Forme ordinaire et ars celebrandi

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Théophane
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Théophane » mer. 19 mai 2010, 17:55

AdoramusTe a écrit :
Théophane a écrit : Sévissait ? La célébration ad orientem est peut-être meilleure, mais ce n'est pas pour autant que la célébration versus popululm est une mauvaise chose.
Ce n'est pas une mauvaise chose, c'est juste une abomination. :p
Je doute fort que le Saint-Père soit de cet avis. Il n'accepterait jamais de célébrer la Sainte Messe d'une façon qui lui semblerait abominable.

L'orientation versus populum peut aller de pair avec un grand respect de la liturgie.
Dans les centres de l'Opus Dei, la Messe est toujours célébrée ainsi. En Espagne, au sanctuaire de Torreciudad, construit grâce à saint Josémaría, l'autel est orienté versus populum.
Dans les deux cas, on communie toujours à genoux et sur la langue. La Messe est toujours sobre, simple et très recueillie.
« Être contemplatifs au milieu du monde, en quoi cela consiste-t-il, pour nous ? La réponse tient en quelques mots : c’est voir Dieu en toute chose, avec la lumière de la foi, sous l’élan de l’amour, et avec la ferme espérance de le contempler face à face au Ciel. »
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par archi » mer. 19 mai 2010, 18:09

Théophane a écrit :Je doute fort que le Saint-Père soit de cet avis. Il n'accepterait jamais de célébrer la Sainte Messe d'une façon qui lui semblerait abominable.
Le Saint Père peut se tromper. Ou être trompé par de mauvais collaborateurs (j'ai une paire de noms en tête :siffle: ).
Certes l'assistance du Saint Esprit garantit qu'il ne promulgue pas de missel invalide. Après, tous les pontifes ne sont pas forcément de grands liturges, et ils ne font pas forcément que des choses bonnes et utiles.

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par jeanbaptiste » mer. 19 mai 2010, 20:03

1) cf. mon message à la page précédente.

2) Ratzinger est un grand liturgiste.

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Laurent L.
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Laurent L. » mer. 19 mai 2010, 20:55

Théophane a écrit : Je doute fort que le Saint-Père soit de cet avis. Il n'accepterait jamais de célébrer la Sainte Messe d'une façon qui lui semblerait abominable.
Je crois que AdoramusTe vous taquine, d'où le :p .

Quant au Saint-Père, voici ce qu'il disait étant cardinal :

« Après le Concile, qui lui-même ne mentionne pas de “se tourner vers le peuple”, on disposa partout de nouveaux autels, tant et si bien que l'orientation de la célébration “versus populum” parait être aujourd'hui la conséquence du renouveau liturgique voulu par le concile Vatican II. En fait l'orientation “versus populum” est l'effet le plus visible d'une transformation qui ne touche pas seulement l'aménagement extérieur de l'espace liturgique, mais implique une conception nouvelle de l'essence de la liturgie : la célébration d'un repas en commun. Cette notion résulte non seulement d'une fausse interprétation du sens de la basilique romaine et de la disposition de son autel, mais aussi d'une compréhension pour le moins approximative de ce que fut la sainte Cène » (Joseph, Cardinal Ratzinger, L’esprit de la liturgie, p. 65).

Cette orientation diminue l'aspect sacrificiel de la messe et favorise la dérive anthropocentrique.

Le pape ne fait pas ce qu'il veut, quand il veut. Il doit composer avec des gens pas forcément favorables. Les fidèles pas encore habitués, à qui on a expliqué que la messe était avant tout un repas convivial, risqueraient de mal le prendre : "mais pourquoi nous tourne-t-il le dos ? Il nous snobe ?"

Néanmoins, sa messe quotidienne est dite ad orientem.

Je me trompe peut-être, mais il me semble que la volonté du Saint-Père de mettre un crucifix sur l'autel face au prêtre est un rempart à l'anthropocentrisme, faute de mieux. Il y a alors moins d'unité avec les fidèles que lorsqu'il y a orientation commune.

Bien à vous,
Laurent.

P.S. Le cardinal Ratzinger a préfacé ce livre de Mgr Klaus Gamber, liturgiste de renom : Tournés vers le Seigneur !

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Laurent L.
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Laurent L. » mer. 19 mai 2010, 21:24

J'ajoute cette interview parue dans la Nef (2007) de l'évêque de Natitingou (Bénin), Mgr Pascal N'Koué, qui abat un certain nombre d'éventuels préjugés sur la perception de la messe en latin ad orientem en terre de mission, on entend en effet souvent dire que cette façon de faire était préjudiciable à la Mission. (La question concerne la FERM, mais les paragraphes 2 et 3 sur le latin et l'orientation peuvent bien sûr s'appliquer pour le présent sujet) :


Vous avez accueilli dans votre diocèse l’abbé Denis Le Pivain et une fondation de l’abbaye bénédictine de Jouques : pourquoi cet accueil pour des communautés traditionnelles ? Les Africains apprécient-ils la « messe en latin » ?
Image
§1 Disons que tout ce qui est catholique doit pouvoir trouver sa place en tout secteur de notre Église. On ne peut pas se priver de la diversité des charismes ! Nous accueillons à Natitingou tous ceux qui se dévouent dans la vigne du Seigneur à la seule condition qu’ils veuillent bien le faire en harmonie avec le reste du diocèse. Le contexte est ici tout autre qu’en Europe. Dieu soit loué, nous avons été épargnés par les conflits autour de la liturgie. C’est avec la messe tridentine que les missionnaires nous ont apporté la foi catholique, nous l’oublions souvent. Dans beaucoup de paroisses au Bénin, vous trouvez encore des chorales céciliennes qui n’ont jamais cessé de chanter le grégorien. D’ailleurs le changement liturgique, à mon humble avis, ne s’imposait pas tant en Afrique où la foi était encore jeune. À l’ouverture du concile Vatican II, Natitingou n’avait que 20 ans d’évangélisation. À cet âge-là, on n’a pas encore de rides. Je reste toutefois convaincu que les deux formes du missel romain peuvent coexister pacifiquement et s’enrichir mutuellement.

