Je crois profondément en ce propos que Kerygme vous citez provenant de « Riposte Catholique … et c’est en quoi je considère que le refus de la peine de mort est un signe d’athéisme grandissant (et quelque peu flagorneur), et non de charité chrétienne. Pour un chrétien, répondre à ce que Dieu attend de nous passe avant la vie. : « qui veut sauver sa vie la perdra ».
Car le concept de repentir pris dans ce contexte est une fumisterie. Sachant tout le travail qu’un croyant doit faire pour s’écarter du péché, le petit nombre de sauvés, l’incertitude qui l’habite de l’être malgré son désir, croyez-vous (ne serait-ce que du point de vue de la justice) qu’il sera si facile à non seulement un incroyant, mais un criminel endurci, de suivre ce chemin ? Peut-être un cas sur mille et encore, l’exception reste l’exception et Dieu saura la jouer mieux que nous.
Certes, il n’y a probablement que le croyant pour se repentir (ou s’enflammer d’idéal) en cas de condamnation, et la peine de mort lèvera ses dernières réticences. C’était vrai autrefois, ce n’est plus d’actualité et nous savons pourquoi…
Je considère aussi comme hors sujet de dresser la liste des cas concernés, car si je disais qu’il faudrait que la vie d’autrui ait été délibérément mise pour le moins en danger ou menacée, il y aurait encore des cas chroniques comme celui du pédophile qui n’avait pas besoin d’en arriver jusque là pour imposer sa force, et qui s’il ne menaçait pas une vie, la détruira dans ce qu’elle avait de plus libre et personnel et c’est peut-être pire.
Je reporte donc ce travail à quand la peine sera reconnue pour légitime et ce qui en donnera le motif comme un critère de discernement.
Venons-en au concept de la légitime défense.
Si un homme déterminé vous menace avec une arme de tir rapide et que vous ne pouvez pas le désarmer, que vous n’avez d’autre choix que celui d’un usage similaire, allez-vous attendre qu’il ait tiré pour le faire ?
Je vous parle là de la réalité, pas de ces scènes rencontrées ou vues dans les films et qui pour la plupart sont complètement fausses.
Vous me direz qu’il ne voulait peut-être que vous blesser (ce qui représente pour lui un plus grand risque que de vous supprimer, car vous deviendriez le témoin de son geste et vous auriez dans votre chair une preuve) alors que déjà je pense que ce serait plus alors par manque de précision, de décision ou de réflexion, si cela arrivait.
Donc vous, à suppose que vous ayez asse de recul pour résister au stress et ne pas être paralysés ou emportés, vous ne chercheriez qu’à le blesser ? Peut-être pensez-vous qu’il vous remerciera de l’avoir épargné ? Moi je crois plutôt qu’il vous en voudra encore plus. Parmi les écrits sur les pères du désert, il en est un qui est : « Un ancien a dit : « celui qui t’a offensé réussira difficilement à te pardonner. » » et (pour compléter cette pensée si juste…) c’est lui qui te poursuivra de sa vengeance alors que c’est toi qui en aurait le droit.
En tout cas il n’en sera pas plus reconnaissant, mais aigri et plus opportuniste qu’il ne l’était, plus mesquin et méfiant, à l’affût.
C’est cela la réalité, plus que l’espoir du contraire.
Prenons un exemple plus précis encore : un homme cherche à vous tuer mais un impondérable l’en empêche. Alors qu’il se prépare à recommencer, et que vous réalisez qu’il est bien plus fort que vous, vous avez l’opportunité soit de l’assommer, soit de le tuer à votre tour.
Vous savez sans doute possible qu’à son réveil vous serez à nouveau seuls, tous les deux, que vous ne disposez de rien pour le neutraliser (liens etc.) et qu’il réessayera de vous tuer (le motif n’a pas changé, et s’y ajoutera son échec).
Vous le tuez, ou vous vous contentez de l’assommer ?
Et si vous vous contentez de l’assommer et que la situation se renouvelle, que l’impondérable est de moins en moins probable, ainsi que votre capacité à le tuer, vous vous contentez de l’assommer ?
Il sera sans doute alors trop tard au moment où vous vous décidez, et sinon, si par hasard vous vous en sortiez (arrivée de renforts) croyez-vous qu’une prochaine fois vous laisserez passer l’occasion inespérée ?
La loi nous oblige à attendre, si je puis dire, d’être en légitime défense. Elle suppose que vous serez le plus fort (ce qui suppose au moins que votre défense soit supérieure à son attaque et non « proportionnelle », déjà, pour vous mettre hors de danger) ce qui n’est vrai que quand la loi vous remplace (et encore ! Combien de victimes mises en danger sont condamnées pour s’être défendues…)
La loi est à votre place et l’a surpris, elle doit décider de son sort…
Vous me direz que la récidive n’est pas si systématiquement acquise, mais quand une personne montre dans l’exécution de son crime une indifférence et des « qualités » indéniables qui l’y prédisposent, allez-vous attendre qu’il recommence et sans savoir ce qu’en sera l’issue ?
