Dieu a créé l'univers, mais avant ?

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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Raistlin » mer. 06 juil. 2011, 14:55

Antoine Marie a écrit :Juste une question : Pourquoi "rien de ce qui peut ne pas exister ne peut durer éternellement" ???
Un être qui pourrait ne pas exister n'a pas l'existence par lui-même, car ce qu'on a par soi-même, on l'a toujours. Or seul un être ayant l'existence depuis et pour toujours est éternel, et cet être ne pourrait pas ne pas exister puisqu'il a l'existence par lui-même.
En gros, pour qu'un être soit éternel, il faut qu'il ait l'existence par lui-même, donc qu'il existe nécessairement. A partir du moment où cet être pourrait ne pas exister, vous avez fait la preuve qu'il n'existe pas nécessairement, donc qu'il n'est pas éternel.

De plus si un être n'a pas l'existence par lui-même, c'est qu'il le reçoit nécessairement d'un autre qui le précède. Or on ne peut remonter la chaîne indéfiniment (même en multipliant les causes, vous n'ôtez pas la contingence). On en arrive donc à la nécessité d'un être qui aurait l'existence par lui-même et qui la donnerait aux autres. On en arrive ainsi à Dieu.
Et dire que l'Univers est éternel ne permet pas de résoudre le problème de la cause existant par elle-même. En effet, même en supposant un Univer éternel, nous ne ferions qu'enchaîner les causes contingentes à l'infini ce qui ne résout rien. Ainsi, on parvient à la certitude de l'existence d'un être nécessaire, donc de Dieu.
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Antoine Marie » mer. 06 juil. 2011, 15:09

Raistlin a écrit :
Antoine Marie a écrit :Juste une question : Pourquoi "rien de ce qui peut ne pas exister ne peut durer éternellement" ???
Un être qui pourrait ne pas exister n'a pas l'existence par lui-même, car ce qu'on a par soi-même, on l'a toujours. Or seul un être ayant l'existence depuis et pour toujours est éternel, et cet être ne pourrait pas ne pas exister puisqu'il a l'existence par lui-même.
En gros, pour qu'un être soit éternel, il faut qu'il ait l'existence par lui-même, donc qu'il existe nécessairement. A partir du moment où cet être pourrait ne pas exister, vous avez fait la preuve qu'il n'existe pas nécessairement, donc qu'il n'est pas éternel.

De plus si un être n'a pas l'existence par lui-même, c'est qu'il le reçoit nécessairement d'un autre. On en arrive donc à la nécessité d'un être qui aurait l'existence par lui-même et qui la donnerait aux autres. On en arrive ainsi à Dieu.
Oui mais justement, l'argument des athées est invariablement : "L'Univers existe éternellement". Je me rends compte qu'il n'a pas l'existence par lui-même, et ça prouve l'existence de Dieu qui lui donne l'existence mais pourquoi l'éternité est-elle un attribut de l'être existant par lui-même uniquement ? N'est-ce pas une vérité de foi ?
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Raistlin » mer. 06 juil. 2011, 15:28

Antoine Marie a écrit :Oui mais justement, l'argument des athées est invariablement : "L'Univers existe éternellement". Je me rends compte qu'il n'a pas l'existence par lui-même, et ça prouve l'existence de Dieu qui lui donne l'existence mais pourquoi l'éternité est-elle un attribut de l'être existant par lui-même uniquement ? N'est-ce pas une vérité de foi ?
Notez d'abord que cet argument est assez limité : quelle preuve ont-ils que l'Univers existe éternellement ? Bien au contraire, la Science semble converger vers l'hypothèse inverse.

Ensuite, ce n'est pas un problème d'éternité : encore une fois, quand bien même l'Univers serait éternel, il ne serait qu'un enchaînement de causes contingentes, aucune n'ayant en elle-même l'existence. Ca ne résoudrait donc rien. Reprenez l'exemple de l'horloge : multiplier à l'infini les engrenages ne suffit pas à rendre compte du mouvement, il faut un ressort.

Voilà pourquoi la preuve de l'existence de Dieu ne dépend pas du fait que l'Univers soit éternel ou non. Elle dépend uniquement du fait que rien dans l'Univers n'a l'existence par lui-même.
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Antoine Marie » mer. 06 juil. 2011, 15:33

Raistlin a écrit :Voilà pourquoi la preuve de l'existence de Dieu ne dépend pas du fait que l'Univers soit éternel ou non. Elle dépend uniquement du fait que rien dans l'Univers n'a l'existence par lui-même.
Nous sommes d'accord, et c'est clairement le plus important !!
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par mystike » mer. 06 juil. 2011, 18:17

Tout a une cause. De nôtre univers, avec l'apparition de la matière, plus tard de la vie, rien n'a pu apparaitre du néant. Avant le big bang, il y avait forcement quelque chose qui a amené au big bang. Et ce quelque chose n'a pas pu apparaitre spontanément. Il y a bien au départ une création. Si je pars du principe qu'il n'y a pas de créateur ni de création, je tombe sur le néant, et sur l'absurde. Du néant rien ne peut se construire. Je pars donc du postulat d'un créateur. Un créateur unique et divin qui n'a pas besoin de cause pour exister, qui est eternel contrairement à notre univers qui a un commencement et peut-être une fin. Il est raisonnable de penser que le temps, qui fait parti de notre univers, a un commencement (celui de la création de notre univers) mais n'existait pas avant. A partir du postulat d'un créateur du temps et de l'espace, celui-ci se situe en dehors (dans l'éternité, hors de notre espace). Difficile à concevoir(en ce qui me concerne), mais c'est ce qui me parait être le plus rationnel, plutôt que de s'appuyer sur une théorie du néant aboutissant à notre univers.

