Pour plus de clarté, j'ouvre ici un nouveau sujet qui se veut la suite des discussions entamées là :
http://www.cite-catholique.org/viewtopi ... 798#p91798
Ce sujet a explosé, ça va être difficile de répondre à tout, surtout que je n'ai pas beaucoup de temps. Ne m'en veuillez donc pas si je n'aborde que quelques points. Ce n'est pas une fuite, sinon le temps qui fuit
Sur ma conception de l'absolu, et en réponse à Cgs : Si, Dieu est, justement, mais il n'existe pas. Je fais une différence entre "être" et "exister". Exister, c'est être un être particulier, localisé dans l'espace-temps (et susceptible d'interagir avec les autres êtres particuliers existant au même moment). Être, c'est plus fondamental et ontologique comme notion. Les universaux, à mon sens, sont, mais ils pourraient ne pas exister (comprendre : ne pas être instanciés par un être concret). La beauté pourrait être en l'absence de tout objet beau. Le bleu pourrait être en l'absence de tout objet bleu. Etc.
En réponse à Raistlin :
- Quand on parle de théorie de l'évolution, ce que l'on veut dire, c'est simplement que les espèces changent au cours du temps, que les espèces actuelles descendent d'autres espèces qui vivaient avant, et que de nouvelles espèces apparaissent qui descendent d'espèces préalables, etc. La théorie de l'évolution s'oppose donc au fixisme, et elle ne suscite guère d'objections sérieuses. Il suffit d'examiner avec attention le matériel paléontologique et géologique disponible, ainsi que les êtres vivants actuels (y compris leur génome), pour se convaincre de la réalité d'une évolution des êtres vivants. Il ne faut pas se tromper sur la définition du mot "théorie". Une théorie, en sciences, ce n'est pas une simple spéculation sans fondement, c'est un ensemble organisé logiquement (voire mathématiquement) de faits empiriques. Il peut aussi y avoir ce qu'on appelle des entités théoriques (notamment en physique). Ces dernières ne peuvent pas se prêter à vérification expérimentales, mais sont néanmoins introduites parce qu'elles simplifient la théorie, la rende plus élégante. Pour en revenir à l'évolution : Là où des objections sérieuses peuvent poindre, c'est surtout relativement aux mécanismes par lesquels les êtres vivants évoluent. Dans ce domaine, cependant, il n'y a aucune hypothèse considérée comme définitivement admises, même si certaines hypothèses sont plus probables que d'autres.
- Sur la méthode de raisonnement au sujet de Dieu :
Au fond, votre démarche semble être plutôt inductive, tandis que ce que je proposais comme argument est plutôt déductif. A votre guise ! Je vais procéder selon votre méthode (enfin je vais essayer) : admettons que je vous accorde qu'en effet, en prenant appui sur le réel observé, l'Univers et la vie ne peuvent exister tout seuls et qu'un Créateur est nécessaire. Maintenant, on peut peut-être aller plus loin. Continuons d'observer le réel et demandons-nous si ce Créateur est bienveillant, malveillant ou indifférent. Nous constatons qu'il y a beaucoup de Mal et de souffrance dans le monde. Cela nous indique que ce Créateur est plutôt malveillant ou indifférent... Peut-être pourrait-il être bienveillant quand même, mais cela amène à des complications, puisqu'il faut à présent essayer de comprendre d'où vient tout ce Mal et toute cette souffrance. Il est beaucoup plus simple et naturel, en partant de l'observation de l'Univers et de la vie, d'arriver à un Créateur non-bienveillant.Raistlin a écrit :L'existence de Dieu soit se poser, à mon sens, d'après le réel observé. L'Univers et la vie peuvent-ils exister tout seuls ou bien un Créateur est-Il nécessaire ? Il s'agit d'une question de philosophie réaliste.Pour vous, c'est quoi un argument ayant quelque chose à voir avec la question ?
[...]
Voilà pourquoi je pense que pour ce qui concerne l'existence de Dieu, il faut rester au niveau du problème de l'existence de l'Univers et de la vie.
J'ai un peu de mal à vous suivre, donc excusez-moi par avance si je profère des "hérésies" relativement à votre penséeRaistlin a écrit :Invoquer des arguments du type la présence du Mal, la multiplicité des religions, etc. fait dévier la question. Le problème, c'est que ces arguments sont trop souvent subjectifs : ils reflètent notre conception de Dieu, les intentions qu'on Lui prête, la manière dont on juge qu'Il devrait se comporter. Bref, ces arguments sont irrecevables car ils analysent le comportement de Dieu d'après notre propre comportement. Ce qui, si on admet que Dieu est le Tout-Autre, est forcément erroné.
Vous dites que ces arguments sont trop souvent subjectifs : "trop souvent" donc pas toujours ? En tout cas, j'avais insisté sur la nécessité de partir d'une définition de Dieu qui soit aussi claire et précise que possible pour mener à bien ce type d'argumentation "poppérienne". J'aurais peut-être dû rajouter : et conforme (cette définition de Dieu) à ce que les croyants en disent. Soit. Si je vous concède cela (enfin ce n'est même pas une concession puisque je suis d'accord), est-ce que un argument basé sur le Mal est recevable ? J'ajoute aussi que la définition du Mal qu'il faudra faire intervenir doit également être claire, précise, et consensuelle. Enfin, par Mal, il faut bien sûr entendre quelque chose d'objectif. Nous sommes d'accord que des jugements du type : "ce qui se passe dans le monde ne me plaît pas", ne sauraient constituer des prémisses valables de notre raisonnement
Une dernière chose : j'admets sans problème la réalité d'un absolu nécessaire, éternel et immuable, et premier principe de toute chose. Peut-être cela va-t-il vous étonner mais la plupart des scientifiques l'admette également (parfois sans en prendre pleinement conscience) : dans la théorie du Big Bang, qui est admise assez largement, la singularité initiale en tant que telle, i.e. le Big Bang, est hors de l'espace-temps (elle n'est donc ni événement, ni un objet), puisque c'est à partir du Big Bang que le temps et l'espace se déploient. Les modèles physiques ne peuvent remonter en-deçà de l'ère de Planck, à la limite de laquelle les variables tendent vers des valeurs infinies (tiens tiens...). Quand on dit que le Big Bang a eu lieu il y a 15 milliards d'années, c'est un abus de langage. Ce qu'il faut comprendre, c'est que l'ère de Planck s'achève il y a 15 milliards d'années. Le Big Bang en tant que tel est une extrapolation métaphysique.
Les arguments "poppériens" n'ont donc pas vocation à disqualifier tout absolu ou toute transcendance, mais seulement à délimiter le possible en éliminant l'impossible. L'argument du Mal n'est donc pas un argument contre l'existence de toute divinité, mais seulement contre l'existence de toute divinité qui conjuguerait à la fois la puissance d'action et la bonté. Maintenant, reste à savoir si le Dieu des chrétiens est une divinité de ce type.
Bien cordialement.