§2 Vous parlez du latin. Dans notre société, les communautés linguistiques sont nombreuses. On en compte plus de 10 originaires du diocèse ! Chanter dans une langue qu’on ne comprend pas est donc le lot commun de nos assemblées liturgiques. Ce n’est pas un drame au Bénin. Le latin apporte plutôt une unité que le français ne peut réaliser de la même manière. Le peuple latin n’existe plus. Du coup le latin n’appartient à personne ou plutôt est la langue de tout catholique latin. De plus, dans les religions traditionnelles africaines, le sacrificateur ou l’officiant s’adresse à Dieu dans une langue inconnue du commun des mortels et cela ne gêne personne. Enfin, ironie de l’histoire, c’est un pape africain, saint Victor Ier, qui a imposé à Rome la langue latine dans les liturgies chrétiennes, vers la fin du IIe siècle.

§3 Il y a aussi un autre point qui parle à l’âme africaine, c’est l’orientation commune du prêtre et des fidèles vers l’Orient, le soleil levant. Dans l’ancienne liturgie, le prêtre ne tournait pas le dos aux fidèles. Il se tournait avec le peuple vers Dieu. Cette réalité est présente non seulement dans les cultes traditionnels africains mais aussi dans l’Islam. Nos gens le comprennent donc très bien. Dans ce face-à-face actuel entre le prêtre et le peuple, le prêtre tourne plutôt le dos au crucifix principal, qui est désormais notre Orient. C’est quand même dommage. Cela vient peut-être de ce que nous ne sommes plus sensibles à la dimension cosmique de la Révélation. Or les éléments de la création sont très présents dans les Saintes Écritures. Nous ne prions plus avec toute la création parce que nous ne considérons plus la création comme œuvre divine. Que faire ? Nous avons éliminé un grand symbolisme.

§4 En tout cas, l’arrivée de l’abbé Denis Le Pivain n’a provoqué aucune vague dans le diocèse, pas plus que celle des bénédictines de Jouques. Ce sont des personnes qui aiment l’Église et sont au service de la communion ecclésiale. Actuellement, mes prêtres diocésains prennent leur tour pour célébrer la messe au monastère chaque matin. Ils aiment le latin. On y célèbre selon les deux rites et cela ne choque personne.

Pierre-Antoine
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Pierre-Antoine » jeu. 20 mai 2010, 23:30

Il ne faut pas oublié que l'on peut célébrer ad orientem et versus ad populum en même temps.

C'est ce que fait le Pape dans la Basilique Saint Pierre de Rome.

L'important est l'orientation du prêtre et de l'assemblée vers le Christ ressuscité (ce qui exclu les dérives anthropocentrique).

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par François-Xavier » lun. 07 juin 2010, 14:03

On pourra regarder aussi ce que nous avons fait à Villars pour la Pentecôte :

http://www.scholasaintmaur.net/Apprendr ... hotos.html

Des photos où l'on voit la messe (FORM) soit versus orientem, soit versus populum.

Un exemple à suivre.... !

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Théophane » dim. 13 juin 2010, 16:59

Pour celles et ceux qui comprennent le portugais, voici un article intéressant sur le thème de l'orientation.

http://www.salvemaliturgia.com/2009/04/ ... ranjo.html

Après avoir réfléchi sur ce sujet, mon idée est la suivante. La célébration versus populum n'est pas à rejeter en bloc, puisque même le Souverain Pontife consent à célébrer de cette façon.
Pourtant, force est de constater qu'elle a été introduite frauduleusement dans l'Église catholique, et qu'à aucun moment le Concile Vatican II ne l'approuve. Les textes conciliaires n'y font absolument pas allusion.

Il faut aussi reconnaître que la célébration coram Deo (ou ad orientem) est plus logique. Lorsque les prêtres et les fidèles sont tous tournés dans la même direction, c'est la communauté entière qui rend un culte à Dieu.
Au contraire, dans la célébration versus populum on a le sentiment que le culte est rendu à la communauté présente.
Pour comprendre ce conflit, il faut s'interroger sur la perception qu'on a de la Messe.

D'une part, la célébration ad orientem est totalement théocentrique. Dieu est au centre de tout. Tout le monde, dans le temple, est tourné vers Lui. La liturgie est reconnue comme un acte public de culte à la Trinité Sainte.

D'autre part, la célébration versus populum présente le risque de réduire la place qu'occupe Dieu dans la liturgie. Étymologiquement, le mot liturgie signifie service du peuple. Pourtant, la meilleure façon de servir le peuple chrétien n'est pas de lui permettre de se complaire dans une vaine auto-glorification mais bien plus de l'aider à tourner son regard vers Dieu.

Comme le fait remarquer Jean-Paul II, parfois se fait jour une compréhension très réductrice du Mystère eucharistique. Privé de sa valeur sacrificielle, il est vécu comme s'il n'allait pas au-delà du sens et de la valeur d'une rencontre conviviale et fraternelle. (Lettre encyclique Ecclesia de Eucharistia, § 10).

Dans la célébration versus populum, le prêtre est tourné vers les fidèles. Mais à qui parle-t-il ? À Dieu ou au peuple ? Est-il licite de tourner le dos à une personne à laquelle on s'adresse, en l'occurrence à Dieu ? De plus, pourquoi devrions-nous voir le prêtre de face ? Est-ce lui le centre de notre attention ou est-ce Dieu ? N'y a-t-il pas là un certain cléricalisme ? Le Cardinal Ratzinger n'hésite pas à employer l'expression one man show pour désigner cette façon de faire.

Les façons de célébrer ad orientem ou versus populum se différencient dans la compréhension que l'on a de la Messe : un culte rendu à Dieu ou une rencontre de la communauté. Or, vient-on à la Messe pour "être ensemble" ou pour "être avec Dieu" ?

