L'Église et la contraception

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par antoine93 » sam. 20 sept. 2008, 20:32

Boris a écrit :
antoine93 a écrit :User de manière responsable de cette faculté de procréer, c'est-à-dire : faire X enfants, et Billings ou abstinence après... Ca tient debout.

Cependant, comment déterminer le nombre d'enfants à faire avant de pouvoir utiliser la méthode Billings ?

D'ailleurs, peut-on utiliser cette méthode, car même après avoir atteint le nombre d'enfants voulus, des "ratés de Billings" peuvent toujours venir...
Que l'on soit bien clair : les "ratés billings" sont dus à ... non respect des règles Billings.
Dans cette page web (http://www.woomb.org/bom/trials/index.html), on peut constater que de temps en temps, des ratés billings peuvent venir même lorsque l'on respecte les règles (ici, "method related pregnancies", ou "grossesses d'origine méthodologique"). Cela reste néanmoins assez rare.
METHOD-RELATED PREGNANCY RATE
This indicates the number of pregnancies, expressed as a percentage, occurring when couples carry out correct instructions for a particular method.
"Ceci indique le nombre de grossesses, exprimées en pourcentage, se réalisant sachant que les couples suivent les instructions correctes pour une certaine méthode."

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par Boris » sam. 20 sept. 2008, 20:40

La méthode billings permet à 25% des couples dit infécond d'avoir quand même des enfants.

Je pense que c'est plutôt cela qui est mentionné.

Ensuite, si ce sont les erreurs, comme je vous l'ai dit, c'est comme la pilule : sur le papier c'est du 100% et dans le concret, c'est du 99%.

Tous les cas (rares) que j'ai rencontré de bébés soit-disant Billings relevaient d'erreur dans l'enseignement et le respect des règles.

Pour plus d'info : http://billings.free.fr , c'est le Centre Billings France, avec des infos en français.
UdP,
Boris

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par Boris » sam. 20 sept. 2008, 20:58

En fait, le meilleur moment pour commencer Billings, c'est au moment des fiançailles.

Comme l'Eglise recommande l'abstinence en dehors du mariage, cela permet aussi de parler sexualité et enfants, accueil de la vie, ...

Rappel : la méthode Billings, c'est la femme qui s'observe et le mari qui prend note le soir en tenant un tableau qui est le reflet du cycle de la femme.

Ainsi, à chaque cycle la question d'un nouvel enfant est reposé.
UdP,
Boris

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par Olivier JC » sam. 20 sept. 2008, 21:23

User de manière responsable de cette faculté de procréer, c'est-à-dire : faire X enfants, et Billings ou abstinence après... Ca tient debout.

Cependant, comment déterminer le nombre d'enfants à faire avant de pouvoir utiliser la méthode Billings ?

D'ailleurs, peut-on utiliser cette méthode, car même après avoir atteint le nombre d'enfants voulus, des "ratés de Billings" peuvent toujours venir...
Pour bien comprendre, il me semble nécessaire d'essayer de voir quelle est la juste attitude intérieure par rapport à tout cela.

Le point fondamental, c'est le désir de procréer. C'est un désir permanent de fécondité. En quelque sorte, la juste attitude serait celle consistant à toujours désirer appeler à la vie un nouvel être humain. Désir qui n'est, au fond, que le reflet du désir de Dieu lui-même.

Or, naturellement, il faut voir si ce désir est concrètement réalisable. Il arrive qu'il le soit. Il arrive qu'il ne le soit pas.

La responsabilité des parents est de déterminer s'il est opportun, à tel moment donné, de laisser ce désir s'épanouir et se concrétiser dans la conception d'un enfant.

S'ils jugent que le moment n'est pas venu, alors se posera la question du moyen permettant de différer la concrétisation de ce désir : l'observation du cycles de fécondité de la femme.


Vous voyez donc que vous prenez les choses à l'envers, puisque vous partez du postulat que le désir d'enfant arrive de temps en temps, et non pas qu'il est permanent. Certes, dans les faits, sans doute ne l'est-il pas : nous sommes pécheurs.
Il ne s'agit pas de faire en sorte de ne pas avoir d'enfant parce qu'on ne désire pas en avoir, mais de renoncer à une désir en considération des circonstances concrètes de l'existence. Il y a presque une dimension de sacrifice, dans cette histoire là...

Ceci n'étant pas admis, alors il est bien évident que l'enseignement de l'Eglise tel qu'il résulte d'Humanae Vitae ne peut être véritablement admis non plus.

