surabondante du Christ, est rendue participante de la gloire divine. La royauté est l’un des attributs de cette gloire divine. Marie n’est point Reine par elle-même, elle est Reine parce qu’elle participe de la Royauté divine et unique de son Fils, le Roi des rois, qui siège à la droite du Père. C’est une royauté participée, une royauté qui dérive de la surabondance de grâce qui découle du Christ glorifiée, le Rocher spirituel (Ex XVII, 1-7 ; 1 Co X, 4).

Évidemment, cette royauté de Marie, si elle est infiniment inférieure à celle du Christ, d’où elle prend sa source, est cependant supérieure à celle de toute autre créature. Pour quelles raisons ? - D’abord, nous dit Pie XII, parce qu’elle est la Mère du Christ Dieu. C’est la maternité divine de Marie qui est la source de tous ses privilèges. Sans doute, tous les fidèles chrétiens sont appelés à porter le Christ dans leur coeur, de telle sorte qu’il y ait là comme une maternité spirituelle. Mais personne ne peut, ni ne pourra jamais renouveler ce grand miracle d’être fécondée par l’Esprit de Dieu et de porter en soi le Fruit Divin du salut, le Verbe fait chair. Personne, hormis Marie, n’a été jugé digne d’une grâce si grande qu’on peut la qualifier sans hésitation de royale.

Une autre raison de la royauté participée éminente de Marie, et qu’on ne trouve pas cette fois dans le texte de Pie XII (mais on la trouve exprimée en divers endroits de l‘oeuvre de Jean Paul II), c’est qu’elle fut la parfaite servante du Seigneur. Or le service est la marque de la royauté. Ainsi Jésus-Christ, le Roi des rois, n’a pas hésité à se faire le plus humble des serviteurs de ses frères, comme lors de l’épisode du lavement des pieds. Lui-même nous le dit : celui qui, parmi vous, voudra devenir grand, se fera votre serviteur ; et celui qui, parmi vous, voudra être premier, se fera esclave de tous. Car le Fils de l'homme est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour beaucoup (Mc X, 42-45). C’est parce que Marie, par son fiat (Lc I, 38), est la plus parfaite des servantes de Dieu, qu’elle mérite de participer d’une manière éminente à la Royauté de son Fils.

Enfin, Pie XII écrit enfin que Marie mérite de participer de manière singulière à la Royauté de son fils en ce qu'elle est associée à l'oeuvre du Divin Rédempteur dans sa lutte contre ses ennemis et dans son triomphe remporté sur eux tous. Si l’on a bien suivi l’ensemble de l’argumentation développée jusqu’ici, ce passage ne devrait point poser de problème. Dans l’oeuvre de la Rédemption, le rôle de Marie ne doit pas être connuméré (c’est-à-dire ajouté, dans le sens d’une égalité de valeur) à celui de Notre-Seigneur, car dans ce cas l’oeuvre du Christ ne serait point parfaite. Marie, comme toutes les créatures, a elle aussi eu besoin d’être sauvé par son Rédempteur. Non, Marie a été associé au grand Mystère de la Rédemption d’une manière limitée et participée, par pure grâce, en tant qu’instrument - conscient et consentant - de la volonté divine. Le récit de la chute d’Adam et Ève nous montre la participation de la femme au péché ; mais il nous rappelle aussi l’intention de Dieu d’engager la femme comme alliée, dans la lutte contre le Serpent antique et la péché (Gn III, 15). Beaucoup de figures féminines de l’Ancien Testament s’inscrivent dans cette alliance, mais c’est en Marie qu’elle arrive à son terme, car c’est elle, véritablement, qui écrase la tête du Serpent en portant en son sein et en mettant au monde Celui qui est l’Agneau de Dieu, et qui enlève les péchés du monde. C’est en ce sens que Marie est en toute vérité associée à l’oeuvre de la Rédemption et à la victoire sur le péché.

A partir de ce qui vient d’être dit, il ne me semble pas vraiment nécessaire de combattre l’assimilation frauduleuse de Jr VII, 18 à l’expression de Reine du Ciel appliquée à Marie. Il me semble évident qu’il s’agit là d’une calomnie qui a pour source soit la haine, soit, plus souvent, l’ignorance.
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L'intercession des saints

Message non lu par VexillumRegis » mar. 06 déc. 2005, 14:00

1°- Certains évangéliques prétendent que c'est nécromancie de vénérer les saints, et ils s'appuient en particulier sur ce passage pour appuyer leur propos : "On ne trouvera chez toi personne qui fasse passer au feu son fils ou sa fille, qui pratique divination, incantation, mantique ou magie, personne qui use de charmes, qui interroge les spectres et devins, qui invoque les morts ; car quiconque fait ces choses est en abomination à Yahvé ton Dieu" (Deutéronome, XVIII, 10-12) - Or, par la foi, les saints, quoique morts, sont vivants dans le Christ : "Je suis la résurrection et la vie ; celui qui croit en moi, fût-il mort, vivra" (Jean, XI, 26) et : "Il n'est pas le Dieu des morts, mais des vivants" (Marc, XII, 27).

2°- Les saints sont donc dans le ciel, dans la gloire du Seigneur ; nous sommes enveloppés d'une nuée de témoins (Hébreux, XII, 1 ; Apocalypse, XIX, 1-10) - "Et il dit à Jésus: "Seigneur, souvenez-vous de moi, quand vous serez parvenu dans votre royaume." Jésus lui répondit : "Je te le dis en vérité, aujourd'hui tu seras avec moi dans le Paradis". (Luc, XXIII, 42-43) - "C'est pour cela qu'ils sont devant le trône de Dieu et le servent jour et nuit dans son sanctuaire" (Ap., VII, 15) - "Ils eurent la vie, et régnèrent avec le Christ pendant mille ans" (Ap., XX, 4) - "Et elle ouvrit sa bouche pour proférer des blasphèmes contre Dieu, pour blasphémer son nom, son tabernacle et ceux qui habitent dans le ciel" (Ap. XIII, 6)

3°- Or nous sommes tous membres du Christ : "ainsi, nous qui sommes plusieurs, nous ne faisons qu'un seul corps dans le Christ" (Rom., XII, 5). Nous pensons donc qu'il existe une communion spirituelle étroite entre tous les membres du Corps mystique de Jésus-Christ, entre ceux qui cheminent sur la terre, et ceux qui participent déjà de la gloire du Seigneur (LG 50).

4°- Plusieurs passages des Ecritures peuvent être produits pour démontrer qu'il y a communication entre les saints du ciel et le Seigneur :

- Tobie, XII, 12 : l'ange Raphaël dit : "je présentais ta prière au Seigneur". Il ne s'agit certes pas ici d'un saint, mais d'un ange : il faut cependant convenir qu'en l'occurence il intercède, ce qui prouve qu'il y a possibilité d'intercession - Et comme je sais bien que le canon protestant ne reconnait pas le livre de Tobie, voici confirmation dans Job, XXXIII, 23 : "Mais s'il trouve pour intercesseur un ange entre mille (...)".

- Les saints prient dans le ciel; ils y sont actifs : " (...) tenant chacun une harpe et des coupes d'or pleines de parfum, qui sont les prières des saints" (Ap., V, 8 ).

- Jérémie, XV, 1 : "Yahweh me répondit : Quand Moïse et Samuel se tiendraient devant moi, mon âme ne se tournerait pas vers ce peuple ; chasse-les de devant ma face et qu'ils partent!" - Pourquoi évoquer ici une possible tentative d'intercession de Moïse et Samuel, si toute intercession est impossible ?

- Le célèbre récit de la Transfiguration (Matt., XVII ; Marc, IX) montre ici deux saints éminents, Moïse et Elie, dans une conversation active avec le Seigneur, déjà dans sa gloire.

