Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchisme

« Dieu leur donnera peut-être de se convertir et de connaître la vérité. » (2Tm 2.25)
Règles du forum
Forum de débats dialectiques entre personnes de bonne volonté autour de la religion chrétienne (catholicisme) et des objections formulées à son encontre

NB : L'attention des intervenants est particulièrement attirée sur la courtoisie et le respect ; les blasphèmes et provocations visant à blesser le sentiment religieux des lecteurs seront modérés ; les discussions inutilement polémiques seront verrouillées et leur initiateurs sanctionnés.
Yukutsu
Ædilis
Ædilis
Messages : 23
Inscription : dim. 10 févr. 2013, 14:48

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Yukutsu » mer. 03 avr. 2013, 15:03

Bonjour François-Xavier. Mon propos ne portait pas sur la tolérance, ou non d'Al-Andalus, mais d'une simple constatation : les chrétiens ayant pris Grenade se montrèrent intraitables envers leurs minorités religieuses, alors que les chrétiens dans les terres musulmanes furent autorisés à rester, pas avec un statut forcément enviable, mais ils n'ont pas été renvoyés non plus.

Johnny, je ne vois pas trop ce que vous voulez dire. En fait vous confirmez même mon propos. Il y avait 30% de chrétiens en Turquie au XIXe, pourtant les Ottomans sont présents dans la région depuis le XVe siècle, ce qui prouve bien que le durcissement de l'Islam envers les minorités est une chose toute récente. Quant aux nationalistes arabes, ça aurait peut-être pu marcher, si encore une fois les Occidentaux et Israël n'avaient pas constamment chercher à déstabiliser les régimes de l'intérieur. On voit d'ailleurs très bien comment ça se passe aujourd'hui en Syrie, où les rebelles islamistes sont armés par les Occidentaux.

Avatar de l’utilisateur
Johnny
Senator
Senator
Messages : 737
Inscription : mar. 26 mars 2013, 16:44
Localisation : Ile-de-France

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Johnny » mer. 03 avr. 2013, 15:37

ledisciple a écrit :
Dernière modification par Johnny le jeu. 04 avr. 2013, 10:53, modifié 1 fois.
Se croire soi-même imparfait et trouver les autres parfaits, voilà le bonheur. (Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus)

Ce qui attire le plus de grâces du bon Dieu, c'est la reconnaissance, car si nous le remercions d'un bienfait, il est touché et s'empresse de nous en faire dix autres et si nous le remercions encore avec la même effusion, quelle multiplication incalculable de grâces ! (idem)

Avatar de l’utilisateur
Raistlin
Prætor
Prætor
Messages : 8038
Inscription : jeu. 01 mars 2007, 19:26
Localisation : Paris

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Raistlin » mer. 03 avr. 2013, 15:39

Yukutsu a écrit :Bonjour François-Xavier. Mon propos ne portait pas sur la tolérance, ou non d'Al-Andalus, mais d'une simple constatation : les chrétiens ayant pris Grenade se montrèrent intraitables envers leurs minorités religieuses, alors que les chrétiens dans les terres musulmanes furent autorisés à rester, pas avec un statut forcément enviable, mais ils n'ont pas été renvoyés non plus.
La réponse est simple : le contexte n'est tout simplement pas le même. Car dans un cas, vous avez une armée conquérante qui ne peut pas administrer seule les terres conquises (elle a besoin de la population locale, sa "tolérance" est donc forcée), et dans l'autre cas les habitants originels qui cherchent à récupérer leurs terres et à retrouver leur liberté, ce qui passe nécessairement par le fait de chasser l'envahisseur.

Et j'ajoute que si les musulmans ont toléré les juifs et les chrétiens lors de leurs conquêtes, notamment pour assurer la vie du pays, ils n'ont pas manqué de les persécuter. Les exemples ne manquent pas.

Cordialement,
« Dieu fournit le vent. A l'homme de hisser la voile. » (Saint Augustin)

Avatar de l’utilisateur
François-Xavier
Pater civitatis
Pater civitatis
Messages : 758
Inscription : dim. 20 août 2006, 23:53
Contact :

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par François-Xavier » mer. 03 avr. 2013, 17:07

Yukutsu a écrit :Bonjour François-Xavier. Mon propos ne portait pas sur la tolérance, ou non d'Al-Andalus, mais d'une simple constatation : les chrétiens ayant pris Grenade se montrèrent intraitables envers leurs minorités religieuses, alors que les chrétiens dans les terres musulmanes furent autorisés à rester, pas avec un statut forcément enviable, mais ils n'ont pas été renvoyés non plus.
L'"autorisation à rester" des chrétiens en terre d'islam est toute relative. On les "tolère" en en faisant des citoyens de seconde zone, et on les taxe en copiant littéralement les pratiques de l'empire sassanide (les califes se sont inspirés de la pratique de l'impôt sassanide exigé à l'époque par le clergé zoroastrien. Le mot Jizya repris dans la sourate 9, verset 29 est un calque du mot désignant cet impôt en moyen perse. Ce qui prouve d'ailleurs que ce verset est une interpolation par rapport au texte d'origine qui date justement de l'établissement de l'empire islamique, donc après la mort de Mahomet).

Par ailleurs, ce que vous avancez au sujet de Grenade est partiel, dans le sens où justement, la défaite de 1493 est pour l'émir une conséquence de son agression. Il est tout à fait légitime de Boabdil suite au reniement de son statut de vassal des rois chrétiens soit exilé. Pour faire un parallèle contemporain, je crois qu'il ne viendrait à personne l'idée que Hollande fait preuve d'intolérance en relevant Cahuzac de ses fonctions de ministre du budget suite à sa trahison. Alors n'inversons pas les rôles.

