L'unique rite romain: comparaison des deux formes

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AdoramusTe
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L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par AdoramusTe » lun. 29 août 2016, 15:22

Texte de Simon Noël, moine prêtre bénédictin à Chevetogne (http://simonnoel.blogspot.fr/2016/08/lu ... n-des.html, via Belgicatho) :
Ceux qui aiment le Christ aiment aussi l'Église. Ceux qui aiment l'Église aiment aussi sa liturgie. Ceux qui aiment la liturgie, s'ils sont catholiques de rite latin, aiment aussi les deux formes de l'unique rite romain: l'ordinaire et l'extraordinaire. La liturgie, sous quelque forme dûment approuvée que ce soit, est l'expression de l'âme de l'Église, elle est le cœur de l'Église, en tant qu'elle est l'épouse du Christ, qui adore son Seigneur.
Dans le rite romain, deux missels sont approuvés: le missel de 1962, appelé aussi missel tridentin ou de saint Pie V, et le missel de 1969, appelé aussi missel de Paul VI.

Pédagogie de l'Eglise

L'Eglise, en tant que mère, a voulu tenir compte de la sensibilité de ses enfants. C'est pourquoi, elle a promulgué un nouvel ordo missae, avec peut-être une certaine précipitation, pour réaliser le vœu de Vatican II de restaurer le rite romain, de lui conférer une certaine clarté et pureté, tout en y incorporant certaines richesses de la Tradition ancienne de l'Eglise. En même temps, constatant que certains se sentaient spirituellement plus en harmonie avec la messe tridentine, elle a reconnu leur droit à continuer à célébrer l'eucharistie dans la forme du missel de 1962.

Aujourd'hui, l'immense majorité des prêtres célèbrent la forme ordinaire de la messe de manière exclusive. Selon l'Eglise, ils devraient cependant connaître aussi le forme extraordinaire et ne pas la mépriser. Je pense qu'un prêtre ferait bien en effet de célébrer parfois dans cette forme extraordinaire. J'en vois deux raisons majeures. D'abord, pour mieux saisir le sens profond des réformes de Vatican II, il faut connaître de l'intérieur ce qui se faisait auparavant et mieux saisir ainsi le sens des changements. La célébration fervente de la forme extraordinaire aura même des conséquences heureuses sur la célébration de la forme ordinaire, en aidant par exemple à retrouver le sens du sacré. Ensuite, la disparition complète du missel tridentin amènerait une coupure avec toute la culture des siècles passés, marqués par la liturgie tridentine et provoquerait ainsi une tragique perte de la mémoire.
Je voudrais maintenant comparer brièvement les deux missels et souligner la richesse de chacun d'eux.

Richesses du missel de Paul VI

Il y a d'abord le nouveau lectionnaire. Il nous offre sur deux ans en semaine, et sur trois ans, les dimanches, un parcours vaste et judicieusement choisi de l'ensemble de la Sainte Ecriture. Ce lectionnaire est ainsi une mine pour la lectio divina, la méditation et la prière personnelle.
Ensuite, les nombreuses et nouvelles préfaces. Elles mettent en valeur toute la richesse du mystère célébré.

Richesses du missel tridentin

Selon moi, il y a l'offertoire, qui souligne le caractère sacrificiel de la messe et nous aide ainsi à entrer plus consciemment et mieux préparés dans la prière eucharistique.
Le nombreux gestes, comme les signes de croix, accomplis par le prêtre pendant le canon, donnent à la prière une expressivité sacrée incomparable. La participation par le corps me semble en effet mieux mise en valeur dans cette forme du rite romain.