- Enfin dans II Machabées, XV, 11-16 (livre non retenu par le canon protestant) : "Il leur raconta en outre un songe digne de foi, une vision réelle, qui les réjouit tous. Voici ce qu'il avait vu : Le grand-prêtre Onias, cet homme de bien, d'un abord modeste et de moeurs douces, distingué dans son langage et adonné dès l'enfance à toutes les pratiques de la vertu, il l'avait vu, les mains étendues, priant pour toute la nation des Juifs. Ensuite lui était apparu, de la même manière, un homme distingué par son grand âge et son aire de dignité, d'un aspect admirable, et entouré de la plus imposante majesté. Onias, prenant la parole, lui avait dit: "Celui-ci est l'ami de ses frères, qui prie beaucoup pour le peuple et pour la ville sainte, Jérémie, le prophète de Dieu".

5°- La prière d'intercession est efficace : "Job, mon serviteur, priera pour vous, et c'est par égard pour lui que je ne vous jugerez point selon votre folie" (Job, XLII, 8, 10) - De même pour l'intercession d'Abraham : "Abraham intercéda auprès de Dieu, et Dieu guérit Abimélech (...)" (voir aussi XVIII, 22-33 pour le cas de Sodome) - Saint Paul demande souvent quant à lui à ses disciples de prier pour lui (Eph. VI, 18-20 ; Philémon 22 ; I Thess. V, 25).

Si l'on tente un résumé par propositions qui se suivent logiquement :

1°- Les saints, même morts, sont vivants dans le Christ ;
2°- Ils sont auprès du Seigneur et participent de sa gloire ;
3°- Nous sommes reliés à eux par le principe de l'unité du Corps mystique et de la communion des saints ;
4°- Les saints du ciel sont actifs et communiquent avec le Seigneur ;
5°- La prière d'intercession est efficace.

Voudrait-on alléguer encore que c'est l'affaiblissement ou le défaut de Foi qui nous font recourir au patronage et à l'intercession des saints ? L'exemple du centurion nous prouve tout le contraire : "Je vous le dis en vérité, en Israël même je n'ai pas trouvé une si grande foi" (Luc, VII, 9). Et pourtant le centurion ne s'était point cru assez digne pour paraître devant Jésus, et préféra envoyer au-devant de lui quelques anciens d'entre les Juifs.

"Vers lequel des saints te tourneras-tu ?" (Job, V, 1)
________________
Je vois que vous trouvez dans Dt XVI, 10-12 un passage scripturaire propre à interdire toute invocation des saints du Ciel. Ces versets semblent en effet troublants, comme d’ailleurs beaucoup d’autres passages de l’Ancien Testament qui semblent à première vue mal s’accorder avec certaines parties du Nouveau Testament ou certaines pratiques de l’Eglise du Christ. Je crois cependant qu’il est possible de dissiper ce trouble.

Vous savez bien que Jésus-Christ a scellé dans Son sang une Alliance nouvelle et éternelle entre l’humanité et Dieu son Père. La Loi, enseigne saint Paul, était une malédiction (Ga III, 13) ; le Christ Jésus est venu pour nous en délivrer, pour nous conférer l’adoption des enfants de Dieu et nous faire vivre de la grâce, qui a surabondé là où le péché avait abondé. Jésus n’est certes pas venu abolir la Loi, mais la parfaire, l’accomplir (Mt V, 17). Ce passage du livre du Deutéronome qui vous empêche de souscrire à toute forme de communion entre les saints glorifiés au Ciel et ceux encore en pélerinage dans cette vallée de larmes, ce passage, donc, je crois qu’il est l’un de ceux que la Rédemption a dépassé et a rendu caduc en pratique, de même que sont désormais vains les anciens interdits alimentaires de la Loi mosaïque.

Je m’explique.

Nous confessons dans le Symbole des Apôtres que Jésus-Christ, entre sa mort et sa résurrection, est descendu aux enfers, proclamant la bonne nouvelle aux esprits qui y étaient détenus (1 P III, 18-19). Le Christ a souffert sa Passion pour tous les hommes, y compris pour les justes qui l’ont précédés, et qui attendaient sa venue pour être libérés et jouir enfin de la vision béatifique. La Transfiguration en fut comme le prélude, où les âmes bien vivantes de Moïse et d’Elie apparaissent pour converser avec le Verbe incarné en gloire ; elles étaient pourtant prisonnières du « sein d’Abraham » (Lc XVI, 22-26), incapables de voir Dieu et d’avoir la moindre communication avec Dieu ; mais par la grâce de la Transfiguration, elles ont été comme aspirées dans la gloire divine du Christ transfiguré.

Les justes, prisonniers dans le Schéol avant la venue de Jésus-Christ, n’y pouvaient point louer et glorifier le Dieu Un et Trine, privés qu’ils étaient de Sa présence. Privés de Sa vision (Ps VI, 6 ; LXXXVIII, 11-13), ils ne pouvaient pas entendre les demandes d’intercession que les hommes encore en pélerinage sur notre terre pouvaient leur adresser. Car c’est dans la lumière de Dieu que nous pouvons voir la lumière (Ps XXXVI, 10), c’est dans l’essence divine à laquelle les élus participent d’une manière indéfinissable (2 P I, 4), qu’ils peuvent avoir une vision spirituelle des demandes des hommes à leur égard. Ainsi donc, puisque les justes, avant la venue de Jésus-Christ dans les enfers, étaient privés de la vision de Dieu, ils étaient donc incapables d’entendre les prières des hommes à eux adressées.

Voilà qui explique clairement la condamnation portée par Dt XVI, 10-12. Puisqu’avant la venue du Christ nous ne pouvions pas avoir la moindre communications avec les justes du Ciel, ceux qui s’adressaient aux morts ne pouvaient entrer en contact qu’avec les démons. Mais puisque le Christ Jésus est venu délivrer les élus dans les enfers, il est maintenant possible d’être en communion avec eux, ainsi que le professe le Credo : Je crois à la communion des saints...

Par ailleurs, et comme je vous l’ai dit, les catholiques ne remplacent nullement le Christ par les saints. Jésus-Christ est le médiateur unique et parfait entre Dieu le Père et nous les hommes ; les saints participent de la médiation unique et parfaite du Christ, puisque Dieu les rend participants de la nature divine (2 P I, 4) dans la gloire du Ciel. Il s’ensuit très logiquement que, dans la perspective catholique, la médiation participée de Marie et des autres saints n’est nullement une sorte de rempart qui nous sépare de Jésus-Christ. Bien au contraire, nous les considéront plutôt comme des transparences où éclate la Gloire du Christ Sauveur. Par l’exemple de leurs vertus, ils sont des modèles qui s’imposent à notre piété ; par la puissance de leurs prières aux pieds du Trône divin, ils glorifient sans cesse le Dieu Un et Trine.

Ce n’est point rabaisser Jésus-Christ que de s’adresser à Ses élus, c’est bien au contraire glorifier Son oeuvre en eux.
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Vénération des images ou idolâtrie ?

Message non lu par VexillumRegis » mar. 06 déc. 2005, 14:01

**Exode XX, 4 : "Tu ne te feras pas d'image taillée, ni aucune figure de ce qui est en haut dans le ciel, ou de ce qui est en bas sur la terre, ou de ce qui est dans les eaux au-dessous de la terre.."

Pourtant :

**Exode XXV, 18-22 : "Tu feras deux chérubins d'or (...) vous ferez les chérubins sortant du propitiatoire à ses deux extrémités (...) les faces des chérubins seront tournées vers le propitiatoire (...) Là je me rencontrerai avec toi et je te communiquerai, de dessus le propitiatoire, du milieu des deux chérubins qui sont sur l'arche du témoignage, tous les ordres que je te donnerai pour les enfants d'Israël."