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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Raistlin » mer. 06 juil. 2011, 19:38

mystike a écrit :Difficile à concevoir(en ce qui me concerne), mais c'est ce qui me parait être le plus rationnel, plutôt que de s'appuyer sur une théorie du néant aboutissant à notre univers.
Entièrement d'accord. Je peux même vous l'affirmer : prétendre que l'Univers est issu du néant est complètement irrationnel puisque le néant est stérile par définition. C'est là une certitude.
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Alouette » mer. 06 juil. 2011, 20:04

Non, car la nécessité de Dieu n’est pas levée par l’éternité de l’Univers. Si l’Univers était éternel, cela signifierait simplement que Dieu lui donne l’existence depuis toute éternité. Pourquoi ? Tout simplement parce que rien dans l’Univers ne possède l’existence par lui-même, tout est contingent. Vous aurez donc beau enchaîner les causes à l’infini, aucune ne possèdera l’existence par elle-même. (Raistlin)

Je crois comprendre ce que vous dites : puisque toutes les parties qui composent l'univers auraient pu ne pas exister, mais qu'elles existent bel et bien, il faut que quelque-chose leur ait donné l'existence, car elles ne peuvent se tirer du néant toutes seules ? Est-ce bien cela, ou je comprends mal votre pensée ?
Si c'est bien cela que vous dites, je me demande tout de même s'il n'y a pas quelque chose qui fait bel et bien partie de l'Univers (donc n'est pas un Dieu transcendant) et n'est pas contingent, mais nécessaire et donc à la base de tout dans l'Univers (j'admets que je n'en suis pas sûre mais il me semble que c'est ce que j'avais compris de plusieurs émissions scientifiques) : l'atome, une matière indivisible. On peut imaginer que l'atome soit la Cause première, donc de l'Univers, ce qui ne prouve pas l'existence d'une entité transcendante, mais immanente. On peut aussi imaginer que le principe même de la vie, de l'existence, est justement la seule chose de non contingent, puisque le néant parait inconcevable. Mais même en nommant ce principe de vie "Dieu", ça ne fait pas de lui le Dieu chrétien puisque la conception chrétienne de Dieu est transcendante, en dehors de la matière, alors que le principe de vie pourrait ne faire qu'un avec la matière, n'être sans la matière, mais être par la matière justement. En effet, il est possible qu'il existe une propriété de la matière des atomes de n'importe quel être vivant ou état de la matière (minéraux) qui lui donne la vie, le mouvement (puisque dans les atomes il y a du mouvement avec les électrons), et que cette propriété se retrouve donc à l'intérieur de chaque être du monde. Cette propriété de la matière serait alors partout à la fois et pourrait être appelée Dieu mais pourtant ne serait pas transcendante…

Le multivers est bien une croyance puisque le scientifique ne peut dire qu'une seule chose : en l'état, c'est une hypothèse sans aucun fondement expérimental, ni démonstration rationnelle rigoureuse (ce qui ne signifie pas pour autant que cette hypothèse est absurde, attention). Ceux qui y adhèrent croient donc nécessairement. (Raistlin)

Il me semblait que c'était prouvé par la science mais vu ce que vous me dites je vais me renseigner car j'avoue ne pas avoir une connaissance scientifique poussée (j'ai fait et je fais toujours de études de lettres, et c'est vrai que même si j'aime imaginer des conceptions possibles de l'univers et que j'aime "micro-philosopher" – car je reconnais que l'on ne peut vraiment philosopher et avoir une position stable sans avoir lu en profondeur beaucoup de théories philosophiques différentes, et la terminale avec ses cours de philo commence à être loin… - je n'ai pas beaucoup de temps pour me mettre aussi vraiment à la science, bien que ça m'intéresse aussi).


La raison est très simple : Dieu seul est parfait car Lui seul possède la plénitude de l'être (par définition). Dieu ne pouvait donc pas créer un Univers qui soit parfait puisque cela aurait signifié qu'Il aurait créé... Dieu. Ce qui est absurde. La Création est donc nécessairement limitée et imparfaite. Mais en étant uni à Dieu, la créature peut participer à la perfection divine. (Raistlin)

Si j'étais croyante, effectivement, j'admettrais ce raisonnement par logique. Mais pourquoi dans ce cas Dieu n'interviendrait-il pas dans sa création imparfaite ensuite pour abréger les souffrances des innocents ?