Je remarque quant à moi que Boabdil n'a pas été exécuté sommairement. Je remarque également qu'aucun prince chrétien à l'époque de la domination musulmane de l'Espagne ne s'était vu proposer un tel statut de vassalité. Bref. Je ne crois pas que votre exemple d'Al Andalus soit vraiment parlant ni probant en l'espèce.

Par ailleurs, je repose ma question : si vraiment ce sont les Chrétiens qui sont intrinsèquement intolérants, pourquoi n'y a t'il pas d'église à Riyadh ?

Je pense aussi qu'il y a une certaine naïveté de la part d'un certain nombre de dirigeants chrétiens à donner des gages de tolérance aux pouvoirs musulmans en les aidant même à mettre ne oeuvre des lieux de culte, y compris à l'heure actuelle, puisque ces manifestations de tolérance ne sont jamais perçus par les Musulmans comme une invitation à faire des gestes dans le sens d'une réciprocité. La convivialité revendiquée est le plus souvent à sens unique... Et elle provient des chrétiens. Les contraintes énormes qui sont faites à l'Eglise copte non seulement pour la construction d'églises mais aussi ne serait-ce que leur entretien en sont un exemple.

Alors bien sûr, les Musulmans nous diront :"Pas de contrainte en religion" en nous expliquant que cet extrait de verset leur interdit un prosélytisme que nous chrétiens nous n'hésiterions pas à mettre en oeuvre. Sauf qu'un minimum d'exégèse coranique nous fait voir ce passage tout à fait autrement, et ce d'autant plus que même la tradition intra musulmane nous l'explicite :

Voici les commentaires qu’a donnés Tabarî (839-923) :
“Les termes Lâ ikrâta fî d-dîni [NDLR : "pas de contrainte en religion] signifient que personne ne peut être contraint à embrasser l’Islam... [Mais] il est également possible d’admettre que l’article a été introduit ici avec une fonction de pronom de rappel [ad-dîn valant ainsi pour dîni-hi] qui renverrait au Nom divin mentionné dans le verset précédent. Le sens serait alors le suivant : Il est le Sublime, l’Immense ; pas de contrainte dans sa religion [c’est-à-dire à l’intérieur de l’Islam, entre les différentes factions]. Les commentateurs sont partagés sur le sens de ce verset...
Enfin, selon d’autres, ce verset a été abrogé car il a été révélé avant que le combat contre les associateurs ne soit imposé [NDLR selon le principe qu'il faut également mettre en cause que des versets postérieurs abrogent des versets "descendus" antérieurement].
L’avis le plus pertinent est de considérer que ce verset a été descendu à propos de certaines catégories de gens : les gens des deux livres, les Mazdéens (Majûs) et tous ceux qui professent une religion différente de l’Islam et desquels la capitation peut être acceptée. Tous les musulmans rapportent que Mahomet contraignit certaines catégories de gens à embrasser l’Islam, qu’il n’acceptait aucune autre profession de foi de leur part, et qu’il les condamnait à mort s’ils refusaient ; c’était le cas des Arabes idolâtres, des renégats et d’autres cas semblables.
Il n’y a pas à contraindre à faire entrer dans la religion quelqu’un dont il est licite d’accepter la capitation dans la mesure où il acquitte cette capitation et agrée le statut [d’infériorité] que lui confère l’Islam”.
En clair, il ne convient pas de contraindre les juifs et les chrétiens à devenir musulmans, mais bien de les soumettre, la domination politique islamique devant s’exercer particulièrement par un impôt spécial qu’ils devront payer et qui leur vaudra d’être « tolérés ». En quelque sorte, cet impôt, payé par individu (adulte ou enfant – cf. S9,29), confère le droit de vivre dans la société musulmane, ou plus exactement le droit de vivre tout simplement. Dieu le veut ainsi, explique Tabari. Il s’agit donc bien d’une tolérance par rapport à un mal : les juifs et les chrétiens sont des maux mais ils deviennent tolérables s’ils rapportent de l’argent et constituent des citoyens de seconde zone – les dhimmis.
Au demeurant, Dieu n’oblige pas à réduire en esclavage les non musulmans :
“Dieu ne vous interdit pas d’être bons et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus à mort dans la religion” (S60,8)
La permission est donnée d’être bon et équitable. Si on ne l’est pas, c’est bien également. Ainsi, quelles que soient les nuances, il paraît difficile de regarder les quatre mots formant s.2,256a autrement qu’à la manière de Tabari : “Pas de contrainte dans l’Islam”. On peut remarquer ceci : cette formule est à sens unique : il faut laisser la liberté à un non musulman d’embrasser l’islam, mais rien n’est dit de la démarche inverse où un Musulman choisirait de renoncer à sa religion
Ceci dit, certaines fatwa-s récentes émises dans les Émirats arabes ont édicté que celui qui renonce à l’islam n’a pas seulement quinze jours pour y revenir (avant d’être tué), mais toute sa vie, ce qui est une manière élégante de tourner le principe et de renvoyer la vengeance de Dieu à un monde meilleur. Mais une telle subtilité a-t-elle une chance d’être reçue par la multitude des gens simples et dans un contexte de tensions exacerbées ?

