Désird'humilité a écrit : ↑mar. 19 mai 2020, 23:37
Cependant, je me pose encore deux questions : premièrement, pourquoi Jésus dit-il
« Le sabbat a été fait pour l’homme, et non pas l’homme pour le sabbat.Voilà pourquoi le Fils de l’homme est maître, même du sabbat. » ? Cela ne rentre t'il pas en contradiction avec la pratique assidue du Christ ?
Par «le sabbat a été fait pour l'homme et non pas l'homme pour le sabbat» Notre Seigneur nous rappelle une vérité simple et évidente, pourtant une vérité que nous oublions souvent. Le bon Dieu nous a donné ses commandements pas pour son bien, ni de son caprice, mais pour notre bien. Car la créature ne se connaît pas mieux que le Créateur ne la connaît. Si Dieu nous impose certaines restrictions, c'est pour notre plus grand bien.
Par «le Fils de l'homme est maître, même du sabbat», il nous rappelle que la loi n'oblige pas le souverain.
Au total, la Loi fut faite PAR le Législateur et non par POUR le Législateur.
C'est pourquoi Notre Seigneur répond aux reproches des pharisiens par l'exemple de David (Marc 2 : 25). Effectivement, David, étant en fuite et affamé, mange les pains consacrés à Dieu, qui étaient réservés pour les prêtres. Et pas seulement il mange lui-même, mais il partage avec ses compagnons. Les pharisiens ne peuvent pas rejeter l'exemple de l'illustre David et dire qu'il a actionne hors la Loi. Or, si par nécessité, David, qui n'était pas prêtre et n'était qu'un antitype (=préfigurateur) de Jésus, d'autant plus la Loi permet la même chose à Jésus, vrai prêtre et vrai roi. Ce qu'on ne peut pas reprocher à David, d'autant plus on ne peut reprocher à son Fils. Donc, Notre Seigneur fit cette chose SELON sa Loi, et non pas CONTRE celle-ci, car Il n'est pas venu pour la changer (Mt 5 : 17)
Nous voyons bien que, en affichant le respect de la Loi, les pharisiens oublient la Loi même. Ou font mine de l'oublier. Car nous avons du mal à croire que ces docteurs de la Loi ne sussent pas l'article du Deutéronome 23:25 qui prévoit exactement le fait que les gens peuvent cueillir le blé à la main. Ils le savaient, car c'est pour cela qu'ils n'osent pas accuser Jésus et ses Apôtres de vol de froment. Alors, il l'accusent d'outrepasser la loi du sabbat. Or, par cela ils nous montrent qu'ils ont oublié le sens de la Loi. Il ne savent plus pourquoi Dieu donne ses lois et c'est pour ça que Dieu incarné leur rappelle: pour les êtres humains. Car, si Deut 23:25 nous interdit la récolte du blé qui ne nous appartient pas à la faucille tendis qu'il la permet à la main c'est justement pour rassasier notre faim en cas de nécessité. Un aspect de ce que la sainte doctrine de l'Église appelle «La destination universelle des biens».
Deuxièmement, comment expliquez-vous la parabole du Bon Samaritain ? Le Bon Samaritain n'est-il pas un hérétique proscrit qui sauve un homme par opposition au prêtre parfaitement orthodoxe qui laisse mourir le même homme ?
Par là, on arrive à votre question. La théorie sans pratique ne sert pas à grande chose. L'Orthodoxie sans l'orthopraxie donne des résultats monstrueux, voilà.
Le fait que derrière l'exemple imaginé par Jésus de cet homme blessé à mort se cache une allégorie pour le péché mortel est bien connu. Tel que je ne vais pas insister là-dessus.
Mais quel est le rapport entre les deux ? Quel est le rapport entre le fait (bien réel, cette fois) de la récolte du blé et la parabole du Bon Samaritain ? Dans les deux cas on voit une action par nécessité. Une action que, comme on a vu, la Loi n'interdisait pas. Le Bon Samaritain, qui n'est pas autre que le Fils de David intervient par nécessité. Le prêtre et le lévite passent leur chemin non pas par négligence, mais parce qu'il obéissent à la Loi plus qu'au Législateur. Car, en touchant un corps qu'ils croyaient mort, ou même le sang impur, ils se rendaient incapables de leur service au Temple. Une procédure minutieuse et compliquée de purification devrait suivre dans ce cas. Nous voyons ici comment un prêtre de Dieu vivant, de Dieu de la vie, devient un fonctionnaire du Temple. Aux bons entendeurs, salut!
Mais le rapport va au delà de la question de la nécessité, commune dans les deux cas. Si on parle du sens allégorique, on doit remarquer ce qui se cache derrière le fait que les Apôtres, pour apaiser leur faim, arrivent à récolter du blé à la main.. Comme le Vénérable Bède le voit bien, les apprentis de Jésus, pleins de sollicitude apostolique, sont affamés du salut des hommes. Le blé, ce sont les âmes qui peuvent être sauvées. Arracher les épis, c'est arracher les hommes à toutes les intentions terrestres. Les froisser entre les mains c'est dégager, par le travail sacramentel de leurs mains bénites, ce qui est très bon, la pureté, le noyau de leur âme, de toute concupiscence charnelle comme d'une sorte de paille qui se dépose sur ce noyau. Le souffle par lequel cette paille s'en va pour dégager ce qu'il est très bon c'est la prédication évangélique. Peut-être même le souffle transmis par Dieu? Manger ce blé c'est le faire incorporé dans le monde des apprentis de Dieu. C'est ce que ni le prêtre, ni le lévite ne le font pas. Les Docteurs de la Loi non plus. Eux, ils laissent le blé pourrir. Le jour de Dieu, ils ont oublié qu'ils sont les apprentis de Dieu.
In corde Iesu,
A.