Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Littérature - Fiches de lecture - Biographies - Critiques - Essais - Philologie
Avatar de l’utilisateur
Fleur de Lys
Rector provinciæ
Rector provinciæ
Messages : 553
Inscription : sam. 20 avr. 2013, 9:59
Conviction : Catholique
Localisation : France

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par Fleur de Lys » ven. 17 avr. 2020, 0:18

[Un simple coucou.
Je vois que 1) le jeu a été déplacé ? 2) il semble en pause. J'espère que vous allez tous bien en ces moments compliqués.
Même quand je ne joue pas je prends plaisir à lire vos extraits, c'est toujours interessant. :) ]

Avatar de l’utilisateur
prodigal
Amicus Civitatis
Amicus Civitatis
Messages : 2292
Inscription : mar. 09 juil. 2013, 10:32

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par prodigal » ven. 17 avr. 2020, 9:13

On peut toujours jouer, l'extrait que j'ai proposé attend toujours de retrouver son auteur.
On sait qu'il s'agit d'un auteur du vingtième siècle, qui se trouve dans tous les bons dictionnaires mais pas entre Pergaud et Romains, et que le caractère étrange de l'extrait ne signifie pas que l'on soit dans le registre de l'horreur.
J'ajouterai qu'à mon avis il s'agit d'un grand écrivain, qui fut naguère très populaire, je crois même qu'on peut dire qu'il fut très aimé. Peut-être est-il un peu oublié, mais il arrive que des adaptations de ses œuvres soient réalisées et réactivent son souvenir.
"Dieu n'a pas besoin de nos mensonges" (Léon XIII)

Avatar de l’utilisateur
Fée Violine
Consul
Consul
Messages : 12387
Inscription : mer. 24 sept. 2008, 14:13
Conviction : Catholique ordinaire. Laïque dominicaine
Localisation : France
Contact :

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par Fée Violine » ven. 17 avr. 2020, 14:50

Très aimé... Marcel Aymé peut-être ? :idea:
En effet il y a eu récemment une adaptation du Passe-muraille.
Et cet extrait est assez représentatif de sa fantaisie habituelle !

Oui, Fleur de Lys, j'ai déplacé le fil car la section Quartier libre n'est visible qu'aux membres inscrits, tandis que les Salons (dont celui-ci, le salon Lettres) sont accessibles à tous.

Avatar de l’utilisateur
prodigal
Amicus Civitatis
Amicus Civitatis
Messages : 2292
Inscription : mar. 09 juil. 2013, 10:32

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par prodigal » ven. 17 avr. 2020, 16:09

Bravo, mon mauvais jeu de mots n'a donc pas été fait en vain!
C'est un extrait du Passe-Muraille d'ailleurs, non pas de la nouvelle, mais du recueil qui la contient et qui porte son nom. Plus précisément, cela fait partie de la nouvelle intitulée Les bottes de sept lieues.
C'est donc à vous de nous proposer quelque chose, chère Fée violine.
"Dieu n'a pas besoin de nos mensonges" (Léon XIII)

Avatar de l’utilisateur
Fée Violine
Consul
Consul
Messages : 12387
Inscription : mer. 24 sept. 2008, 14:13
Conviction : Catholique ordinaire. Laïque dominicaine
Localisation : France
Contact :

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par Fée Violine » ven. 17 avr. 2020, 17:26

Votre indice était excellent !


Nouvelle énigme :


Je voyageais. Le paysage au milieu duquel j'étais placé était d'une grandeur et d'une noblesse irrésistibles. Il en passa sans doute en ce moment quelque chose dans mon âme. Mes pensées voltigeaient avec une légèreté égale à celle de l'atmosphère ; les passions vulgaires, telles que la haine et l'amour profane, m'apparaissaient maintenant aussi éloignées que les nuées qui défilaient au fond des abîmes sous mes pieds ; mon âme me semblait aussi vaste et aussi pure que la coupole du ciel dont j'étais enveloppé ; le souvenir des choses terrestres n'arrivait à mon coeur qu'affaibli et diminué, comme le son de la clochette des bestiaux imperceptibles qui paissaient loin, bien loin, sur le versant d'une autre montagne. Sur le petit lac immobile, noir de son immense profondeur, passait quelquefois l'ombre d'un nuage, comme le reflet du manteau d'un géant aérien volant à travers le ciel. Et je me souviens que cette sensation solennelle et rare, causée par un grand mouvement parfaitement silencieux, me remplissait d'une joie mêlée de peur. Bref, je me sentais, grâce à l'enthousiasmante beauté dont j'étais environné, en parfaite paix avec moi-même, et avec l'univers ; je crois même que, dans ma parfaite béatitude et dans mon total oubli de tout le mal terrestre, j'en étais venu à ne plus trouver si ridicules les journaux qui prétendent que l'homme est né bon ; quand, la matière incurable renouvelant ses exigences, je songeai à réparer la fatigue et à soulager l'appétit causé par une si longue ascension.