Le sens originel du "pas de contrainte en religion" (un certains nombre des observations suivantes sont tirées de EM Gallez)
Une petite digression s’impose ici concernant les mots de ce verset.
D’abord, il n’est pas évident que le mot dîn signifiait religion dans le feuillet primitif qui devint un jour la sourate 2. Or, dès la première sourate, ce sens ne convient pas : Dieu y est dit “mâlik yaûmi d-dîni ”, ce qui signifie non pas “Maître du Jour de la religion”, mais bien “Maître du Jour du Jugement” (s.1,3), comme Tabari l’indique lui-même. Quel était exactement le sens primitif du mot dîn ?
Selon la racine sémitique, dîn est en rapport avec ce qui est dû (en arabe, on a précisément ce sens dans le mot basé sur cette racine, dayn, dette) ou avec le fait de rendre ce qui est dû c’est-à-dire la justice (connotation prédominante dans les 38 occurrences de l’hébreu biblique, ce qui donne surtout les sens de jugement et de juge). Ce qui est dû en justice à Dieu, c’est évidemment le culte; de cette manière, on a pu glisser tardivement du sens de culte à celui de religion (ce dernier terme ne recouvrant pas que le culte).
Quant au mot ikrâh, sa signification est inséparable de celle de la racine krh, c’est-à-dire partager en deux ou, au sens figuré, diviser intérieurement, troubler (cf. Daniel 7,15). On retrouve ce sens dans l’arabe karata, affliger (t et h ont une équivalence originelle, cf. le "ta marbuta"). Le verbe kariha, détester, semble être ainsi un doublet artificiel d’où dérive notre forme causative ikrâh, le fait de faire détester, d’où est extraite par glissement l’idée de contrainte. Mais le sens originel de ikrâh serait plutôt le fait de causer un trouble intérieur.
Alors la totalité du verset 2,256 prend un sens beaucoup plus cohérent :
“[Pour le croyant, il ne doit y avoir] pas de cause de trouble dans le culte, car le bon chemin se distingue de l’errance, etc.” (s.2,256).

Il fait immanquablementpenser à autre chose qui est évidemment d'origine entièrement chrétienne : "pas de haine lors du culte" qui pourrait renvoyer à Mt 5,23-24 :
Si donc tu viens présenter ton offrande à l'autel et que là tu te souviennes que ton frère a quelque chose contre toi, laisse là ton offrande, devant l'autel, et va d'abord te réconcilier avec ton frère; et alors viens présenter ton offrande.
Du reste, il apparaît que le sens premier de la racine krh reste sous-jacent dans les diverses occurrences coraniques, quelle que soit leur forme verbale. Par exemple, en s.2,216, le mot kurh signifie plutôt trouble ou source d’hésitation que contrainte ou désagrément :
“On vous a prescrit le combat à mort (qitâlu) ce qui vous est un trouble (kurhun)”.
Le verbe correspondant, qâtala, est habituellement traduit par combattre, mais il s’agit d’un affadissement trompeur : c’est la 3e forme du verbe qatala signifiant tuer, forme propre à une action qui se concrétise envers un tiers et va jusqu’au bout ; elle signifie : ne pas hésiter à tuer, combattre à mort. )
De plus, avant le verset s.2,256, il est justement question du

Code : Tout sélectionner

“Jour où il n’y aura plus ni marchandage ni amitié ni intercession” (2,254) ;