**1 Rois VI, 23-35 : "Il fit dans le sancturaire deux chérubins de bois d'olivier sauvage, ayant dix coudées de haut (...) Et Salomon revêtit d'or les chérubins. Il fit sculpter en relief, sur tous les murs de la maison, tout autour, à l'intérieur comme à l'extérieur, des chérubins, des palmiers et des fleurs épanouies (...)"

Ou encore :

**Nb. XXI, 4-9 : "Et Yahweh dit à Moïse: «Fais-toi un serpent brûlant et place-le sur un poteau; quiconque aura été mordu et le regardera, conservera la vie.» Moïse fit un serpent d'airain et le plaça sur un poteau, et, si quelqu'un était mordu par un serpent, il regardait le serpent d'airain, et il vivait."

Si l'on interprète de manière trop littérale Exode XX, 4, il faut admettre qu'il y a une contradiction patente entre les différents passages cités, puisqu'on ne peut faire "aucune figure de ce qui est en haut dans le ciel" (et les chérubins ?) ni aucune représentation ou image "de ce qui est en bas sur la terre" (et le serpent d'airain ?) - Il faut donc bien trouver une autre explication qui satisfasse autant Exode XX, 4 que les autres passages cités.

Voici ma vision des choses.

1°- Il est d'abord interdit d'adorer la représentation elle-même de la divinité, ce qui est le propre de l'idôlatrie.

C'est ce que firent pourtant les Juifs lors de l'épisode du veau d'or :

**Exode XXXII, 1-6 : "Le peuple, voyant que Moïse tardait à descendre de la montagne, s'assembla autour d'Aaron et lui dit : "Allons, fais-nous un dieu qui marche devant nous. Car pour ce Moïse, l'homme qui nous a fait monter du pays d'Égypte, nous ne savons ce qu'il en est devenu." Aaron leur dit: "Otez les anneaux d'or qui sont aux oreilles de vos femmes, de vos fils et de vos filles, et apportez-les-moi." Tout le monde ôta les anneaux d'or qu'ils avaient aux oreilles, et ils les apportèrent à Aaron. Il les reçut de leurs mains fa-çonna l'or au burin, et en fit un veau en fonte. Et ils dirent : "Israël, voici ton Dieu, qui t'a fait monter du pays d'Égypte." Ayant vu cela, Aaron construisit un autel devant l'image, et il s'écria : "Demain il y aura fête en l'honneur de Yahweh." Le lendemain, s'étant levés de bon matin, ils offrirent des holocaustes et présentèrent des sacrifices pacifiques; et le peuple s'assit pour manger et pour boire, puis ils se levèrent pour se divertir."

Le psalmiste résume bien la scène :

**Psaume 106, 19-20 : "Ils firent un veau au mont Horeb, ils se prosternèrent devant une image de métal fondu ; Ils échangèrent leur gloire contre la figure d'un bœuf qui mange l'herbe."

2°- Il est impossible de représenter le Dieu unique et transcendant ; il est donc préférable de s'abstenir de toute image, de peur d'induire les fidèles en erreurs.

Ainsi :

**Deutérome IV, 15-19 : "Puisque vous n'avez vu aucune figure le jour où Yahweh vous parla du milieu du feu en Horeb, prenez bien garde à vos âmes, de peur que vous ne vous fassiez une image taillée, figure de quelque idole, image d'homme ou de femme, toute image d'animal qui vit sur la terre, toute image d'oiseau qui vole dans le ciel, toute image de bête qui rampe sur le sol, toute image de poisson qui vit dans les eaux au-dessous de la terre; de peur que, levant les yeux vers le ciel, et voyant le soleil, la lune et les étoiles, toute l'armée des cieux, tu ne sois attiré à te prosterner devant eux et à leur rendre un culte, eux que Yahweh, ton Dieu, a donnés en partage à tous les peuples qui sont partout sous le ciel."

**Is. 40, 18 : "A qui donc comparerez-vous Dieu, et quelle image lui préparerez-vous ?"

S. Paul met lui-aussi en garde contre l'erreur des païens :

**Rom. I, 23 : "ils ont échangé la majesté du Dieu incorruptible pour des images représentant l'homme corruptible, des oiseaux, des quadrupèdes et des reptiles."

Or les catholiques ne violent en aucune manière ces deux interdits.

1°- Nous avons déjà vu que les catholiques n'adorent pas les images, mais vénèrent en elles ce qui y est représenté. Prenons un exemple qui touchera très certainement les évangéliques : la Bible. En soi, matériellement, ce n'est qu'un livre parmi beaucoup d'autres, avec des pages et de l'encre. En cela rien qui soit honorable. Et pourtant c'est aussi la Parole de Dieu, et là, vu sous cet angle, il est clair qu'il est juste de chérir sa Bible et de la vénérer. Ainsi, si on la fait tomber à terre par mégarde, c'est peu de chose, puisque seul le livre, per se, est atteint ; mais si un impie jette au feu une Bible avec l'intention d'offenser Dieu, tout le monde conviendra que c'est un péché grave. Les catholiques comme les orthodoxes ont un rapport identique avec les saintes images.

2°- Les catholiques ne violent pas non plus la deuxième interdiction. Les Juifs ne pouvaient représenter le Dieu infini et transcendant, mais pour nous, Dieu s'est fait homme, et l'on peut donc le représenter sous sa forme humaine.

**S. Jean Damascène (de fide orthodoxa) exprime ainsi les raisons de l'interdiction juive : "Qui pourrait représenter Dieu qui ne tombe point sous le sens de la vue, qui n'a pas de corps, qui ne peut être limité en aucune manière, ni dépeint par aucune figure ?" - Et, dans un autre ouvrage il donne la réponse chrétienne au dilemne juif : "Autrefois Dieu, qui n'a ni corps, ni figure, ne pouvait absolument pas être représenté par une image. Mais maintenant qu'Il s'est fait voir dans la chair et qu'Il a vécu avec les hommes, je peux faire une image de ce que j'ai vu de Dieu (...) Le visage découvert, nous contemplons la gloire du Seigneur.

**Matthieu V, 17 : "Ne pensez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes; je ne suis pas venu abolir, mais parfaire."

Les évangéliques pourraient objecter que nous ne nous contentons pas de représenter le Christ, mais aussi Dieu le Père et le Saint-Esprit. Voici la réponse catholique :

**Catéchisme Romain, III, 29, 6 : "Cependant il ne faudrait pas croire qu’on pèche contre la Religion et la Loi de Dieu, lorsqu’on représente quelqu’une des trois Personnes de la Sainte Trinité par certaines figures sous lesquelles elles apparurent dans l’Ancien et dans le nouveau testament. Nul n’est assez ignorant pour croire que ces images soient l’expression réelle de la Divinité. Le Pasteur aura soin de déclarer qu’elles servent seulement à rappeler certaines propriétés et certaines opérations qu’on attribue à Dieu. C’est ainsi que le Prophète Daniel (VII, 9) le dépeint « comme un vieillard (l’ancien des jours) assis sur un trône avec des livres ouverts devant Lui. » Il voulait par là nous représenter son Eternité et cette Sagesse infinie qui considère toutes les pensées et toutes les actions des hommes pour les juger. (...) La colombe et les langues de feu qui figurent le Saint-Esprit dans l’Evangile et les Actes des Apôtres indiquent des attributs qui lui sont propres, et qui sont trop familiers à tout le monde pour qu’il soit nécessaire de nous y arrêter plus longtemps."
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Du Baptême des enfants (1) - Les fondements scripturaires

Message non lu par VexillumRegis » mar. 06 déc. 2005, 14:03

Quelques notes rapides.