A partir du postulat d'un créateur du temps et de l'espace, celui-ci se situe en dehors (dans l'éternité, hors de notre espace). Difficile à concevoir (en ce qui me concerne), mais c'est ce qui me parait être le plus rationnel, plutôt que de s'appuyer sur une théorie du néant aboutissant à notre univers. (mystike)

Oui mais pourquoi penser que le temps a été créé avant le monde, avant l'Univers ? Je pencherais pour cette explication : l'Homme, afin de mesurer le mouvement, a créé le concept "temps". En effet, le temps permet de mesurer le mouvement, une seconde permet de mesurer l'espace d'un millimètre (ou moins, mais ce n'est pas là l'important), et à partir de là les mouvements plus grands. En fait, le temps n'existerait pas sans mouvement, si les cellules cessaient de se mouvoir, les bactéries de se mouvoir etc. tout resterait intact, immuable, sans vie et donc sans temps. Le temps, donc, serait la mouvement même de la vie.

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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par l'observateur » jeu. 07 juil. 2011, 0:25

Raistlin a écrit :Entièrement d'accord. Je peux même vous l'affirmer : prétendre que l'Univers est issu du néant est complètement irrationnel puisque le néant est stérile par définition. C'est là une certitude.
Il me semble qu'il a été démontré que le vide ne l'était jamais complètement: le monde quantique révèle que le vide est en effet rempli de fluctuations, de création spontanée de couple de matière/antimatière (par exemple) qui s'annilent presque aussitôt.

C'est un exemple de création spontanée. Alors dans ce cas pourquoi ne serait ce pas le cas aussi de l'univers lui même? La création spontanée de l'univers n'est plus si irrationnelle que ça...
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par ti'hamo » jeu. 07 juil. 2011, 8:37

Mais ce vide qui ne l'est pas, c'est déjà l'univers. Quand on parle de création, on ne parle pas uniquement de notre monde à nous, mais de tout ce qui existe : l'acte créateur par lequel ce qui existe, existe. Donc également tout autre univers parallèle, multiple, emboîté...

Et donc également les fluctuations du vide quantiques : c'est quelque chose qui existe, un phénomène physique décrit par des lois physiques.
Le vide quantique, ça n'est pas le néant.

Mais pourtant certains invoquent cette possibilité pour proclamer : "l'univers s'est créé tout seul, il n'y a donc pas besoin d'un dieu pour l'expliquer !", montrant par là uniquement combien ils ont moins bien compris la question que les philosophes du XIIe siècle, ou de l'Antiquité (il y a déjà une remarque de Socrate, dans Platon, à propos de la confusion d'apporter une réponse scientifique au sujet des mécanismes à une question métaphysique au sujet de l'origine, mais à propos du corps humain).


On est, là encore, dans le même genre de confusion que lorsqu'il s'agit de l'évolution : parce que la vie se développerait selon des lois permettant son apparition et son évolution, il n'y aurait pas besoin d'un dieu pour l'expliquer ; mais ces lois, c'est encore quelque chose d'existant, c'est encore du matériel, du physique, du créé.

Est-ce que savoir comment fonctionne le corps humain annule la question de savoir comment il se fait qu'il existe ?
On peut pourtant bien être médecin et chrétien. Et bien, il en va de même de l'univers.
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Raistlin » jeu. 07 juil. 2011, 9:22

l'observateur a écrit :Il me semble qu'il a été démontré que le vide ne l'était jamais complètement: le monde quantique révèle que le vide est en effet rempli de fluctuations, de création spontanée de couple de matière/antimatière (par exemple) qui s'annilent presque aussitôt.
Donc ce n'est pas du néant. Le vide quantique est donc un état énergétique particulier d'où peut jaillir la matière.
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Raistlin » jeu. 07 juil. 2011, 9:44

Alouette a écrit :Je crois comprendre ce que vous dites : puisque toutes les parties qui composent l'univers auraient pu ne pas exister, mais qu'elles existent bel et bien, il faut que quelque-chose leur ait donné l'existence, car elles ne peuvent se tirer du néant toutes seules ? Est-ce bien cela, ou je comprends mal votre pensée ?
Oui, c’est plus ou moins cela.

Alouette a écrit :Si c'est bien cela que vous dites, je me demande tout de même s'il n'y a pas quelque chose qui fait bel et bien partie de l'Univers (donc n'est pas un Dieu transcendant) et n'est pas contingent, mais nécessaire et donc à la base de tout dans l'Univers (j'admets que je n'en suis pas sûre mais il me semble que c'est ce que j'avais compris de plusieurs émissions scientifiques) : l'atome, une matière indivisible.
Alors là, je vous arrête tout de suite, l’atome n’est certainement pas l’élément le plus petit de la matière. Un atome est composé de neutrons, de protons et d’électrons. Les protons et les neutrons sont eux-mêmes composés de quarks.

Pour ma part, si je devais trouver un dénominateur commun et originel à la matière, ce serait l’énergie, car si l’on s’en réfère à la célèbre formule d’Einstein – E=mc² - la matière ne serait que de l’énergie « condensée » pour schématiser.
Alors, on pourrait se demander si l’énergie n’est pas cet être nécessaire et ça me semble une bonne option. Cependant, il y a un obstacle majeur : l’énergie n’est jamais sous la même forme dans l’Univers. Tout est changeant et multiple. Or le fait de changer signifie devenir ce qu’on n’était pas et ne plus être ce qu’on était. Ainsi, en quelque sorte, l’énergie « être nécessaire » qui deviendrait matière ne serait plus de l’énergie, elle perdrait donc l’existence en tant qu’énergie pour devenir autre chose. Or lorsqu’on possède l’existence par soi-même, on ne peut pas la perdre. Donc l’énergie n’est pas l’être nécessaire qu’on recherche.