L’enseignement du passage n’est-il pas d’affirmer que les croyants guidés par Dieu et sûrs de leur récompense rendront un culte à Dieu dans la tranquillité d’esprit – à la différence des autres ? Dieu ne voit-il pas mieux que l’homme quel est le bon chemin et quel est le mauvais ?
Les vrais croyants qui rendent à Dieu un culte sont sur le bon chemin de lumière, tandis que les autres sont dans l’errance : ils sont voués aux démons et aux ténèbres. Le texte est clair.
Autres versets parfois cités concernant la tolérance islamique
Parmi les autres versets parfois cités pour fonder la tolérance, il arrive que l’on cite le beau verset s9,6 qui rappelle le devoir d’hospitalité, même vis-à-vis d’un associateur :
"Si un associateur te demande asile, donne-lui asile de sorte qu’il entende la parole de Dieu ; ... ce sont vraiment des gens qui ne savent pas”.
Ce verset est positif. Ou plutôt le serait s’il n’y avait pas le verset immédiatement précédent qui dit :
“Lorsque seront accomplis les mois sacrés, alors tuez (fa’qtulû) les associateurs où que vous les trouviez...
[mais s’ils] acquittent l’impôt, laissez-leur le champ libre” (s.9,5).
Parfois, cet autre verset, est cité :
“Si Dieu avait voulu, Il aurait fait de vous une seule communauté” (s.5,48).
Évidemment, il convient de déterminer qui est ce "vous". Est-ce à l’humanité entière que le verset s’adresse ? À cette question, la tradition musulmane a toujours répondu avec une grande unanimité : il s’agit des seuls musulmans, en tant qu’ils se répartissent entre diverses écoles juridiques et théologiques. Ce verset ouvrirait donc la porte à un certain pluralisme à l’intérieur de l’Islam, ce qui rejoint une des interprétations données par TABARÎ du verset s.2,256a, exposée plus haut. Ce verset ne concerne donc pas les non musulmans.
Les versets s.10,99-100 sont également cités quelquefois :
“Si ton Seigneur voulait, tous ceux qui sont sur la terre, tous, croiraient. Est-ce à toi de contraindre (krh) les gens à être croyants ? Il n’est en personne de croire, que par permission de Dieu. Et Il mettra (yaj‘alu) la souillure sur ceux qui n’auront pas compris”.
En note, Régis Blachère indique – sans expliquer pourquoi –: “Ces deux versets sont, selon toute apparence, une addition ultérieure”. En tout cas, ils expriment bien la manière islamique de penser la tolérance, qui se réfère ici implicitement à l’idée de prédestination : Dieu ayant prédestiné certains à aller au Paradis et les autres en Enfer, il n’y a pas lieu de se soucier des non musulmans qui, de toute façon, iront en Enfer.
Il faut mentionner encore le verset s5,32 cité habituellement de manière raccourcie :
“Quiconque tuerait une personne, c’est comme s’il avait tué tous les gens ensemble”.
Ce verset est très intéressant. D’abord, il faut le lire en entier :
“À cause de cela [le crime de Caïn], Nous avons prescrit sur les enfants d’Israël que quiconque tuerait une personne – non en prix d’une personne [c’est-à-dire en vertu de la loi du talion] ou en prix d’un désordre sur la terre [car il est licite d’éliminer ceux qui s’opposent à Dieu] –, [c’est] comme s’il avait tué tous les gens ensemble.
Et quiconque l’aurait fait vivre [c’est-à-dire aurait sauvé une personne], [c’est] comme s’il avait fait vivre tous les gens ensemble” (s.5,32).
Il existe un parallèle dans un passage de la Mishna , le livre qui forme la base des deux Talmuds et de l’enseignement rabbinique ; il s’agit d’un commentaire relatif au crime commis par Caïn, fils d’Adam :
“L’Homme fut d’abord créé individu unique, pour qu’on sût que quiconque supprime une seule existence, l’Écriture le lui impute exactement [= le tient pour responsable] comme s’il avait tué tout le genre humain ; mais quiconque sauve une seule existence, l’Écriture lui en tient le même compte que s’il avait sauvé tout le genre humain” (Mishna, traité Sanh. 4,5).
Entre le Coran et la Mishna, la différence tient à ce qui est ajouté dans le premier : “à moins que ce soit en prix d’une personne ou en prix d’un désordre sur la terre”.
Ces mots enlèvent le caractère absolu de l’interdiction du meurtre ; ils suggèrent même qu’il est licite ou nécessaire de tuer pour défendre l’ordre voulu par Dieu sur terre. Certes, on peut se demander s’ils n’ont pas été ajoutés après (ils viennent mal dans le texte). Mais comme c’est le texte actuel qui fait autorité, ce verset ne peut que recevoir la signification suivante : le meurtre est un mal sauf s’il s’agit de défendre son honneur (spécialement en cas d’homicide) ou l’honneur de Dieu sur terre (c’est-à-dire l’honneur… de l’Islam). Le meurtre est donc licite dans beaucoup de cas.
En fait, ce verset s5,32 pourrait fonder une ouverture à l’autre, qui commence par l’ouverture au droit qu’il a d’exister. Simplement, il faudrait que ceux qui disent faire une lecture moderne du Coran acceptent l’idée que le texte a été modifié et qu’il est donc non seulement possible mais nécessaire de se fonder sur un état antérieur du texte. Car il y a des états antérieurs du texte, malgré ce que professe l’islam orthodoxe.
Jusqu’à présent, ces « nouveaux penseurs de l’Islam » ont toujours refusé de commencer une exégèse du texte, ouvrant l’accès à un état antérieur.
Enfin, on peut lire en s18,29 :
“Croie qui veut et mécroie (« kafare ») qui veut”.
Le verset continue longuement en décrivant l’horrible feu que Dieu a préparé à ceux qui font le mauvais choix (en particulier le choix de kafarer), tandis que les versets 30 et 31 décrivent les délicieuses récompenses célestes qui attendent ceux qui font le bon choix. Le côté fataliste de ces affirmations fonde une certaine tolérance à l’égard de “ceux qui ne croient pas”, assurément, mais une tolérance dénuée de tout respect puisque Dieu les a déjà condamnés. À la limite, ces versets expriment plutôt un mépris, au nom de Dieu.
Concluons sans faux-fuyants : hormis le verset s5,32 et à condition de revenir au texte tel qu’il figurait très vraisemblablement sur le feuillet originel , aucun passage du Coran ne permet de fonder autre chose qu’une tolérance islamique, refusant tout respect aux non musulmans. Ce qui est compréhensible : le respect des personnes suppose toujours une certaine égalité devant Dieu. Ceci est impensable et expressément nié (par exemple en s6,165).
« C'est Lui qui a fait de vous les successeurs sur terre et qui vous a élevés, en rangs, les uns au-dessus des autres »
et s16,75 :
Dieu propose en parabole un esclave appartenant [à son maître], dépourvu de tout pouvoir, et un homme à qui Nous avons accordé de Notre part une bonne attribution dont il dépense en secret et en public. [Ces deux hommes] sont-ils égaux? Louange à Dieu! Mais la plupart d'entre eux ne savent pas.
Dieu Lui-même est dit placer Ses fidèles au-dessus des autres et leur enseigner à mépriser les non musulmans, qui ne possèdent au mieux qu’un droit provisoire d’exister avant d’aller en Enfer.
Tel est le message du Coran tel qu’il se présente aujourd'hui. Il n’est pas possible de dire autre chose, sinon dans le but de tromper ceux qui ne le connaissent pas.
La logique « d’opposition entre le bien et le mal » développée par l’Islam n’est pas la seule qui existe dans le monde d’aujourd’hui. Il y en a une autre, celle du relativisme absolu, qui lui est radicalement contraire – c’est en ce sens qu’on peut parler non d’un choc des civilisations mais bien d’un choc entre ces deux logiques. On ne pourra sortir de leur affrontement dialectique qu’en les regardant en face, chacun devant commencer par faire le ménage chez lui.
Dernière modification par François-Xavier le jeu. 30 mai 2013, 11:06, modifié 1 fois.

Avatar de l’utilisateur
ledisciple
Rector provinciæ
Rector provinciæ
Messages : 590
Inscription : lun. 19 déc. 2011, 5:54

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par ledisciple » mer. 03 avr. 2013, 23:14

François-Xavier a écrit :La vraie question devrait plutôt être : comment se fait il qu'il y ait une mosquée à Rome mais pas d'église à Riyadh ?
La réponse est simple, il suffit de voir quel était le pape en situation à cette époque. De 1974 où la ville fit don (!!) du terrain, au début de sa construction dix ans plus tard, 1984 donc, & son inauguration de lieu de culte en 1995, je ne vois que les deux papes, Paul VI, et Jean-Paul II (Jean-Paul I n'eut le temps de rien faire). Quel hasard pour les traditionalistes, vraiment c'est curieux.
https://fr.larousse.fr.org/wiki/Mosqu%C3%A9e_de_Rome
Ne confondons pas tout.

Il y a ceci :
Image
qui n'a absolument rien à voir avec ceci, à quelques années près par hasard en plus :
Image
(mosquée de Rome)

Credo quia absurdum.