1°- La promesse du Seigneur est pour tous, y compris pour les enfants : "Pierre leur dit : "Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ pour la rémission de vos péchés, et vous recevrez le don du Saint-Esprit, car la promesse est pour vous, et pour vos enfants, et pour tous ceux qui sont au loin, en aussi grand nombre que le Seigneur notre Dieu les appelera" (Actes II, 38-39).

2°- Plusieurs passages font mention du baptême de familles entières :

- Actes X, 24, 48 : "Corneille les attendait, et il avait convoqué ses parents et ses amis intimes (...) Et il (Pierre) commanda de les baptiser au nom de Jésus-Christ."

- Actes XVI, 15 : " Quand elle eut été baptisée, ainsi que sa maison, elle (nous) adressa cette prière (...)".

- Actes XVI, 33 : "Les prenant à cette même heure de la nuit, il lava leurs plaies, et aussitôt il fut baptisé, lui et tous les siens."

- 1 Cor. I, 16 : "J'ai encore baptisé la famille de Stéphanas; du reste, je ne sache pas que j'ai baptisé personne d'autre."

Si les enfants n'apparaissent pas explicitement dans ces passages, ils n'en sont pas non plus exclus. Origène (185-253), dans ses Commentaires des Romains (V, 9) affirme que la tradition que suit l'Eglise en baptisant les enfant vient des apôtres. Cette tradition est attestée historiquement dès le IIème siècle de notre ère.

3°- Jésus-Christ nous a ordonné de ne point empêcher les enfants de venir à lui : "Laissez les petits enfants venir à moi, et ne les en empêchez pas (...)" - Leur refuser le baptême, qui les incorpore au Christ, n'est-ce pas là une attitude contraire au commandement du Seigneur ?

4°- Les enfants naissent aussi avec la souillure originelle qui trouve son origine dans le péché d'Adam (Rom. V, 12-21) - Ils doivent donc eux aussi être purifiés de cette tache dans les eaux du baptême.

5°- La circoncision était une figure du baptême (Col. II, 11-13). Or elle était pratiquée sur les petits enfants, le huitième jour après leur naissance (Gen. XVII, 12-14). Donc on peut baptiser les petits enfants.

6°- Matthieu XIX, 13 : "Alors on lui amena de petits enfants pour qu'il leur imposât les mains et priât (pour eux)" - Or l'imposition des mains est un signe sacramentel signifiant l'effusion de l'Esprit-Saint (Actes VIII, 14-17 ; Actes VI, 2-6) - Donc si Jésus impose les mains aux petits enfants, c'est pour qu'ils reçoivent le Saint-Esprit, où tout au moins le sceau de l'Esprit, appelé à grandir avec la foi personnelle de l'Enfant. Il en est de même lors du baptême : la foi de l'Eglise supplée la foi du petit enfant pour imposer le sceau de l'Esprit dans la rémission des péchés ; la foi personnelle de l'enfant qui grandit doit développer la grâce reçut en germe dans le baptême.
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1°- Je crois d’abord qu’il est nécessaire de replacer dans son contexte le baptême tel qu’il est pratiqué et décrit dans le Nouveau Testament. Il s’agit de la toute première période de la prédication apostolique. Les apôtres, noyés dans une masse de peuple incrédule, tentent de convaincre leur auditoire de la vérité de la foi en Jésus-Christ. Par la parole, par des miracles divers et variés aussi. Ils s’adressent bien entendu à des personnes adultes, car, en admettant qu’ils aient eu l’intention de baptiser les enfants (ce qui n‘est pas en effet clairement attesté), encore fallait-il que les parents de ces enfants soient déjà eux-mêmes convertis ! Il n’est donc pas étonnant que les apôtres ne fassent nulle part mention du baptême des enfants, ni pour le pratiquer, ni pour l’interdire : ils n’en sont tout simplement pas encore là ! - Il faut d’ailleurs souligner que les Églises qui pratiquent le baptême des enfants (et elles sont nombreuses...) ne rejettent absolument pas ce schéma néo-testamentaire du baptême, c’est-à-dire le triptyque : prédication/conversion/baptême, bien au contraire ! Il reste pleinement valide pour les adultes qui ont entamé une démarche en vue de recevoir le baptême (c’est mon cas), ou, plus rarement, lorsqu’il s’agit de prêcher l’Évangile dans des contrées où la majorité de la population ne connaît pas le christianisme - Mais ces Églises ont aussi du s’adapter à une situation qui est inconnue au Nouveau Testament : celle où la majeure partie de la population adulte est déjà chrétienne et baptisée. C’est à ce moment que le baptême des enfants a été généralisé : la prédication est alors transférée après le baptême, ce qui suppose un catéchuménat post-baptismal (d’où aussi le rôle traditionnel du parrain et de la marraine, chargés de guider, avec les parents, la croissance de l’enfant dans la foi). Il est vrai que cette nécessité de l’éducation chrétienne post-baptismale (Eph. VI, 4 : Élevez-les en les corrigeant et en les instruisant selon le Seigneur) est généralement négligée de nos jours, mais comme on dit, abusus non tollit usum, l'abus de supprime pas l'usage !

2°- Il me semble que l’insistance unilatérale des anti-pédobaptistes sur la conversion et la foi personnelles qui doivent nécessairement précéder le baptême constitue une sorte de négation du don de la grâce qui précède la foi. Car sans la grâce de Dieu nous ne pourrions pas avoir la foi. Le baptême des enfants est une merveilleuse et éclatante manifestation de la pure gratuité du salut ; il met magnifiquement en relief la grâce prévenante du Christ, pour qui l'âge et la conscience claire n'ont pas la même importance que pour nous. Nous avons toujours tendance à oublier ce don initial. S. Augustin quant à lui avait une vive conscience de cette antécédence de la grâce : Tu (Dieu) nous as cherchés sans que nous te cherchions, mais tu nous as cherchés pour que nous te cherchions (Confessions, XI, 2, 4). Car le baptême, avant d’être le sacrement de la foi, est avant tout un don de la miséricorde de Dieu : il nous a sauvés, non à cause des oeuvres de justice que nous faisions, mais selon sa miséricorde, par le bain de la régénération et en nous renouvelant par le Saint-Esprit (Tite III, 5).

