Obscurantisme médiéval?

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Leviathan
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Obscurantisme médiéval?

Message non lu par Leviathan » lun. 01 mai 2006, 18:52

J'avoue que j'ignore s'il y a un sujet spécifiquement à propos du relativisme. Le fait qu'il existe plusieurs religions ne saurait être la preuve du fait qu'aucune ne détient la vérité. Il suffit d'étudier un peu les religions comme je l'ai fait et on se rend compte qu'elles n'ont rien à voir entre elles.
Le fait est que toutes ont un point commun : elles prétendent détenir 100% de la vérité, et envoient tous les mécréants en Enfer. Quant à savoir laquelle détient la Vérité... On est pas sorti de l'auberge.
Oui, la loi morale est universelle. Il ne s'agit pas de l'imposer par la force, il s'agit de dire que cette loi s'impose d'elle-même à tout homme.
Et en quoi consiste cette "morale" dont vous parlez ? Franchement, j'ai du mal à saisir... La loi s'impose surtout à quelqu'un par le contexte... Prenons un exemple : John sait qu'il ne doit pas tuer les autres parce que ses parents lui l'ont dit. Mais qu'en serait-il de lui s'il avait grandi sur une île déserte, sans personne pour lui dire ce qui est à faire et à ne pas faire ?
Je ne pense pas qu'il lui serait venu à l'esprit de ne pas tuer ses semblables. Après tout, vu qu'il n'a pas besoin d'eux pour vivre...
Arrow La loi civile ne peut en aucun cas être contraire à la loi divine. Cela veut dire que le mal peut être toléré, voir même avoir le droit à être toléré, mais qu'il ne peut en aucun cas recevoir l'appui des lois.
Pourtant, les homosexuels et l'IVG trouvent dans certains pays européens des lois qui les appuient... Or, il me semble que ces actes sont contraires à la loi divine, non ?
De plus, comment cette loi peut-elle vouloir s'imposer à quelqu'un qui ne croit pas en Dieu ?
Vous confondez loi civile et loi divine. Si les lois civiles peuvent changer, il n'en est pas de même de la loi divine.
Pouvez vous me citer quelques lois divines, à titre d'exemple ?
Cela dit, arrêtez, je vous en prie, de me parler d'obscurantisme avec le christianisme. C'est vraiment n'importe quoi, et ça ne veut rien dire. La civilisation catholique n'est pas un modèle d'obscurantisme ; êtes-vous capable, comme St Bernard, de citer de l'Ovide ou du Horace, comme ça, au détour d'une idée ? Savez-vous ajouter des lettres à l'alphabet, comme le fit Chilpéric à l'imitation de l'empereur Claude ? Voyez-vous la richesse de la philosophie médiévale ?
St Bernard, il a vécu à quelle époque ?
Parce que jusqu'à une époque assez récente, on ne savait pas grand chose d'Ovide et cie en Occident... Tout simplement parce que les chrétiens se sont amusés à brûler tous les livres de ce genre et ont fait fuir les intellectuels vers l'Est. (St Paul, St Augustin, etc... la liste est longue)
Bref, après la chute de l'Empire Romain, les gens sont tombés plus bas que terre question connaissances scientifiques, et le mysticisme a pris le dessus.
Quant à la richesse de la philosophie médiévale, je ne me prononce pas étant donné que je n'y connais pas grand chose... Tout ce que je sais, c'est qu'on passe d'une civilisation où la culture était à la disposition de presque tout le monde (bon, il est vrai que le paysan s'en fout un peu de savoir lire...), où l'ascension sociale était possible (des fils de fermiers sont devenus des généraux connus), et où la liberté de culte était l'un des fondements, à un autre où l'espérance de vie n'atteignait même pas les 20 ans et où le peuple (celui qui finance les 3% de privilégiés) vivait à peine mieux que les chiens... Sans parler du fait que, si vous n'aviez pas la bonne religion, vous finissiez en combustible...
Bien entendu, il n'en est pas de même en Orient, où comme vous le dites, la culture hellénistique a perduré. (D'ailleurs, je ne l'ai pas englobé dans "l'obscurantisme")