Je ne sais pas si je l’explique bien, et peut-être que j’ai commis des erreurs de formulation, mais l’idée est là : ce qui est changeant et multiple ne peut être que contingent, et ne possède pas l’existence par soi-même. L’énergie issue du Big Bang (si on admet cette hypothèse) est changeante et multiple, elle n’a donc pas l’existence par elle-même.

Alouette a écrit :Il me semblait que c'était prouvé par la science mais vu ce que vous me dites je vais me renseigner car j'avoue ne pas avoir une connaissance scientifique poussée
J’avoue ne pas bien voir comment la théorie du multivers pourrait être prouvée expérimentalement (vous savez, même la théorie de l’évolution n’est qu’une théorie – comme son nom l’indique – et non une certitude scientifique). Mais je vous en prie, renseignez-vous, j’aimerais beaucoup savoir.

Alouette a écrit :Si j'étais croyante, effectivement, j'admettrais ce raisonnement par logique. Mais pourquoi dans ce cas Dieu n'interviendrait-il pas dans sa création imparfaite ensuite pour abréger les souffrances des innocents ?
Abréger les souffrances ? Si vous entendez par là le fait de mettre fin aux jours de celui qui souffre, sachez chère alouette que Dieu veut la vie, pas la mort ! Ainsi, Il fait bien mieux qu’abréger nos souffrances : Il s’en sert pour nous glorifier et nous faire entrer dans Son intimité, dans Sa vie même. Et Il le fait en prenant sur Ses épaules nos fautes, nos souffrances, nos peines.

Si par abréger les souffrances de l’innocent, vous entendez plutôt intervenir pour que le mal n’ait pas lieu, ou pour qu’il cesse immédiatement, c’est une question complexe. D’abord, notez que Dieu nous veut libre et que nous ne serions que des marionnettes si Dieu empêchait purement et simplement un homme de commettre le mal (et donc, d’autres hommes d’en souffrir, par définition). Ensuite, comme je l’ai dit, il est erroné de s’attendre à ce que Dieu ôte toute limite à ce que nous pouvons faire : si je mets ma main dans le feu, je me brûle, et Dieu n’en est pas responsable ! Et Dieu n’est pas non plus un garde du corps… Cependant, il est vrai qu’il est révoltant de voir un enfant frappé par la maladie, d’apprendre que telle catastrophe a fauché des milliers de vies, etc. C’est là où le mystère commence (n’en déplaise à cracboum) : en effet, la Bible nous dit que l’Homme n’a pas été conçu pour être la proie des maux de ce monde, mais qu’il l’est devenu suite à son propre péché, à sa rupture d’avec Dieu. Il est donc sain de se révolter contre le mal : c’est le signe le plus évident (n’en déplaise aux matérialistes) que nous ne sommes pas faits pour ça, qu’à la base nous ne devions pas connaître tous les maux qui nous accablent. Voilà précisément pourquoi l’athéisme, au sujet du mal, ne tiendra jamais la route : les athées sont contraints d’affirmer que les maux qui nous accablent sont « naturels ». Mais si c’était le cas, nous ne nous révolterions pas, nous pourrions certes chercher à améliorer notre sort mais sans révolte… or ça ne correspond pas un seul instant à l’expérience humaine.


Pour conclure, rappelons que le Christ est la seule réponse satisfaisante à la souffrance humaine, réponse certes mystérieuse, mais néanmoins la seule valable. Vous me direz que je prêche pour ma paroisse (sans mauvais jeu de mots) mais en toute sincérité, c’est la conclusion logique à laquelle mon intelligence arrive. L’athéisme, pour ne parler que de cette idéologie, ne résout pas la question du Mal, ne propose rien sinon l’oubli de la question comme si il ne fallait pas vraiment s’en préoccuper. Moi, ça ne me satisfait pas.
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Amfortas » jeu. 07 juil. 2011, 11:00

L’argument des multi-univers n’est qu’une interprétation de l’équation d’évolution d’Heisenberg, équation problématique lorsque confrontée à la réalité de l’expérience. Il est donc fallacieux d’utiliser une interprétation hypothétique d’une équation comme argument métaphysique, surtout quand ladite interprétation est elle-même problématique.

Rappelons la problématique initiale : l’équation d’évolution d’Heisenberg est une équation de la mécanique quantique décrivant l’évolution dans le temps d’une fonction d’onde.

Le problème c’est que cette équation décrit une évolution continue et ne permet pas d’expliquer l’effondrement de la fonction d’onde, effondrement qui survient au moment de la mesure expérimentale.

Cela signifie que selon cette équation nous devrions rester toujours dans l’indéterminé et ne jamais passer dans le déterminé. Or l’expérience du réel en nous fournissant une mesure certaine (il est mort ou il est vivant mais il ne peut pas être les deux à la fois…) nous situe dans le déterminé. D’où contradiction entre la théorie et l’expérience.