Conclusion

L'essentiel en tout cela est l'amour. Amour immense de l'Eglise, amour fervent de l'eucharistie. Puisse dans cet amour l'Eglise retrouver la paix liturgique.
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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par chris-ostome » lun. 29 août 2016, 20:49

AdoramusTe a écrit : Ceux qui aiment la liturgie, s'ils sont catholiques de rite latin, aiment aussi les deux formes de l'unique rite romain: l'ordinaire et l'extraordinaire
Ok, mais tout dépend de ce qu'on entend par la forme ordinaire de la messe. Celle du missel de Paul VI ou celle du missel de Paul VI avec toutes les dérogations généralisées qui ont suivi ? La forme ordinaire ne souffrirait pas d'une telle impopularité si elle était célébrée convenablement, comme le faisait Benoît XVI. Aujourd'hui, la plupart des paroisses ordinaires célèbre une drôle de messe, où parfois l'on enlève le Kyrie, et d'autres fois l'on revisite le CREDO.

Oui, j'aime les deux formes, et je suis profondément déçu qu'il n'y ait pas à proximité de chez moi une paroisse célébrant la vraie forme ordinaire.

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par Suliko » mar. 30 août 2016, 11:26

Bonjour AdoramusTe,

Il y a quelques mois, vous écriviez ceci:
Si ça amuse les gens d'essayer de réparer un rite multiforme (ou informe) qui s'enfonce de plus en plus dans le chaos, je ne veux en aucun cas les empêcher. J'y ai cru pendant un moment et j'ai assez perdu mon temps avec ça.
Par contre, je refuse d'être entraîné dans ce chaos.
Auriez-vous changé d'opinion sur le sujet?

Pour ma part, je suis gênée dès le début de cet article. car l'auteur semble clairement juger que les catholiques qui n'aiment pas vraiment la nouvelle liturgie sont de mauvais catholiques, ou du moins des catholiques qui ne comprennent pas bien la réforme liturgique et son caractère positif. Mais bien sûr, l'invitation à ce que les prêtres découvrent et célèbrent la forme extraordinaire est une bonne chose. Je pense néanmoins que pour beaucoup, découvrir les richesses de la forme traditionnelle leur donnera moins envie de continuer à célébrer la forme ordinaire. Ce ne serait après tout que leur choix.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par AdoramusTe » mar. 30 août 2016, 11:45

Suliko a écrit : Auriez-vous changé d'opinion sur le sujet?
Je n'ai pas commenté l'article. Je n'ai fait que de le faire partager car sa teneur me semble rare : il témoigne d'un apaisement.
On est passé d'une époque de diabolisation de la liturgie traditionnelle à une époque où on la met sur le même plan que la liturgie ordinaire.
L'auteur essaie de sortir par le haut en mettant en lumière des côtés positifs. L'état d'esprit est meilleur que mon opinion :D
Pour ma part, je suis gênée dès le début de cet article. car l'auteur semble clairement juger que les catholiques qui n'aiment pas vraiment la nouvelle liturgie sont de mauvais catholiques, ou du moins des catholiques qui ne comprennent pas bien la réforme liturgique et son caractère positif.
A mon avis, je lis ça comme une invitation à ne pas rejeter la liturgie ordinaire.
Mais bien sûr, l'invitation à ce que les prêtres découvrent et célèbrent la forme extraordinaire est une bonne chose. Je pense néanmoins que pour beaucoup, découvrir les richesses de la forme traditionnelle leur donnera moins envie de continuer à célébrer la forme ordinaire. Ce ne serait après tout que leur choix.
Ce n'est pas seulement leur choix. Ils sont au service d'une communauté et ne peuvent pas imposer leurs goûts pour des raisons pastorales.

Dans le fond, il faut éviter de croire la liturgie traditionnelle comme figée. Elle a toujours évolué organiquement dans l'histoire.
De même, on ne peut pas croire que tout apport de la liturgie ordinaire est forcément mauvais.

