Le fait de lire les évangiles est-il une prière ?

[René]

Bonjour
tout ou presque est dans le titre !
Certains jours, pour de multiples raisons très différentes les unes des autres, je n'arrive guère à prier comme je l'entends; avec attention, concentration et amour.
Prier, selon mon avis, doit venir du fond de l'être, je dirai presque des tripes et consister en un don de soi.Un don de soi et aussi, une volonté d'union et d'amour.
Bref, la sincérité de la démarche ne doit faire aucun doute bien sur.
Or, il arrive que le physique, le moral ou autre compromettent cet état d'esprit.
Ces jours là, je me "réfugie" dans la lecture des évangiles ou d'autres textes bibliques.
Ma question est simple, du fait de mon insuffisance mais de ma sincérité par ailleurs, la lecture des textes peut-elle constituer une prière, une forme de prière ?
En fait, je tente de compenser un déficit par une autre forme de pratique.
Par la prière, je tente de m'unir à mon créateur, de lui dire ma foi, mon amour et celui que j'ai pour autrui; bien des choses...quand je n'arrive à faire parler mon cœur ou mon esprit, je préfère l'abstinence au stricte formalisme.
Selon moi, prier ne doit pas devenir une habitude mais demeurer un "geste" d'amour.
Merci de me dire votre point de vue.
René

[Invité]

Thérèse d'Avila prend une comparaison l'arrosage du jardin
on va tirer l'eau du puits dans l'oraison on s'aide d'une parole, d'un livre, on peine pour rester en présence du Seigneur
On met un canal pour amener l'eau. Là c'est plus facile. Une parole nous a accrochés, nous avons moins de "distractions"
Il y a la pluie, là, nous n'avons rien à faire, c'est le Seigneur qui nous manifeste sa présence
Nous avons à jouer avec tout cela suivant les lieux, les temps les soucis, les joies...........
De toute façon lire la Parole de Dieu, revenir sur des passages qui nous ont marqué, redire souvent une parole que nous avons dans le coeur nourrient notre prière comme un bon compost alimente la plante. Vous ne le voyez pas tout de suite mais petit à petit la prière s'en trouve faciliter, plus riche, plus intérieure.
Même si vous avez l'impression de pedre votre temps à la lecture de certains passages, plus tard cela deviendra une aide parce que pour un tout autre sujet vous vous souviendrez de ce passage qui sera à ce moment là une lumière.
Ne vous lassez pas de lire, réfléchir méditer prier sur la Parole de Dieu. On ne se lasse pas de l'air que l'on respire. C'et vital

[Harfang]

Hum... très souvent je suis fatigué ou je n'ai pas très envie de prier et pourtant je fais quand même l'effort de me mettre à genoux, de réciter les prières habituelles et j'ai parfois - pas toujours - de "bonnes surprises" dans le sens où même si au début je n'avais pas envie ensuite la prière se transforme un peu en ce que vous décrivez au début.

Donc moi je pense que même si des raisons physiques, morales... ne portent pas à la prière il ne faut pas se décourager et quand même faire l'effort de se recueillir et de se livrer à la prière.

[archi]

Par la prière, je tente de m'unir à mon créateur, de lui dire ma foi, mon amour et celui que j'ai pour autrui; bien des choses...quand je n'arrive à faire parler mon cœur ou mon esprit, je préfère l'abstinence au stricte formalisme.
Selon moi, prier ne doit pas devenir une habitude mais demeurer un "geste" d'amour.

Bonjour.

Je pense que vous êtes trop idéaliste: la prière exige aussi de la régularité et de la fidélité, même quand l'état mental n'y est pas.

Il est certain qu'il y a plein de petites choses qui empêchent de prier comme on voudrait. Mais quand on est submergé par la vie courante, ses préoccuppations, ses distractions, il est important de se ménager un moment de prière régulier pour en sortir, sinon, votre "abstinence" se transformera en longues périodes absorbé par les plaisirs du monde. Il ne faut pas se faire d'illusion, une prière régulière aura forcément un aspect mécanique, ce qui n'exclut pas une prière plus personnelle et méditative (mais pour laquelle on n'arrivera pas toujours à être dans l'état mental qui va bien).

Je dois dire que j'ai très longtemps eu du mal à me trouver une forme de prière régulière, que j'arrive à pratiquer sans oublier une fois sur 2, et le reste du temps en étant distrait pendant la prière.

