Si l'on postule le contraire et que l'on pousse cette logique jusqu'au bout, alors potentiellement chaque aspect de notre expérience perçue peut être associée à un substrat entièrement différent. Rien ne me permet plus par exemple de considérer que l'anse de mon seau naît du même subtrat que le contenant, ou du sol sur lequel il repose, ou du reflet qui s'y projette, ou de mon œil qui perçoit ledit reflet, ad infinitum.
Effectivement, peut-être qu'une infinité de subtrats s'accorde ainsi d'une manière qui m'apparaît comme cohérente, intelligible et donc potentiel objet de recherche scientifique.
Intellectuellement, je peux jouer avec cette idée mais cela me semble inutilement tarabiscoté.
Je pense aussi qu'il manque ici une ontologie et une phénoménologie de la pensée, que vous semblez considérer comme posée et trouvée là. Mais j'ai peut-être manqué vos écrits à ce sujet.
Quand vous parlez d'accès aux instances interprétatives du dogme, vous sous-entendez intellectuel ? matériel ?Crosswind a écrit : ↑mer. 13 nov. 2019, 14:04Je vous concède le trait forcé. Cependant, admettez qu'une très petite partie de la chrétienté seulement a accès aux instances interprétatives du dogme. Monsieur-tout-le-monde se contente la plupart du temps de suivre ce qu'il pense comprendre des interprétations officielles. D'où ma remarque faite à Prodigal : l'on passe d'un dogme entendu en tant que pleine compréhension par soi et pour soi, à un dogme de confiance envers une institution pratiquement plénipotentiaire du Divin. Et le problème se rencontre tel que je l'ai formulé : l'interprétation d'un dogme sera toujours sujet à la modification, parce que tirée de la logique, et seule la confiance ou la foi en une possible interprétation ultime, définitive, permet d'établir une évolution vers cet état apaisé, et l'espoir d'une interprétation dernière.
L'accès matériel n'est plus vraiment un obstacle aujourd'hui. Il y a quantités d'ouvrages, d'encycliques et j'en passe qui permettent à tout un chacun de dérouler le raisonnement qui a mené à telle interprétation, ou d'en rejeter d'autres.
L'accès intellectuel aux interprétations du dogme n'est certes pas évident, il demande parfois un effort considérable, et cela peut effectivement laisser une grande partie des fidèles sur le carreau. Je tempérerai en disant qu'il n'est nul besoin d'aller si loin pour convenir qu'une interprétation est logique et raisonnable.
Vous semblez considérer que la logique ne peut à elle seule permettre d'aboutir à une conclusion sûre, ou tout du moins par la négative à écarter les options qui ne tiennent pas debout ?
La science elle-même s'appuie sur des axiomes, ne serait-ce que l'intelligibilité de notre environnement comme vous le rappelez, intelligibilité qui n'est pourtant pas si évidente que cela puisque à vous lire, nous n'avons même pas la certitude que l'ensemble des phénomènes étudiés procèdent d'un même substrat. Par convention la science postule que son objet d'études est intelligible, et ne tolère qu'avec méfiance (quand elle ne l'exclue pas complètement) ce qui n'est pas intelligible, répétable ou quantifiable.Crosswind a écrit : ↑mer. 13 nov. 2019, 14:04Je vois là, en retour de la vôtre, une généralité excessive. La logique cléricale invoquée est loin d'être partagée au sein des membres de la chrétienté. L'Histoire nous le montre bien malheureusement. Vous parlez de même de fondations sûres, établissant un parallèle avec la méthode scientifique :apatride a écrit : ↑dim. 10 nov. 2019, 10:19Ce que j'y perçois est plutôt la réflexion collective d'une communauté d'hommes et de femmes, qui ont considéré ces notions avec tout le sérieux qu'elles méritent, et dont les conclusions s'appuient sur un cheminement logique qui peut être retracé par toute personne qui ne se satisferait pas d'y placer sa confiance sans réserves.
Quelles sont les fondations de la science? La confrontation de faits conventionnellement établis avec une théorie sous forme d'hypothèses, en vue de prédire des événements, puis s'en servir pour extrapoler un passé. Quelles sont les fondations de la religion? La simple croyance en un ou plusieurs faits passés. Ces deux domaines ne peuvent être comparés, même si l'un et l'autre reposent sur la foi en une Réalité au moins en partie connaissable.
Effectivement la foi s'appuie sur des événements surnaturels, et donc par essence non répétables ni quantifiables. C'est pourquoi je continuerai bien évidemment à distinguer science et religion quand bien même on peut leur trouver quelques similarités.Crosswind a écrit : ↑mer. 13 nov. 2019, 14:04Il me semble dès lors très osé d'affirmer pour sûres les fondations d'une croyance religieuse. Ni les historiens, ni les scientifiques, ne proclameront avérés les faits de résurrection ou de transsubstantiation. Ils n'auront par contre aucun doute quant à la réalité du contenu de leurs théories, parce que ces théories peuvent être confrontées aux faits, et par là falsifiables. Mais jamais ces personnes n'accepteront de but en blanc des affirmations que personne ne pourra jamais expérimenter. Or comment comprendre le corps du Christ autrement que par la foi ou la confiance?
Mais c'est aussi pour cela que je ne distinguerai pas comme vous le faites la foi et la confiance, car la foi (fides ou "confiance" en latin) procède justement d'une confiance rationnelle bâtie sur une myriade d'éléments qui s'organise en un faisceau d'indices raisonnablement digne de cette confiance.
Comme vous le comprendrez, je ne peux vous suivre dans cette distinction entre une foi qui serait irrationnelle et une confiance qui serait rationnelle. Ne serait-ce que parce que dans le cas de la foi, la confiance en un raisonnement est amenée à devenir (quand elle n'est pas précédée par) une rencontre avec une Personne, une relation, et alors il s'agit bien là d'une confiance en quelqu'un.Crosswind a écrit : ↑mer. 13 nov. 2019, 14:04Lorsque nous accordons notre confiance à quelqu'un, nous ne croyons pas en une entité absolue, mais seulement en une probabilité comportementale déclinée au futur. Lorsque nous accordons notre confiance en Dieu, nous accordons notre confiance en un raisonnement (preuve Divine, cause Divine, etc...). Je sépare pour ma part la foi de la confiance : la première est irrationnelle, la seconde pas.apatride a écrit : ↑dim. 10 nov. 2019, 10:19C'est cette confiance nourrie d'une multitude d'indices, de faits historiques, de raisonnements (théo)logiques, de cohérence symbolique, de rencontres humaines (même à travers le temps avec le témoignage des saints) que nous désignons sous le terme de "foi" ; cette même foi que nous pratiquons tous lorsque nous décidons d'accorder notre confiance à une personne quand bien même nous savons que nous ne la saisirons jamais dans sa totalité.