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par cmoi » lun. 27 janv. 2020, 9:39
Bonjour à tous,
comme chaque lundi matin, je découvre vos échanges du WE et je suis bien embarrassé.
Ne pouvant choisir à qui répondre quoi, il y aurait trop de dispersion, je me permets de poursuivre mon analyse personnelle de ce mouvement dans son histoire après Vatican II.
Une mention spéciale à celui qui a écrit que Mgr Lefèbvre ne défendait pas tant la messe en latin à l'origine : je confirme et l'ai d'ailleurs déjà laissé entendre. même si je n'en suis pas encore arrivé là dans mon analyse.
Je connais bien les critiques que les Traditionalistes firent de la nouvelle messe. Elles se firent scientifiques.
On compara le nombre de génuflexions (12 à 2) de signes de croix (47 à 7) de citations (7 à … variable selon les options mais négligeable en comparaison) de la Sainte Vierge et surtout de ses « titres » (bienheureuse, toujours vierge, mère de Dieu, elle n’intercède plus, elle n’est plus médiatrice de grâces) devenus manquants et on déclara que la nouvelle messe était une insulte à sa personne, voulue par le diable son ennemi mortel, pour appauvrir le dogme car il fallait obligatoirement le mentionner voilé sous ces vocables pour que la messe (presque soit valide) lui fasse honneur.
Prenaient-ils les chrétiens pour des imbéciles incapables de se souvenir de qui elle leur était et de leur catéchisme, si cela n’était pas évoqué pendant la messe ? Personne ne le leur reprocha… chacun essayait de s’habituer au changement et admirait ceux qui étaient capables de le « décortiquer » et d’avoir un avis clair et comparatif.
On oublia de dire que ces génuflexions étaient éprouvantes pour les vieux prêtres et transformaient la messe en exercice sportif (pour les servant aussi, mais cela leur était plus un amusement, une distraction à maîtriser dans le contrôle de soi), que le cumul de ces signes de croix pouvait donner le sentiment d’une superstition et détourner de l’essentiel, comme s’ils étaient magiques et nécessaires au mystère de la transsubstantiation.
On oublia que 4 de ces citations mariales venaient de la répétition du confiteor, qui avait été « simplifié » : on ne la citait plus qu’une fois et sans son titre de bienheureuse, ni de « toujours » vierge, on ne citait plus St Michel, ni Jean-Baptiste, ni les apôtres Pierre et Paul, ils étaient tous englobés dans « les anges et tous les saints » que l‘on suppliait de prier pour nous mais à qui on ne se confessait plus.
Or pourquoi se confessant à Dieu l’aurait-on fait en plus envers eux ? Ne suffirait-il pas de les prier et sans en privilégier aucun, sinon la Ste Vierge ? Comme témoins disait-on avant, et que cela manquerait maintenant... Quant à l’oubli du tandem formé par Pierre et Paul, et répété plus loin dans le canon des premiers papes et martyrs, c’était une abomination, la négation de la succession apostolique, etc.
On décida que ces suppressions relevaient d’une volonté délibérée d’effacer la tradition, alors qu’elles provenaient de la consultation d’enfants purs qui naïvement, exprimèrent qu’il y avait beaucoup de superflu et de répétitions dans cette messe qu’ils connaissaient et avaient déjà « jugée » comme naïvement le font les enfants : pourquoi 2 confiteor séparés et bout à bout ? Pourquoi « ces » martyrs et papes et pas d’autres, dont l’énumération était pourtant longue ? A tous ces pourquoi il y avait bien sûr eu des explications et chaque suppression fut alors jugée comme relevant d’une volonté délibérée et mauvaise.
On décida que ces appauvrissement (et je n’ai pas encore ici mentionné les prières disparues et non remplacées) qui conduisait à un rapprochement voulu d’avec les protestants, était le signe d’une décadence, presque d’une hérésie s’ils se « reconnaissaient » dans cette nouvelle messe et pouvaient la dire. Que cette réforme dont l’autre but avoué et celui-ci non contestable était de faire davantage participer les fidèles, conduisait à un autre appauvrissement, celui de l’intériorité, au profit d’une participation purement extérieure dont on rappela que la raison d’être était de favoriser l’union intérieure et spirituelle, la participation surnaturelle qui unissait nos âmes à Dieu.
On rappela le sens des étapes et des mots (au moins une bonne conséquence !) et que les récitations à voix basse et l’usage du latin poursuivaient ce but d’intériorité, maintenant dévastée puisque les anciens moyens manquaient.