J'ai finalement pris l'habitude de dire 1 Pater et 3 Ave au moment de me coucher, c'est court, c'est mécanique mais maintenant je m'y accroche fidèlement, je n'arriverais plus à éteindre la lumière sans les avoir récités. Ca m'a constitué une base pour d'autres formes de prière plus élaborées, comme le Bréviaire ou le Rosaire.

Donc essayez de vous trouver une prière courte et mécanique et de décider d'une heure fixe où vous prendrez quelques secondes pour la réciter.

Si les soucis et plaisirs du monde envahissent le reste de votre journée, il restera toujours le rayon de lumière de ce rendez-vous avec le Seigneur. Evidemment, quand vous pouvez vous ménager d'autres rendez-vous pendant la journée, même sans avoir la même régularité, ne vous gênez pas.

Maintenant, pour ce qui est du titre du fil... la lectio divina est une pratique qui a certainement de valeur en elle-même. Je pense que si on veut en faire la base de sa prière, il faut là aussi être capable de s'imposer un rendez-vous régulier. Maintenant, d'autres vous parleront certainement mieux que moi de ses contraintes, et des modalités d'une lecture vraiment spirituelle des Ecritures (je pense qu'il ne s'agit pas simplement d'ouvrir un chapitre et de lire).

In Xto,
archi.

[Théophile]

Quel bel amour René vous avez de Dieu !

[René]

Bonjour
je vous remercie infiniment de vos remarques, et de la richesse qu'elle contiennent !!
Touriste, et Archi, je ne suis pas trop idéaliste, je ne crois pas.
Prier est un moment d'intimité où le désintéressement total par rapport à ce monde atteint un sommet.
C'est le seul moment où l'on puisse être seul avec son créateur, lui parler, lui confier, lui demander et lui donner aussi !!
J'ai mis des décennies à comprendre, il était temps ! Mais aussi, la prière donne et apporte bien plus qu'elle ne coute !
Mon voeu pour autrui sera exaucé, mon intention sera retenue, ma communion sera profonde, que de choses ...
Prier est un enrichissement, alors, raison de plus et évidente que de le faire avec sincérité; c'était le but de ma question.
Je vais réfléchir à vos remarques et vous remercie encore de votre aide.
Bonne journée
René

[gerardh]

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Bonjour,

Pour moi, la lecture des évangiles comme la prière sont des choses très bonnes, mais distinctes l'une de l'autre. Ainsi par exemple par la prière on s'adresse à dieu, tandis que par la lecture, c'est Dieu qui nous parle.


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[gerardh]

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Bonjour,

La prière et la lecture biblique sont deux choses très bonnes mais très distinctes l'une de l'autre. Ainsi par exemple par la prière on s'adresse à Dieu, tandis que par la lecture c'est Dieu qui nous parle.

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[Xavi]

Ma question est simple, du fait de mon insuffisance mais de ma sincérité par ailleurs, la lecture des textes peut-elle constituer une prière, une forme de prière ?
... Par la prière, je tente de m'unir à mon créateur, de lui dire ma foi, mon amour

Avec vous, je réponds oui à la question lorsque, comme vous le dites fort bien, vous tentez par là de vous unir au Seigneur, de lui "dire", même sans mots, ce que vous voulez lui exprimer.

Bien sûr, cela ne contredit en rien toutes les observations bien justes que plusieurs ont exprimées, mais ne confondons pas nos efforts cérébraux parfois intenses pour dire, penser ou répéter toutes sortes de paroles et de réflexions de manière informelle ou par des formules de prières mises à notre disposition par Jésus lui-même, l'Ecriture Sainte ou l'Eglise.

Prions sans cesse, nous dit St Paul (1 Th 5, 17) : ce conseil suffit à nous montrer l'infinie variété des modes de prières qui nous unissent au Seigneur. Aucune n'écarte les autres.

[coeurderoy]

La lectio divina n'a pas de règles formelles (en ce qui me concerne) : une "simple" lecture (ou audition !) d'un passage d'Evangile peut nous jeter dans l'action de grâce, le repentir ou la louange, bref se transformer, sans qu'on s'y attende forcément en une véritable prière du coeur (appel, remerciement, adoration d'un mystère...). Je confirme ce qu'en dit Harfang : passé l'effort de "s'y mettre" les jours où l'on en a guère envie, on n'est jamais déçu en général. Et puis, si notre prière est sèche, désertique et déçoit notre attente, l'hommage que nous rendons à Dieu en Lui accordant un peu de temps et d'attention demeure un culte très pur et dénué de retour sur notre petit "moi" spirituel...

Un conseil (venu des pères de l'Eglise) : sachons, comme le Boeuf, ruminer et bien mastiquer cette parole divine afin de nous en nourrir très substantiellement !

cordialement !