Avatar de l’utilisateur
Johnny
Senator
Senator
Messages : 737
Inscription : mar. 26 mars 2013, 16:44
Localisation : Ile-de-France

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Johnny » jeu. 04 avr. 2013, 10:52

ledisciple a écrit : De 1974 où la ville fit don (!!) du terrain, au début de sa construction dix ans plus tard, 1984 donc, & son inauguration de lieu de culte en 1995, je ne vois que les deux papes, Paul VI, et Jean-Paul II (Jean-Paul I n'eut le temps de rien faire).
La ville de Rome, ce n'est pas le Vatican.

S'il y a des musulmans à Rome, ils ont le droit de construire une mosquée. Où est le problème ?
(il y a aussi des sex-shops à Rome....)
Se croire soi-même imparfait et trouver les autres parfaits, voilà le bonheur. (Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus)

Ce qui attire le plus de grâces du bon Dieu, c'est la reconnaissance, car si nous le remercions d'un bienfait, il est touché et s'empresse de nous en faire dix autres et si nous le remercions encore avec la même effusion, quelle multiplication incalculable de grâces ! (idem)

Avatar de l’utilisateur
ledisciple
Rector provinciæ
Rector provinciæ
Messages : 590
Inscription : lun. 19 déc. 2011, 5:54

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par ledisciple » jeu. 04 avr. 2013, 15:17

Johnny a écrit :Où est le problème ?
François-Xavier l'a pourtant clairement posé avec son immense culture et sa modestie souveraine : "pourquoi n'y a-t-il pas d'église à Riyadh?"
Pourquoi 150 millions de chrétiens se font masacrer en pays musulmans sans que Rome, ville papale avant Mussolini, n'intervienne avec fermeté? Pourquoi les églises catholiques et leurs cimetières sont actuellement profanés en masse considérable, avec un silence de plomb dessus? Mais que de jeunes musulmans caillassent les fidèles pendant la messe du dimanche, et qu'un évêque hurle "surtout pas d'islamophobie", sans se soucier des victimes vers lesquelles il ne va même pas à leur rencontre, voilà encore le même problème posé. Pourquoi?

Que Rome refuse des constructions au prix du terrain exhorbitant proposé par les traditionnalistes, et qu'avec l'accouintance de l'évêque de Rome (l'évêque de Rome est le pape, cher Gyrovague!), ces terrains soient offerts gratuitement pour la construction d'une immense mosquée avec minaret, en plus, voilà qui interroge.
Ce que l'Eglise catholique romaine a donc toujours suivi, serait désormais caduque & en erreurs depuis 2000 ans? C'est absolument impossible!

Alors, très en dessous de l'estimable François-Xavier, je m'interroge avec des faits avérés, je le montre & prouve, sans rien en conclure.
Il y a comme un malaise dans l'Eglise, qui développe sa plus grande crise historique. Ce sont encore des faits.
Rien ne vous empêche d'étudier l'histoire de l'Eglise catholique romaine, de lire les œuvres des saints papes, le dernier en date est Pie X...

Hodie afflictus sum valde sed cras solvam vincula mea.
Oremus

Avatar de l’utilisateur
archi
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1692
Inscription : jeu. 22 mai 2008, 14:57

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par archi » sam. 06 avr. 2013, 13:14

le gyrovague a écrit :
ledisciple a écrit : Que Rome refuse des constructions au prix du terrain exhorbitant proposé par les traditionnalistes, et qu'avec l'accouintance de l'évêque de Rome (l'évêque de Rome est le pape, cher Gyrovague!), ces terrains soient offerts gratuitement pour la construction d'une immense mosquée avec minaret, en plus, voilà qui interroge.
Ce que l'Eglise catholique romaine a donc toujours suivi, serait désormais caduque & en erreurs depuis 2000 ans? C'est absolument impossible!


J'ignorais que le pape, en tant qu'évêque de Rome avait son mot à dire dans la cession de terrains par la ville de Rome. Si ce fait est avéré alors je vous rejoins pleinement, le disciple, dans votre analyse. :oui:
C'est malheureusement exact:
http://www.lecfcm.fr/?p=2690 (site du Conseil Français du Culte Musulman)
Pendant le dîner dont je parlais tout à l’heure, Jean-Paul II m’a raconté l’histoire de la construction de la mosquée et du centre islamique de Rome.

Il m’a dit que le maire de la capitale italienne était venu le voir avec une lettre officielle des ambassadeurs des nations islamiques reportant leur désir commun de construire une mosquée, et lui avait demandé son avis. Non seulement le pape avait donné son accord, mais il avait demandé au maire d’offrir le terrain pour y construire la mosquée et le centre culturel gratuitement.
J'ai beau avoir du respect à bien des égards pour Jean-Paul II, son envergure, son action décisive contre le communisme, sa fidélité mariale, ses encycliques et plus généralement son action dans le sens d'un retour vers l'orthodoxie doctrinale après les dérives des années 70... ses points de vue, exprimés à nombre de reprises sur les autres religions (Assise, la visite au Bénin et les discours afférents, ce qui est dit dans l'article ci-dessus, etc...), me paraissent difficilement compatibles avec la Tradition (avec un grand T) chrétienne, et avec le comportement des chrétiens tout au long de l'histoire de l'Eglise, depuis l'époque apostolique jusqu'aux dispositions du droit canon de 1917. Quand on pense que les chrétiens qui étaient forcés à lancer une pincée d'encens aux idoles étaient excommuniés, et que l'on a beaucoup débattu pour savoir s'il était possible seulement de les réintégrer (ne parlons pas de les canoniser), provoquant même des schismes, on mesure la distance parcourue.

Je comprends donc tout à fait les réserves émises par certains. Le contraire est de l'aveuglement volontaire.