Il semble qu'une bonne alternative à ce dilemme ait été trouvée : il s'agit de placer un crucifix au centre de l'autel, dans les Messes célébrées versus populum. De cette façon, on ne provoque ni émeutes, ni révolution et on évite de blesser le conservatisme de fidèles attachés à une façon de faire qui est apparue dans l'Église à la manière d'un coup d'État. Le crucifix au centre de l'autel, tourné vers le prêtre, est, pour reprendre la parole du Cardinal Ratzinger, un "est intérieur" qui permet à tous, prêtre et fidèles, d'être tournés vers Dieu.

Il convient de préciser une chose que beaucoup ignorent : la célébration ad orientem n'a rien de contraire au missel de Paul VI, tandis que la célébration versus populum a déjà été utilisée avant le Concile Vatican II, à l'époque où la partie de l'Église de rite romain utilisait le missel de saint Pie V. La question de l'orientation n'a donc que peu à voir avec la forme du rite romain (ordinaire ou extraordinaire).

Pour conclure, il y a quelque chose que j'ai du mal à comprendre. Je ne m'explique pas cette obstination très conservatrice à vouloir garder des autels modernes peu esthétiques dans des églises anciennes, alors que la célébration ad orientem serait bien plus conforme à l'architecture du bâtiment. J'ai posté ci-dessus, dans un message précédent, une photo qui illustre mon propos à ce sujet.
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par archi » dim. 13 juin 2010, 18:14

Théophane a écrit :Après avoir réfléchi sur ce sujet, mon idée est la suivante. La célébration versus populum n'est pas à rejeter en bloc, puisque même le Souverain Pontife consent à célébrer de cette façon.
Pourtant, force est de constater qu'elle a été introduite frauduleusement dans l'Église catholique, et qu'à aucun moment le Concile Vatican II ne l'approuve. Les textes conciliaires n'y font absolument pas allusion.

Il faut aussi reconnaître que la célébration coram Deo (ou ad orientem) est plus logique. Lorsque les prêtres et les fidèles sont tous tournés dans la même direction, c'est la communauté entière qui rend un culte à Dieu.
Au contraire, dans la célébration versus populum on a le sentiment que le culte est rendu à la communauté présente.
Pour comprendre ce conflit, il faut s'interroger sur la perception qu'on a de la Messe.

D'une part, la célébration ad orientem est totalement théocentrique. Dieu est au centre de tout. Tout le monde, dans le temple, est tourné vers Lui. La liturgie est reconnue comme un acte public de culte à la Trinité Sainte.

D'autre part, la célébration versus populum présente le risque de réduire la place qu'occupe Dieu dans la liturgie. Étymologiquement, le mot liturgie signifie service du peuple. Pourtant, la meilleure façon de servir le peuple chrétien n'est pas de lui permettre de se complaire dans une vaine auto-glorification mais bien plus de l'aider à tourner son regard vers Dieu.
Tout à fait.

Je lis en ce moment "le théâtre divin,une histoire de la Messe du XVIe au XXe Siècle", et une partie est consacrée à décrire les messes de St Charles Borromée et de quelques autres célèbres pour leur dévotion eucharistique. Des messes parfois exagérément longue, tant ces saints étaient absorbés par leur tête à tête avec le Seigneur qu'ils avaient entre leurs mains. Au XXe Siècle, les messes du St Padre Pio avaient la même réputation et duraient parfois extrêmement longtemps.

Dans la FERM, le prêtre commence par prier en bas de l'autel (Psaume 42 et Confiteor). Ensuite il monte à l'autel. Dans la FORM, au contraire, il s'incline devant l'autel puis il s'adresse au peuple, et récite le rite pénitentiel (qui comprend en principe, dans sa forme n°1, le Confiteor) vers et avec l'assemblée. L'autel n'a plus à être consacré et est habituellement une table tournée vers le peuple. De plus, il ne rejoint cette table qu'au milieu de la messe, à l'Offertoire. Le contraste est saisissant.

Les adversaires de la FORM lui reprochent souvent de ne pas être sacrificielle, ou d'être moins sacrificielle (selon la virulence de leur critique). Ca peut paraître très exagéré si on ne s'en tient qu'aux textes. Mais si on envisage l'attitude générale qu'elle impose au prêtre, le reproche est fondé. Je pense vraiment que les liturgistes qui ont conçu la FORM étaient des prêtres qui n'avaient pas gardé cette dévotion intense vers le Saint Sacrement présent entre leurs mains (il y avait malheureusement aussi beaucoup de messes bâclées), ne pensaient qu'à l'assemblée, et là on peut effectivement parler de conception protestante de l'Eucharistie (l'Eucharistie est liée à la présence de l'assemblée), en tout cas leur pensée était centrée sur l'assemblée... au point d'oublier Celui pour quoi l'assemblée est réunie. Il est probable que les célébrations selonle Missel de St Pie V face au peuple, telles qu'elles se sont développées surtout à partir des années 50, ont été pour beaucoup de choses dans cet état d'esprit.

Une fois compris cela, on comprend mieux pourquoi le Saint Père insiste en prime abord sur le fait d'avoir une Croix visible sur laquelle concentrer son regard, pour que le prêtre, même s'il est physiquement orienté vers l'assemblée. Il s'agit de permettre au célébrant de retrouver autant que possible l'état d'esprit d'un St Charles Borromée ou d'un St Padre Pio, la concentration et la prière intense liée à la conscience d'avoir le Crucifié Lui-même entre ses mains.

Dans le même cadre, je me demande s'il ne serait pas souhaitable de rétablir dans la FORM de vraies prières au bas de l'autel, qu'elles soient ou non dialoguées avec l'assemblée. Et de remettre au goût du jour tout ce qui permet de prendre conscience de la Sainteté du sacrement: clôture du Sanctuaire, communion à genoux et dans la bouche, hostie touchée uniquement par des mains consacrées (donc... même pas les diacres!). Etc...