Je vous fait également remarquer que tout ce que vous citez, ou presque, fait référence à l'avant ou l'après moyen âge, à l'époque où l'on recommençait à s'intéresser au monde greco-romain, pour revenir à un niveau de vie équivalent.
En clair, il semble que le christianisme n'ait laissé au moyen âge que quelques traités philosophiques, la force de mieux supporter leur misère aux plus pauvres, et de nombreuses pseudo-sorcières brûlées. (D'ailleurs, ce qui m'étonne beaucoup, c'est la manière dont ils sont arrivés à créer une telle société avec un message prônant l'égalité des hommes...)
Tout esprit scientifique a été brimé, Galilée n'étant qu'un exemple parmi tant d'autres.
Néanmoins, comme toute religion, le christianisme a aussi permi le développement d'une certaine forme d'art, cela je ne le nie pas.


En ce qui concerne l'obscurantisme :
L'obscurantisme est une attitude d'opposition à la diffusion du savoir, dans quelque domaine que ce soit.

Un obscurantiste est une personne qui prône et défend une attitude de négation du savoir (refuser de reconnaître pour vraies des choses qui devraient l'être), ou de restriction dans la diffusion d'une connaissance (sans nier la véracité d'une chose, considérer qu'elle ne peut être diffusée pour des raisons de toutes sortes : intérêt personnel, craintes sociales, etc.)

À en croire le discours obscurantiste :

1. tout propos sortant des normes est trompeur : il attente donc à la vérité, il est hérésie, blasphème et, une fois ce crime matérialisé, il mérite sanction (bûcher, anathème, etc.)
2. tout discours intellectuel cherche à imposer son point de vue : il est dictatorial. On parle de fatwa scientiste pour stigmatiser un exposé savant
3. le véritable savoir ne s'acquiert pas par la réflexion, interprétant ainsi l'expression '[Ces choses sont] caché[es] aux intellectuels, révélé[es] aux tout-petits' attribuée à Jésus Christ dans le Nouveau Testament
4. tout exposé savant est incompréhensible, jargoneux, arrogant et par là même susceptible d'introduire le doute dans les esprits simples, de nuire à l'unité du peuple (contexte nationaliste), de nuire à des intérêts supérieurs tous aussi sacrés les uns que les autres (l'intérêt de la nation, de la race, de la classe sociale, de la production nationale, etc.). On débouche là sur le populisme et son corrélat obligé l'anti-intellectualisme
(Sources : Wikipédia)

Nul besoin d'être un pro en histoire pour voir des références au moyen âge dans cette définition.
i vous parlez par là de la haine de l'intelligence, pointez plutôt notre époque (cf. l'état d'esprit des "jeunes" moyens sur le savoir "prise de tête", la bêtise hargneuse des Guignols de l'info, l'inculture avouée des journalistes, etc...).
Je fais justement partie de ces jeunes, et je ne regarde plus la télévision, justement à cause de ces horreurs dont on veut nous bourrer le crâne. (Quoique... Star Ac' et cie sont plus dangereux sur ce point là.)

En ce qui concerne la condition des femmes, je n'y faisais pas allusion, c'est une autre histoire.

MB
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obscurantisme médiéval?

Message non lu par MB » mar. 02 mai 2006, 12:14

Bon, Léviathan, je commence à regretter ce que j'ai dit au sujet de vos post. Votre dernier ici était franchement inutile.

Permettez-moi de parler, en tentant d'y mettre un peu d'ordre, de toutes les aberrations historiques dont vous vous êtes rendue coupable.
Vous avez notamment tendance à idéaliser l'Antiquité ; il se trouve que je connais bien cette période. Les sociétés antiques sont des mondes aristocratiques, violemment inégalitaires (la chose est très nette à Rome, mais aussi dans la plupart des cités grecques), extrêmement hiérarchisés. L'ascension sociale y est très rare ; à Rome, pour faire de la politique sous la République, il faut posséder 400 000 sesterces au moins (et en pratique beaucoup plus), ce qui est une somme gigantesque ; sous l'Empire, 1 million. Rome n'est pas une démocratie, les assemblées populaires spontanées sont interdites (seul un magistrat peut les convoquer), et par ailleurs il est fréquent de censurer la production littéraire ou théâtrale ; la chose s'est aussi faite dans le monde grec, qui de toute façon a été "aristocratisé" par les Romains lorsqu'ils l'ont conquis. Et même si, dans l'Empire romain après 212, tous les hommes libres deviennent citoyens, on réintroduit une nouvelle coupure entre les "puissants" et les "humbles", soumis à toutes les avanies de la part du pouvoir (sans parler du monde servile).