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

Avatar de l’utilisateur
Raistlin
Prætor
Prætor
Messages : 8038
Inscription : jeu. 01 mars 2007, 19:26
Localisation : Paris

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Raistlin » lun. 08 avr. 2013, 10:53

archi a écrit :Je comprends donc tout à fait les réserves émises par certains. Le contraire est de l'aveuglement volontaire.
Vous croyez ?

Le but n'est pas de dire que tout ce que fit le bienheureux Jean-Paul II fut parfait. Sans doute fut-il victime lui aussi de l'idéologie du "vivre ensemble". Néanmoins, n'est-ce pas justice que de permettre aux fidèles d'autres religions de pratiquer leur culte tant que cela ne trouble pas l'ordre public ? C'est ce que dit le concile Vatican II.

Après, on peut se demander pourquoi avoir voulu que le terrain soit cédé gratuitement. Peut-être pour faire un geste en espérant que les musulmans, voyant la bonne volonté des chrétiens, seraient plus enclins à leur permettre de vivre en paix dans les pays islamiques. L'erreur du bienheureux Jean-Paul II serait alors d'avoir profondément méconnu ce qu'est l'islam, religion qui ignore toute réciprocité.

Je suis convaincu que l'Église souffre d'un aveuglement au sujet de l'islam. Lorsqu'on voit sur ce forum des chrétiens, ayant sans doute une belle et grande foi, parler des "trois religions abrahamiques", ou dire que le Dieu de l'islam est le même que celui de Jésus-Christ sans autre précision, il y a de quoi s'inquiéter. N'oublions pas que Satan est le père du mensonge, et qu'il use de cette arme pour brouiller les pistes et endormir le peuple de Dieu. Je pense qu'un des enjeux est donc d"informer correctement les chrétiens sur ce qu'est l'islam, et sur la profonde incompatibilité théologique entre cette religion et le christianisme.

Fraternellement,
« Dieu fournit le vent. A l'homme de hisser la voile. » (Saint Augustin)

Isabelle47
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1896
Inscription : mer. 22 juin 2011, 22:49

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Isabelle47 » lun. 08 avr. 2013, 11:35

"Chrétiens et musulmans, nous avons beaucoup de choses en commun, comme croyants et comme homme. Nous croyons au même Dieu, le Dieu Unique, le Dieu Vivant, le Dieu qui crée les mondes et porte ses créatures à leur perfection (...) La loyauté exige que nous reconnaissions et respections nos différences".
(extrait du discours de Jean-Paul II au Maroc en août 1985).
Jean-Paul II engage ici son discours en envisageant un Dieu unique (commun) et non le Dieu Trinitaire, certes, mais ses mots sont précis, le sens de son discours très clair.

Qui serions-nous, aujourd'hui, pour affirmer le contraire?
Même si nous avons notre liberté de juger, pourquoi attiser incompréhensions et haines en pointant du doigt les divergences et non les points commun car, toujours selon JeanPaul II, les religions diverses "sont autant de reflets d'une unique vérité" et "A juste titre, les Pères de l'Eglise voyaient dans les diverses religions comme autant de reflets d'une unique vérité, comme des semences du Verbe".
Il est ici question de "reflets" de la Vérité, et de "semence" du Verbe, la religion chrétienne étant l'aboutissement, la complétude, la Vérité, nous en sommes tous d'accord, étant chrétiens, mais cela ne devrait pas nous permettre d'ignorer la part de vérité dans les autres religions ni les mépriser. (A moins de considérer les efforts de dialogue interreligieux de Vatican II et de Jean-Paul II comme des errreurs ou des utopies?)
Et cela ne devrait en rien amoindrir notre foi chrétienne mais au contraire nous permettre de la conforter.
"Aussi, croyez-moi, vous pratiquerez beaucoup mieux la vertu en considérant les perfections divines, qu'en tenant le regard fixé sur votre propre limon"
(Thérèse d'Avila)

Avatar de l’utilisateur
Raistlin
Prætor
Prætor
Messages : 8038
Inscription : jeu. 01 mars 2007, 19:26
Localisation : Paris

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Raistlin » lun. 08 avr. 2013, 11:46

Isabelle47 a écrit :"Chrétiens et musulmans, nous avons beaucoup de choses en commun, comme croyants et comme homme. Nous croyons au même Dieu, le Dieu Unique, le Dieu Vivant, le Dieu qui crée les mondes et porte ses créatures à leur perfection (...) La loyauté exige que nous reconnaissions et respections nos différences".
(extrait du discours de Jean-Paul II au Maroc en août 1985).
Jean-Paul II engage ici son discours en envisageant un Dieu unique (commun) et non le Dieu Trinitaire, certes, mais ses mots sont précis, le sens de son discours très clair.

Qui serions-nous, aujourd'hui, pour affirmer le contraire?
Même si nous avons notre liberté de juger, pourquoi attiser incompréhensions et haines en pointant du doigt les divergences et non les points commun car, toujours selon JeanPaul II, les religions diverses "sont autant de reflets d'une unique vérité" et "A juste titre, les Pères de l'Eglise voyaient dans les diverses religions comme autant de reflets d'une unique vérité, comme des semences du Verbe".
Il est ici question de "reflets" de la Vérité, et de "semence" du Verbe, la religion chrétienne étant l'aboutissement, la complétude, la Vérité, nous en sommes tous d'accord, étant chrétiens, mais cela ne devrait pas nous permettre d'ignorer la part de vérité dans les autres religions ni les mépriser. (A moins de considérer les efforts de dialogue interreligieux de Vatican II et de Jean-Paul II comme des errreurs ou des utopies?)
Et cela ne devrait en rien amoindrir notre foi chrétienne mais au contraire nous permettre de la conforter.
Soyons précis. Premièrement, il va de soi que les musulmans croient au Dieu Unique. Et que par définition, il n’y a qu’un seul Dieu. Donc en ce sens, chrétiens et musulmans ont le même Dieu. Mais cela ne saurait signifier que les musulmans connaissent le Dieu Unique comme les chrétiens le connaissent. A vrai dire, le Coran donne une vision déformée du Créateur et ce faisant, les musulmans n’ont devant les yeux qu’un portrait flouté. Pensez à ce que dit Jésus à la samaritaine : oui les samaritains adoraient le Dieu d’Israël, mais sans le connaître, à la différence des Juifs qui eux le connaissaient.

