Bonjour,
Pour éclairer le débat, rappelons ce qu'écrivaient J. RATZINGER (futur pape Benoît XVI) et le cardinal T. BERTONE en 2002 par la voix de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi :
4. À partir de là, s’étend le réseau complexe des problématiques actuelles, qui n’ont pas eu à affronter les questions des siècles passés. Les conquêtes scientifiques ont en effet permis d’atteindre des objectifs qui ébranlent les consciences et qui obligent à trouver des solutions susceptibles de respecter les principes éthiques d’une manière cohérente et solide. On assiste au contraire à des tentatives de législation qui visent à briser le caractère intangible de la vie humaine, sans tenir compte des conséquences qui en découlent pour l’existence et l’avenir des peuples dans le domaine de la formation de la culture et des comportements sociaux. Dans une telle situation, les catholiques ont le droit et le devoir d’intervenir pour rappeler le sens le plus profond de la vie et des responsabilités qui incombent à tous en cette matière. Dans la droite ligne de l’enseignement constant de l’Église, Jean-Paul II a maintes fois répété que ceux qui sont engagés directement dans les instances législatives ont «une obligation précise de s’opposer» à toute loi qui s’avère un attentat contre la vie humaine. Pour eux, comme pour tout catholique, il est impossible de participer à des campagnes d’opinion en faveur de telles lois, et il n’est permis à personne de les soutenir par son vote [19]. Comme l’a enseigné Jean-Paul II dans l'encyclique Evangelium vitae à propos du cas où il ne serait pas possible d’éviter ou d’abroger totalement une loi permettant l’avortement déjà en vigueur ou mise au vote, cela n’empêche pas qu'«un parlementaire, dont l’opposition personnelle absolue à l’avortement serait manifeste et connue de tous, pourrait licitement apporter son soutien à des propositions destinées à limiter les préjudices d’une telle loi et à en diminuer ainsi les effets négatifs sur le plan de la culture et de la moralité publique».[20].
Dans ce contexte, il faut ajouter que la conscience chrétienne bien formée ne permet à personne d’encourager par son vote la mise en œuvre d’un programme politique ou d’une loi dans lesquels le contenu fondamental de la foi et de la morale serait évincé par la présentation de propositions différentes de ce contenu ou opposées à lui. Parce que la foi est un tout indivisible, il n’est pas logique d’isoler un de ses éléments au détriment de la totalité de la doctrine catholique.
L’engagement politique en faveur d’un aspect isolé de la doctrine sociale de l’Église ne suffit pas à répondre totalement à la responsabilité pour le bien commun. Les catholiques ne peuvent pas non plus songer à déléguer à d’autres l’engagement qu’ils ont reçu de l’Évangile de Jésus Christ, pour que la vérité sur l’homme et sur le monde puisse être annoncée et atteinte.
La source complète (à lire en entier, car le document est difficilement sécable) :
http://www.vatican.va/roman_curia/congr ... ca_fr.html
Par ailleurs, le pape Benoît XVI rappelle également que le vote catholique doit être éclairé par le respect des points non négociables :
83. Il est important de relever ce que les Pères synodaux ont appelé cohérence eucharistique, à laquelle notre existence est objectivement appelée. En effet, le culte agréable à Dieu n'est jamais un acte purement privé, sans conséquence sur nos relations sociales: il requiert un témoignage public de notre foi. Évidemment, cela vaut pour tous les baptisés, mais s'impose avec une exigence particulière pour ceux qui, par la position sociale ou politique qu'ils occupent, doivent prendre des décisions concernant les valeurs fondamentales, comme le respect et la défense de la vie humaine, de sa conception à sa fin naturelle, comme la famille fondée sur le mariage entre homme et femme, la liberté d'éducation des enfants et la promotion du bien commun sous toutes ses formes. (230) Ces valeurs ne sont pas négociables. Par conséquent, les hommes politiques et les législateurs catholiques, conscients de leur grave responsabilité sociale, doivent se sentir particulièrement interpellés par leur conscience, justement formée, pour présenter et soutenir des lois inspirées par les valeurs fondées sur la nature humaine. (231) Cela a, entre autres, un lien objectif avec l'Eucharistie (cf. 1 Co 11, 27-29). Les Évêques sont tenus de rappeler constamment ces valeurs; cela fait partie de leur responsabilité à l'égard du troupeau qui leur est confié. (232)
Source :
http://w2.vatican.va/content/benedict-x ... tatis.html
En résumé, un catholique fidèle à l'Eglise et fidèle au Christ (c'est un tout...) doit voter avec ces éléments en tête. Si le choix est parfois difficile, il faut considérer :
qu'un catholique ne peut pas voter pour un candidat qui, objectivement, ne respectera pas les principes non négociables.
en particulier, qu'un catholique ne peut pas encourager par son vote un candidat pro-avortement.
qu'un tel choix est parfois impossible, les candidats n'étant pas conformes au bien commun. Dans ce cas, l'Eglise nous commande de choisir "le moins pire", ce qui pourrait améliorer le bien commun même si aucun des candidats n'est acceptable, une sorte de moindre mal. Ou alors, le vote blanc peut faire sens, dans la mesure où la personne décide de ne pas soutenir les candidats proposés, car leurs propositions sont contraires à sa conscience.
Ces éléments semblent bien, comme cela a été dit par plusieurs contributeurs, exclure de facto un candidat (M. MACRON) parmi les deux finalistes. Ce qui est assez fort, c'est que M. MACRON n'a rien mis dans son programme qui prête le flan explicitement à ses détracteurs, l'essentiel des mesures étant économiques. Toutefois, sur le plan sociétal, on sait pertinemment que ce candidat va aggraver la législation en matière de respect de la vie, en matière de droit de la famille et de protection de l'enfance.
Pour Mme Le Pen, la ligne semble moins claire sur certains points. Par exemple, le principe non négociable de la liberté scolaire est certes affirmé avec force dans le programme de la candidate (point 11 de son programme), mais la suite (le contrôle des écoles hors-contrat) semble contredire la proposition (avec notamment la référence aux valeurs de la République). D'autres points méritent un éclaircissement.
Précision enfin que l'acte de voter peut se faire selon plusieurs raisons :
par adhésion au programme et à la vision du candidat
par stratégie électorale ou par intérêt
Beaucoup de gens votent selon la seconde logique, en regardant dans le programme ou dans la vision du candidat ce qui serait bien pour leur propre situation. Un catholique, qui a par définition une vision globale de la société dans laquelle il vit et le souci de préserver cette société en oeuvrant pour le bien commun, ne peut que voter selon la première logique (à moins qu'un vote stratégique puisse être un moindre mal, par exemple voter pour Mme LePen pour éviter M. MACRON).
En Christ,