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par François-Xavier » dim. 13 juin 2010, 19:27

archi a écrit :
Je lis en ce moment "le théâtre divin,une histoire de la Messe du XVIe au XXe Siècle", et une partie est consacrée à décrire les messes de St Charles Borromée et de quelques autres célèbres pour leur dévotion eucharistique. Des messes parfois exagérément longue, tant ces saints étaient absorbés par leur tête à tête avec le Seigneur qu'ils avaient entre leurs mains. Au XXe Siècle, les messes du St Padre Pio avaient la même réputation et duraient parfois extrêmement longtemps.
Il y a des liturgistes au XXème siècle, qui, inversement, préconisaient de ne pas s'attarder sue les gestes, et même d'aller rapidement pour éviter d'être déconcentré pendant la célébration des saints mystères.
archi a écrit : Dans la FERM, le prêtre commence par prier en bas de l'autel (Psaume 42 et Confiteor). Ensuite il monte à l'autel. Dans la FORM, au contraire, il s'incline devant l'autel puis il s'adresse au peuple, et récite le rite pénitentiel (qui comprend en principe, dans sa forme n°1, le Confiteor) vers et avec l'assemblée. L'autel n'a plus à être consacré et est habituellement une table tournée vers le peuple. De plus, il ne rejoint cette table qu'au milieu de la messe, à l'Offertoire. Le contraste est saisissant.
Non, ce n'est pas tout à fait ça ; je crois que vous avez une vision assez incomplète des choses : tout d'abord, dans la FORM, le prêtre, pendant le chant de l'Introït s'avance dans le sanctuaire (et le cas échéant génuflecte) avant de vénérer l'autel par un baiser. Il doit donc gravir les marches. Il rejoint ensuite le siège du célébrant ou la banquette ; ce sont exactement les mêmes gestes que fait l'évêque lors d'une célébration en FERM. L'exemple type de la FERM, c'est bien la messe pontificale, avec diacre et sous diacre ; et dans ce cas, l'évêque ne reste pas à l'autel.
Inversement, on voit énormément de messes FORM, où le prêtre, par paresse, une fois l'autel vénéré, ne se rend pas au siège ; il reste pour le confiteor le kyrie, le gloria et la collecte à l'autel; Ca arrive très souvent... Et je vous assure que cela ne rend pas la messe plus sacrificielle. Au contraire. Cela déconcentre. J'ai d'ailleurs la conviction que ce type de comportement est l'héritage des aménagements d'autels trop rapides après le concile qui se sont faits beaucoup trop rapidement, sans véritable réflexion sur l'espace liturgique : où la seule chose qu'on a fait c'est retourner l'autel et mal appliquer l'ordo de Paul VI sans comprendre, en "faisant comme avant".
archi a écrit : Les adversaires de la FORM lui reprochent souvent de ne pas être sacrificielle, ou d'être moins sacrificielle (selon la virulence de leur critique). Ca peut paraître très exagéré si on ne s'en tient qu'aux textes. Mais si on envisage l'attitude générale qu'elle impose au prêtre, le reproche est fondé. Je pense vraiment que les liturgistes qui ont conçu la FORM étaient des prêtres qui n'avaient pas gardé cette dévotion intense vers le Saint Sacrement présent entre leurs mains (il y avait malheureusement aussi beaucoup de messes bâclées), ne pensaient qu'à l'assemblée, et là on peut effectivement parler de conception protestante de l'Eucharistie (l'Eucharistie est liée à la présence de l'assemblée), en tout cas leur pensée était centrée sur l'assemblée... au point d'oublier Celui pour quoi l'assemblée est réunie.
Compte tenu de ce que je vous ai expliqué précédemment, je ne pense pas que cet argument à lui seul puisse vous permettre d'avancer ce que vous dites. Par contre il y en a probablement d'autres qui seraient plus pertinents. Mais c'est un autre sujet.

Si le prêtre est au siège et que ce siège est sur le côté (droit, par exemple), de l'autel rien n'empêche justement le prêtre de se tourner vers l'autel et non vers le peuple pour le confiteor, et la collecte, et les autres prières faites au nom du peuple, mais de se tourner vers le peuple pour les monitions, et ce, même si l'autel est "face au peuple" (avec notamment une croix au centre).
archi a écrit : Il est probable que les célébrations selon le Missel de St Pie V face au peuple, telles qu'elles se sont développées surtout à partir des années 50, ont été pour beaucoup de choses dans cet état d'esprit.
Ce qu'il faut savoir également, c'est qu'une des raisons pour lesquelles "l'habitude" de la messe face au peuple s'est imposée, c'est que dans la FERM, les lectures se font à l'autel, et que l'un des grands désirs des théologiens du mouvement liturgiques était de mieux faire apparaître la fonction ministérielle de la proclamation de l'Ecriture sainte, et pour cela, la proclamer face au peuple. C'est la raison pour laquelle avant le concile il y a eu tant de messes face au peuple (surtout après la guerre). Il est tout à fait clair que si on avait clairement distingué dès cette époque le "lieu de la Parole" et le "lieu du Sacrifice" (autel / ambon) comme faisant pourtant partie d'une "double table" (cf. Vatican II) en plaçant non plus le célébrant uniquement à l'autel mais au siège où est sa place "normale" comme à la messe pontificale (FERM), on n'aurait pas eu ce problème. On voit bien d'ailleurs, dans les endroits où l'on célèbre avec la liturgie de 1965, que les choses se font plus naturellement, et que le célébrant ne reste pas "scotché" à l'autel.