(L'extrait est long, mais pas plus facile pour autant...)

Avatar de l’utilisateur
prodigal
Amicus Civitatis
Amicus Civitatis
Messages : 2292
Inscription : mar. 09 juil. 2013, 10:32

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par prodigal » sam. 18 avr. 2020, 10:08

Je trouve ce texte très bien écrit. Nous sommes dans une ambiance romantique, je parierais pour la première moitié du XIXe siècle.
C'est un récit qui semble autobiographique, mais il peut être aussi extrait d'un roman dont le héros (celui qui voyage) ressemble à l'auteur.
Ce qui me semble faire indice, c'est la mention des journaux qui disent que l'homme est né bon. Tout le texte dégage une atmosphère rousseauiste, mais manifestement notre auteur est d'un autre bord, bien que le contact avec la nature crée une sorte de fraternité inattendue avec ce cher Jean-Jacques.
Tout ceci me fait penser à Chateaubriand, mais peut-être s'agit-il de quelqu'un de moins connu, puisque vous nous dites que ce n'est pas facile.
"Dieu n'a pas besoin de nos mensonges" (Léon XIII)

Avatar de l’utilisateur
Fée Violine
Consul
Consul
Messages : 12387
Inscription : mer. 24 sept. 2008, 14:13
Conviction : Catholique ordinaire. Laïque dominicaine
Localisation : France
Contact :

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par Fée Violine » sam. 18 avr. 2020, 13:59

Non, il est aussi connu que Chateaubriand, pas de problème. La difficulté, c'est que j'ai pris soin, une fois de plus, de choisir un extrait peu connu d'un auteur très connu.
Ce n'est pas un roman.
Je ne sais pas si c'est autobiographique.
Ce n'est pas de la première moitié du XIXe.

Avatar de l’utilisateur
prodigal
Amicus Civitatis
Amicus Civitatis
Messages : 2292
Inscription : mar. 09 juil. 2013, 10:32

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par prodigal » ven. 24 avr. 2020, 10:24

On dirait que les candidats ne se bousculent pas.
Je voudrais tout de même trouver la solution de cette énigme qui m'intrigue.
Ce n'est pas de la première moitié du dix-neuvième siècle. Donc, c'est plus récent, ou plus ancien. Je n'arrive pas à me décider. J'aurais tendance à parier pour le dix-huitième alors, mais vraiment sans conviction, à cause du lexique.
Ce qui m'intrigue également, c'est qu'il puisse y avoir doute sur le caractère autobiographique de l’œuvre, alors qu'il ne s'agit pas d'un roman.
Pourrait-il s'agir de Goethe? J'ai l'impression de m'égarer totalement!
"Dieu n'a pas besoin de nos mensonges" (Léon XIII)

Avatar de l’utilisateur
Riou
Barbarus
Barbarus

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par Riou » ven. 24 avr. 2020, 11:08