3°- La foi requise pour le baptême n’est pas une foi parfaite et mûre, mais un début appelé à se développer. Chez tous les baptisés, enfants ou adultes, la foi doit croître après le baptême. Car la foi n’est pas une vertu que l’on acquiert seul et pour toujours. La foi est d’abord un don, un don de Dieu, bien sûr, mais aussi un don de l’Eglise, qui a en charge le dépôt de la foi. On ne croit pas tout seul, on croit dans une communauté de foi, la communauté ecclésiale. Il faut distinguer la foi en tant qu’état et la foi en tant qu’action. Les enfants sont-ils réellement dépourvus de toute foi ? Peut-être au sens rationnel et visible, oui, sans doute. Mais certains passages bibliques peuvent laisser entendre que même les petits enfants ont reçu la grâce d’une intelligence innée de la foi : Mais celui qui scandalisera un de ces petits qui croient en moi (...) (Mt XVIII, 6 - cf. aussi Mt XXI, 16). Notre Seigneur prend lui-même les enfants en exemple : Je vous le dis, en vérité, si vous ne changez et ne devenez comme les enfants, vous n'entrerez point dans le royaume des cieux. Celui donc qui se fera humble comme ce petit enfant est le plus grand dans le royaume des cieux. Et celui qui reçoit en mon nom un enfant comme celui-ci, c'est moi qu'il reçoit (Mt XVIII, 3-5) ; car les enfants ne sont-ils pas beaucoup plus aptes à la vraie foi chrétienne que les adultes avec leurs raisonnements, leurs contestations et leurs doutes ? - Dans tous les cas, l’Eglise a toujours enseigné que lors du baptême, la foi de l’Eglise peut se substituer à la foi personnelle de l’enfant ; elle sert à l’enfant par l’opération du Saint-Esprit qui fait l’unité de l’Eglise et par qui les biens de chacun sont communs à tous les autres : Les petits enfants sont présentés pour recevoir la grâce spirituelle, non pas tellement par ceux qui les portent dans leurs bras (quoique ce soit aussi le cas s'ils sont de bons fidèles) que par la société universelle des saints et des fidèles [...] C'est la Mère Église tout entière, celle qui est dans ses saints, qui agit, car c'est elle qui tout entière les enfante, tous et chacun (S. Augustin, Epist. 98, 5). Cette doctrine met bien en valeur le caractère ecclésial de la foi. Que la foi d’une personne puisse se substituer et sauver une autre personne incapable d’une foi personnelle, on peut d’ailleurs le déduire de certains passages des Écritures : voir Mc V, 22-43 et Mc IX, 17-27.

4°- Jean III, 5 : En vérité, en vérité, je te le dis, nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce commandement du Seigneur, formel et clair, ne souffre aucune exception. Car puisque par la génération de la chair nous avons tous contracté la souillure issue du péché d’Adam, nous avons tous besoin d’être régénéré par l’eau et l’Esprit. Car la mort est venue par Adam, et c’est par Jésus-Christ qu’elle est vaincue (1 Cor. XV, 21). C’est par le baptême que nous sommes ensevelis avec Jésus-Christ pour renaître avec lui à une vie nouvelle (Rom. VI, 3 ; Col. II, 12) ; le baptême est le gage de notre résurrection future. Comment une enfant mort sans baptême avant d’avoir atteint l’âge de raison pourrait-il être sauvé, lui qui n’a pas été configuré à la mort et à la résurrection du Christ ? Dieu veut que tous les hommes soient sauvés (1 Tim. II, 3-4), mais il n’y a pas de salut hors de Jésus-Christ (Actes IV, 12) : les anti-pédobaptistes enseignent aussi cette doctrine biblique, et pourtant ils refusent aux enfants d’être configurés à la résurrection du Christ, seul gage de la vie éternelle, et ce malgré le commandement formel de Jean III, 5 : En vérité, en vérité, je te le dis, nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu et, plus précisément encore : De même, n'est-ce pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux, qu'il ne se perde pas un seul de ces petits ? (Mt XVIII, 14) Contradiction inacceptable !

5°- J’ai déjà établi un parallèle intéressant (déjà dans S. Paul) entre la circoncision et le baptême. Comme l’écrit si justement Paul, Abraham reçut ensuite le signe de la circoncision comme sceau de la justice qu'il avait obtenue par la foi quand il était incirconcis (Rom. IV, 9). Ainsi la circoncision, fondement de l’Ancienne Alliance, est d’abord le résultat d’un acte de foi personnel, avant d’être imposé par la suite à tous les nouveaux nés le huitième jour après leur naissance (Gen. XVIII, 12-14), signe de l’alliance entre Dieu et son peuple. Il en est de même du baptême, signe de l’Alliance Nouvelle : d’abord sceau de la justice obtenue par la foi, il a ensuite été généralisé à tous les enfants comme gage de l’Alliance entre Dieu et son peuple. Car la foi ecclésiale, la foi du peuple de Dieu précède la foi de la personne et la fonde.

6°- Je termine enfin par une question très simple qu’il me semble important de poser à tous ceux qui rejettent le baptême des enfants : les Églises d’origine apostolique (catholique et orthodoxe) et les Églises historiques issues de la Réforme (luthérienne, réformée, anglicane) défendent et pratiquent le baptême des enfants : pourquoi vous acharnez-vous à rejeter une doctrine approuvée par toute l’histoire de l’Eglise et par une écrasante majorité des chrétiens d’aujourd’hui ? Il me semble que les évangéliques eux-mêmes sont divisés sur cette question : peut-on me le confirmer ?

J’indique enfin mes deux sources principales :

L’instruction Pastoralis Actio sur le baptême des enfants, de la Congrégation pour la doctrine de la foi (1980)

L’étude du docteur luthérien Wilbert Kreiss
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Du Baptême des enfants (2) - Les Pères et le Magistère

Message non lu par VexillumRegis » mar. 06 déc. 2005, 14:04

Quelques Pères de l’Église

Martyre de Polycarpe (environ 82-168), IX, 3 : Polycarpe répondit : "Il y a quatre-vingt six ans que je le sers [le Christ], et il ne m'a fait aucun mal ; comment pourrais-je blasphémer mon roi qui m'a sauvé ?" - Évêque de Smyrne, Polycarpe a été martyrisé en 168. [S’il est serviteur du Christ depuis 86 ans (âge de sa mort), c’est qu’il a vraisemblablement reçu le baptême dans sa petite enfance].

Justin, Première apologie, XV, 6 : Beaucoup d'hommes et de femmes, âgés de soixante ou soixante-dix ans, qui sont depuis leur enfance disciples du Christ - Justin a été martyrisé en 167, sous l’Empereur Marc-Aurèle.

S. Irénée, Adv. Haer., II, 22, 4 : Jésus est venu en effet sauver par lui-même tous les hommes: tous ceux, dis-je, qui par lui sont renés en Dieu, nourrissons, tout-petits, enfants, jeunes gens et personnes âgées. - S. Irénée (environ 140-200) a été évêque de Lyon ; il a combattu les sectes gnostiques dans son célèbre ouvrage Réfutation et destruction de la fausse gnose.

Hippolyte de Rome, Tradition apostolique : On baptisera en premier lieu les enfants ; tous ceux qui peuvent parler pour eux-mêmes parleront; quant à ceux qui ne le peuvent pas, leurs parents parleront pour eux ou quelqu'un de leur famille. - On sait peu de choses d’Hippolyte. Prêtre romain d’origine orientale, il serait mort martyr en 235 - Sa Tradition apostolique est une oeuvre très importante, riche en informations de caractère disciplinaire et liturgique.

Origène, Commentaire de l'épître aux Romains, V, 9 : C'est pour cela que l'Église a reçu des apôtres la tradition d'administrer le baptême même aux parvuli (N.B. mot latin qui désigne les petits enfants). Car les hommes à qui fut transmis le secret des mystères divins savaient qu'il y avait en tous de véritables souillures dues au péché, qui devaient être effacées par l'eau et par l'Esprit. - Origène (185-253), auteur de nombreux commentaires bibliques, a été martyrisé durant la persécution de l’empereur Dèce.

Origène, Homélies sur Luc, XIV, 5 : A ce propos je veux encore dire un mot sur une question fréquemment soulevée parmi les frères. Les paidia (mot grec qui signifie "les enfants") sont baptisés pour le pardon des péchés. Desquels ? Quand ont-ils donc péché ? En fait, jamais. Et pourtant, "personne n'est pur de souillure" (même s'il n'a qu'un jour, Job 14 : 4s). C'est cette souillure qu'on enlève par le mystère du baptême. Voilà la raison pour laquelle on baptise aussi les paidia.

Origène, Homélies sur le Lévitique, VIII, 3 : On se demande pourquoi le baptême de l'Église qui est donné pour la rémission des péchés, est aussi, suivant la coutume de l'Église, administré aux petits enfants ; or, s'il n'y avait rien en eux qui réclamât rémission et pardon, la grâce baptismale apparaîtrait superflue.