Mais dire que chrétiens et musulmans croient au même Dieu, sans autre précision, me semble incomplet et dangereux pour ceux qui ne connaissent pas l’islam. J’ajoute qu’un pape n’est pas infaillible dans tout ce qu’il dit et sans vouloir décrédibiliser le bienheureux Jean-Paul II, il nous est possible de prendre de la distance avec de tels propos par trop ambigus.

Quant au fait de trouver dans les autres religions des semences du Verbe, il faut préciser que les pères de l’Église parlaient des religions préchrétiennes. Il n’en va pas de même de l’islam qui est un post-christianisme comme l’explique très clairement le père Gallez. Rien dans l’islam ne prépare à l’accueil du Christ, au contraire tout s’y oppose. Il faut donc sortir de cette vision irénique d’un islam qui rapprocherait de la vérité, c’est tout l’inverse.

L’islam, dans son essence même, s’oppose au christianisme. Cette religion nie les dogmes au cœur de notre foi, pratique le révisionnisme historique pour se justifier et accuse nos pères dans la foi de falsification. La réponse adaptée ne me semble pas être dans un pont jeté entre l’islam et le christianisme – car un tel pont n’existera jamais – mais dans une réfutation en bonne et due forme de cette fausse religion. N’oublions jamais que le démon se sert de la vérité, mêlée à l’erreur, pour entretenir la confusion.

En revanche, les efforts de Vatican II et du bienheureux Jean-Paul II pour dialoguer avec les musulmans doivent être poursuivis. La question est : sur quelle base doit se faire ce dialogue ? L’irénisme et le relativisme me semblent des bases fort peu solides.

Fraternellement,
« Dieu fournit le vent. A l'homme de hisser la voile. » (Saint Augustin)

Avatar de l’utilisateur
François-Xavier
Pater civitatis
Pater civitatis
Messages : 758
Inscription : dim. 20 août 2006, 23:53
Contact :

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par François-Xavier » lun. 08 avr. 2013, 11:50

Raistlin s'inquiète à juste titre lorsqu'il voit des Chrétiens "dire que le Dieu de l'islam est le même que celui de Jésus-Christ sans autre précision".
Je crois que justement Jean-Paul II dans son fameux discours de Casablanca est bien plus précis, puisque s'il affirme qu'il n'y a qu'un Dieu unique, ce qui est incontestable, il souligne de façon forte les différences entre la conception musulmane de Dieu et la conception chrétienne de Dieu :
« La plus fondamentale est évidemment le regard que nous portons sur la personne et l'œuvre de Jésus de Nazareth. Vous savez que pour les Chrétiens, ce Jésus les fait entrer dans une connaissance intime du mystère de Dieu, et dans une communion filiale à ses dons, si bien qu'ils le reconnaissent et le proclament Seigneur et Sauveur » (Jean Paul II à Casablanca le 9 août 1985).
Et dans son livre de 1994 il précise encore cette idée :
Jean-Paul II, Entrez dans l'Espérance a écrit :« le Dieu du Coran est (…) seulement majesté et jamais Emmanuel, « Dieu avec nous » ? L'islam n'est pas une religion de rédemption (…) cependant, la religiosité des musulmans est digne de respect ».
Par ailleurs sur la fameuse question des semina verbi, "semences de verbe", j'ai la conviction qu'il ne faut pas faire d'erreur de lecture. Les semina verbi, dans le vocabulaire patristique s'entendent des religions préchrétiennes, qui ignorent la Révélation, mais que la providence a parfois utilisées comme préparation évangélique.
Mais il ne faut pas considérer les religions post chrétiennes de la même façon que les religions païennes. Cette erreur d’interprétation de Lumen Gentium conjuguée elle-même à une mauvaise lecture de Saint Augustin amène à confondre dans le discours théologique les religions préchrétiennes et les religions post chrétiennes. Si les religions préchrétiennes ont effectivement en elles des semina verbi, ces semina verbi sont recyclées dans les croyances post chrétiennes en arguments contestant la vérité chrétienne, avec des répercussions sur la théologie de toutes les religiosités, y compris des religiosités ou idéologies qui s’opposent à la révélation. Celles-ci parce qu’elles se positionnent par rapport à la révélation qu’elles connaissent, se construisent en réalité contre elles. Le succès ou l’échec de ces idéologies, religiosités dévoyées ou croyances, ou leurs dérives les font apparaître plus ou moins avec le temps comme des antichristianismes. Il n’empêche pourtant que théologiquement parlant, ce sont des oppositions des réactions, des simulacres de salut, et non la proposition d’un bonheur éternel commencé dès cette vie.
Le Catéchisme de l’Eglise catholique (C.E.C) n’est pas exempt de cafouillages autour de la question du salut, en particulier en son numéro 1281 qui voulait définir qui est sauvé ; celui-ci était ainsi formulé dans la première édition (datant de 1992) :
CEC 1281 a écrit :“Ceux qui subissent la mort à cause de la foi, les catéchumènes et tous les hommes qui, sous l’impulsion de la grâce, sans connaître l’Église, cherchent sincèrement Dieu et s’efforcent d’accomplir sa volonté, sont sauvés, même s’ils n’ont pas reçu le Baptême (cf. LG 16)”.
On y lisait donc une affirmation d’inspiration journetiste sur le salut des non chrétiens, assortie d’une référence inexacte à Lumen Gentium, car ce texte n’évoque qu’un appel universel au salut, sans dire ni quand ni comment. D’où la correction apportée aux éditions suivantes :
CEC 1281 2ème édition a écrit :“Ceux qui subissent la mort à cause de la foi, les catéchumènes et tous les hommes qui, sous l’impulsion de la grâce, sans connaître l’Église, cherchent sincèrement Dieu et s’efforcent d’accomplir sa volonté, peuvent être sauvés, même s’ils n’ont pas reçu le Baptême (cf. LG 16)”.
Mais la phrase reste fausse, car elle signifierait alors que les martyrs de la foi ne sont pas sauvés par le fait même de leur martyre. En fait, l’erreur du rédacteur consista à vouloir mettre sur un même plan abstrait et dans une même phrase les martyrs, les catéchumènes et les non chrétiens : c’était s’enfermer dans une impasse – au minimum, il aurait dû couper la phrase en deux.
Il faut donc bien faire la différence entre le salut « en puissance » et le salut « en acte ». La capacité à Dieu des non – Chrétiens, les destine – mais pas contre leur propre volonté ! – à la vision de Dieu qui les a créé pour cela. Il faut donc aussi faire la différence entre les préchristianismes et les post-christianismes, les seconds étant la plupart du temps en réalité des obstacles, des empêchements à l’acquisition du salut, puisqu’ils recyclent et instrumentalisent l'évènement de la révélation. Si cela n’est pas compris – et pour cela il faut être capable de se défaire d’une certaine mauvaise conscience vis à vis de la colonisation, en s’attachant à la vérité chrétiennne et non pas à la question de la « suprématie civilisationnelle » – à coup sûr on se pose alors la question de l'existence d'un plan de Dieu sur l'islam ; on en déduit ensuite que Dieu désire qu'il y ait des Juifs, des Chrétiens et des Musulmans, et qu'en fin de compte tous sont dans une certaine mesure le « peuple de Dieu » tel que l’aurait défini Vatican II. Et enfin, on finit par s’attendre à ce que de l'islam, par l’islam et dans l’islam, le visage du Christ soit renouvelé. Le pas est vite franchi vers la reconnaissance en Mahomet sinon d'un prophétisme, au moins d'une expérience mystique réelle et belle, correspondant à une volonté positive de Dieu pour rappeler quelque chose aux Chrétiens. Tout cela reposant sur une mythique « première période mahométanes mecquoise », que l'islamologie contemporaine réfute avec des arguments scientifiques crédibles.