Mais pour l'instant, je suis toujours convaincu que la restauration liturgique passera par la liturgie traditionnelle.
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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par Héraclius » mar. 30 août 2016, 14:31

"Ne pas rejeter la liturgie ordinaire" peut avoir un sens très vaste, qui va de "La liturgie ordinaire est la réforme accomplie du vetus ordo, qui reste intéréssant historiquement" à "Certains aspects de la réforme sont très positifs, mais la réforme dans son ensemble a été mal faite et ces éléments positifs de la forme ordinaire devraient être rapatriés vers la messe romaine sous la forme que lui a donnée le développement organique de la liturgie".

On peut critiquer (1) la forme du rite infraordinaire tel qu'il est célébré en France (2) critiquer un certain "rubricisme ordinaire" qui ne cherche pas, même dans des célébration fidèles aux textes, à sa rattacher à la tradition de l'Eglise (3) critiquer la réforme elle-même (4) critiquer sacrosanctum concilium et donc, l'idée qu'une réforme était néssécaire.

Bref, il y a beaucoup de positionnements possibles, beaucoup d'espaces.
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par AdoramusTe » mar. 30 août 2016, 15:27

Héraclius a écrit : Bref, il y a beaucoup de positionnements possibles, beaucoup d'espaces.
Je pensais que vous alliez conclure. Je reste sur ma faim. :p
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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par Héraclius » mar. 30 août 2016, 19:00

AdoramusTe a écrit :
Héraclius a écrit : Bref, il y a beaucoup de positionnements possibles, beaucoup d'espaces.
Je pensais que vous alliez conclure. Je reste sur ma faim. :p
Et bien la seule position tenable en dehors de laquelle il n'y a point de salut est à l'évidence celle qui prend un certain recule sur la réforme liturgique dans ses dimensions théoriques et pratique et tend, en douceur, à rapprocher les deux formes en gardant le meilleurs des deux.

:p
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par AdoramusTe » mar. 30 août 2016, 19:44

Héraclius a écrit :
AdoramusTe a écrit :
Je pensais que vous alliez conclure. Je reste sur ma faim. :p
Et bien la seule position tenable en dehors de laquelle il n'y a point de salut est à l'évidence celle qui prend un certain recule sur la réforme liturgique dans ses dimensions théoriques et pratique et tend, en douceur, à rapprocher les deux formes en gardant le meilleurs des deux.

:p
En fait, j'ai bien l'impression que vous avez raison.
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Re: L'unique rite romain: souhaitable convergence des deux formes

Message non lu par Gaudens » mer. 28 déc. 2022, 21:28

Je pense fréquemment à la souhaitable convergence des deux formes : de même que le Vetus Ordo peut nous donnber des voies permettant de remettre Dieu au centre de nos célébrations,le Novus Ordo incite à une "participatio activa "des fidèles et se déploie de façon parfois plus logique,plus simple aussi.
J'ai risqué ci-dessous quelques pistes ,qui risquent de faire hurler autant des traditionnalistes rigides que des progressistes devenus en fait les conservateurs dans cette affaire...Il s'agit peut-être parfois de détails,me dira-t-on mais qui ont leur poids ,surtout si on recherche pour l'ensemble des pratiquants une perception d'unité entre les deux formes.
Et mes réflexions un peu basiques laissent sans la traiter la question majeure et très délicate du lectionnaire, pour lequel l'avantage me semble clairement du côté du Novus Ordo..

CONVERGENCES SOUHAITABLES

Du Novus Ordo vers le Vetus Ordo :

Orientation du prêtre vers l’Orient à partir de la Préface,sauf pour les monitions et le dialogue avec les fidèles.
Recherche de chants des prières du propre plutôt que de cantiques divers et variés au choix des animateurs liturgiques (choix qui est parfois plus ou moins acceptable mais pas toujours…)
Respect du texte des prières de l’ordinaire ( appelé le kyriale dans la liturgie traditionnelle) qui est de droit mais est parfois sacrifié au profit de paraphrases discutables (le Gloria en particulier)
Fin de l’exclusion systématique du grec (pour le Kyrie) et du latin (sauf dans quelques paroisses urbaines qui le conservent , en particulier pour le Sanctus et l’Agnus Dei) :une façon de respecter l’enseignement du Concile Vatican II ( constitution Sacrosanctum Concilium).