[Invité]

Parfois, suivant les occupations, il est difficile de dégager 15 à 20 minutes. C'est rare que l'on ne puisse pas trouver 15 à 20 fois 1 minute. Pour cela la répétition d'une invocation que nous aimons bien, d'un parole de l'évangile ou une en relation avec le temps liturgique peut nous aider.
Par exemple pour ce temps de Noël reprendre le chant des anges: Gloire à Dieu et paix sur terre.

[Pierre-Antoine]

Lire les Evangiles, c'est prier. Ecouter la parole de Dieu, c'est prier.

Dans la liturgie des heures, les religieux et les clercs ne font que proclamer la parole de Dieu par des passages de la bible et des psaumes. Qui douterait qu'il s'agisse là d'une prière ?

La lecture de la bible est une forme de prière particulière : c'est une prière de méditation où l'attitude première est d'écouter Dieu.

La prière est un dialogue. Souvent nous parlons (en secret certes, mais nous parlons). Laissons nous dans notre prière la palce à Dieu d'en caser une ? Lorsque nous lisons la bible, c'est ce que nous faisons, nous nous mettons à l'éoute de la parole de Dieu à l'écoute de Dieu.

Les trois formes de la prière chrétienne sont l'oraison, la méditation et la prière vocale. Souvent on oublie les deux premières pour ne garder que la troisième.

[Etrigan]

Utiliser la prière du coeur peut être utile : http://www.pagesorthodoxes.net/coeur/coeur-c.htm

[Invité]

En complément d'Etrigan pour vous donner du courage je n'hésite pas à vous copier un passage des" Récits d'un pèlerin russe"