D’où l’idée pour lever cette contradiction de dire « Tous les possibles sont réels, mais chacun dans sa réalité ». Dans une réalité je vis, dans une autre réalité je suis mort… En somme l’indétermination est réduite à une série de déterminations situées dans des réalités différentes.

Passons sur le fait que la validation expérimentale d’une telle interprétation supposerait la mise en évidence d’alter objets et d’alter égos (Bonjour vous êtes qui ? Je suis vous…)

Mais surtout cela n’explique pas le fait que notre esprit parvient parfaitement à faire la distinction entre l’ordre du possible et celui du réel, sauf à avoir la raison dérangée, un homme ne confondra jamais sa situation présente avec sa situation possible (Je peux guérir donc je ne suis plus malade…)

Maintenant on sait parfaitement ce qui fait passer un système quantique d’un état indéterminé à un état déterminé : c’est l’observation. Et qui dit observation dit ? dit observateur, mais pour un athée il ne peut y avoir d’observateur à l’origine, puisque pour lui il n’y a pas de Dieu, d’où les théories contradictoires subséquentes dans lesquelles il s’enferre…

Quant aux fluctuations quantiques du vide, qui là encore sont brandies comme un argument massue pour se passer de Dieu, regardons y de plus près et ouvrons un ouvrage de théorie quantique des champs, comme par exemple « QTF in a nutshell » de A. Zee professeur à Princeton » :

« Disturbing the vacuum

We would like to do something more exciting than watching a boiling sea of
quantum fluctuations.We would like to disturb the vacuum. Somewhere in space,
at some instant in time, we would like to create a particle, watch it propagate for
a while, and then annihilate it somewhere else in space, at some later instant in
time. In other words, we want to create a source and a sink (sometimes referred to
collectively as sources) at which particles can be created and annihilated.
To see how to do this, let us go back to the mattress. Bounce up and down
on it to create some excitations.»


Traduction:

“Perturber le vide

Nous voudrions faire quelque chose de plus excitant que de simplement regarder une mer agitée par les fluctuations quantiques. Nous voudrions perturber le vide. Quelque part dans l’espace, à un certain instant, nous voudrions créer une particule, étudier sa propagation pendant un moment, puis l’annihiler à un autre endroit de l’espace, à un instant ultérieur. En d’autre termes, nous voulons créer une source et un puits (quelques fois désignés tous deux comme des sources) à partir desquels des particules peuvent être créées et annihilées. Pour voir comment faire cela, revenons à notre analogie du matelas. Faisons des rebonds sur ce matelas pour créer des excitations ».

Lorsque l’on est un peu versé dans la chose, on voit tout de suite de quoi il s’agit, il s’agit « d’un pincement du champ », c'est-à-dire l’ajout ad hoc de singularités pour que se produise un phénomène de propagation, de même que le sauteur sur un matelas ou un trampoline en exerçant une pression répétée en un certain point fait se propager des ondes élastiques sur le matériau.

Donc même dans la théorie pour avoir cette création/annihilation de particule il faut perturber le vide quantique, le vide quantique laissé à lui seul ne crée rien. De même que si personne ne saute sur le matelas ou la trampoline, rien ne se passe, c’est le calme plat.

Enfin quelle est la situation de la physique concernant les tout premiers instants de l’univers ? Eh bien elle est dans une impasse ou plutôt elle est face à un mur, le mur de Planck. En effet le couplage des effets relativistes et quantiques (rendus nécessaires par le caractère microscopique de l’univers à ses débuts et par sa densité énergétique prodigieuse) induit un processus catastrophique qui ne permet plus de parler d’espace, de temps, de matière, d’énergie…bref toutes les formes de la physique s’effondrent. (essayer d’imaginer un objet physique qui n’est ni dans l’espace, ni dans le temps, sans aucune masse et énergie…). Vous avez certes quelque chose, mais ce quelque chose est le tout informe.

Donc la physique en est réduite à adopter une attitude purement pythagoricienne, c'est-à-dire à développer des modèles mathématiques qui n’ont plus aucun rapport avec la réalité physique ! (pour Pythagore les nombres expliquent toute la réalité).

Voilà pourquoi Brian Greene, expert mondialement reconnu de la théorie des cordes, déclare dans son ouvrage de vulgarisation « L’univers élégant »:


« Les décisions que prennent les théoriciens ne sont motivées que par des raisons d'esthétique, en vertu desquelles les théories doivent exhiber l'élégance et la beauté structurelle qui vont de pair avec le monde que nous observons. Evidemment, rien ne dit que cette stratégie conduise à la vérité. » (p 190)

La supersymétrie apparaît comme un concept unificateur fabuleux (p 247 *)
(*) Fabuleux : qui appartient à l'imagination, chimérique (Larousse).