Il faut encore une fois bien comprendre qu'en réalité, l'ordo de 1962 est en fait l'ordo de la curie romaine du début du XVIème-XVIIème ; et qu'il est conçu, en dehors de la messe pontificale, pour la célébration de messes individuelles sans peuple ; où la proclamation de l'écriture sainte peut être faite de l'autel, dos au peuple, parce que justement, il n'y a pas de peuple...
archi a écrit : Une fois compris cela, on comprend mieux pourquoi le Saint Père insiste en prime abord sur le fait d'avoir une Croix visible sur laquelle concentrer son regard, pour que le prêtre, même s'il est physiquement orienté vers l'assemblée. Il s'agit de permettre au célébrant de retrouver autant que possible l'état d'esprit d'un St Charles Borromée ou d'un St Padre Pio, la concentration et la prière intense liée à la conscience d'avoir le Crucifié Lui-même entre ses mains.
C'est certain. Ceci dit, je ne suis pas sûr que les rubriques du missel doivent pousser les célébrants à avoir le même type de dévotion (donc de "subjectivité") que ces grands saints.
archi a écrit : Dans le même cadre, je me demande s'il ne serait pas souhaitable de rétablir dans la FORM de vraies prières au bas de l'autel, qu'elles soient ou non dialoguées avec l'assemblée. Et de remettre au goût du jour tout ce qui permet de prendre conscience de la Sainteté du sacrement: clôture du Sanctuaire, communion à genoux et dans la bouche, hostie touchée uniquement par des mains consacrées (donc... même pas les diacres!). Etc...

In Xto,
archi.
Les prières au bas de l'autel sont de l'ordre de la dévotion qui a été petit à petit introduite dans l'ordo de la messe ; elles sont belles et valables : mais ce n'est pas de l'ordre du culte public : à l'origine, elles sont une préparation au sacrifice, et elles étaient récitées à la sacristie. Petit à petit on les a déplacées dans le sanctuaire parce que dans le cas de nombreuses messes basses célébrées en même temps, c'était plus simple. Les tenants les plus convaincants de la FORM sont d'ailleurs tout à fait contre le dialogue avec l'assemblée des prières au bas de l'autel : elles étaient réservées à l'acolyte (au servant) qui s'exprimait au nom de l'assemblée. Et je crois que c'était plus juste.

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par archi » dim. 13 juin 2010, 20:37

François-Xavier a écrit :Il y a des liturgistes au XXème siècle, qui, inversement, préconisaient de ne pas s'attarder sue les gestes, et même d'aller rapidement pour éviter d'être déconcentré pendant la célébration des saints mystères.
Je ne vois pas trop comment faire rapidement les gestes évite d'être déconcentré? :incertain:
Non, ce n'est pas tout à fait ça ; je crois que vous avez une vision assez incomplète des choses : tout d'abord, dans la FORM, le prêtre, pendant le chant de l'Introït s'avance dans le sanctuaire (et le cas échéant génuflecte) avant de vénérer l'autel par un baiser. Il doit donc gravir les marches. Il rejoint ensuite le siège du célébrant ou la banquette ; ce sont exactement les mêmes gestes que fait l'évêque lors d'une célébration en FERM. L'exemple type de la FERM, c'est bien la messe pontificale, avec diacre et sous diacre ; et dans ce cas, l'évêque ne reste pas à l'autel.
Oui, ceci étant, les "prières au bas de l'autel" de la FERM sont devenues la "préparation pénitentielle" face à l'assemblée de la FORM. Et la vénération de l'autel est bien moindre dans cette dernière forme.

Inversement, on voit énormément de messes FORM, où le prêtre, par paresse, une fois l'autel vénéré, ne se rend pas au siège ; il reste pour le confiteor le kyrie, le gloria et la collecte à l'autel; Ca arrive très souvent... Et je vous assure que cela ne rend pas la messe plus sacrificielle. Au contraire. Cela déconcentre. J'ai d'ailleurs la conviction que ce type de comportement est l'héritage des aménagements d'autels trop rapides après le concile qui se sont faits beaucoup trop rapidement, sans véritable réflexion sur l'espace liturgique : où la seule chose qu'on a fait c'est retourner l'autel et mal appliquer l'ordo de Paul VI sans comprendre, en "faisant comme avant".
En lisant votre message, sur le moment, j'ai été étonné de ne jamais voir ces prêtres qui restent à l'autel. En fait, je les vois effectivement souvent, mais comme l'"autel" est devenu une table avec un micro, ça ne correspond pas du tout à l'idée du prêtre qui reste face à l'autel de Dieu. Donc effectivement, c'est bien de ça qu'on parlait: on n'a fait que remplacer l'autel par une table face au peuple. Et effectivement, ça n'a rien de sacrificiel.
Ce qu'il faut savoir également, c'est qu'une des raisons pour lesquelles "l'habitude" de la messe face au peuple s'est imposée, c'est que dans la FERM, les lectures se font à l'autel, et que l'un des grands désirs des théologiens du mouvement liturgiques était de mieux faire apparaître la fonction ministérielle de la proclamation de l'Ecriture sainte, et pour cela, la proclamer face au peuple. C'est la raison pour laquelle avant le concile il y a eu tant de messes face au peuple (surtout après la guerre). Il est tout à fait clair que si on avait clairement distingué dès cette époque le "lieu de la Parole" et le "lieu du Sacrifice" (autel / ambon) comme faisant pourtant partie d'une "double table" (cf. Vatican II) en plaçant non plus le célébrant uniquement à l'autel mais au siège où est sa place "normale" comme à la messe pontificale (FERM), on n'aurait pas eu ce problème. On voit bien d'ailleurs, dans les endroits où l'on célèbre avec la liturgie de 1965, que les choses se font plus naturellement, et que le célébrant ne reste pas "scotché" à l'autel.
Le fait de dire que le siège est la place "normale" du célébrant me paraît abusif. Habituellement, dans la FERM, l'évêque est au trône, qui indique son pouvoir plénier, alors que le prêtre n'est qu'à l'autel. La FORM a fait disparaître cette distinction. Est-ce forcément plus "juste"?

Dans la FERM telle qu'on la voit maintenant, les lectures sont souvent proclamées à l'ambon (ou du moins doublées pour l'Evangile) et c'est effectivement une très bonne chose, indépendamment de la question du siège.