Du Vetus Ordo vers le Novus Ordo :

Utilisation,chaque fois que c’est possible, d’un autel « détaché du mur » comme demandé par la même constitution du Concile Vatican II (« pour qu’on en fasse aisément le tour »…).
Fin de l’exclusion des vêtements liturgiques post-conciliaires amples (pas d’archéologisme vestimentaire systématique tel qu’il se pratique chez les tradis).
Prononciation à mi-voix par le prêtre (avec utilisation d’un micro individuel le cas échéant) de la prière du Canon afin que les fidèles puissent en suivre la progression.Seule la Secrète devrait rester telle .
Homélie du célébrant en chasuble (fin du pénible strip tease de l’enlèvement puis de la reprise de la chasuble).
Maintien debout des fidèles lors de la prière commune chantée du Gloria et du Credo (au lieu de les commencer debout et de faire assoir les fidèles au milieu du chant , de façon incompréhensible).
Prononciation intégrale à voix haute, comme c’était le cas autrefois (et devrait l'être encore) , par le célébrant tourné vers les fidèles, du « Suscipiat Dominus » avec répons complet des fidèles formule (heureusement récemment reprise par le Novus Ordo) .
Prière commune du célébrant et des fidèles du Pater Noster,actuellement seulement prononcé par le seul célébrant).

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par nano » jeu. 29 déc. 2022, 14:16

En gros, ce qui se fait à Evron pour le nouvel ordo, et au Barroux dans l'ancien .... deux très bons exemples au demeurant !

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par Gaudens » mar. 03 janv. 2023, 20:32

Merci Nano, d'avoir attiré notre attention sur la liturgie célébrée par la Communauté Saint-Martin avec le nouvel ordo,donc en bénéficiant des nombreux apports de la réforme liturgique des années 1962/1969 mais dans un esprit totalement traditionnel. Je ne la connaissais que très vaguement jusqu'alors.

https://www.communautesaintmartin.org/liturgie/

Nos tradis habituels ne disent rien à ce sujet.Il est vrai que la maqorité d'entre eux semble absente du forum depuis pas mal de semaines

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par Jean-Mic » mer. 04 janv. 2023, 15:58

Merci Gaudens pour cette contribution qui nous change des habituels anathèmes qui polluent le débat. Vos "convergences souhaitables" me semblent des idées des plus intéressantes. Elles ne sont probablement pas les seules possibles, mais celles-ci ont le mérite de sembler simples à mettre en œuvre. Pourtant, je n'ai pas écrit "sont simples" mais "semblent simples". Ne prenez pas ça pour une critique, mais plutôt pour une demande d'éclaircissements. Je me propose de prendre la première de vos propositions afin de préciser mes demandes :
Gaudens a écrit :
mer. 28 déc. 2022, 21:28
Du Novus Ordo vers le Vetus Ordo :
Orientation du prêtre vers l’Orient à partir de la Préface, sauf pour les monitions et le dialogue avec les fidèles.
Remarque préalable : Je me suis déjà exprimé à plusieurs reprises sur la notion d'Orient, et sur l'orientation de nos églises, bien moins fréquente qu'on ne le pense dans les églises construites après le concile de Trente (bien peu d'églises baroques sont réellement orientées, on a d'abord fait avec le terrain qu'on avait, comme le recommandaient Charles Borromée et Pie V). Je n'insiste donc pas et je renvoie ceux qui voudraient encore en débattre à le faire sur le fil du forum où cette question a été abordée. (Je ne sais pas comment on renvoie d'un fil vers un autre. Si quelqu'un sait faire, qu'il veuille bien le faire en réponse ou me l'expliquer.)

