archi a écrit :
A vrai dire, l'Occident n'était pas représenté non plus à Nicée, je ne crois pas non plus à Constantinople, et pour aller un peu plus loin dans l'histoire, le IIe Concile de Nicée (7e Ooecuménique) qui a mis fin à la crise iconoclaste était un Concile purement oriental, raison pour laquelle il n'a jamais été vraiment reçu en Occident (pour reprendre les termes du Cardinal Ratzinger). La qualité oecuménique n'était donc pas liée à la représentativité de tous les évêques.
D'après l'article de Bernard Meunier Qui es le Christ ? (IVe VIe s) de l'Histoire générale armogathique du Christianisme récemment parue au PUF, Ossius de Cordoue était présent à Nicée, et l'évêque de Rome, Sylvestre s'y était fait représenter.
À Chalcédoine, en 451, il y avait des occidentaux, dont les légats romains.
En revanche, pour Constantinople (381) et Ephèse (431), c'est vous qui avez raison. Il s'agit de conciles exclusivement orientaux, qui n'avaient apparemment même pas la prétention d'être œcuméniques, et qui ont été reconnus rétroactivement comme tels par Chalcédoine
archi a écrit :Les Orthodoxes tiennent que l'oecuménicité d'un Concile est définie par la "réception" par l'Eglise. Définition effectivement quelque peu circulaire, et dans ce cas on peut se demander si, par exemple, Chalcédoine était vraiment oecuménique puisqu'il n'a pas été reçu par les Eglises qui ont fait schisme... A elle seule, cette définition est insatisfaisante et ignore d'autres facteurs (dont la réception par le Pape).
La réception par le Pape est en fin de compte le seul critère sûr. Mais on ne l'avait pas encore admis au moment de la crise arienne. Et nos frères séparés d'Orient ne l'ont toujours pas admis…
archi a écrit :Ceci dit, les Conciles du 1er millénaire - et même certains du 2e (comme Constance, reconnu comme oecuménique et accepté par l'Eglise - encore que certains décrets ne le soient pas - , convoqué par l'Empereur germanique, qui a servi à déposer les 3 papes concurrents du moment et à en élire un nouveau) montrent que la réception par l'Eglise a son rôle à jouer - et certains Catholiques au plus haut niveau (p.ex le Cardinal Ratzinger, encore lui) l'ont reconnu.
Constance est un cas unique dans l'histoire de l'Église, un concile qui a servi à élire un pape. Il a logiquement été reconnu par le pape qu'il a fait. Effectivement, sa légitimité vient de la reconnaissance par toute l'Église de Martin V (tandis que l'échec d'Alexandre VI et Jean XXIII premier du nom a prouvé l'illégitimité de la précédente tentative, le concile de Pise)
archi a écrit :Dans les Conciles au statut discutable, on peut aussi signaler Bâle-Ferrara-Florence, qui a suivi de peu Constance et a voulu affirmer la supériorité du Concile sur le Pape. Il est autant que je sache sur les listes des Conciles oecuméniques catholiques (établie à posteriori), pourtant, on ne peut pas dire que sa doctrine fasse l'objet d'une reconnaissance officielle.
Le concile de Bâle a été légitimement convoqué par Martin V juste avant sa mort en 1431, convocation confirmée par son successeur Eugène IV. Ce concile est entré en conflit avec le pape (absent, mais représenté par son légat) et, après quelques péripéties, le pape a décidé en 1437 son transfert à Ferrare, où il s'est poursuivi normalement, tandis que ceux qui avaient refusé le transfert élisaient un antipape à Bâle. Là, la chose est claire, si les modalités sont confuses: c'est l'accord avec le pape qui fait le concile œcuménique
archi a écrit :Bref, les choses ne sont ni simple ni aussi tranchées qu'on voudrait. Par contre, ce qu'on peut clairement dire, c'est que le Concile de Tyr n'était pas orthodoxe.
Quant au rôle du peuple, ce n'est pas prendre les laïcs pour des idiots que considérer que la question était bien au dessus de leur compétence. Que certains se soient passionnés pour cela (à commencer par les empereurs) est un fait, mais sans aucun doute plus en supporters de tel ou tel évêque que pour de justes raisons théologiques. L'anecdote que raconte Archi l'illustre bien, beaucoup plus que le conte bleu de l'orthodoxie quasi unanime du peuple de Dieu balayant l'hérésie d'une majorité d'évêques félons.
Soyons honnêtes: y a-t-il un seul d'entre nous qui puisse affirmer que, s'il avait eu à se prononcer entre homoios et homoousios sans savoir à l'avance qui étaient les bons et qui étaient les méchants, il aurait fait le bon choix ?
Ce que je constate, c'est que les évêques se sont querellés sur des
définitions, ce qui illustre bien le rôle qu'ils sont les seuls à pouvoir tenir, qui est de
définir la doctrine. Ici, ces définitions portaient sur des termes exprimant la foi de l'Eglise, avec des positions plus ou moins tranchées entre les termes du débat. Maintenant, même si l'homme de la rue n'y participait pas et ne pouvait rien définir, rien ne prouve qu'il n'était pas au fait des débats théologiques et du sens des termes grecs employés, et surtout on peut penser qu'il savait si il croyait en Jésus-Christ vraiment Dieu et vraiment Homme, ou bien s'il Le concevait comme un homme de qualité élu par la grâce divine mais néanmoins d'une autre nature que le Père. Ce qui était après tout le fond du problème.
Effectivement, comme ça, c'est très simple, mais ce n'était pas les termes du débat. Autant que je sache, la doctrine d'Arius n'était pas: Jésus-Christ "homme de qualité élu par la grâce divine", doctrine évidemment incompatible avec les évangiles. Pour lui, le Fils avait été créé par le père avant la Création du monde: il lui était donc inférieur, en tant que créature, mais n'était pas pour autant un homme. Pour Nicée, et donc pour nous, le Fils est co éternel au Père, engendré par lui, mais non créé, et de même nature que lui (homoousios)
Après Nicée, le débat s'est concentré sur ce dernier mot, homoousios. Les opposants (étaient-ils vraiment ariens au sens strict, d'ailleurs ?), le rejetaient et n'acceptaient qu' homoios, semblable. C'est là-dessus qu'on s'est étripé pendant cent ans: le Fils est-il semblable au Père, ou de même nature que lui ? Je persiste à penser que ce débat ne pouvait être tranché par le sensus fidei des laïcs, aussi affûté fût-il.