Je pense que la voie des "journaux" et de "l'homme né bon" qui, au vu de la manière dont la chose est tournée, n'est pas du tout le credo de l'auteur - on se demande même s'il n'y a pas une ironie qui se répercute sur tout le texte - est la bonne voie.
De plus, le texte est très bien écrit, et il délivre une vraie impression poétique, impression de la beauté de la nature qui n'est pas, visiblement, l'objet de prédilection habituel de l'auteur, puisque ce dernier est surpris quand il se voit touché par cette communion devant la nature. C'est une charge contre Jean Jacques et ses disciples, comme le dit prodigal. Ce credo de "l'homme né bon", l'auteur le repère, à son époque, dans des "journaux" qui, comme tout bon journal, a pour tâche de répandre cette idée dans l'opinion publique. Les journaux visés sont donc des journaux "progressistes", car au 19 ème siècle (et je crois que c'est le bon siècle pour ce texte par son style, ou peut-être début 20ème), les journaux affirmant la bonté naturelle de l'homme sont aussi ceux qui croient dans le progrès de l'humanité et sont des fervents partisans de la Révolution, contrairement à des doctrines plus pessimistes basées sur le péché originel et la corruption naturelle de l'homme. Il me semble que le texte dessine clairement ces deux camps, et je crois que l'auteur est dans le second camp malgré les apparences immédiates (on sent le camp de l'auteur notamment dans cette phrase : " j'en étais venu à ne plus trouver si ridicules les journaux qui prétendent que l'homme est né bon ; quand, la matière incurable renouvelant ses exigences, je songeai à réparer la fatigue et à soulager l'appétit causé par une si longue ascension", où l'on voit que la tendance générale de l'auteur est de trouver ces journaux progressistes ridicules, sans compter la deuxième partie de la phrase, qui parle du corps toujours à entretenir, mettant ironiquement en contraste l'envolée lyrique d'une âme qui épouse tout l'univers, comme si l'auteur était dématérialisé ("mon âme me semblait aussi vaste et aussi pure que la coupole du ciel dont j'étais enveloppé"), et cette triviale "matière incurable" qui désire bouffer et souffler, ramenant la belle âme des profondeurs de la voie lactée vers... le besoin de se soulager le ventre. La toute fin du texte sonne un peu comme une chute, peut-être même une blague ironique, difficile à dire).
Ce texte est écrit, à mon avis, par ce que le professeur de littérature Antoine Compagnon appelle un "anti moderne". C'est à peu près la seule conviction que j'ai dessus.
Ma question serait plutôt : l'auteur est un romancier et poète, un poète plutôt qu'un romancier, ou un romancier plutôt qu'un poète? Si ce n'est pas la première moitié du 19ème, ce serait plutôt la deuxième moitié?

Avatar de l’utilisateur
Fée Violine
Consul
Consul
Messages : 12387
Inscription : mer. 24 sept. 2008, 14:13
Conviction : Catholique ordinaire. Laïque dominicaine
Localisation : France
Contact :

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par Fée Violine » sam. 25 avr. 2020, 0:50

Oui, c'est la 2e moitié du XIXe. Allez, je vous donne la date exacte de publication : 1869.
Ce n'est pas un romancier.
Et il n'est pas anti-moderne !!! :rire:
Si vous trouvez le genre littéraire, vous ne serez pas loin de trouver l'auteur.

Avatar de l’utilisateur
Riou
Barbarus
Barbarus

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par Riou » sam. 25 avr. 2020, 9:02

Ce n'est pas un roman, ni un poème versifié. Ça ne peut pas être le genre de l'essai non plus, au vu du style et de ce qui est écrit.
De fait le texte est écrit en prose, mais pas par un romancier.
Quatre solutions me viennent à l'esprit : soit il s'agit d'un receuil de pensée, de fragment (peut-être un journal d'écrivain), soit d'une nouvelle, soit de la poésie en prose, soit du théâtre (mais ça m'étonnerait, à moins qu'on ait ici un petit extrait d'un monologue).
Si l'auteur n'est pas un romancier, j'ai tendance à penser qu'il est poète. Par conséquent, oui, j'ai une idée.

Avatar de l’utilisateur
prodigal
Amicus Civitatis
Amicus Civitatis
Messages : 2292
Inscription : mar. 09 juil. 2013, 10:32

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par prodigal » sam. 25 avr. 2020, 10:43