Je sais que certains (dont le Père Bouyer) ont célébré vers le peuple pour pouvoir proclamer la parole vers le peuple sans enfreindre la moindre rubrique, mais est-ce réellement la raison essentielle de ce mouvement vers le "face au peuple"?
Il faut encore une fois bien comprendre qu'en réalité, l'ordo de 1962 est en fait l'ordo de la curie romaine du début du XVIème-XVIIème ; et qu'il est conçu, en dehors de la messe pontificale, pour la célébration de messes individuelles sans peuple ; où la proclamation de l'écriture sainte peut être faite de l'autel, dos au peuple, parce que justement, il n'y a pas de peuple...
Cette explication m'étonne franchement. L'ordo de Saint Pie V a été présenté dès le départ comme devant être adopté par toute la chrétienté (même s'il a fallu 3 siècles pour qu'il soit réellement utilisé partout). Je ne pense pas qu'ils se soient contentés d'utiliser un missel strictement conçu pour un usage interne à la curie. De plus, les "messes individuelles sans peuple" ont longtemps été interdites: il fallait au moins 1 assistant, représentant le peuple, pour avoir le droit de célébrer.

archi a écrit : Dans le même cadre, je me demande s'il ne serait pas souhaitable de rétablir dans la FORM de vraies prières au bas de l'autel, qu'elles soient ou non dialoguées avec l'assemblée. Et de remettre au goût du jour tout ce qui permet de prendre conscience de la Sainteté du sacrement: clôture du Sanctuaire, communion à genoux et dans la bouche, hostie touchée uniquement par des mains consacrées (donc... même pas les diacres!). Etc...

In Xto,
archi.
Les prières au bas de l'autel sont de l'ordre de la dévotion qui a été petit à petit introduite dans l'ordo de la messe ; elles sont belles et valables : mais ce n'est pas de l'ordre du culte public : à l'origine, elles sont une préparation au sacrifice, et elles étaient récitées à la sacristie. Petit à petit on les a déplacées dans le sanctuaire parce que dans le cas de nombreuses messes basses célébrées en même temps, c'était plus simple. Les tenants les plus convaincants de la FORM sont d'ailleurs tout à fait contre le dialogue avec l'assemblée des prières au bas de l'autel : elles étaient réservées à l'acolyte (au servant) qui s'exprimait au nom de l'assemblée. Et je crois que c'était plus juste.
Les prières au bas de l'autel dialoguées ne me gênent pas. Ceci dit, je pense que c'est justement cette forme dialoguée des prières dialoguées qui a donné aux concepteurs de la FORM cette idée de la "préparation pénitentielle" proclamée face à l'assemblée, qui n'existait pas auparavant. Historiquement, ce sont effectivement des prières du prêtre.

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Théophane » dim. 13 juin 2010, 21:48

Les adversaires de la FORM lui reprochent souvent de ne pas être sacrificielle, ou d'être moins sacrificielle (selon la virulence de leur critique). Ca peut paraître très exagéré si on ne s'en tient qu'aux textes.
Je n'ai pas encore procédé à une étude approfondie du missel de Paul VI, mais pour assister à la Messe tantôt en latin et tantôt en français, il me semble que la traduction dans notre langue a délibérément gommé les aspects sacrificiels du texte latin.
L'exemple le plus frappant est sans doute ce passage de la troisième prière eucharistique.
Le texte latin dit : agnoscens Hostiam cuius voluisti immolatione placari ; et il est traduit par daigne y reconnaître celui [le sacrifice] de ton Fils qui nous a rétablis dans ton Alliance ; pourtant, il eût été plus conforme au texte latin de traduire ainsi : en reconnaissant la victime dont Tu as voulu l'immolation.
Mais si on envisage l'attitude générale qu'elle impose au prêtre, le reproche est fondé. Je pense vraiment que les liturgistes qui ont conçu la FORM étaient des prêtres qui n'avaient pas gardé cette dévotion intense vers le Saint Sacrement présent entre leurs mains (il y avait malheureusement aussi beaucoup de messes bâclées), ne pensaient qu'à l'assemblée, et là on peut effectivement parler de conception protestante de l'Eucharistie (l'Eucharistie est liée à la présence de l'assemblée), en tout cas leur pensée était centrée sur l'assemblée... au point d'oublier Celui pour quoi l'assemblée est réunie.
Pourriez-vous préciser votre propos ? Vous semblez dire que la célébration versus populum a contribué à la désacralisation de la Messe, et sur ce point je suis plutôt d'accord. Pourtant, vous semblez oublier que cette manière de célébrer ne doit pas être abusivement associée à la forma ordinaria du rite romain, en effet ni le Concile Vatican II ni le Missel romain n'exigent que la Messe soit dite versus populum. Les textes sont silencieux.
Il est vrai qu'on associe facilement la célébration ad orientem à la forma extraordinaria et la célébration versus populum à la forma ordinaria ; mais cette assimilation n'est vraie que dans la pratique. Dans l'idéal, elle n'existe pas.
La désacralisation de la Sainte Messe ne saurait donc être imputée au Concile Vatican II, mais seulement aux prêtres et aux laïcs qui se sont octroyés une liberté en matière liturgique que l'Église ne leur reconnaissait pas.

Dans le même cadre, je me demande s'il ne serait pas souhaitable de rétablir dans la FORM de vraies prières au bas de l'autel, qu'elles soient ou non dialoguées avec l'assemblée.
Cela devient superflu dans la mesure où les prêtres et les fidèles se préparent à assister à la Messe par des prières de dévotion privée. Pourtant, on peut imaginer que ce n'est pas le cas de tous les catholiques, malheureusement.

