Emmanuel Lyasse a écrit :Quand on a adopté l'usage (certes légitime) de baptiser les petits enfants, on a lié la confirmation par l'évêque à leur passage à l'âge adulte, très tôt, contrairement à ce que dit Archi. L'âge minimum de la confirmation a été fixé à l'âge du discernement, sept ans (cela n'a pas changé). On a fixé au même âge celui de la première communion, pour la même raison.
Là, c'est bien la première fois que j'entends dire que la confirmation par l'évêque aurait autrefois eu lieu à l'âge adulte (au passage, le baptême des enfants est attesté dans les Actes des Apôtres, ce n'est nullement un usage inauguré après coup... simplement, à l'époque apostolique, la plupart des baptisés étaient adultes).
Bon, quand j'ai un doute sur un point d'histoire de l'Eglise ou de théologie, je vais chercher dans la
Catholic Encyclopedia en ligne, c'est ce qu'il y a de plus complet qui soit facilement accessible, dès lors qu'on est à l'aise pour lire l'anglais. Je me référerai donc à la page sur la confirmation (
http://www.newadvent.org/cathen/04215b.htm).
Je ne peux pas réécrire ou traduire tout ce qui est écrit sur cette page, mais en parcourant cette page et notamment la partie historique, je constate (je traduis juste les extraits qui concernent la question de la confirmation des enfants):
- que les références de l'époque l'époque patristique convergent pour montrer que les 2 sacrements étaient normalement conférés en même temps ou juste après, même si effectivement un baptême pouvait être conféré en urgence ou par un diacre, la confirmation était ensuite conférée par l'évêque.
- dans une phrase de St Augustin (évêque d'Hippône pour mémoire), "quand nous imposions les mains à ces
enfants..."
- autre référence explicite à cette époque, celle d'une lettre du Pape Innocent Ier (401-417): "concernant la signation ("
sealing") des enfants, il est clair qu'il est illégal qu'elle soit faite par quelqu'un d'autre qu'un évêque".
Donc on voit bien que dès cette époque, la confirmation était administrée aux enfants.
En descendant plus loin:
- "la confirmation des
nouveaux baptisés devint une part importante du travail de l'évêque" (Lingard, à propos du début du Moyen-Age anglo-saxon).
- dans le cas de St Cuthbert, "des enfants lui étaient apportés pour la confirmation"
- au XIIIe Siècle en Angleterre, "en général, les conciles et les synodes admonestaient les parents à propos de la confirmation de leurs enfants". Le synode de Worcester (1240) décrète que "les parents qui négligent de faire confirmer leur enfant dans
l'année qui suit leur baptême se verraient interdire l'entrée de l'église". Le synode d'Exeter (1287) décréta que les enfants devaient être confirmés dans les
trois ans après leur naissance, sans quoi leurs parents devraient jeûner au pain et à l'eau jusqu'à ce qu'ils se soient mis en conformité avec la loi.
Etc, etc... (j'arrête là parce que j'en ai assez de traduire et recopier les citations :> ). On voit à quel point la pratique actuelle se démarque de toute la tradition de l'Eglise.
On a eu tendance, au cours du Moyen-Âge puis de l'époque moderne, à repousser l'âge de la première communion. Plus la piété eucharistique se développait, plus on considérait la communion comme un moment exceptionnel (la plupart des fidèles laïcs ne communiaient qu'une fois par an à partir du milieu du Moyen Âge), plus aussi on la réservait à ceux qu'on jugeait capable de comprendre vraiment ce dont il s'agissait. On est arrivé ainsi à fixer à peu près l'âge de la première communion à douze ans, qui s'est ainsi trouvée liée au passage à l'adolescence.
Oui. Et là aussi, même la chose est avérée depuis plus de temps (début IXe siècle), franchement, la chose me choque.
Je ne reprends pas le reste de votre historique (qui concerne l'histoire récente) qui me paraît juste et qui explique largement (sans la justifier) la situation actuelle.
Au fait que dit le droit canon (actuel), juste pour voir?
Sur la Confirmation:
Can. 890 - Les fidèles sont tenus par l'obligation de recevoir ce sacrement en temps opportun; les parents et les pasteurs d'âmes, surtout les curés, veilleront à ce que les fidèles soient dûment instruits pour le recevoir et à ce qu'ils s'y présentent en temps opportun.
Can. 891 - Le sacrement de confirmation sera conféré aux fidèles aux alentours de l'âge de raison, à moins que la conférence des Évêques n'ait fixé un autre âge, ou qu'il n'y ait danger de mort ou bien que, au jugement du ministre, une cause grave ne conseille autre chose.
La référence est bien l'âge de raison ou autour, pas 5 ou 10 ans après...
Maintenant, traditionnellement, la confirmation précède la 1ere communion, même si on a parfois vu des exceptions. L'exception actuelle étant largement due à la décision de St Pie X d'abaisser l'âge de la 1ere communion, comme vous l'avez fait remarquer.
Or, ce qu'enseigne le Concile de Trente à propos de la communion (XXIe Session, chap IV), c'est que les petits enfants qui n'ont pas atteint l'âge de raison ne sont pas tenus de communier puisque, sans avoir l'âge de raison, ils ne peuvent pécher mortellement et perdre l'état de grâce: le baptême leur suffit.
Ce qui sous-entend nécessairement que dès lors qu'ils ont atteint l'âge de raison ou de discrétion (qui n'est pas nécessairement 7 ans, il dépend de l'enfant même si on le situe habituellement aux alentours de 7 ans) ils peuvent désormais pécher mortellement et ont besoin, eux, du soutien des sacrements.
L'âge de raison devrait donc être la dernière limite pour recevoir la confirmation et la 1ere communion, et pas le seuil minimal. Et cet âge peut très bien être inférieur à 7 ans chez certains enfants.
Voilà pourquoi il me semble qu'on commet une erreur tragique, finalement pas si éloignée de celle des protestants anabaptistes qui lient le baptême à la nécessité d'un choix adulte, en liant la réception de ces sacrements à la compréhension intellectuelle dans un cas, ou pire à l'aboutissement d'un parcours catéchétique. Franchement, j'aimerais bien me tromper, mais cette impression s'appuie:
- sur l'Ecriture Sainte ("laissez venir à moi les petits enfants")
- sur la Tradition de l'Eglise (i.e. ce qui a été transmis et pratiqué depuis les Apôtres), jusqu'au Moyen-Age en Occident (et même plus récemment pour la confirmation), et encore aujourd'hui dans les rites orientaux
- sur la dogmatique (cf Concile de Trente ci-dessus)
Je ne vois donc guère de raison de remettre en question mon impression!
In Xto,
archi.