.....Pendant une semaine, je m'exerçai dans la solitude de mon jardin à l'étude de la prière intérieure, en suivant exactement les conseils du starets. Au début tout semblait aller bien. Puis, je ressentis une grande lourdeur, de la paresse, de l'ennui, un sommeil insurmontable et les pensées s'abattirent sur moi comme les nuages. J'allai chez le starets plein de chagrin et lui exposait mon état. Il me reçut avec bonté et me dit:
- Frère bien aimé, c'est la lutte que mène contre toi le monde obscur, car il n'est rien qu'il ne redoute tant que la prière du coeur. Il essaye de te gêner et de te donner le dégoût pour la prière. Mais l'ennemi n'agit que selon la volonté et la permission de Dieu, dans la mesure où cela nous est nécessaire. Il faut sans doute que ton humilité soit encore mise à l'épreuve....................................
Tu sais que la raison de tout homme est dans sa poitrine... A cette raison enlève donc toute pensée et donne lui le " Seigneur Jésus Christ, ayez pitié de nous" Efforce-toi de remplacer par cette invocation intérieure toute autre pensée et à la longue cela t'ouvrira sûrement le seuil de ton coeur..................
Voici un rosaire avec lequel tu pourras faire au début trois mille oraisons par jours. Debout, assis, couché ou en marchant, dis sans cesse, Seigneur Jésus Christ, ayez pitié de moi! Doucement et sans hâte. Et récite exactement trois mille oraisons par jour sans en ajouter ou retrancher aucune. C'est ainsi que tu parviendras à l'activité perpétuelle du coeur.
Je reçu avec joie ces paroles du starets et m'en retournai chez moi. Je me mis à faire exactement et fidèlement ce qu'il m'avait enseigné. Pendant deux jours, j'y eux quelque difficulté, puis cela devint si facile que lorsque je disais la prière, je sentais comme un besoin de la reprendre et elle coulait avec facilité et légèreté sans rien de la contrainte du début.
Je racontai cela au starets, qui m'ordonna de réciter six mille oraisons par jour et me dit:
Sois sans trouble et efforce-toi seulement de t'en tenir au nombre d'oraisons qui t'es prescrit: Dieu te fera miséricorde.
Pendant toute une semaine, je demeurai dans ma cabane solitaire à réciter chaque jour mes six mille oraisons sans me soucier de rien autre et sans avoir à lutter contre les pensées; j'essayais seulement d'observer exactement le commandement du starets. Qu'arriva-t-il? Je m"habituais si bien à la prière que, si je m'arrêtais un cours instant, je sentais un vide comme si j'avais perdu quelque chose; dès que je reprenais ma prière, j'étais de nouveau léger et heureux. Si je rencontrai quelqu'un, je n'avais plus envie de parler, je désirais seulement être dans la solitude et réciter la prière; tellement je m'y trouvais habitué au bout d'une semaine.
Le starets qui ne m'avait pas vu depuis dix jours vint lui même prendre de mes nouvelles. Je lui expliquai ce qui m'arrivai. Après m'avoir écouté, il me dit:
-Te voila habitué à la prière. Vois-tu, il faut maintenant garder l'habitude et la fortifier: ne perd pas de temps et, avec l'aide de Dieu, prends la résolution de réciter douze mille oraisons par jour; demeure dans la solitude , couche-toi un peu plus tard et viens me voir deux fois par mois.
Je me conformai aux ordres du starets et le premier jour, c'est à peine si je parvins à réciter douze mille oraisons que j'achevai tard dans la soirée. Le lendemain je le fis plus facilement et avec plaisir. Je ressentis d'abord de la fatigue, une sorte de durcissement de la langue et une raideur dans les mâchoires, mais sans rien de désagréablement, ensuite j'ai eu légèrement mal au palais, puis au pouce de la main gauche qui égrenait le rosaire, tandis que mon bras s'échauffait jusqu'au coude, ce qui produisit une sensation délicieuse. Et cela ne faisait que m'inciter à réciter encore mieux la prière. Ainsi pendant cinq jours j'exécutai fidèlement les douze mille oraisons et en même temps que l'habitude, je reçus l'agrément et le goût de la prière.
Un matin de bonne heure, je fus comme réveillé par la prière. Je commençais à dire mes oraisons du matin, mais ma langue s'y embarrassait et je n'avais d'autre désir que de réciter la prière de Jésus. Dès que je m'y fus mis je devins tout heureux, mes lèvres remuaient sans effort. Je passai toute la journée dans la joie. J'étais comme retranché de tout et me sentais d'un autre monde. Je terminais sans difficulté mes douze mille oraisons avant la fin du jour. J'aurais beaucoup voulu continuer, mais je n'osais dépasser le chiffre indiqué par le starets. Les jours suivants, je continuai d'invoquer le nom de Jésus Christ avec facilité et sans jamais me lasser.
J'allais voir le starets et lui racontai tout cela en détail. Lorsque j'eus fini, il me dit:
-Dieu t'a donné le désir de prier et la possibilité de le faire sans peine. C'est là un effet naturel produit par l'exercice et l'application constante, de même une machine dont on lance peu à peu le volant continue ensuite de tourner d'elle-même, mais pour qu'elle reste en mouvement, il faut la graisser et lui donner parfois un nouvel élan. Tu vois maintenant de quelles facultés merveilleuses le Dieu ami des hommes a doué notre nature sensible elle-même; et tu as connu les sensations extraordinaires qui peuvent naître même dans l'âme pécheresse dans la nature impure que n'illumine pas encore la grâce. Mais quel degré de perfection, de joie et de ravissement n'atteint pas l'homme lorsque le Seigneur le veut bien lui révéler la prière spirituelle spontanée et purifier son âme de ses passions. C'est un état inexprimable et la révélation de ce mystère est un avant goût de la douceur céleste. C'est le don que reçoivent ceux qui cherchent le Seigneur dans la simplicité d'un coeur débordant d'amour!
Désormais je te permets de récité autant d'oraisons que tu le veux, essaie de consacrer tout le temps de la veille à la prière et invoque le nom de Jésus sans plus compter, t'en remettant humblement à la volonté de Dieu, et espérant en son secours; il ne t'abandonnera pas et dirigera ta route.
Obéissant à cette règle, je passais tout l'été à réciter sans cesse la prière de Jésus et je fus tout à fait tranquille. Durant mon sommeil, je rêvais parfois que je récitais la prière. Et, pendant la journée, lorsque qu'il m'arrivais de rencontrer des gens, ils me semblaient aussi aimables que s'ils avaient été de ma famille. Mais je ne restais pas avec eux. Les pensées s'étaient apaisées et je ne vivais qu'avec la prière; je commençais à incliner mon esprit à l'écouter et parfois mon coeur ressentait de lui-même comme une chaleur et une grande joie. Lorsqu'il m'arrivait d'entrer dans une église, le long service de la solitude me paraissait court et ne me lassait plus comme auparavant. La cabane solitaire me semblait un palais splendide et je ne savais comment remercier Dieu de m'avoir envoyé, à moi pauvre pécheur, un starets à l'enseignement si bienfaisant.

[René]

Bonsoir
je tenais à vous remercier pour vos remarques !
Un éclairage différent, une transmission d'expérience personnelle, le forum est riche quant aux apports divers qu'il me donne...
Merci et bonne soirée
René