On refusa de juger pertinent les nouveaux : moins de mots, qu’ils soient compréhensibles et dans la langue maternelle, celle du cœur, plus de vrai silence, moins de rappels communs pour qu’ils soient plus personnels et précisément intérieurs.
On déclara qu’il n’était pas du tout inconcevable qu’un fidèle reste silencieux pendant tout le saint sacrifice, pourvu qu’il se sente séduit et happé, inspiré par les gestes et l’attitude, l’incantation presque magique (usage du latin : mais ce mot en dénonce le risque et n’était par conséquent pas employé par eux…) du prêtre et son exemple.
Et c’est vrai qu’avec l’ancienne messe, un mauvais prêtre pouvait « faire illusion » du fait du rite, tandis qu’avec la nouvelle, il capotait…
Nous ne le savons tous que trop, aujourd’hui !
Or précisément cela oblige… et donna à force de nouveaux prêtres extraordinaires (génération Jean-Paul II) que les traditionalistes ignorent…
Ces nouveaux prêtres qui n’ont pas entendu ces critiques, qui n’ont pas vu « ce qui manquait » à cette messe qu’on leur enseignait ni que cela manquait : l’ignorent-ils pour autant ? Non…
Il faut croire que la place de ces choses n’était pas nécessaire partout là où les intégristes les mettait…
Pourtant ces intégristes ont eu des enfants, et qui continuent à voir ce qu’on leur a dit de voir dans cette messe (l’auraient-ils vu sinon ?)
Par exemple, soyons précis : la place du pouce et de l’index, après la consécration, qui dénotait et montrait une volonté attentive à éviter toute profanation. Pour eux l’avoir omis/supprimé c’est un signe fort de laisser aller, une porte ouverte sur pire, alors que ceux qui n’ont pas connu cette manifestation extérieure d’un intérieur présupposé, pensé et délibéré, voué à cette expression, n’y accorderont aucune signification, y verront même un vain scrupule, un manque d’ouverture et de spontanéité, de confiance et d’élan, si on le leur signale ou qu’ils le remarquent.
Ou tout simplement la marque d’une époque, une façon respectable et différente d’exprimer ce qu’ils ont eux dans le cœur et ils s’étonneront que d’autres « formés autrement » puissent leur faire un tel procès d’intention.
(J’oublie plein d‘autres signes, autres que cette préservation de tout contact profane pour les doigts du prêtre après la consécration, et dont eux seuls ou presque se souviennent aujourd’hui, car de fait le changement ne relevant pas de la forme, mais de l’esprit, il y en a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup : la purification des doigts du prêtre au-dessus du calice, celle des vases sacrés, la pale, la suppression de plein d’accessoires devenus inutiles, les 3 nappes réduites à une seule, etc. Et que les excès dus à la communion dans la main, ou dus à sa distribution par des mains de laïcs supposés en état de grâce (seuls les prêtres auparavant pouvaient toucher même seulement les objets sacrés) en dépit de leurs airs patauds, cauteleux ou compassés (voire de femmes) occultèrent mais aussi pour eux exacerbèrent (au lieu de les supprimer), sans parler de la communion debout et de la suppression des servants et de la patène, rendant celle à genoux quasiment impossible…
Tous ces signes qui témoignaient de la foi en la présence réelle, comment voulez-vous qu’ils disparaissent sans que certains y voient un affaiblissement de cette foi ?!!!
Les connaissiez-vous tous ? Ils ont disparu, c’est vrai… C’était le prix à payer et ils se demandent encore pour quoi qui en vaille la peine, se scandalisant presque que sans eux, on puisse y croire encore et ne pas commettre un impair !)
Encore une fois, comme pour la querelle avec les orthodoxes (on prétendra que ces changements nous en rapprochaient, mais chacun croira constater le contraire), il y aura ceux qui cherchent l’union, et ceux qui cherchent la cassure et la désunion, et qui pour cela, quelle que soit leur bonne ou mauvaise raison de départ, mettent en avant et en trouvent des signes qui n’ont ce sens-là que parce qu’ils le leur donnent.
Et comme ils finissent par être bien les seuls à les voir, ces signes semblent leur donner une supériorité, et ils forment une caste, une faction, qui se resserre les coudes et durcit sa position. Ils se sentent forts, sans plus rien connaitre des évolutions extérieures.
Comme il y a eu parmi eux des gens cultivés, ils emploient des mots puissants, parlent de débâcle, de relâchement, invectivent et font mouche, recrutent.
La dévotion s’accommode de fanatisme, d’autant plus quand elle l’ignore et en est innocente…
Mais revenons à eux. Puisqu’ils ont refusé le changement, ils ont cherché à le comprendre et se sont penchés sur ses causes, autant que sur les risques liés à son usage. Et ils en ont trouvé de gratinées, d’incontestables !