Avatar de l’utilisateur
Raistlin
Prætor
Prætor
Messages : 8038
Inscription : jeu. 01 mars 2007, 19:26
Localisation : Paris

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Raistlin » lun. 08 avr. 2013, 11:58

Merci François-Xavier pour cette excellente mise au point (et notamment pour ces précisions que vous apportez sur la pensée du bienheureux Jean-Paul II).

Beaucoup reste à faire pour que toute la vérité soit faite sur l'islam.
« Dieu fournit le vent. A l'homme de hisser la voile. » (Saint Augustin)

Isabelle47
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1896
Inscription : mer. 22 juin 2011, 22:49

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Isabelle47 » lun. 08 avr. 2013, 14:23

Merci François-Xavier, votre développement est très intéressant.

Les subtilités entre salut en puissance/salut en acte, les mésinterprétations des textes de Vatican II et ceux du Bienheureux Jean-Paul II, les réflexions contradictoires à propos du plan de Dieu sur l'Islam, tout cela est très complexe pour un non théologien, surtout si l'énoncé du catéchisme (celui de 1992 que vous citez) - censé tout de même simplifier et éclairer les choses et mettre ces débats et leurs synthèses à la portée de tout un chacun - prête, lui-même, à confusion.
"Aussi, croyez-moi, vous pratiquerez beaucoup mieux la vertu en considérant les perfections divines, qu'en tenant le regard fixé sur votre propre limon"
(Thérèse d'Avila)

Avatar de l’utilisateur
Johnny
Senator
Senator
Messages : 737
Inscription : mar. 26 mars 2013, 16:44
Localisation : Ile-de-France

Re: Urgence d'avoir un discours sur l'islam dans le catéchis

Message non lu par Johnny » lun. 08 avr. 2013, 14:45

Matthew a écrit :Ne faut pas non plus confondre islam sunnite (qui effectivement est très virulent à notre égard) et islam chiite (eux ils sont plutôt sympas et tolérants avec les chrétiens, on peut leur parler et ils nous ressemblent beaucoup dans la recherche de l'Amour de la vérité et de Dieu) Le soucis, c'est que l'islam est dominé par le sunnisme... Et pas le chiisme. L'un est plus "agressif" que l'autre, l'un conduit à l'intolérance l'autre à la tolérance.

Pour faire simple et caricaturer, sunnites = protestants et chiites = catholiques. J'aime bien les chiites.
Bachar n'est pas cool....et il est chiite.

Mais c'est très vrai, et les pays occidentaux sont des imbéciles car alliés avec les sunnites et wahabites, contre les chiites (sauf en Irak) : le dialogue inter-religieux est potentiellement plus facile avec les chiites, car ils n'ont pas figé la sunna il y a 10 siècles, et on partage le culte de Marie avec eux (au Liban, il y a des lieux de culte communs, où tout se passe très bien !)

C'est le régime semi-totalitaire iranien qui donne une mauvaise image du chiisme, car ils se sont fourvoyés à mélanger la religion avec l'État . Mais à long terme, on devrait logiquement être copains avec les Iraniens.
Se croire soi-même imparfait et trouver les autres parfaits, voilà le bonheur. (Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus)

Ce qui attire le plus de grâces du bon Dieu, c'est la reconnaissance, car si nous le remercions d'un bienfait, il est touché et s'empresse de nous en faire dix autres et si nous le remercions encore avec la même effusion, quelle multiplication incalculable de grâces ! (idem)

Répondre

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Bing [Bot] et 85 invités