Et de remettre au goût du jour tout ce qui permet de prendre conscience de la Sainteté du sacrement: clôture du Sanctuaire, communion à genoux et dans la bouche, hostie touchée uniquement par des mains consacrées (donc... même pas les diacres!). Etc...
Pour ce qui est de la clôture, ce serait sans doute une très bonne idée. C'est déjà le cas dans certaines églises.
Quant à la communion, il faudrait commencer par supprimer l'indult qui permet de communier dans la main. Pour le moment, il est permis de recevoir le Seigneur debout ou à genoux, dans la main ou sur la langue. Mais il va de soi que la communion à genoux et sur la langue est plus respectueuse. Sans doute serait-il opportun de placer un banc de communion, qui encouragerait les fidèles à communier à genoux et sur la langue tout en leur laissant la liberté de rester debout et de communier dans la mains s'ils le souhaitent. Ce n'est pas ce qu'il y a de mieux, loin s'en faut, mais tant que l'Église le tolère, on ne peut pas leur interdire.
Quant à la distribution de la communion par les seuls prêtres, je suis bien entendu d'accord. En revanche je n'ai pas assez de connaissances sur le diaconat pour avoir un avis sur l'opportunité de l'intervention des diacres ; je préfère donc suspendre mon jugement pour le moment. ;)

Ce qu'il faut savoir également, c'est qu'une des raisons pour lesquelles "l'habitude" de la messe face au peuple s'est imposée, c'est que dans la FERM, les lectures se font à l'autel, et que l'un des grands désirs des théologiens du mouvement liturgiques était de mieux faire apparaître la fonction ministérielle de la proclamation de l'Ecriture sainte, et pour cela, la proclamer face au peuple.
Je partage cette conception de la liturgie. La Parole de Dieu n'est pas réservée à un petit nombre. Elle doit être proclamée à tous les fidèles, à la lumière du magistère de l'Église (l'homélie).
Le départ opéré entre l'ambon et l'autel, entre la Parole et l'Hostie, ne me choque pas. Bien au contraire, cette conception de la Messe me semble beaucoup plus équilibrée.
Il convient toutefois de préciser que même dans la forma ordinaria les lectures peuvent se faire en latin. Dans certains cas, l'Évangile est même lu en grec.

Il y a des liturgistes au XXème siècle, qui, inversement, préconisaient de ne pas s'attarder sur les gestes, et même d'aller rapidement pour éviter d'être déconcentré pendant la célébration des saints mystères.
Je ne vois pas trop comment faire rapidement les gestes évite d'être déconcentré?
Je suis d'accord avec ces liturgistes. Le prêtre ne doit pas célébrer la Messe de façon hâtive, mais la trop grande lenteur n'est pas forcément une bonne chose. Il me semble qu'en s'attardant sur chacun des mots, on ne facilite pas la compréhension, bien au contraire. De plus, il faut prendre garde à ne pas tomber dans une sorte d'autosatisfaction et de plaisir personnel. C'est une bonne chose de vouloir accomplir les pratiques de piété avec soin et dévotion, mais le perfectionnisme n'a pas grand chose à voir avec la sainteté.
Néanmoins, on comprend bien que certains saints aient été bouleversés par le mystère de l'Eucharistie au point de rester longtemps à l'autel.

Oui, ceci étant, les "prières au bas de l'autel" de la FERM sont devenues la "préparation pénitentielle" face à l'assemblée de la FORM. Et la vénération de l'autel est bien moindre dans cette dernière forme.
C'est sans doute une bonne chose de faire participer le peuple au rite pénitentiel. Si nous allons vers l'autel et que nous recevons le Seigneur, nous devons le faire avec un cœur purifié.
Encore faut-il que la "préparation pénitentielle" soit correcte. J'ai assisté à une Messe de Pentecôte où le Confiteor et le Kyrie étaient bonnement supprimés et remplacés par le Veni Sancte Spiritus (en français) en raison de son prétendu caractère pénitentiel. Je ne remets pas cela en question, mais le Missel romain prévoit le Kyrie et non le Veni Sancte Spiritus, fût-ce pour la Pentecôte.

En fait, je les vois effectivement souvent, mais comme l'"autel" est devenu une table avec un micro, ça ne correspond pas du tout à l'idée du prêtre qui reste face à l'autel de Dieu. Donc effectivement, c'est bien de ça qu'on parlait: on n'a fait que remplacer l'autel par une table face au peuple. Et effectivement, ça n'a rien de sacrificiel.
Il existe des églises où un autel placé dans le chœur permet la célébration versus populum. Pour autant, ce n'est pas une table mais un véritable autel, avec les cierges et le crucifix. Je peux vous montrer une photo si vous le souhaitez.

Habituellement, dans la FERM, l'évêque est au trône, qui indique son pouvoir plénier, alors que le prêtre n'est qu'à l'autel. La FORM a fait disparaître cette distinction. Est-ce forcément plus "juste"?
Dans certaines cathédrales, le siège du prêtre et celui de l'évêque sont différents et placés aux deux côtés opposés. Le siège de l'évêque n'est donc utilisé que lorsqu'il se trouve présent.


Les prières au bas de l'autel dialoguées ne me gênent pas. Ceci dit, je pense que c'est justement cette forme dialoguée des prières dialoguées qui a donné aux concepteurs de la FORM cette idée de la "préparation pénitentielle" proclamée face à l'assemblée, qui n'existait pas auparavant. Historiquement, ce sont effectivement des prières du prêtre.
C'est toute la question de la participation des fidèles. Le Cardinal Ratzinger soutenait l'idée selon laquelle le Canon pouvait très bien être récité à voix basse.
Dans la forme ordinaire du rite romain, le prêtre récite également à voix basse la prière qui précède la communion.
« Être contemplatifs au milieu du monde, en quoi cela consiste-t-il, pour nous ? La réponse tient en quelques mots : c’est voir Dieu en toute chose, avec la lumière de la foi, sous l’élan de l’amour, et avec la ferme espérance de le contempler face à face au Ciel. »
Bienheureux Álvaro del Portillo (1914-1994)

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Griffon » lun. 14 juin 2010, 18:31

Théophane a écrit :Après avoir réfléchi sur ce sujet, mon idée est la suivante.
...
D'une part, la célébration ad orientem est totalement théocentrique. Dieu est au centre de tout. Tout le monde, dans le temple, est tourné vers Lui. La liturgie est reconnue comme un acte public de culte à la Trinité Sainte.
...
Dans la célébration versus populum, le prêtre est tourné vers les fidèles. Mais à qui parle-t-il ? À Dieu ou au peuple ? Est-il licite de tourner le dos à une personne à laquelle on s'adresse, en l'occurrence à Dieu ? De plus, pourquoi devrions-nous voir le prêtre de face ? Est-ce lui le centre de notre attention ou est-ce Dieu ?
Cher Théophane,

Loin de moi l'idée de me lancer dans une telle controverse.
Pourtant, puisque vous y réfléchissez, je ne puis m'empêcher de ne pas vous laisser dire de telles erreurs.