Cela va de l’anecdote qui veut qu’une des prières eucharistiques fut composée à la va vite dans un café (or un homme habité de Dieu ne pourrait-il se trouver dans un café à consommer, et en quoi cette circonstance extérieure pourrait-elle l’influencer s’il est habité, si c’est « le moment » etc. Certains arguments sont par eux-mêmes réversibles… Mais d’autres, non :
ainsi le Cardinal Bugnini, le « père » de ce que la nouvelle messe a pu avoir de « satanique », fut-il convaincu (preuves à l’appui) du fait de sa seule imprudence, d’appartenir à une loge et tardivement (quoiqu’immédiatement) déclassé, lui qui fut auparavant longtemps surclassé.
Effectivement, vu sous un certain jour, qui peut donner le vertige, tout ce qui fut nouveau résulta d’une volonté délibérée (mais qui ne fut pas la seule agissante) de pervertir le rite. Comme cela ne pouvait être fait ouvertement, rien de ce qui fut dit, ordonné et avancé ne fut faux en soi, mais placé de sorte à étouffer la vérité et la rendre contradictoire, la noyer sous l’accessoire, l’affaiblir et si bien que disparurent des signes forts.
Ainsi, pour reprendre le confiteor (et d’autres prières nécessairement supprimées avec, quand il devint commun), qu’il soit d’abord dit par le seul prêtre, ministre du Christ, qui se reconnaissait indigne d’une mission si auguste et solennelle, en s’inclinant profondément, qui ne se reconnaissait aucun droit à une telle faveur et un tel rôle, se recommandait à l’intercession des saints, etc. cela avait du sens !
Mais la nouvelle règle en avait aussi, et en aura d’autres (ne serait-ce qu’à l’état de nouveaux germes à développer) qui n’existaient pas, ne sera pas en reste de ce côté-là et nous le verrons plus tard. D’ailleurs, il y avait une coutume qui recommençait le confiteor avant la communion, cette fois en commun. Pourquoi l’avoir oubliée et n’en avoir pas profité pour ainsi en conserver 2, un pour le prêtre et l’autre pour l’assemblée ?
Ce que je veux dire, par cette question, c’est que si les intégristes eurent de bonnes remarques, ils ne proposèrent rien pour améliorer la nouveauté. Ils la condamnèrent massivement (avant de savoir en quoi il y avait effectivement eu tromperie, et ils s’en donnèrent alors ensuite raison) et se replièrent sur l’ancienne messe, qu’ils rendirent jalousement intouchable (erreur ! En tout cas pas inégalable, ni insurpassable… elle n’était pas exempte d’imperfections) aidés en cela par certaines déclarations du concile de trente qu’ils retrouvèrent : ce ne fut pas immédiat ! - au lieu de chercher à l’améliorer et de devenir une force de proposition.
Il est vrai qu’ils essuyèrent bien des refus et rebuffades : et alors ? Etait-ce une raison pour rompre l’unité ? Car malgré tout, comme ils le constatèrent, si bien des choses étaient devenues ambigües, elles n’en étaient pas moins recevables et par conséquent, exploitables, pour parvenir à autre chose qui, pourquoi pas, ne serait-il pas meilleur ?
Ils ont abandonné le terrain…
Quand la barque du chef coule, on ne l'abandonne pas avant lui, et un bon chef est celui qui décide d'y rester. Même s'il y a eu un traître et qui a percé la coque, il n'y a qu'à écoper. C'est au chef de savoir si c'est "jouable" ou non.
Le jour où Paul VI refusa d’écouter les femmes romaines venues l’assaillir sous ses fenêtres et lui réclamer de la rétablir, il fut clair que l’ancienne messe ne serait jamais le gage d’un renouveau, et qu’il faudrait « en passer par la nouvelle » afin de trouver celle de l’avenir (j’en ai donné un aperçu plus avant)… Le saint Esprit avait choisi son camp, même s’il comportait des officiers supérieurs dégénérés, c’est avec lui qu’il fallait continuer le combat.
Il vaincra le communisme, abattra le mur de Berlin, et j’en passe...
Ce qu’aucun traditionalisme, sclérosé, n’aurait fait, même s’il rêve encore d’une gloire qui ne sera plus jamais que posthume, et non pas celle d’avoir résisté à une imposture qui fut réelle… Il ne fut que responsable d’un clivage, qui était précisément ce qu’il fallait à tout prix éviter.
A suivre
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cmoi le lun. 27 janv. 2020, 16:37, modifié 2 fois.