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par Boris » sam. 20 sept. 2008, 21:57

Joliment dit.

:clap: :clap: :clap:

J'adhère totalement, je n'avais jamais réfléchi aux choses dans ce sens.
Je me permets d'envoyer votre message à Mme Sentis, responsable du Centre Billings France.
UdP,
Boris

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par antoine93 » sam. 20 sept. 2008, 22:10

Olivier JC a écrit : Le point fondamental, c'est le désir de procréer. C'est un désir permanent de fécondité. En quelque sorte, la juste attitude serait celle consistant à toujours désirer appeler à la vie un nouvel être humain. Désir qui n'est, au fond, que le reflet du désir de Dieu lui-même.

Or, naturellement, il faut voir si ce désir est concrètement réalisable. Il arrive qu'il le soit. Il arrive qu'il ne le soit pas.
En fonction de quels critères concrets juge-t-on si ce désir est concrètement réalisable ou non ? Et combien il est réalisable ? (je parle bien sûr, des critères utilisables selon la théologie morale)

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par Boris » dim. 21 sept. 2008, 8:24

antoine93 a écrit :En fonction de quels critères concrets juge-t-on si ce désir est concrètement réalisable ou non ? Et combien il est réalisable ? (je parle bien sûr, des critères utilisables selon la théologie morale)
Boris a écrit :Ensuite, pour le nombre d'enfants, cela dépend de chaque couple, de sa capacité financière, de son age, ...
Je pense que les critères sont liés à ce que l'on peut offrir aux enfants à venir pour qu'ils aient une vie digne.

Ensuite, on ne doit pas refuser un enfant sous prétexte qu'il va falloir changer de voiture parce que le "scénic" sera trop petit. (je dis scénic car c'est un cas réel de cause d'avortement : la voiture toute neuve est trop petite pour le 3e ou 4e enfant, donc avortement, mais il s'agit souvent de couples utilisant des moyens de contraception).

Il ne faut que le refus d'enfant soit motivé par la conservation de son petit confort.

Exemple : pas plus de 2 enfants, parce que sinon on ne plus s'acheter des vêtements de marque et ne plus louer un hôtel 4* pour les vacances.
Ou bien pas d'enfant supplémentaire parce que je devoir arrêter mon passe-temps favori pendant les 9 mois de grossesse + le temps après la naissance.


Evidemment, ce n'est pas de la théologie morale, mais je pense que cela tout de même dans le même sens.
UdP,
Boris

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par Olivier JC » dim. 21 sept. 2008, 9:29

antoine93 a écrit :En fonction de quels critères concrets juge-t-on si ce désir est concrètement réalisable ou non ? Et combien il est réalisable ? (je parle bien sûr, des critères utilisables selon la théologie morale)
Pour approfondir la réponse de Boris, je dirais que de manière générale, il est toujours possible de trouver des raisons pour différer une grossesse.

La juste attitude c'est de prendre en considération ces raisons, et de les creuser pour voir si elles sont motivées par un égoïsme dissimulé éventuellement sous une couche de bons sentiments, ou si ce sont des raisons qui sont véritablement fondées sur l'intérêt bien compris de l'éventuel futur enfant.

Il n'y a donc pas à proprement parler de "règles", de critères particuliers. L'appréciation de la légitimité des raisons opposées au désir d'enfant dépend de chaque cas particulier.

Soit dit en passant, vous constatez aisément que le simple fait de remettre les choses dans le bon sens (non pas une absence de désir qu'il faut concrétiser, mais un désir dont il faut différer la concrétisation) oriente la réflexion dans une certaine direction, puisqu'il est bien évident que nous sommes plus facilement prêts à faire quelques sacrifices pour ce que l'on désire (ou devrait désirer) que pour ce que l'on ne désire pas.
L'Eglise ne dit pas autre chose, qui appelle les parents à la générosité.

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par Boris » dim. 21 sept. 2008, 9:39

Ma femme me dit qu'il faut considérer 2 points :
- les finances
- l'épanouissement de la femme

En effet, l'un et l'autre jouent profondément sur l'ambiance familiale.

Comment une femme éduquera-t-elle ses enfants si elle est dépressive parce qu'avec un enfant supplémentaire elle est complètement débordée et n'arrive plus à s'en sortir ?
Surtout si la famille est obligé de s'enfouir au fin fond de la campagne déserte pour des raisons financières. (mais toutes les campagnes ne sont désertes)

Cette question de l'épanouissement de la femme fait entrer en jeu son mari bien entendu et son comportement vis à vis d'elle et de ses enfants.