Le savoir écrit n'y est pas si diffusé que vous ne le croyez, en pratique il est restreint aux classes supérieures (et de toute façon il ne peut pas aller bien loin, puisque l'imprimerie n'existe pas) ; de nombreux lettrés, par ailleurs aristocrates et donc imbus de cette conception hyper-hiérarchisée du monde, refusent de diffuser leurs connaissances, par principe ; une attitude "obscurantiste" comme celle que vous pointez du doigt à travers la définition tendancieuse de Wikipedia existe très souvent dans l'Antiquité païenne, et elle n'est jamais critiquée en tant que telle.
Par ailleurs, la "rationalité" supérieure du monde antique est en grande partie un mythe ; les Grecs et les Romains ont accordé autant d'importance aux mystiques, aux explications divinatoires ou autres de toute espèce. En fait, anthropologiquement, ils sont souvent plus proches des Papous que de nous (ce qui n'est pas une insulte pour les Papous). Je vous renvoie à quelques grands auteurs modernes qui en parleront mieux, J.-P. Vernant, P. Vidal-Naquet, P. Veyne, M. Détienne, etc., etc. Vous allez être très déçue sur l'Antiquité, qui n'est décidément pas ce que vous croyez...

Quant au niveau de vie, il est moins élevé que sous le Moyen-âge ; les rendements agricoles sont plus faibles que dans l'Europe d'après l'an Mil ; les inventions techniques, si elles existent (machine à vapeur, savon, moulin à eau, trucs d'Archimède, etc.) ne sont pas diffusées, et cela volontairement (Archimède méprisait ceux qui voulaient faire une application pratique et économique de ses procédés). L'espérance de vie n'est pas plus élevée : la plupart des enfants meurent peu de temps après leur naissance (soit dit en passant, l'espérance de vie n'a jamais été de 20 ans : il s'agit d'une fiction statistique intégrant les enfants nés en bas âge - une fois que l'on a passé les 10 premières années de sa vie, on a toutes les chances d'en vivre une soixantaine). Et la sous-alimentation est aussi développée, voire plus, que dans le Moyen Age : mais les auteurs antiques en parlent peu, car ils se moquent éperdûment des problèmes du bas peuple (contrairement aux auteurs chrétiens) et ne les évoquent que lorsqu'ils ont une incidence politique. Un indice, cependant : on estime la population de la Gaule, au 2ème siècle ap. J.-C., à 6 millions d'habitants ; on sait que la population du royaume de France au début du 14ème siècle (qui a été scrupuleusement comptée à cette époque) est de 18 millions d'habitants, et cela sur une surface plus petite. La France médiévale peut donc nourrir trois fois plus de personnes que la Gaule romaine. A méditer...

- Je reviens sur d'autres inexactitudes flagrantes, au sujet du Moyen Age occidental notamment. Vous dites qu'il n'y a pas besoin d'être un pro en histoire pour en parler, et vous avez raison ; mais il ne faut pas être un ignare non plus.
Parlons ainsi des questions liées au savoir ; vous laissez entendre qu'on a tout fait disparaître de l'Antiquité, ou presque... j'ai vu hier une préface du livre VI de Tite-Live : pour établir le texte, on a collationné une trentaine de manuscrits s'échelonnant du 4ème au 15ème siècle, et beaucoup datent des 10-11èmes. Il faut croire que les moines occidentaux étaient plus curieux de ces textes que bien de nos contemporains... d'ailleurs ils ne se sont pas contentés de les recopier, l'histoire et la littérature romaine sont tout à fait maîtrisées au Moyen Age, et parfois mieux qu'à notre époque, puisque le latin est alors une langue vivante...