Tertullien, De baptismo, XVIII, 3 ; XIX, 1 : Au reste, eu égard à l'état, à la disposition et à l'âge, il est plus expédient de différer le baptême que de le donner d'abord surtout aux petits enfants; car pourquoi, s'il n'y a pas de nécessité pressante, exposer les parrains à un très grand péril ? Ceux-ci peuvent mourir, par conséquent ils ne peuvent acquitter leurs promesses ; s'ils vivent, le mauvais naturel des enfants peut tromper leurs espérances.

Il est vrai que notre Seigneur a dit au sujet des enfants : "Ne les empêchez pas de venir à moi." Qu'ils viennent donc lorsqu'ils seront plus avancés en âge ; qu'ils viennent lorsqu'ils seront en état d'être instruits, afin qu'ils connaissent leurs engagements. Qu'ils commencent par savoir Jésus-Christ, avant que de devenir chrétiens. Pourquoi tant presser de recourir à la rémission des péchés un âge encore innocent ? Les hommes du siècle en usent avec plus de précaution ; ils n'osent confier l'administration des biens terrestres à des enfants auxquels cependant on se hâte de distribuer les biens du ciel. Que les enfants apprennent donc à demander le salut, afin qu'il paraisse qu'on n'accorde qu'à ceux qui demandent
. - Tertullien (vers 155-222) est le seul auteur ecclésiastique de l’antiquité à rejeter le baptême des enfants.

S. Cyprien, Lettre 64 : Pour ce qui regarde les enfants, vous disiez qu'on ne devait pas les baptiser le deuxième ou le troisième jour, mais qu'il fallait prendre modèle sur la loi antique de la circoncision, par conséquent ne pas baptiser et sanctifier le nouveau-né avant le huitième jour. Notre assemblée en a pensé tout autrement. La façon d'agir que vous préconisiez n'a rallié aucun suffrage, et nous avons tous été d'avis qu'il ne fallait refuser à aucun homme arrivant à l'existence la Miséricorde et la Grâce de Dieu. Le Seigneur dit dans l'évangile : "Le fils de l'homme n'est pas venu pour perdre les âmes des hommes, mais pour les sauver". (Lc 9,56). Autant donc qu'il est en nous, nous ne devons, si c'est possible, perdre aucune âme. Que manque-t-il, en effet, à celui que les Mains de Dieu ont formé dès le sein de sa mère ? A nos yeux, il semble que ceux qui arrivent à l'existence croissent avec les jours d'ici bas. En réalité, ce qui est fait par Dieu est parfait, en raison de la majesté et de l'opération divine de l'auteur.

Bref, que tous, tout petits enfants ou personnes plus âgées, reçoivent également le don divin, c'est ce que la divine Écriture nous montre, quand elle nous représente Elisée s'étendant, en priant Dieu, sur l'enfant de la veuve qui était mort, tête contre tête, face contre face, en sorte que les membres du prophète allongé sur l'enfant correspondaient exactement à ses membres et les pieds de l'un aux pieds de l'autre. Si on examine la chose d'après la nature et le corps humain, un enfant ne peut avoir les mêmes dimensions qu'un adulte; de petits membres ne peuvent s'adapter exactement à de plus grands. Mais ce qui est exprimé la, c'est l'Égalité divine et spirituelle, suivant laquelle tous les hommes sont de même taille et de même âge; et il n'est possible d'établir des différences d'âge et de développement corporel qu'au regard de l'homme et non de Dieu : à moins qu'il ne faille dire que la grâce même, qui est accordée aux baptisés, est moindre ou plus grande suivant l'âge de ceux qui la reçoivent. Mais non. L'Esprit saint est donné également à tous, non d'après une mesure proportionnelle, mais d'après une bonté et une bienveillance paternelle. Car Dieu ne fait pas plus acception d'âge que de personne, mais il est pour tous, dans la distribution de la grâce céleste, un Père qui partage également.

Mais vous ajoutez que le pied d'un enfant aux premiers jours après sa naissance n'est point pur, et que chacun redoute de le baiser : cela non plus ne doit point être un obstacle à ce qu'on lui confère la grâce divine. Il est écrit en effet : "Tout est pur à qui est pur". (Tite 1,15). Et personne ne doit avoir horreur de ce que Dieu a daigné faire. L'enfant sans doute est de naissance récente; il n'est point tel cependant que l'on doive, quand on lui donne la grâce et la paix, avoir horreur de le baiser, puisque chacun de nous, en baisant cet enfant, doit penser, conformément à nos croyances, aux Mains de Dieu dont il vient de sortir, et que nous baisons en quelque manière en cet être humain récemment formé et venu à la lumière, puisque nous embrassons l'oeuvre de Dieu. Quant à ce fait que la circoncision juive se faisait le huitième jour, c'était là un symbole et comme une esquisse, une figure, qui devait être accomplie à la Venue du Christ. Car, comme le huitième jour, c'est-à-dire le premier après le jour du sabbat, devait être celui où le Seigneur ressuscitait, nous rendrait la vie, et nous donnerait la circoncision spirituelle, ce huitième jour, c'est à-dire le premier après celui du sabbat, le jour du Seigneur, a précédé comme une image préfigurant l'avenir. Cette figure a cessé quand la vérité est venue, et nous a été donnée avec la circoncision spirituelle.

C'est pourquoi, nous ne croyons pas qu'il faille empêcher personne de recevoir la grâce d'après la loi qui a été établie; nous pensons que la circoncision spirituelle ne doit pas être empêchée par la circoncision charnelle, mais qu'il faut admettre tout homme à la grâce du Christ, puisque aussi bien Pierre dit dans les Actes des Apôtres : "Le Seigneur m'a dit qu'aucun homme ne devait être appelé souillé et impur". (Ac 10,28 ). Au surplus, si l'homme, quand il s'agit d'obtenir la grâce, pouvait en être empêché par quelque chose, ce seraient surtout les adultes et les personnes âgées qui pourraient en être empêchés par des fautes graves. Eh bien, les plus grands coupables, après avoir péché gravement contre Dieu, lorsqu'ils arrivent à la foi, obtiennent la rémission de leurs fautes : personne n'est privé du baptême et de la grâce. A combien plus forte raison un enfant n'en doit-il pas être privé, qui, étant né depuis peu de temps, n'a commis aucune faute; il a contracté seulement à sa première naissance, comme descendant d'Adam, le virus mortel de l'antique contagion; il arrive d'autant plus facilement à obtenir la rémission des péchés, que les péchés qu'on lui remet ne sont pas les siens, mais ceux d'autrui.


S. Jean Chrysostome, Catechesis III, 5-6 : 5. Dieu soit béni, répétons-le, lui seul qui fait des merveilles, lui qui fait toutes choses et les renouvelle. Ceux qui hier étaient captifs, sont aujourd’hui des hommes libres et citoyens de l’Église. Ceux qui naguère étaient dans la honte du péché, sont maintenant dans l’assurance et la justice. Ils sont non seulement libres, mais saints ; non seulement saints, mais justes non seulement justes, mais fils ; non seulement fils, mais héritiers ; non seulement héritiers, mais frères du Christ ; non seulement frères du Christ, mais ses cohéritiers ; non seulement ses cohéritiers, mais ses membres ; non seulement ses membres, mais des temples ; non seulement des temples, mais des instruments de l’Esprit.