Enfin dernier point : chaque enfant supplémentaire dans une famille est une âme supplémentaire au Paradis pour glorifier et louer Dieu.
UdP,
Boris

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par Olivier JC » lun. 22 sept. 2008, 11:12

Bonjour,

Voilà. Il n'est donc pas possible de déterminer à l'avance combien d'enfants il est possible de concevoir.

Il ne s'agit donc pas de se dire : X enfants, puis méthode naturelle.

Il s'agit de se marier, puis de voir s'il est raisonnable de concevoir immédiatement un enfant, ou si certaines raisons valables justifient d'attendre un peu. Puis, cet enfant étant né, il s'agit de voir s'il est raisonnable de concevoir immédiatement le second, ou si certaines raisons valables justifient d'attendre un peu plus. Et ainsi de suite jusqu'à la ménopause, à partir de laquelle, par la force des choses, il ne sera plus nécessaire de se poser la question.
Suivant les circonstances concrètes, cela pourra conduire des couples à n'avoir qu'un enfant, d'autres quatre, d'autres six, d'autres douze...
  • A cet égard, il me semble important de préciser que l'objection souvent faite, tirée du risque de surpopulation, est inopérante. Car en effet, à supposer le risque réel, il convient de souligner que les époux ne sont pas dans une bulle : ils sont membres à part entière de la société humaine, et impliqués à ce titre dans l'objectif du bien commun. Dès lors, la situation démographique de la société dans laquelle ils vivent doit également être un critère éclairant la décision de procréer ou au contraire de différer cette procréation. Il est bien évident, par exemple, que dans un pays comme la Chine, un tel critère pourra avoir un poids bien plus déterminant que dans d'autres pays.

    Il faut bien y insister : l'enseignement de l'Eglise ne consiste pas à dire aux époux de faire des enfants, des enfants et encore des enfants. Il est de faire des enfants intelligemment, de manière responsable. Ce qui, à la sortie, peut donner des familles avec un seul enfant comme des familles avec vingt enfants.
Egalement, pour ce qui relève du désir d'enfanter en permanence qui est plus théorique que pratique (puisque la chair convoite contre l'esprit), il est utile de relever que Dieu nous a donné une Parole pour soutenir notre intelligence et notre volonté pour les moments où notre désir ne nous porte pas spontanément à vouloir enfanter : "Soyez féconds, multipliez" (Gn 1, 28 - Trad. BJ).
Telle est la volonté permanente de Dieu pour les couples mariés : que le couple soit fécond, et que cette fécondité se manifeste plus particulièrement par l'enfantement. Il y a, pour les couples mariés, un appel permanent, inhérent à leur état d'époux, à procréer.

A noter que cette considération constitue également un fondement, à côté de l'exigence d'unité et de vérité de l'acte conjugal, pour expliquer l'enseignement de l'Eglise relatif à la contraception, et non seulement l'expliquer, mais lui donner une plus grande plénitude de sens. Ne pas vouloir d'enfant, se refuser à enfanter, et chercher quel moyen employer pour assurer l'effectivité de cette volonté, c'est s'opposer à l'appel permanent à la fécondité et à la procréation. Et c'est cela qui est mauvais, que la méthode soit mécanique ou naturelle. Ainsi, toute contraception est mauvaise.
L'exigence d'unité et de vérité de l'acte conjugal ne vient, en quelque sorte, que comme appoint pour expliquer que seul le recours à l'observation du cycle naturel de la femme est véritablement humain, et donc qu'une méthode autre, même employée sans arrière-pensée contraceptionniste, est mauvaise en soi.

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par MB » lun. 22 sept. 2008, 13:55

Bonjour Olivier JC

Vos réflexions sont stimulantes et tout à fait inattendues. On ne m'a jamais parlé ainsi de ces sujets...
Pour être franc, cela me laisse encore pas mal de résistances, mais il faut que vous me donniez quelques jours pour savoir un peu mieux ce qu'elles sont.

Bien à vous
MB

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par MB » ven. 26 sept. 2008, 11:30

Bonjour Olivier JC,

j'ai mis un peu de temps à vous répondre... espérons que ce temps n'est pas perdu.