Je me permets donc de réécrire ainsi votre proposition : orientation du prêtre vers l'extrémité du chœur (et, à défaut d'Orient géographique, l'éventuel retable ou le vitrail d'axe) ... ou pourquoi pas orientation commune du prêtre et de l'assemblée ? Et je m'empresse de dire que j'y adhère pour une large part. C'est une évidence que la plus grande partie de la prière eucharistique s'adresse à Dieu lui-même (à commencer par la grammaire employée) et que la disposition ensemble tournés vers le Seigneur met en valeur l'aspect du sacrifice offert par le prêtre pour l'assemblée. Inversement, que les paroles de la consécration ainsi que toutes les parties dialoguées de la PE soient prononcées face à l'assemblée appelée à la communion est tout aussi riche de sens comme manifestation de la communion qui est en jeu ! Comment donc mettre en valeur ces deux aspects dans une même célébration ?

Je pense que ce serait un exercice très formateur que nous pourrions tous faire que de relire mot-à-mot les textes de la messe (pourquoi pas en soulignant de deux couleurs différentes) ce qui mérite d'être prononcé par le prêtre au nom de l'assemblée et donc ensemble tournés vers le Seigneur, et ce qui ce qui justifie d'être dit par le prêtre à l'assemblée, église communiant (avec le prêtre) au même Seigneur. Il me semble que ce petit exercice (exercice d'école sans recherche d'application immédiate, j'en conviens) pourrait nous faire mieux goûter l'infinie richesse de l'Eucharistie ... même s'il me paraît bien difficile à mettre en œuvre.

J'ai en effet de la peine à imaginer les déplacements autour de l'autel et les aménagements liturgiques que cela supposerait. Que le prêtre et ses acolytes changent de côté pour les différents temps de la célébration eucharistique, après tout pourquoi pas ? Avec un peu de bon sens, on trouverait bien un mode de procession adapté. Mais, bon, convenons que dans la pratique, cela resterait compliqué. Pour ne prendre qu'un point de détail, comment installer le crucifix et les candélabres sur l'autel pour permettre une telle alternance ?

Il reste quand même difficile de concilier dans une même liturgie les deux dimensions, sacrificielle et communautaire, de la célébration eucharistique. Intrinsèquement difficile dans la mesure où nos actes humains ne pourront jamais rendre tout à fait compte de la richesse incommensurable d'un mystère comme celui de l'Eucharistie.

Alors, faute de pouvoir concilier ces dimensions en une même liturgie, il faut choisir ! Et c'est ce qu'on fait les promoteurs des deux rites, l'un en accentuant (à l'extrême) le caractère sacrificiel de la messe, l'autre en accentuant (à l'extrême) le caractère communautaire de la messe, à chaque fois au risque (plus qu'effectif) de l'oubli ou de l'abandon de la pluralité des sens et des expressions. Pourtant, permettez-moi de rêver, il n'est pas exclu que la liturgie évolue (ce qu'elle a toujours fait en vingt-et-un siècle) et s'enrichisse (ce qu'elle a toujours fait en vingt-et-un siècles) pour rendre compatible l'expression de ces sens multiples de l'Eucharisitie.
Gaudens a écrit :
mer. 28 déc. 2022, 21:28
Du Vetus Ordo vers le Novus Ordo :
Utilisation,chaque fois que c’est possible, d’un autel « détaché du mur » comme demandé par la même constitution du Concile Vatican II (« pour qu’on en fasse aisément le tour »…).
C'est la conséquence logique de ce que j'ai écrit ci-dessus. Mais cela se heurte à l'existence-même et à la disposition-même des autels issus de la réforme tridentine. Faire-aisément-le-tour-de-l'autel n'a de sens qu'en absence de retable et de tout ce qui peut faire écran pour l'assemblée ! Cela est tout à fait concevable dans l'aménagement liturgique d'un lieu de culte neuf, mais que faire des formidables retables baroques ou même des retables en modèle réduit des siècles qui suivirent (notamment ceux des néo-styles du 19ème) ?

