Cher bip,
Je te présente mes excuses pour m’être énervé tout à l’heure, je reconnais que c’était stupide et pour le coup peu chrétien. Je pense par contre que tu ne mesures pas que je passe mes journées à recevoir des réflexions comme les tiennes de la part de nombreuses personnes et qu’au bout d’un moment, je craque et que j’en ai assez. Je ne comprends pas pourquoi être aussi hostile à la religion, mais passons. Ce qui est sûr, c’est que ce n’est pas avec ma réaction que ça va s’arranger. Ce que je me propose donc de faire, c’est de répondre à tes arguments de façon posée, histoire de te montrer que je les prends au sérieux.
Sur l’esclavage.
L’esclavage a été condamné par les papes pour la première fois à ma connaissance par le pape Jean VIII en 873 dans sa lettre « Unum est » aux princes de Sardaigne :
« Il est une chose pour laquelle nous devons paternellement vous admonester ; si vous ne la corrigez pas, vous encourrez un grand péché, et par elle ce ne sont pas les gains que vous accroîtrez, comme vous l'espérez, mais bien plutôt les dommages. Comme nous l'avons appris, à l'instigation des Grecs, beaucoup qui ont été enlevés captifs par les païens sont donc vendus dans vos régions et, après avoir été achetés par vos compatriotes, ils sont gardés sous le joug de l'esclavage ; alors qu'il est avéré qu'il est pieux et saint, comme il convient pour des chrétiens, que lorsqu'ils les ont achetés des Grecs, vos compatriotes les renvoient libres pour l'amour du Christ, et qu'ils reçoivent leur récompense non pas des hommes, mais de notre Seigneur Jésus Christ lui-même. C'est pourquoi nous vous exhortons et nous vous commandons, avec un amour paternel, si vous leur avez acheté des captifs, de les laisser aller libres pour le salut de votre âme. »
Il existe de nombreuses condamnations de l’esclavage, alors je ne vais pas les citer toutes, juste celles qui peuvent apporter de l’eau à notre moulin. Peu après la découverte du Nouveau Monde par Christophe Colomb, le pape Paul III a condamné à plusieurs reprises l’esclavage des indiens d’Amérique. Dans une première bulle qui disait :
« [ Satan, ] l'ennemi de la race humaine, s'oppose toujours à tout homme bon de sorte que sa course puisse se terminer, il a planifié d'une manière, inattendue bien avant maintenant, un moyen par lequel il pourrait empêcher la parole salvatrice de Dieu d’être annoncée aux nations. Il a remué le monde de ses alliés qui, désirant satisfaire leur propre avarice, osent affirmer en long et en large que les Indiens de l'Ouest et du Sud qui sont venus à notre connaissance en ces périodes puissent être réduits à notre service comme des animaux brutaux, sous le prétexte qu'ils ne connaissent pas la foi Catholique. Et ils les réduisent ainsi à l'esclavage, les traitant par des afflictions qu'ils emploieraient à peine avec les animaux»
«Par conséquent, Nous... considérant que les Indiens eux-mêmes sont en effet des hommes vrais... par notre décret Apostolique d'Autorité, décrétons et déclarons par ces lettres présentes que ces mêmes Indiens et tous autres peuples, même s’il sont en dehors de la foi, ne doivent pas être privés de leur liberté ou de leurs autres possessions et ne sont pas à être réduits en esclavage, ou de ce qui en résulte, et quoi que ce soit qui soit fait en contradiction de ce que nous disons, est proclamé comme nul et non avenant. »
Je me permets d’insister sur l’expression « tous autres peuples ». Comme ça ne s’est pas montré assez efficace, une deuxième bulle qui punissait tout ceux qui réduisaient d’autres hommes en esclavage d’excommunication fut proclamée. Puisque tu as prétendu que l’Eglise enseignait que les noirs n’avaient pas d’âme et qu’on pouvait dès lors les réduire en esclavage, je complète en ajoutant que le pape Urbain VIII a réitéré ce décret d’excommunication alors que le problème resurgissait avec les africains dans la bulle Commissum nobis en date du 22 avril 1639. Je finis par une instruction du Saint Office (plus haute institution de la curie romaine après le pape) du 20 mars 1686 qui traite la question sous forme de question-réponse.
Il est demandé :
S’il est permis de capturer par la force et la duperie des noirs ou autres indigènes qui n'ont porté préjudice à personne? (je précise que le mot indigène n’est nullement péjoratif, tu peux regarder la définition dans le dictionnaire)
Réponse : non.
S’il est autorisé d’acheter, de vendre ou de faire des contrats en tout respect des noirs ou autres indigènes qui n'ont pas porté préjudice à personne et n’ont rien fait et qui ont été faits captifs par la force de la duperie?
Réponse : non
Si les propriétaires de Noirs et autres natifs qui n’ont porté préjudice à personne et ont été capturés par la force ou la ruse, doivent les remettre en liberté ?
Réponse: Oui
Voilà qui rend à mon avis incontestable que si l’esclavage a pu perdurer, ce n’est pas la faute de l’Eglise qui l’a toujours condamné de façon on ne peut plus clair, de même qu’elle a affirmé que tous les hommes avaient le droit à la liberté. Je me permets de comparer la doctrine de l’Eglise avec les propos de personnalités célèbres :
"Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement que les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures. Je répète qu'il y a pour les races supérieures un droit, parce qu'il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures."
(Jules Ferry, 28 juillet 1885)
"Nous avons trop l'amour de notre pays pour désavouer l'expansion de la pensée, de la civilisation françaises... Nous admettons le droit et même le devoir des races supérieures d'attirer à elles celles qui ne sont pas parvenues au même degré de culture et de les appeler aux progrès réalisés grâce aux efforts de la science et de l'industrie."
(Léon Blum, 9 juillet 1925)
"Les Blancs sont supérieurs à ces Nègres, comme les Nègres le sont aux singes, et comme les singes le sont aux huîtres."
(Voltaire, traité de métaphysique)
"Leurs yeux ronds, leur nez épaté, leurs lèvres toujours grosses, leurs oreilles différemment figurées, la laine de leur tête, la mesure même de leur intelligence, mettent entre eux et les autres espèces d'hommes des différences prodigieuses. Et ce qui démontre qu'ils doivent point cette différence à leur climat, c'est que des Nègres et des Négresses transportés dans les pays les plus froids y produisent toujours des animaux de leur espèce, et que les mulâtres ne sont qu'une race bâtarde d'un noir et d'une blanche, ou d'un blanc et d'une noire."
(Voltaire, Essai sur les moeurs)
"La nature a subordonné à ce principe ces différents degrés et ces caractères des nations, qu'on voit si rarement se changer. C'est par là que les Nègres sont les esclaves des autres hommes. On les achète sur les côtes d'Afrique comme des bêtes."
(Ibid)
"La race des Nègres est une espèce d'hommes différente de la nôtre [...] on peut dire que si leur intelligence n'est pas d'une autre espèce que notre entendement, elle est très inférieure. Ils ne sont pas capables d'une grande attention, ils combinent peu et ne paraissent faits ni pour les avantages, ni pour les abus de notre philosophie. Ils sont originaires de cette partie de l'Afrique comme les éléphants et les singes ; ils se croient nés en Guinée pour être vendus aux Blancs et pour les servir."
(ibid)
Voilà le début. Mon ami est très dans l’esprit des temps alors vous avez peut-être d’autres citations dans la même veine.
Wanderer