Alors je vais essayer de raisonner tout haut.
Il faut trouver le genre littéraire, et ce n'est pas un roman. Plus important comme indice sans doute : son auteur n'est pas un romancier.
Quel peut être le genre en question? Epistolaire? Mais Madame de Sévigné n'est plus très vaillante en 1869! Poétique? L'extrait proposé n'est pas de la poésie, il me semble. Autobiographique? Vous nous dites que non, ou du moins que le caractère autobiographique de ce récit n'est pas évident.
Qu'est-ce qu'il reste? Peut-être est-ce un journal? Mais qui de très connu a pu écrire son journal en 1869? Je ne vois pas. Un récit de voyage? Qui commence par "je voyageais"? C'est douteux, et puis nous sommes toujours ici dans l'autobiographique. Une scène de théâtre? cela n'y ressemble pas. Et cela ne suffirait pas pour trouver l'auteur.
Bref, je sèche. Mais je ne renonce pas encore. Ne négligeons pas que penser à un anti-moderne suscite une certaine hilarité.
Mais peut-être ne s'agit-il pas d'un écrivain, mais d'un artiste ou d'un religieux, pourquoi pas? Hypothèse néanmoins stérile, car cela ne m'avance pas.
Ce serait alors peut-être un extrait des Mémoires d'une personnalité connue. Mais là encore je ne vois rien. Je ne vois même pas de nom à proposer qui soit cohérent avec les indices donnés! Je vais continuer à y réfléchir. :s
"Dieu n'a pas besoin de nos mensonges" (Léon XIII)

Avatar de l’utilisateur
Fée Violine
Consul
Consul
Messages : 12387
Inscription : mer. 24 sept. 2008, 14:13
Conviction : Catholique ordinaire. Laïque dominicaine
Localisation : France
Contact :

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par Fée Violine » sam. 25 avr. 2020, 10:48

Vous avez tort, Prodigal, de penser que le genre littéraire n'est pas important. Comme je disais plus haut, si vous trouvez le genre littéraire, vous aurez presque trouvé l'auteur.
Riou est plus près de la solution que vous.

Avatar de l’utilisateur
prodigal
Amicus Civitatis
Amicus Civitatis
Messages : 2292
Inscription : mar. 09 juil. 2013, 10:32

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par prodigal » sam. 25 avr. 2020, 11:03

Je n'avais pas vu le message de Riou!
S'il est plus près que moi de la solution, c'est sans doute que notre auteur est connu comme poète. 1869? Il y a bien Victor Hugo, évidemment. Mais c'est aussi un romancier, donc ce n'est pas lui! D'ailleurs ce n'est guère son style.
Je laisse donc Riou proposer son idée, puisque je suis dans le brouillard le plus complet.
"Dieu n'a pas besoin de nos mensonges" (Léon XIII)

Avatar de l’utilisateur
Riou
Barbarus
Barbarus

Re: Jeu : le diagnostic littéraire à l'aveugle

Message non lu par Riou » sam. 25 avr. 2020, 11:47

Donc je me lance.
Il ne peut s'agir de Victor Hugo, d'abord parce qu'il est aussi romancier, mais aussi parce que cette critique des journaux, et cette pointe d'ironie que je sens dans le texte sur "l'homme né bon" (et la chute du dernier morceau de phrase) ne me paraît pas lui ressembler.
Je crois pouvoir déduire, au vu de la réponse de Fée Violine, que l'auteur est poète (comme prodigal, je ne vois pas trop du théâtre ici, et je n'avais pas du tout pensé au genre épistolaire pour le reste, mais mon impression première est bien de sentir un effet poétique dans ce texte). Il s'agirait donc soit d'un journal d'un poète (intime, réflexion, fragment de pensée écrite avec un accent poétique), soit d'un poème en prose qui est un genre qui naît vraiment au 19 ème siècle. A supposer que le texte soit français, qui est le répertoire dans lequel je pioche depuis le début (mais peut-être que c'est une erreur), je ne vois que deux solutions qui me viennent immédiatement à l'esprit : Rimbaud ou Baudelaire, qui ont écrit de la poésie en prose (et Baudelaire est un poète qui a écrit des réflexions personnelles dans un journal). Cela ne ressemble pas trop à la vigueur de Rimbaud dans le style, mais semble plus proche de Baudelaire (qui est bien dans la catégorie anti moderne au sens d'Antoine Compagnon, et la référence un peu bizarre aux journaux et à l'homme né bon m'a fait penser à ce type d'auteur critique de la modernité sur plusieurs points).
Le texte ayant été écrit en 1869, je crois que c'est possible pour Baudelaire, qui est à cheval sur les deux moitiés de siècle.
Je pense donc à Baudelaire (peut-être la poésie du Spleen de Paris par exemple, une des premières tentative de poésie en prose à ma connaissance, bien que cet extrait n'est pas urbain, mais semble précisément se produire juste après être sorti de la ville).

Répondre

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 25 invités