6. Dieu soit béni ! Lui qui seul fait des merveilles ! "Tu as vu en quel nombre sont les bienfaits du baptême ? Alors que beaucoup croient qu’il a pour unique bienfait la rémission des péchés, nous avons compté jusqu’à dix honneurs conférés par lui. C’est pour cette raison que nous baptisons même les petits enfants, bien qu’ils n’aient pas de péchés, pour que leur soit ajouté la justice, la filiation, l’héritage, la grâce d’être frères et membres du Christ, et de devenir la demeure du Saint-Esprit
.- S. Jean Chrysostome (345-407) a été évêque de Constantinople de 397 à 404.

S. Augustin, De Genesi ad litteram, X, XXIII, 39 : Après cette discussion, telle que nous l'ont permise et le temps et nos forces, je conclurais que les raisonnements et les témoignages de l'Écriture ont une valeur égale ou presque égale dans les deux hypothèses, si la coutume où est l’Église de baptiser les petits enfants, ne me faisait pencher en faveur de l'opinion selon laquelle les âmes émanent de celles des parents; je ne vois aucune réponse à faire à cette opinion sur ce point; si Dieu m'envoie ensuite quelque lumière, s'il accorde même la grâce d'écrire aux docteurs qui se préoccupent- de ces questions, je le verrai avec plaisir. Aujourd'hui toutefois je déclare que l'argument tiré du baptême des petits enfants est très sérieux, afin qu'on s'occupe de le réfuter, s'il est faux. Car, ou nous devons abandonner cette question et croire qu'il suffit pour la foi de savoir le but où nous conduira une vie pieuse, sans connaître notre origine; ou l'âme intelligente est portée avec ardeur à sonder un problème qui la touche : alors, mettons de côté toute obstination dans le débat; faisons nos recherches avec conscience, demandons avec humilité, frappons avec persévérance. Si cette connaissance nous est utile, Celui qui sait mieux que nous ce qu’il nous faut nous l'accordera, lui qui donne ce qui leur est bon à ses enfants (1 Jean III, 6). Toutefois l'usage où l'Église, notre mère, est de baptiser les enfants, doit être pris en sérieuse considération : il ne faut ni le regarder comme inutile, ni croire qu'il n'est pas une tradition des Apôtres. Cet âge tendre offre un argument d'autant plus sérieux, que le premier il a eu le bonheur de verser son sang pour le Christ.

S. Augustin, De peccatorum meritis et remissione et de baptismo parvulorum, lib. I, XXIII, 33 : Ceux mêmes qui n'ont aucun péché personnel à raison de leur âge, ont contracté déjà ce péché originel, ils sont ainsi par nature enfants de colère ; et de cette colère, de cette maladie, de ce péché, nul n'est affranchi que par l'Agneau de Dieu qui efface les péchés du monde (Jean I, 29) ; que par le médecin qui n'est pas venu pour les hommes bien portants, mais pour les malades, que par le Sauveur dont la venue a été annoncée au genre humain en ces termes : « Il vous est né aujourd'hui un Sauveur (Luc II, 11) » ; que par le Rédempteur dont tout le sang efface notre dette. Car, qui oserait dire que Jésus-Christ ne soit pas le Sauveur et le Rédempteur des enfants ? Et de quoi les sauve-t-il, s'il ne trouve en eux aucune maladie de péché originel ? Comment les rachète-t-il, s'ils n'ont pas été vendus au péché, rien que par leur naissance du premier homme ? N'allons donc pas, à notre fantaisie, promettre aux enfants aucune sorte de salut éternel en dehors du baptême de Jésus-Christ ; la divine Écriture, qui ne fait point semblable promesse, doit être préférée à tout esprit humain.

Saint Augustin, Contre la deuxième réponse de Julien, pélagien, I, 50 : Si tu adores le Dieu des patriarches, pourquoi ne crois-tu pas que la circoncision faite le huitième jour, et dont le précepte fut donné à Abraham, figurait d'avance la régénération qui se fait en Jésus-Christ ? Si tu croyais cette vérité , tu comprendrais que l'âme d'un enfant, à moins qu'elle ne fût souillée de quelque péché, ne pouvait être avec justice bannie du milieu de son peuple, quand cet enfant n'avait pas été circoncis le huitième jour (2). Si tu adores le Dieu des patriarches, pourquoi ne crois-tu pas ce que ce Dieu a dit si souvent par leur bouche : « Je vengerai sur les enfants les péchés de leurs pères (3)? » Si tu adores le Dieu des Apôtres, pourquoi ne crois-tu pas que le corps est mort à cause du péché (4) ? Si tu adores le Dieu en qui a espéré et en qui espère l'Eglise des premiers-nés dont les noms sont inscrits dans les cieux, pourquoi ne crois-tu pas que les enfants, sur le point d'être baptisés, sont arrachés à la puissance des ténèbres (5), puisque l'Eglise fait sur eux des insufflations et des exorcismes, afin précisément d'expulser de leurs âmes la puissance des ténèbres ?

1. I Tim. VI, 16. — 2. Gen. XVII, 12-14. — 3. Exod. XXXIV, 7 ; Jér. XXXII, 18. — 4. Rom. VIII, 10. — 5. Coloss. I, 13.

S. Augustin, Lettre CLXVI à S. Jérôme, 6 : Je demande donc où l'âme contracte le péché par suite duquel elle tombe dans la damnation à laquelle n'échappe pas l'enfant lui-même qui meurt sans que la grâce du Christ lui vienne en aide par le baptême. Car vous n'êtes pas de ceux qui, débitant des nouveautés, s'en vont disant qu'il n'y a pas de péché originel dont l'enfant soit délivré par le baptême.

S. Augustin, Epist. 98, 5 : Les petits enfants sont présentés pour recevoir la grâce spirituelle, non pas tellement par ceux qui les portent dans leurs bras (quoique ce soit aussi le cas s'ils sont de bons fidèles) que par la société universelle des saints et des fidèles [...] C'est la Mère Église tout entière, celle qui est dans ses saints, qui agit, car c'est elle qui tout entière les enfante, tous et chacun.

Le Magistère de l'Eglise

Pape Sirice (384-399), Lettre Directa ad decessorem à l'évêque Himère de Tarragone, 10 février 385 - Dz 184 : Sans vouloir cependant amoindrir le respect sacré qui s'attache à Pâques, Nous prescrivons d'administrer sans délai le baptême aux enfants qui, du fait de leur âge, ne peuvent pas encore parler, ou aux personnes qui se trouvent dans une nécessité quelconque de recevoir le saint baptême, de peur qu'il ne s'ensuive un détriment pour nos âmes si, par suite de notre refus de la fontaine du salut à ceux qui le désiraient, certains mourants venaient à perdre le Royaume et la vie. Quiconque de même se trouve menacé d'un naufrage, d'une invasion ennemie, ou de quelque maladie mortelle, qu'il soit admis, aussitôt qu'il le demande, au bénéfice de la régénération sollicitée. L'erreur jusqu'ici dans ce domaine doit suffire ; à présent que tous les prêtres s'en tiennent à la règle susdite, s'ils ne veulent pas être arrachés à la solidité du roc apostolique sur lequel le Christ a construit toute l'Eglise.

Pape Innocent Ier, Lettre Inter ceteras Ecclesiae Romanae à Silvanus et aux autre pères du concile de Milève, 27 janvier 417 - Dz 219 : (...) que les petits enfants peuvent, même sans la grâce du baptême, jouir des récompenses de la vie éternelle, cela est stupide au plus haut point. Si, en effet, ils ne mangent pas la chair du Fils de l'homme et ne boivent pas son sang, ils n'auront pas la vie en eux (voir Jean VI, 53). Ceux qui soutiennent que ces enfants l'auront sans être renés, me paraissent vouloir rendre vain le baptême lui-même, en prêchant qu'ils ont ce que la foi professe ne pouvoir leur être conféré que par le baptême. Si donc, comme ils le veulent, il n'y a aucune fâcheuse conséquence à ne pas renaître, il leur faut aussi professer que les saintes eaux de la nouvelle naissance ne servent à rien. Mais, la vérité peut avoir rapidement raison de la doctrine erronée de ces hommes vains avec les paroles que le Seigneur dit dans l'Évangile : Laissez venir à moi les petits enfants et ne les empêchez pas ; car c'est à leurs pareils qu'appartient le Royaume des cieux. (voir Mt XIX, 14 ; Mc X, 14 ; Lc XVIII, 16).