Pour ce qui est de l'évolution du savoir :
- il s'étiole en Occident au début du Moyen-Age, mais pour des raisons qui n'ont rien à voir avec la religion : le monde des cités est affaibli par les invasions et surtout les épidémies, or c'est dans le cadre de la cité que s'épanouissait la culture antique. Dans l'empire d'Orient, il ne disparaît pas puisque l'Etat impérial subsiste et a besoin de lettrés (Psellos, au XIème siècle, connaît l'Iliade par coeur, et s'y entend bien pour décortiquer Platon).
- cela dit, il ne disparaît pas. D'abord il y eut des royaumes barbares très cultivés (l'Espagne des Wisigoths, l'Italie de Théodoric) ; ensuite, les rois barbares ne sont pas des incultes non plus (l'histoire du roi qui ne sait pas lire, c'est un mythe) ; il faut tenir compte aussi de la passion des Irlandais pour l'étude de l'Antiquité. Quant aux formes juridiques romaines, elles ne disparaissent pas, elles constituent même une référence.
- il y a plusieurs moments de grands développements intellectuels (la renaissance carolingienne, avec de grands humanistes, sans parler de Charlemagne lui-même qui, malgré ses difficultés de lecture, savait le latin, le grec, et pouvait soutenir des discussions théologiques pointues ; la renaissance du 12ème siècle, époque de St Bernard puisque vous voulez savoir quand il a vécu, mais aussi de la naissance des universités et de la redécouverte du droit romain... et bien sûr les sommets de la pensée au 13ème siècle, St Thomas entre autres, la redécouverte d'Aristote...). Et je ne parle pas des avancées techniques, agricoles notamment, que les moines ont beaucoup développées, il faudrait aussi parler de la lettre de change, des bateaux capables de voguer sur l'Atlantique (ça, les Romains maîtrisaient mal), de la comptabilité en partie double ("un des sommets de l'esprit humain", selon Goethe), des prouesses techniques de l'architecture gothique, que les hommes de l'Antiquité auraient été bien en peine d'imaginer. Bref, cessez de dire toutes vos âneries sur les ténèbres du Moyen Age.

- En ce qui concerne les questions de l'Inquisition : pas de bêtises non plus. On a comptabilisé de temps en temps : les sentences de mort concernent 1 à 2 % des cas instruits ; les inquisiteurs, m'a-t-on dit (je ne suis pas médiéviste), étaient beaucoup plus doux que les autorités judiciaires laïques. De surcroît, l'Inquisition n'était pas une chose obligatoire, et un souverain était tout à fait libre de la refuser sur son territoire. Quant à la chasse aux sorcières, elle se déroule surtout aux 15-16ème siècles (énormément à la fin du 16ème), et n'a rien à voir avec l'Inquisition - et soit dit en passant, les procès en sorcellerie existaient aussi, ils étaient même nombreux, pendant l'Antiquité (je vous renvoie à l'Apologie d'Apulée). Sinon, le bûcher pour raisons religieuses, au Moyen Age, c'est rare ; en revanche, à la fin de l'Antiquité (y compris sous des empereurs païens, cela n'étant pas une question de religion ici), c'est une peine judiciaire commune. Vous savez, je ne suis pas très content de ces pratiques moi aussi - ne serait-ce qu'en raison des bêtises que leur souvenir retravaillé vous fait dire -, mais toute époque a ses défauts, la nôtre aussi, vous ne le nierez pas...

Il serait donc temps que vous revoyiez un minimum vos connaissances sur le sujet. Vous ne savez rien, et quand vous croyez savoir quelque chose, vous ne manifestez aucune curiosité pour une époque autre, vous ne la considérez qu'à travers le regard de la nôtre, ce qui n'a pas de sens. Avant de refaire le monde, renseignez-vous. Sinon, je suis ravi que vous ne regardiez pas la TV, vous serez moins déculturée que d'autres : cela, en soi, constitue un bon début, confirmez, quoi. Quant à moi, j'ai 27 ans et je vous rassure, je ne suis pas encore un vieux ringard.

Bien à vous
MB

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