Voilà mes questions, mes demandes d'éclaircissements. J'ai essayé de les exposer sans dogmatisme, même si la plupart des habitués de ce forum savent bien de quel côté mon cœur balance en matière liturgique.
Heureux ceux qui savent rire d'eux-mêmes. Ils n'ont pas fini de s'amuser !

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par Cgs » jeu. 05 janv. 2023, 9:52

Bonjour Jean-Mic,

Merci pour vos questionnements légitimes. Je pense comme vous que les propositions de convergence citées me semblent pertinentes. Je considère néanmoins qu'il n'est pas difficile d'unir les deux dimensions communautaire et sacrificielle. Je vais me livrer à l'exercice que vous proposez, avec pour support la PGMR (Nouvel Ordo) que l'on peut trouver ici https://www.vatican.va/roman_curia/cong ... le_fr.html. Je n'ai pas assez de compétence pour travailler dans l'autre sens, mais peut-être un autre intervenant peut-il s'en charger.

:arrow: Lors des rites initiaux (du chant d'entrée jusqu'à la collecte ; cf III)A)) : il est logique que le prêtre soit tourné vers les fidèles lors du chant d'entrée et la salutation à l'autel et au peuple rassemblé, dans la mesure où ces moments visent à réaliser une communion entre tous les fidèles et le prêtre qui préside. Pour la suite (acte pénitentiel, Kyrie, Gloria et collecte), le prêtre et les fidèles s'adressent directement à Dieu. Ils peuvent donc se tourner vers la Croix près de l'autel pendant tout ce temps.

:arrow: Lors de la liturgie de la Parole, le prêtre sera tourné vers les fidèles, cela semble assez évident.

:arrow: Lors de la montée vers l'autel et jusqu'à la prière après la fin de la communion, il semble logique que le prêtre soit tourné vers l'autel, devant ce dernier, face à Dieu. Les seules exceptions seront quand le prêtre s'adresse directement aux fidèles, dans ce cas il se retourne le temps nécessaire (juste avant la préface, lors du rite de la paix, lors du Ecce Agnus Dei, lors de la prière après la communion)

:arrow: Lors des rites de conclusion, le prêtre est logiquement face au peuple.

Bien à vous,
Cgs
Mes propos qui apparaissent en vert comme ceci indiquent que j'agis au nom de la modération du forum.

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par Jean-Mic » jeu. 05 janv. 2023, 12:50

@ Cgs : nous ne sommes pas vraiment compris.
Sur les points 1, 2 et 4 de votre argumentaire, je pense qu'il n'y a guère débat. Nous sommes d'accord.
En revanche, sur le troisième point, ce n'est pas si certain. L'exercice d'école que je proposais se situe à l'intérieur de cette partie de la messe, où la position et la posture du prêtre pourrait, à mon sens, ne pas être unique de bout en bout.
Cgs a écrit :
jeu. 05 janv. 2023, 9:52
Lors de la montée vers l'autel et jusqu'à la prière après la fin de la communion, il semble logique que le prêtre soit tourné vers l'autel, devant ce dernier, face à Dieu. Les seules exceptions seront quand le prêtre s'adresse directement aux fidèles, dans ce cas il se retourne le temps nécessaire (juste avant la préface, lors du rite de la paix, lors du Ecce Agnus Dei, lors de la prière après la communion)
La plus grande partie de la prière eucharistique s'adresse indéniablement à Dieu lui-même, à la deuxième personne (du singulier - Tu - ou pluriel de politesse - Vous), mais dans les paroles de la consécration, pour ne prendre que cet exemple, la deuxième personne cède le pas tantôt à la troisième personne du singulier (Il - le Seigneur), tantôt à la deuxième personne du pluriel (vous), tantôt encore à la première personne du pluriel (nous), incluant sans un même geste assemblée et prêtre (le tout souvent sur le mode impératif). A qui donc s'adresse ces mots, sinon à l'assemblée ?
C'est sur ces paroles-là que l'exercice prendrait du sens, ... même si nous sommes bien d'accord que la mise en œuvre effective resterait à inventer.