En gros, ce que vous dites est extrêmement stimulant ; en renversant les perspectives comme vous l'avez fait, vous jetez un éclairage qui m'est tout à fait nouveau sur ces questions. Sans doute n'est-il pas nouveau en réalité, et des réflexions de ce type existent-elles en grand nombre ; reste qu'on ne les trouve pas facilement, et c'est bien triste.

Reste aussi - comme je vous l'ai dit - que certains points, toujours, me chiffonnent.

1° Je passe rapidement sur les notions d'"enfant-projet", etc. Il n'y a pas à en faire toute une histoire. Il faut bien être capable d'assumer un enfant, d'une part, donc d'un certain point de vue, il y a toujours un projet. Quant à la notion de "projet" que vous dénoncez, je pense qu'elle n'existe pas en réalité, qu'elle est une illusion des gars du type du planning familial ; car, en pratique, un enfant, même voulu, même désiré, même projeté, arrive toujours par surprise. Si je puis dire, en ces domaines, l'Esprit souffle où il veut ; on a déjà du mal à attraper un enfant quand il bouge dans tous les sens ; c'est vrai aussi avant sa naissance...
Tout le monde sait qu'un couple, même décidé fermement à avoir un enfant, peut mettre un temps fou à y parvenir, ou à l'inverse, l'a tout de suite. J'ai l'impression que la conception se fait presque indépendamment des circonstances physiologiques positives, et que d'une certaine manière, il y faut plus que la nature. C'est comme si chaque couple était appelé à vivre, de son côté et à sa manière, l'Annonciation. Corrigez-moi si je dis une énormité.

2° Revenons au sujet. En fait, je trouve que votre argumentation au sujet des méthodes "naturelles" est un peu tortueuse. D'un côté, elles sont les seules à ne pas être peccamineuses ; de l'autre, toute méthode de contraception est à éviter. J'aimerais y voir un peu plus clair. En fait, j'ai l'impression que vous passez, l'air de rien, d'une définition de la nature (dans le sens de "ce qui correspond à la nature profonde de l'homme") à une définition un peu "écologique" (les méthodes artificielles étant une "amputation" de l'union sexuelle). En quoi une contraception à la Billings amputerait-elle moins l'union sexuelle que l'utilisation d'un latex ou d'une pilule ? Encore une fois, admettons un instant l'argumentation de Boris : si Billings est plus efficace que le latex, alors l'utilisation du latex laisse positivement plus de possibilité à la conception, et c'est alors Billings qui est peccamineux.
Ou alors on se fonde sur le caractère "naturel" de Billings et d'Ogino, mais on retombe dans l'aporie dénoncée plus haut (tout ce que fait l'homme étant à la fois naturel et artificiel).

Je reviendrai encore, dans quelque temps, sur les autres questions (en plus d'y cogiter, je suis pressé par mon travail en ce moment) ; mais je suis prêt à vous lire d'ici là.

Cordialement
MB

jeanbaptiste
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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par jeanbaptiste » ven. 26 sept. 2008, 12:11

Au sujet de 2 :

Il me semble que ce qui différencie fondamentalement les méthodes dites naturelles du latex et de la pilule tient en une seule chose : la connaissance du corps du conjoint.

Je m'explique en caricaturant : le désir sexuel masculin est généralement dirigé par la volonté de féconder (l'acte importe plus que l'issue), là où le désir sexuel féminin est dirigé par la volonté d'être fécondée, d'avoir un enfant (l'issue importe plus que l'acte). Cela est particulièrement manifeste dans les deux crimes sexuels suivants (instrumentalisation du corps) : le viol généralement masculin, vise à satisfaire le désir sexuel de féconder, l'acte sexuel ; faire un enfant "dans le dos" est généralement féminin et vise à satisfaire le désir d'avoir un enfant. Cela peut sembler étrange que je mette sur le même niveau le viol, et le fait de faire un enfant à l'insu du conjoint, or dans les deux cas il y a bien une instrumentalisation de la personne qui dégrade la dignité humaine.

Prenons donc un couple "typique", "caricatural". Un homme qui désire sa femme, veut "faire l'amour" avec elle, sans désirer pour l'instant un enfant ; et une femme qui désire sexuellement son mari afin d'avoir un enfant (ce qui ne veut pas dire qu'elle n'y prend pas plaisir !).

Un enfant naît, voulu par la mère (elle fera passer cela pour un accident), mais pas attendu par le père. Supposons qu'il y ait une engueulade : le mari reproche à sa femme de ne pas avoir penser à prendre la pilule, cette dernière lui répond qu'il n'a qu'à prendre des préservatifs, après tout elle ne voit pas pourquoi elle devrait supporter toute la responsabilité de la chose etc.