16ème concile de Carthage (418), canon 2 - Dz 223 : Il a été décidé de même : Quiconque nie que les tout-petits doivent être baptisés, ou dit que c'est pour la rémission des péchés qu'on les baptise, mais qu'ils n'ont rien, eux, du péché originel d'Adam que le bain de la régénération aurait à expier, ce qui a pour conséquence que pour eux la formule du baptême "en rémission des péchés" , n'a pas un sens vrai mais faux, qu'il soit anathème. Car on ne peut pas comprendre autrement ce que dit l'Apôtre : Par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et par le péché, la mort, et ainsi la mort a passé dans tous les hommes, tous ayant péché en lui (Rom. V, 12) sinon de la manière dont l'Église catholique répandue par toute la terre l'a toujours compris. C'est en effet à cause de cette règle de foi que même les tout-petits, qui n'ont pas pu commettre encore par eux-mêmes quelque péché, sont cependant vraiment baptisés en rémission des péchés pour que la régénération purifie en eux ce que la génération leur a apporté.

Concile de Vienne (1311-1312) - Dz 904 : Au vrai, en ce qui concerne l'effet du baptême chez les enfants, il se trouve des théologiens qui ont eu des opinions contraires, certains affirmant que, par l'efficacité du baptême, la faute était remise aux enfants, mais que la grâce ne leur était pas conférée ; d'autres au contraire que, par le baptême, la faute leur était remise et que les vertus et la grâce informante leur étaient infusées à l'état d'habitus. Considérant l'efficacité générale de la mort du Christ, qui est également appliquée à tous les baptisés par le baptême, Nous avons décidé que la deuxième opinion, qui affirme que la grâce informante et les vertus sont conférées aux enfants comme aux adultes par le baptême, doit être retenue comme plus probable et conforme aux affirmations des saints et des docteurs modernes en théologie.

Concile de Florence (1442) - Dz 1349 : Au sujet des enfants, en raison du péril de mort qui peut souvent se rencontrer, comme il n'est pas possible de leur porter secours par un autre remède que par le sacrement du baptême, par lequel ils sont arrachés à la domination du diable et sont adoptés comme enfants de Dieu, elle avertit qu'il ne faut pas différer le baptême pendant quarante ou quatre-vingts jours ou une autre durée, comme font certains, mais qu'il doit être conféré le plus tôt qu'il sera commodément possible, mais de telle sorte que, s'il y a péril de mort immédiat, ils soient baptisés sans aucun délai, même par un laïc ou une femme, dans la forme de l'Église, si un prêtre fait défaut, comme il est contenu plus complètement dans le décret des Arméniens.

Concile de Trente, Décret sur le péché originel, 17 juin 1546 - Dz 1514 : Si quelqu'un nie que les tout-petits, qui viennent de naître de leur mère, doivent être baptisés", même s'ils viennent de parents baptisés. "ou bien dit qu'ils sont certes baptisés pour la rémission des péchés, mais qu'ils ne portent rien du péché originel venant d'Adam qu'il est nécessaire d'expier par le bain de régénération" pour obtenir la vie éternelle," d'où il suit que pour eux la forme du baptême pour la rémission des péchés n'a pas un sens vrai, mais faux : qu'il soit anathème. Car on ne peut pas comprendre autrement ce que dit l'Apôtre : Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché, la mort, et ainsi la mort a passé dans tous les hommes, tous ayant péché en lui (Rom. V, 12) si ce n'est comme l'a toujours compris l'Église catholique répandue en tous lieux. C'est en effet à cause de cette règle de foi venant de la tradition des apôtres "que même les tout-petits, qui n’ont pas encore pu commettre aucun péché par eux-mêmes, sont pourtant vraiment baptisés pour la rémission des péchés, afin que soit purifié en eux par la régénération ce qu'il ont contracté par la génération". En effet nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit Saint, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu (Jean III, 5)

Ibid. , Décret sur les sacrements, 3 mars 1547, canon 13 sur le sacrement du baptême - Dz 1626 : Si quelqu'un dit que les petits enfants, par le fait qu'ils ne font pas acte de foi, ne doivent pas être comptés parmi les fidèles, après qu'ils ont reçu le baptême, et que, pour cette raison, ils doivent être rebaptisés quand ils sont arrivés à l'âge de discrétion, ou qu'il est préférable d'omettre leur baptême plutôt que de les baptiser dans la seule foi de l'Église, eux qui ne croient pas par un acte personnel de foi : qu’il soit anathème.
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Du Baptême des enfants (3) - Deux citations de Luther

Message non lu par VexillumRegis » mar. 06 déc. 2005, 14:05

Luther, dans son Sermon pour le Dimanche de la Trinité , écrit à propos de Jean III, 3-5 : "Prenons à cœur ce passage, en particulier contre les aveugles que sont les Anabaptistes, qui considèrent le baptême des enfants comme inefficace et stérile. Comment pourrait-il l'être, si le Christ nous dit que son eau est là pour régénérer par l'activité du Saint-Esprit ? S'il faut que les enfants soient régénérés, qu'autrement ils ne peuvent voir le royaume des cieux, pourquoi ne devrions-nous pas les baptiser ? Qu'est-ce qui nous autorise à affirmer que l'eau administrée par suite d'un commandement de Dieu et unie à sa Parole, ne sert pas à la régénération des enfants ? N'est-il pas vrai que selon les paroles du Christ, quiconque veut être régénéré doit l'être par l'eau ?" (W2 XIII a, 687)

Luther, Sermon pour le troisième Dimanche après l'Épiphanie : "Dis-moi, est-ce parler chrétiennement que de juger des oeuvres de Dieu selon notre guise, en disant : les enfants n'ont pas encore atteint l'âge de raison; c'est pourquoi ils ne peuvent pas croire ? Et si, au lieu de faire comme toi, de parvenir à la foi par la raison, les enfants y parvenaient par leur déraison ? Qu'est-ce que la raison peut apporter de bon à la foi et à la Parole de Dieu ? N'est-elle pas celle qui s'y oppose le plus ? Ne faut-il pas, pour parvenir à la foi et aimer la Parole de Dieu, aveugler la raison et la bafouer, mourir à elle et devenir comme un insensé, déraisonnable et inintelligent comme un petit enfant ?... Combien de fois le Christ ne dit-il pas que nous devons devenir des enfants et des insensés, et ne condamne-t-il pas la raison ? Où en était la raison des enfants que Jésus serra dans ses bras, qu'il bénit et à qui il offrit le royaume des cieux ? N'étaient-ils pas sans raison ? Pourquoi demande-t-il qu'on les lui amène et les bénit-il ? D'où ont-ils la foi qui fait d'eux des enfants du royaume des cieux ? Justement, parce qu'ils sont sans raison et sans intelligence, ils sont plus propres à la foi que les adultes dont la raison s'insurge souvent et ne veut pas passer sa grosse tête par la petite porte. Quand il est question de la foi et des oeuvres de Dieu, il ne faut pas regarder à la raison et à ses oeuvres. Là, c'est Dieu qui agit, et la raison est morte, aveugle" (W2 XI, 493 s.)
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