L'exercice que je vous propose ne vise évidemment pas à révolutionner la liturgie, je n'aurais pas ce culot, ceci n'est pas de mon ressort. Mais je le pense utile à titre personnel pour (comme je l'ai écrit plus haut) mieux goûter l'infinie richesse de l'Eucharistie. De fait, quoi que nous fassions, la liturgie célébrée par les hommes ne sera toujours qu'un pâle avant-goût de la liturgie qui nous attend dans le Royaume, liturgie pour laquelle le Seigneur a déjà dressé la table.
Heureux ceux qui savent rire d'eux-mêmes. Ils n'ont pas fini de s'amuser !

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Re: L'unique rite romain: comparaison des deux formes

Message non lu par Gaudens » jeu. 05 janv. 2023, 21:10

Merci à vous,Jean-Mic et CGS d’avoir repris et élargi ma réflexion initiale.

Je me rappelle assez bien sans pouvoir la trouver facilement,l’exposé historique et architectural de Jean Mic, sur l’orientation des églises de l’Antiquité jusqu ’à l’époque classique.Il me parait très documenté et complet bien que donnant l’impression d’une « orientation » (= direction vers l’Orient) pas si fréquente que ça alors qu’elle me semble très majoritaire et respectée dans les constructions d’églises plus récentes, du XVIIIè à la première moitié du XXè siècle mais c’est là une siimple perception un peu subjective de ma part.

Les autels majeurs ,dont les baroques à retable , sont toujours adossés au mur central de la nef et ne me paraissent pas concernés par notre discussion.Ils ont vocation à rester ce qu’ils sont :orientation fondamentale du regard et normalement réceptacle du tabernacle (point discuté d’ailleurs sur un autre fil il y a quelques années). Donc en effet,orientation commune du célébrant et des fidèles vers Dieu,initialement et le plus souvent aussi vers l’Orient,symbolisant le Christ,soleil de justice,naissant à l’Orient.

Concernant l’aspect concret des mouvements autour de l’autel ,ils seraient rendus possibles par les autels établis/édifiés dans le chœur mais plus près des fidèles, après le Concile en application de Sacrosanctum Concilium (dans certains cas malheureux ils furent créés en substitution pure et simple des autels majeurs mais c’est une autre question) .
Les candélabres,placés sur les deux côtés de l’autel de célébration, ne sont pas un problème,la croix peut-être si elle est placée sur l’autel lui-même mais comme l’écrit CGS , elle est souvent plantée sur le sol à côté de l’autel et pourrait être de toutes façons dirigée de telle sorte qu’elle serve de point de référence tant d’un côté que de l'autre de l’autel.
Concernant les points 3 et 4 de CGS,il me semble qu’il a raison pour toute la prière eucharistique sauf dialogues entre célébrant et fidèles, jusqu’ au Mysterium fidei/Proclamons le mystère de la foi , appelé l’acclamation d’anamnèse :là il me semble que l’aspect communautaire prévaut (prêtre tourné vers les fidèles) , après quoi l’offrande ,commençant par les mementos des défunts et des vivants) suppose normalement le retour à une orientation commune du célebrant et des fidèles vers Dieu-l’Orient,en principe).
J’ai une hésitation pour l’orientation lors de la prière commune du Pater et le choix pourrait en être laissé aux communautés,je pense, bien que pour la part je penche vers une orientation commune du prêtre et des fidèles .
Il faudrait en tous cas tenir compte des sensibilités et des habitudes prises depuis cinq décennies…Pas simple !

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