« Fait ironique, nous verrons que bien que la théorie des cordes soit potentiellement la plus prédictive que les physiciens aient jamais étudiée, ceux-ci ne sont pas en mesure de faire des prédictions suffisamment précises pour pouvoir être confrontées aux données expérimentales. » (p 235)

La théorie des cordes est-elle correcte ? Nous n'en savons rien. (p235)

Il est tout à fait envisageable que plus d'une génération de physiciens consacre sa vie à l'étude au au développement de la théorie des cordes, sans jamais recevoir en retour le moindre écho expérimental. (p 252)


Le physicien théoricien Lee Smolin avait d’ailleurs publié en 2007 un ouvrage intitulé : « Rien ne va plus en physique, l’échec de la théorie des cordes, dont le grand mathématicien et médaille Field 1982 Alain Connes disait dans la préface :

« Il y a là un réel problème, car la science n’avance pas sans confrontation avec la réalité. Il est parfaitement normal et souhaitable de laisser du temps à une théorie en gestation pour se développer sans pression extérieure. Il n’est par contre pas normal qu’une théorie ait acquis le monopole de la physique théorique sans jamais la moindre confrontation avec la nature et les résultats expérimentaux. Il n’est pas sain que ce monopole prive de jeunes chercheurs de la possibilité de choisir d’autres voies, et que certains des leaders de la théorie des cordes soient à ce point assurés de la domination sociologique qu’ils puissent dire : « Si une autre théorie réussit là où nous avons échoué, nous l’appellerons théorie des cordes. »

Le livre de Lee Smolin est une analyse lucide de cet état de fait. J’ai appris beaucoup en le lisant, aussi bien sur la physique, merveilleusement racontée, que sur les qualités humaines de Lee Smolin, son amour de la physique mêlée à la persévérance, qui sont les conditions nécessaires pour apporter une petite pierre à l’édifice que l’esprit humain construit afin de comprendre où nous avons bien pu provisoirement atterrir ».


En conclusion : qu’est-ce la physique théorique a apporté comme argument à charge contre l’existence de Dieu ? La réponse est très claire : objectivement rien, absolument rien. Le dossier de l’accusation athée est vide, complètement vide, l’accusation a cru bon de faire citer ce témoin à charge, mais ce témoin est lui-même en crise, ses réponses ne sont pas assurées, il donne dans la contradiction et à chacune de ses affirmations l’objection de la défense a été retenue : « Objection l’accusation essaie de faire passer pour vraie ce qui n’est que matière à débat ou ébauche ou théorie inconsistante et/ou incomplète ou encore non validée ». Et surtout il ne s’est jamais prononcé contre l’existence de Dieu, ce qu’il n’aurait pas manqué de faire s’il s’était cru suffisant dans ses théories. (rasoir d’Occam)
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par l'observateur » jeu. 07 juil. 2011, 23:50

Je vais peut être paraitre court, mais il me semble que stephen hawkin aborde lui aussi ce problème dans Y a-t-il un grand architecte dans l'univers?, et conclut lui que l'hypothèse Dieu n'était pas nécéssaire pour expliquer la création de l'univers (et pas que Dieu n'éxistait pas attention)

Quelqu'un d'autre aurait il lu ce livre?
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Raistlin » ven. 08 juil. 2011, 9:27

l'observateur a écrit :Je vais peut être paraitre court, mais il me semble que stephen hawkin aborde lui aussi ce problème dans Y a-t-il un grand architecte dans l'univers?, et conclut lui que l'hypothèse Dieu n'était pas nécéssaire pour expliquer la création de l'univers (et pas que Dieu n'éxistait pas attention)
Remarquez l'ambiguité des termes utilisés : pas besoin de Dieu pour expliquer la création...

Quoiqu'il en soit, je n'ai pas lu ce livre mais je vois mal comment Stephen Hawkin peut dire qu'il n'a pas besoin de Dieu pour expliquer l'apparition de l'Univers. Je ne vois même pas comment il peut trancher la question de l'apparition de l'Univers alors que la physique en est incapable (du moins pour l'instant).

Alors oui, je veux bien croire qu'il n'a pas besoin de l'hypothèse Dieu - rien de plus facile que de ne pas tenir compte d'une hypothèse ou même d'une vérité, c'est à la portée du premier venu - mais la question n'est pas là. La question est de savoir si l'hypothèse par laquelle il remplace Dieu est plus rationnelle. Et ça, permettez-moi d'en douter.
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Re: Dieu a créé l'univers, mais avant ?

Message non lu par Amfortas » ven. 08 juil. 2011, 13:58

Observateur a écrit :

Je vais peut être paraitre court, mais il me semble que stephen hawkin aborde lui aussi ce problème dans Y a-t-il un grand architecte dans l'univers?, et conclut lui que l'hypothèse Dieu n'était pas nécéssaire pour expliquer la création de l'univers (et pas que Dieu n'éxistait pas attention)
Voilà ce que dit Stephan Hawking :


“Why God Did Not Create the Universe
There is a sound scientific explanation for the making of our world—no gods required

By STEPHEN HAWKING And LEONARD MLODINOW

(…)
Many people would like us to use these coincidences as evidence of the work of God. The idea that the universe was designed to accommodate mankind appears in theologies and mythologies dating from thousands of years ago. In Western culture the Old Testament contains the idea of providential design, but the traditional Christian viewpoint was also greatly influenced by Aristotle, who believed "in an intelligent natural world that functions according to some deliberate design."
That is not the answer of modern science. As recent advances in cosmology suggest, the laws of gravity and quantum theory allow universes to appear spontaneously from nothing. Spontaneous creation is the reason there is something rather than nothing, why the universe exists, why we exist. It is not necessary to invoke God to light the blue touch paper and set the universe going.