L'homme, se reposant sur la pilule, jouit sans se responsabiliser de sa femme , et sa femme, en pensant aux préservatifs, se dédouane de ses responsabilités en pensant que si elle a "oubliée" un jour la pilule, ce n'est, après tout, que justice etc.

Les méthodes dites naturelles apportent au couple une connaissance profonde de la sexualité du conjoint, de ses rythmes, et rend difficilement possible une telle instrumentalisation du corps de l'autre. En effet, dans ce cas, choisir de faire l'amour lors d'une période féconde, choix qui se fait à deux, est un engagement des deux côtés du couple du désir de voir l'acte aboutir à une fécondation.

La pilule comme symbole de la "libération" sexuelle est significatif : "nous sommes libres de baiser comme nous le voulons, avec qui nous voulons etc.". Comprenons : le rapport sexuel devient un acte à deux qui se fait chacun de son côté. Cette liberté est égoïsme.

Il est bien évidemment possible d'avoir des rapports sexuels qui respectent la dignité du conjoint avec des contraceptifs. Mais le risque de laisser tomber notre responsabilité sur l'autre est toujours présente. Les méthodes naturelles sont en soi "responsables", les contraceptifs sont en soi "irresponsables" (c-a-d égoïstes). Il est possible de faire une utilisation responsable et respectueuse des contraceptifs, mais le risque de glisser (par fatigue, oublie etc.) dans l'irresponsabilité et l'irrespect du conjoint est toujours possible.

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par Olivier JC » ven. 26 sept. 2008, 13:09

Bonjour MB,
MB a écrit :1° Je passe rapidement sur les notions d'"enfant-projet", etc. Il n'y a pas à en faire toute une histoire. Il faut bien être capable d'assumer un enfant, d'une part, donc d'un certain point de vue, il y a toujours un projet. Quant à la notion de "projet" que vous dénoncez, je pense qu'elle n'existe pas en réalité, qu'elle est une illusion des gars du type du planning familial ; car, en pratique, un enfant, même voulu, même désiré, même projeté, arrive toujours par surprise. Si je puis dire, en ces domaines, l'Esprit souffle où il veut ; on a déjà du mal à attraper un enfant quand il bouge dans tous les sens ; c'est vrai aussi avant sa naissance...
Tout le monde sait qu'un couple, même décidé fermement à avoir un enfant, peut mettre un temps fou à y parvenir, ou à l'inverse, l'a tout de suite. J'ai l'impression que la conception se fait presque indépendamment des circonstances physiologiques positives, et que d'une certaine manière, il y faut plus que la nature. C'est comme si chaque couple était appelé à vivre, de son côté et à sa manière, l'Annonciation. Corrigez-moi si je dis une énormité.
De fait. Jésus lui-même conseille à celui qui envisage de construire une tour de commencer par s'asseoir pour voir s'il a de quoi aller jusqu'au bout. Le problème que peut soulever l'idée d'enfant-projet ne relève donc pas de la prévoyance. Simplement, cela peut conduire à des attitudes dommageables :
1) Par exemple, en cas de difficulté à concevoir, cela peut amener des conséquences très difficiles pour le couple, surtout si il commence à se tourner vers des méthodes de procréation artificielle. Il convient de conserver un certain détachement, en quelque sorte, par rapport au désir d'enfanter.
2) Autre exemple, les conséquences dommageables sur l'éducation de l'enfant. Un "projet" trop bien ficelé, trop pensé, peut poser problème. Les psys ont bien cerné ce problème.