Pourquoi Dieu serait-il plus à droite, à gauche, devant ou derrière ?
A la messe, où se trouve Jésus ?
Jésus est à la fois, le prêtre, l'autel et le sacrifice. Voici le centre de ce qui se passe.

En se tournant vers le peuple, le prêtre "in persona Christi" lui permet de rentrer dans l'action liturgique.
Et Dieu se trouve au milieu de ses fidèles, au centre, car là où est Jésus, là est le Père ("Ne sais-tu pas, Philippe, que le Père est en moi, et que je suis dans le Père ?")

De plus, cette façon de faire correspond à la Tradition ecclésiale que la célébration se fait en public, et pas en cachette.

Donc la question est bien dos au peuple ou face au peuple.
Et quelle que soit l'orientation choisie, ce n'est pas face à Dieu, mais en Dieu.

La disposition dos au peuple a voulu trouver une justification dans la présence du tabernacle.
Mais le tabernacle n'a pas de sens dans l'action liturgique, et il introduit plutôt une perturbation si on en vient à invoquer sa présence pour justifier de se tourner vers lui. Car, dans ce cas, nous aurions le Christ face au Christ ?!!!

Je préférais quand vous reconnaissiez que la liturgie était une affaire entre les mains de Rome.
En tout cas, pour ma part, je m'aligne sur le pape, en faisant confiance à son représentant, mon évêque.

Cordialement,

Griffon.
Jésus, j'ai confiance en Toi,
Jésus, je m'abandonne à Toi.
Mon bonheur est de vivre,
O Jésus, pour Te suivre.

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par jeanbaptiste » lun. 14 juin 2010, 18:56

La disposition dos au peuple a voulu trouver une justification dans la présence du tabernacle.
Non, la disposition face au christ trouve sa justification dans l'orientation commune des fidèles vers l'est.
En tout cas, pour ma part, je m'aligne sur le pape, en faisant confiance à son représentant, mon évêque.
Bien. Lisez l'Esprit de la Liturgie, et il me semble que si vous lui faite confiance, vous lui ferez également confiance lorsqu'il défend la messe ad orientem.

Cela dit, d'autres types d'orientations sont défendables mais :

1) elles doivent s'accompagner d'une catéchèse importante.

2) elles doivent être adaptées à l'architecture du lieu dans lequel elles est célébrée.

Ces deux points sont rarement pris en compte, car ils demandent un travail important. Dès lors il serait préférable, dans un tel contexte, de s'en tenir à la célébration ad orientem, dans la plupart des cas.

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par archi » lun. 14 juin 2010, 20:47

Griffon a écrit : Pourquoi Dieu serait-il plus à droite, à gauche, devant ou derrière ?
A la messe, où se trouve Jésus ?
Jésus est à la fois, le prêtre, l'autel et le sacrifice. Voici le centre de ce qui se passe.
La question est celle de formes qui permettent de comprendre le Mystère et d'y rentrer. On pourrait bien sûr, en théorie célébrer dans une station de métro, en catimini entre 2 rames, vêtu d'un jogging avec une casquette, on achète une baguette et un quart de rouge, et tout en fumant sa clope (c'est interdit dans le métro mais ce n'est pas la question :p ), on prononce les paroles de la Consécration, qui seront valides. On peut se convaincre que Dieu est là, sur le quai du métro, dans la baguette et le quart de rouge fraîchement consacrés. Pourtant, vous aurez du mal ne serait-ce qu'à vous recueillir 10 secondes: on aura beau vous avoir appris que Dieu était là, vous n'en aurez aucune perception visible, et cette "cérémonie" n'aura aucun sens. Vous ne prierez pas, ou alors il vous faudra faire de gros efforts.

Au contraire, en s'orientant dans une direction commune (et traditionnellement, dans la direction du Soleil levant), on rend perceptible certaines réalités célestes, à commencer par la plus essentielle de toutes, le fait que la Prière s'adresse à Dieu.

Le fait est qu'en se tournant vers le peuple, le prêtre se retrouve dans la position d'une vedette de spectacle, et immanquablement il pensera avant tout à son dialogue avec l'assemblée. Dieu se limitant aux espèces du pain et du vin, risque fort de passer au second plan, et c'est ce qu'on constate souvent.
De plus, cette façon de faire correspond à la Tradition ecclésiale que la célébration se fait en public, et pas en cachette.
Sans vouloir vous vexer, c'est parfaitement faux. La Tradition, en Orient comme en Occident, est précisément celle d'une direction commune du prêtre et de l'assemblée. Même dans les basiliques romaines où le prêtre, en se tournant vers l'Orient, célébrait vers le peuple (mais sans bien le voir du fait de la disposition de l'autel), le peuple se tournait originellement lui aussi vers l'Orient (tournant le dos au prêtre).

Quant au fait de célébrer de manière cachée, le fait est que la Consécration a lieu systématiquement in secreto depuis le VIe Siècle: par le Canon en silence en Occident, et par l'iconostase en Orient. Cette époque est précisément celle où le catéchuménat a disparu et, avec lui, la séparation de l'Assemblée entre les fidèles et les catéchumènes, ces derniers étant conviés à sortir à la fin de la Liturgie de la Parole. Bref, jusqu'en 1970, il y a bel et bien toujours eu une composante secrète, une discipline de l'arcane, à la Consécration.
La disposition dos au peuple a voulu trouver une justification dans la présence du tabernacle.
Non, le tabernacle central tel que nous le connaissons est lié à l'organisation post-tridentine, d'ailleurs beaucoup plus "publique" que ce qui se faisait jusque-là (disparition des jubés, place centrale du maître-autel bien visible pour favoriser la dévotion eucharistique des fidèles). Dans ce cadre, il était logique que le tabernacle ait une place centrale, alors que dans un sanctuaire plus isolé, il pouvait être sur le côté.

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

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