Prétendre que nous savons aujourd’hui nous préserver de récidives est une fausseté, outre que l’investissement que cela représente serait mieux employé à secourir les pauvres.
Je suis contre le système carcéral, il existe aujourd’hui des moyens (bracelet électronique, travaux d’intérêt général, tutelle, etc.) pour l’éviter. Ceux qui en sortent sont souvent pires, en insécurité (et nous aussi du coup !) il faudra les réinsérer, ils auront été coupés de la société, etc. Sans compter que les compétences et qualités pour être matons ne sont pas ordinaires et exposent à des risques.
Or il ne faut pas rêver : sa sûreté n’a rien d’inviolable, et elle contient son propre virus (la remise des peines).
Il n’y a que deux façons d’être « contre » la peine de mort :
- Vous en remettre à un miracle prochain : je ne vous dirai pas que c’est tenter Dieu, mais que c’est grand et beau. Cependant : est-ce juste ? Etes-vous sûre d’avoir l’étoffe de cette foi-là et n’est-ce pas plutôt une lâcheté ? Et quand bien même vous me répondriez que oui, trouveriez-vous normal de devoir en attendre autant de tous ? Je veux parler de ceux envers qui votre compassion devrait aller en priorité ! (De toute façon, si j’en crois les échanges que j’ai eu sur d’autres sujets, nous ne sommes pas nombreux à penser les choses ainsi, quant à en vivre, combien en restera-t-il !)
Vous sacrifier consciemment : ce ne peut pas être le choix d’une société, mais un choix individuel et quand vous seul êtes concerné. Car cette société s’autodétruirait après avoir profité aux plus indignes.
Soyons clair : il y a vengeance et vengeance (St Thomas d’Aquin parle du « soin de la vengeance », qui est nécessaire et juste et qui se passe de l’assentiment de « sa victime »), et elle est tout à fait hors sujet pour moi. Le mal est un mystère et une absurdité, on ne s’en venge pas, on s’en préserve. Sans haine ni méchanceté…
Certains athées devant cette peine de mort font montre d’un plus grand courage que des croyants : ils la trouvent juste, or comme il n’y a d’autre justice pour eux que celle d’ici-bas, il faut bien qu’il y ait un recours pour que « ne pas faire aux autres ce qu’on ne voudrait pas qu’il nous soit fait », soit défendu face à des criminels qui sinon bénéficieraient d’un passe-droit.
C’est ce point-là que votre citation omet de prendre en compte.
La collusion actuelle entre croyants et incroyants se fait sous le signe de la lâcheté. Elle est très contagieuse, insidieuse, et chacun se bande les yeux en applaudissant (exutoire ou catharsis) aux médailles distribuées à quelques héros courageux, reliques d’un temps passé disparu ou prophètes d’un avenir encore incertain.
Tuer, en ce qui concerne la compassion, la dignité, fait moins de mal que de blesser. Le mal n’est plus dans ce cas que spirituel, il ne contient aucun sadisme ni vengeance, il relève d’une légitimité de défense qui a fait et qui fera toujours ses preuves dans une réalité qui de toute évidence n’est pour beaucoup que virtuelle ou imaginée, intellectuelle, et qui laisse à Dieu toute latitude d’intervenir ou non.
A force d’en refuser le droit à la justice, il arrivera un jour où cela deviendra le seul acte pieux encore accessible. Or nous avons tous besoin d’un délai pour mieux nous repentir de nos péchés – pas de cela qui n’en est pas un !
Vous avez le choix : en éviter un qui n’est pas probant, et perdre la vie (en toute charité fraternelle, je parle d’un point de vue non égoïste), ou combattre encore ceux qui se cachent en vous et vous débarrasser des importuns qui se flattent d’en avoir de plus dominants.
Si à titre individuel on peut épargner la vie d’un homme qui mériterait la mort (c'est-à-dire ne pas porter plainte et même s’il n’y a pas de peine de mort) ce n’est plus vrai à titre collectif. Maintenant ce sont souvent ceux qui réclament justice et réparation de tribunaux civils ou pénaux (coquette somme d’argent) qui sont les premiers à se donner bonne conscience en écartant la peine de mort. Est-ce cela, faire preuve d’indulgence ?
Je ne l’ai pas écrit mais pensé très fort : parce que leur lâcheté à se défendre se dissimule et que les mauvais rôles sont distribués aux autres, se disant « pourvu que cela dure ! »
Se débarrasser d’une nuisance, non d’un coupable (ce n’est pas le propos de juger mais d’agir), sans autre satisfaction ni désir de nuire puisque au contraire le réduisant à un absent vite oublié pour qui on peut toujours prier (seule chose vraiment efficace à faire pour lui).