(…)


Traduction:


Pourquoi Dieu n’a pas créé l’univers

Par Stephen Hawking et Léonard Mlodinow

(…)

Beaucoup de gens voudraient que nous exploitions ces coïncidences comme preuve d’un travail divin. L’idée que l’univers ait été conçu pour l’humanité apparaît dans des théologies et mythologies datant de plusieurs milliers d’années. Dans la culture occidentale, l’Ancien Testament contient l’idée d’un dessein providentiel, mais le point de vue chrétien traditionnel a été aussi grandement influencé par Aristote, qui croyait en « une nature intelligente régie par des principes posés délibérément ».

Ce n’est pas la réponse de la science moderne. De récents progrès en cosmologie suggère que les lois de la gravité et de la théorie quantique permettent que des univers apparaissent spontanément à partir de rien. La création spontanée est la raison pour laquelle il y a quelque chose plutôt que rien, pourquoi l’univers existe, pourquoi nous existons. Il n’est pas nécessaire d’invoquer Dieu pour communiquer l’impulsion initiale et mettre l’univers en branle.



(…)

D’abord remarquons que la critique de Stephen Hawking cible essentiellement les partisans du principe anthropique (à ne pas confondre avec le second principe thermodynamique, principe entropique), qui stipule que la vie humaine n’aurait pu apparaître si les constantes physiques n’étaient pas exactement ce qu’elles sont. (une petite variation de quelques milliardièmes affectant une constante d’une loi physique et la vie n’apparaissait pas), d’où les anthropistes concluent qu’un agencement d’une telle précision ne peut avoir été qu’intentionnel et avoir eu pour fin l’émergence de la vie humaine.

Nous verrons que ce principe anthropique est effectivement critiquable, mais pour l’heure relevons cette ânerie monumentale proférée par Stephen Hawking et qui consiste à dire : « L’univers apparaît spontanément à partir de rien ».

Ânerie monumentale car ce qu’il est convenu d’appeler le vide quantique, n’est pas rien, mais est au contraire un champ de possibles. D’ailleurs en probabilité on parle de l’univers des possibles pour désigner l’ensemble des évènements susceptibles de se réaliser au cours d’une expérience aléatoire.

Ce qui nous amène à préciser une distinction, qui ne date pas d’hier, que les penseurs de l’antiquité connaissaient déjà, à savoir que l’être possible n’est pas le néant, ce n’est pas non plus l’être actuel (c'est-à-dire l’être réalisé), mais ce n’est pas pour autant un néant, c’est un être virtuel ou être en puissance, c'est-à-dire qui a la puissance de venir réellement à l’existence. Ainsi nous avons tous été des êtres possibles avant d’être des êtres réels, la réalité de notre être commençant dès la conception.

Alors qu’est-ce que le « rien » ou le néant ? Eh bien c’est ce qui n’est même pas un être possible, c’est l’impossible, l’absurde : un cercle carré, un effet sans cause etc…

D’ailleurs Sherlock Holmes avait coutume de dire : «Une fois qu'on a éliminé l'impossible, alors ce qui reste, même le plus improbable, doit être la solution ». L’impossible est le non-être, le néant, alors que l’improbable est encore possible, c’est encore de l’être et on ne peut le balayer d’un revers de main.

Et toute la physique théorique moderne est fondée sur la notion de champ quantique. Or un champ quantique est un champ de possibles : il ne décrit pas une particule au sens classique du terme, mais la possibilité probabilisée de voir émerger une telle particule en un point du champ. Ce n’est donc pas rien !

En revanche lorsqu’en théologie on évoque la création ex nihilo, il s’agit bel et bien d’une création « à partir de l’impossible » et non à partir d’un être possible, c'est-à-dire que nul être possible ne préexiste à la création, la création crée aussi la possibilité.

Donc l’argument de Stephen Hawking n’est pas un argument contre la création ex nihilo, puisqu’il est obligé d’extrapoler à partir d’un champ de possibles (qu’il identifie à tort avec le néant) alors que la création est antérieure logiquement à toute possibilité.

Venons en maintenant à une deuxième faille dans le raisonnement de Stephen Hawking, et d’ailleurs c’est lui-même qui nous la livre :



Each universe has many possible histories and many possible states. Only a very few would allow creatures like us to exist. Although we are puny and insignificant on the scale of the cosmos, this makes us in a sense the lords of creation.


Traduction:



(…)

Chaque univers a plusieurs histoires possibles et plusieurs états. Mais seulement un nombre infime d’entre eux permettent à des créatures comme nous d’exister. Bien que nous soyons insignifiant à l’échelle du cosmos, cela fait de nous en un sens les seigneurs de la création.

(…)


C’est à dire qu’après toutes ces palinodies pour nous expliquer que nous ne sommes que des produits hasardeux parmi d’autres, voilà que le caractère exceptionnel de notre univers refait surface et fait de nous des « seigneurs de la création ». C’est comme si dans un premier temps on relativisait le gagnant au loto : « Oh ma foi c’est un joueur comme un autre, il a simplement eu de la chance » et puis dans un deuxième temps on le mettait sous les spot lights : « Incroyable ! il est le seul à avoir raflé toute la cagnotte ! », bon il faudrait savoir…

Ici le problème se situe au niveau de la définition de l’univers des possibles, définition approximative, qui explique ce flottement entre tantôt une attitude blasée (une possibilité parmi d’autres) et une attitude d’étonnement. (une possibilité fort improbable).