D'autre part, il est certain que certains couples mettent plus de temps que d'autres. Conséquences néfastes d'une contraception chimique, trop grande implication psychologique entraînant une sorte de blocage, autres difficultés psychologiques, fécondité limitée ou mal ciblée... Les causes peuvent être nombreuses.
Cela dit, il ne me semble pas pertinent de dire qu'il y a faut plus que la nature. Notre psychologie fait partie intégrante de notre nature humaine, et il ne me semble pas juste de voir dans la conception d'un enfant une intervention divine autre que la seule création de l'âme (selon le cas général : naturellement Dieu peut toujours intervenir). Un enfant est certes un don de Dieu, mais en vertu de la causalité première.
MB a écrit :2° Revenons au sujet. En fait, je trouve que votre argumentation au sujet des méthodes "naturelles" est un peu tortueuse. D'un côté, elles sont les seules à ne pas être peccamineuses ; de l'autre, toute méthode de contraception est à éviter. J'aimerais y voir un peu plus clair. En fait, j'ai l'impression que vous passez, l'air de rien, d'une définition de la nature (dans le sens de "ce qui correspond à la nature profonde de l'homme") à une définition un peu "écologique" (les méthodes artificielles étant une "amputation" de l'union sexuelle). En quoi une contraception à la Billings amputerait-elle moins l'union sexuelle que l'utilisation d'un latex ou d'une pilule ?
D'une part, je crois utile de distinguer premièrement l'intention contraceptive, qui naturellement est toujours mauvaise. Et deuxièmement le moyen de différer une conception, dont la moralité dépend de sa capacité à atteindre l'objectif fixé tout en assurant à l'union des époux sa pleine vérité.
Les deux choses sont cumulatives : intention droite et moyen licite sont requis. De là que l'utilisation d'une méthode naturelle avec une intention contraceptive est problématique.

D'autre part, je ne passe aucunement d'une notion de la nature à une autre, sauf à m'exprimer maladroitement. J'affirme simplement que la nature "biologique", à savoir notre corps, son fonctionnement, fait partie intégrante de la nature humaine. Donc, que notre corps est à même de nous fournir, par son fonctionnement même, des pistes dans l'ordre de l'agir moral.
Ainsi on voit que biologiquement, les organes sexuels de la femme et de l'homme sont fait l'un pour l'autre, et que cette réunion a deux effets : elle peut contribuer à raffermir les liens entre les époux (c'est prouvé biologiquement, par la libération de je ne sais plus quelle hormone) et à concevoir un enfant.
Elargissant la perspective à la nature humaine dans sa globalité, donc y compris la nature biologique, nous apprenons que l'être humain est créé à l'image de Dieu, et qu'il est fait pour se donner comme Dieu se donne : sans restrictions aucune. Pour se donner avec tout ce qu'il est à tous points de vue.
Ce qui permet de conclure que la sexualité est, pour le couple, un des lieux de ce don de soi qui implique de façon particulière les corps, et que ce don est donc appelé à être total.

Vous voyez ? Je ne navigue pas entre deux conceptions antagonistes de la "nature". Si l'homme est à l'image de Dieu, c'est aussi par son corps. Ce n'est pas nous qui sommes à l'image des animaux, mais l'inverse : les animaux ont un corps parce que l'homme, selon le plan de Dieu devait avoir un corps. C'est l'homme qui détermine la Création par Dieu. Il en est le couronnement, le modèle, le prêtre. En lui, elle se récapitule. C'est le regard magnifique des Pères de l'Eglise, quelque peu voilé en Occident, mais que l'Orient a gardé vivace, et je ne serais pas étonné que Benoît XVI adopte un point de vue similaire dans sa prochaine encyclique, dont on nous dit qu'elle aura une forte implication environnementale.

Bref, la nature humaine, ce n'est pas uniquement une abstraction conceptuelle. C'est quelque chose qui s'enracine dans le biologique, qui inclut le biologique, mais qui ne se résume naturellement pas au biologique.
MB a écrit :Encore une fois, admettons un instant l'argumentation de Boris : si Billings est plus efficace que le latex, alors l'utilisation du latex laisse positivement plus de possibilité à la conception, et c'est alors Billings qui est peccamineux.
Ou alors on se fonde sur le caractère "naturel" de Billings et d'Ogino, mais on retombe dans l'aporie dénoncée plus haut (tout ce que fait l'homme étant à la fois naturel et artificiel).
Cet aspect de la question (l'efficacité de la méthode) n'a aucune incidence morale. Ce qui fait la valeur de Billings, c'est précisément qu'elle est "naturelle", étant entendu que ce terme naturel doit être compris comme je l'ai expliqué dans le paragraphe précédent.

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Re: Contraception, que dit l'Église ?

Message non lu par antoine93 » ven. 26 sept. 2008, 14:46

Olivier JC a écrit : Ainsi on voit que biologiquement, les organes sexuels de la femme et de l'homme sont fait l'un pour l'autre, et que cette réunion a deux effets : elle peut contribuer à raffermir les liens entre les époux (c'est prouvé biologiquement, par la libération de je ne sais plus quelle hormone) et à concevoir un enfant.
Il s'agit de l'ocytocine.

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