Tous ceux qui ont déjà fait des probabilités savent que la toute première chose qu’il faut faire pour résoudre un problème de probabilité est de définir l’univers des possibles. Or cette définition n’est pas toujours évidente. Ainsi vous pouvez définir l’univers des possibles du jeu pile ou face comme l’ensemble constitué de 2 évènements : {pile, face}. Mais si au cours de l’expérience la pièce tombe sur la tranche, cela veut dire qu’il y avait aussi un troisième évènement possible que vous avez omis de votre définition initiale et qui ne manquera pas de provoquer votre surprise puisque vous l’aviez jugé impossible et qui pourtant s’est réalisé. Inversement vous pouvez jugé possible un évènement qui en fait est impossible.

Par conséquent le problème « Pourquoi y a-t-il de l’être et non pas plutôt rien ? » n’est pas résolu par le paradigme cosmo-quantique comme le croit à tort Stephen Hawking, puisqu’il faut encore expliquer : « Pourquoi est-ce possible et non pas impossible ? ». Le problème n’est donc pas résolu mais reporté sur les possibles.

L’erreur est de prendre le mot être exclusivement dans son acception « être réel » et de rejeter l’être possible dans un pur néant. Alors que le problème ontologique est beaucoup plus vaste que cela et porte également sur l’être possible, que par conséquent Stephen Hawking ne fait que reculer pour mieux sauter.

Précisons d’ailleurs au passage, que contrairement à ce qu’affirmait Leibniz la théologie catholique nous enseigne que Dieu n’a pas été contraint de créer le meilleur des mondes possibles…

Maintenant venons-en aux « anthropistes », les partisans de l’ « anthropisme», car il faut bien voir que dans ce type de dialectique l’adversaire cogne souvent sur le plus faible, sur celui qui dessert le plus sa propre cause. Comme par exemple un journaliste militant athée va bien sûr aller interviewer le catholique le plus ignare et maladroit qui soit et qui renverra une image déplorable auprès du reste de la population, voilà pour l’éthique journalistique…

Le problème de l’anthropisme est que ses partisans s’imaginent que Dieu est une sorte d’horloger qui a réglé de façon déterministe son horloge, détail par détail, engrenage par engrenage avec une précision absolue, et que le moindre grain de sable peut faire s’effondrer la belle mécanique, preuve d’après eux qu’il y a bel et bien eu un réglage extrêmement minutieux, et donc un horloger. Finalement on retrouve le Grand Architecte de Voltaire, celui des déistes et des franc-maçons, qui a très peu à voir avec le vrai Dieu, et qui d’ailleurs une fois qu’il a remonté son horloge la laisse tourner sans ne plus intervenir sur elle.

Effectivement cette façon d’envisager les choses est incompatible avec le paradigme quantique, dont acte.

Mais c’est aussi incompatible avec la théologie catholique, qui nous enseigne que Dieu est la cause principale pouvant agir au travers des causes secondes, de façon adaptée (c'est-à-dire sans leur faire violence), et que ces cause secondes peuvent être libres et contingentes. Même plus l’action divine au travers des causes secondes est le mode d’action divin le plus répandu, le mode direct étant beaucoup plus rare.

Par conséquent Dieu n’a pas eu « à serrer les boulons » et à faire tel et tel réglage comme le ferait un mécano et comme une imagerie naïve pourrait le suggérer, il lui a suffit d’agir au travers des causes secondes pour réaliser son plan.

Là aussi ce n’est pas nouveau : aux inquisiteurs qui cherchaient à prendre Jeanne d’Arc en défaut en lui faisant remarquer que ma foi si Dieu ne voulait pas des Anglais en France il n’avait qu’à user de sa toute puissance pour les rejeter à la mer, la Sainte rétorqua : «Les hommes d'armes combattront et Dieu donnera la victoire », ce qui signifie que Dieu agira au travers des hommes d’armes, sans attenter le moins du monde à leur liberté, pour bouter les Anglais hors de France. Voilà un bel exemple d’action divine par les causes secondes sur la base d’une coopération adaptée à ces mêmes causes, en l’occurrence une libre coopération puisque l’homme est libre.

Pour la théologie catholique il n’y a donc pas de contradiction à ce que Dieu agisse au travers de causes contingentes et hasardeuses (Eh oui le maître du hasard c’est Dieu !), parce qu’elle reconnaît pleinement le rôle des intermédiaires dans la mise en œuvre du plan divin.

Pour la théologie protestante c’est beaucoup plus problématique, parce que les protestants ont toujours protesté (c’est le cas de le dire) contre les intermédiaires : l’église, le clergé, les saints, les philosophes, les docteurs, la raison, la métaphysique etc… revendiquant un contact direct avec Dieu. D’où toutes ces thèses créationnistes farfelues en provenance du monde protestant, et qui desservent beaucoup plus la cause de la foi qu’elles ne la servent. Ceci dit il faut être juste et reconnaître qu’elles ne peuvent pas plus desservir la cause de la foi que ne le fait la théologie musulmane. Enfin bon pour la vraie foi nul problème.
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