La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

« Alors il leur ouvrit l'esprit à l'intelligence des Écritures. » (Lc 24.45)
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Xavi
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La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par Xavi » sam. 01 févr. 2020, 17:27

Baraq a écrit :
dim. 19 janv. 2020, 20:09
En lisant le livre de Xavi fin décembre, j'ai repensé à un prêtre italien découvert sur internet il y a quelques années. Ce prêtre a eu des visions sur Adam, la création de la femme, le péché originel, le meurtre d'Abel, et la signification du chapitre 6 de la Genèse. Elles ont été rapportées dans un livre, mais comme il n'était pas encore traduit en français, je n'avais lu alors qu'un résumé, qui m'avait beaucoup intéressé mais laissé bien perplexe. J'ai recherché ce livre pour le lire, et je l'ai retrouvé il y a quelques jours, cette fois traduit intégralement en français. Il est disponible sous forme pdf ici. Même si certaines choses me laissent encore perplexe, je ne pensais pas que ce livre apporterait autant de réponses aux questions que je me pose depuis longtemps. Si vous connaissez déjà ce livre, ou si vous avez l'occasion et le temps de le lire vous aussi (je parle au pluriel en incluant Xavi, Aldebaran, Trinite et les autres participants), vous me direz ce que vous en pensez.
Cher Baraq,

Je vous remercie de m’avoir fait découvrir l’étonnante méditation de la Genèse de don Guido Bortoluzzi (1907-1991) que je ne connaissais pas.

Il n'y a d’ailleurs que très peu de références sur Google qui propose cependant un accès libre et aisé, que vous nous avez indiqué, au livre « La Genèse Biblique » écrit et diffusé par une personne qui a eu à cœur de présenter les méditations de ce prêtre humble et confiant de la région du patriarcat de Venise où le futur pape Jean-Paul Ier, Albino Luciani, fut son compagnon de classe.

http://www.donguidobortoluzzi.com/libri ... ique_v.pdf

La sincérité de ce prêtre ne me paraît pas suspecte. Il se présente comme ayant bénéficié de visions, de voix et de rêves confortés par des prédictions prophétiques reçues dans sa jeunesse de Saint Jean Calabria (1873-1954) canonisé en 1999 et du père Mateo Crawley (1875-1960) qui fait l’objet d’une procédure en béatification, avec une confirmation par son père spirituel au séminaire, Mgr Gaetano Masi, et l’intérêt que lui a porté Thérèse Neumann (1898-1962), une mystique qui fait aussi l’objet d’une procédure en béatification.

Les visions, les voix et les rêves étant des faits qui peuvent être produits naturellement par le cerveau, et a fortiori lorsqu’ils concernent des questions auxquelles le sujet accorde une très grande attention, on ne peut en déduire nécessairement un caractère surnaturel et, moins encore, une preuve de la validité des interprétations qu’en donne la réflexion intellectuelle de don Guido.

Il raconte à ce sujet qu’il a adressé « un bref compte rendu » à son évêque, en ajoutant « Quand je me suis rendu à l'évêché, je demandai à l'évêque s'il l'avait lu, il me répondit: - C'est la troisième fois que j'ai la preuve de votre vive imagination, idées hors du commun, vraiment hors du commun, m'a-t-il dit en riant. » (p. 285)

Voici ce que don Guido en disait lui-même : « Ce que j'écris ne peut être déclaré d'origine surnaturelle que par l'autorité ecclésiastique compétente, qui, tout en reconnaissant son authenticité, peut faire ses recherches sur l'opportunité de la publication de tout ou de certaines parties de l'écrit. Je me soumets à toute décision prise par le magistère ecclésiastique. » (p. 70)

C’est d’ailleurs ce que lui conseilla son évêque, le patriarche de Venise Albino Luciani (futur pape Jean-Paul 1er) : « Mgr Albino Luciani, qui fut mon condisciple [au séminaire]... me répondit en me disant que l'on ne peut faire usage des révélations personnelles touchant au contenu de la Bible, avant que le Saint-Siège en ait reconnu l'authenticité, soit l'origine supranaturelle, ainsi que l'absence d'erreurs. » (p. 286)

L’Église ne s’est pas encore prononcée sur le caractère surnaturel ou non des révélations de don Guido, ni a fortiori sur leur hétérodoxie par rapport à l’ensemble des dogmes de la foi catholique, et il faut donc rester très prudent à cet égard comme don Guido l’était d’ailleurs lui-même en rappelant sa soumission au jugement de l’Église mais aussi, de manière plus explicite, du fait qu’il ne prétend pas avoir reçu directement des explications du Ciel, mais seulement quelques indications au sens imprécis à partir desquelles il a réfléchi et développé une interprétation particulière de la Genèse biblique.

Ce qu’il propose n’est donc pas une vérité reçue directement mais seulement des révélations limitées et ce qu’il en déduit, à titre personnel, pour comprendre raisonnablement la création et le péché originel.

Selon don Guido, « le Seigneur voulait, lui apprendre à raisonner, déduire, relier, utiliser la pensée conjointement avec son cœur. Il aurait pu lui dire simplement: “Regarde ... elle, c'est Ève ... lui, c'est Adam ... les choses se sont déroulées comme ceci, comme cela …”. Et bien non! Le Seigneur ne le voulait pas passif. Lui, veut que chacun de nous entre dans sa logique après avoir compris les 'pourquoi'. Il veut que la Vérité soit une conquête souhaitée, raisonnée, voire soufferte, mais obtenue sur la base de la liberté et de la volonté. » (p. 320-321)

On ne peut que louer cette humilité par laquelle don Guido relativisait lui-même ses propres réflexions, malgré le caractère extraordinaire des révélations concrètes qu’il rapportait.

Comme chacun de nous, don Guido était éclairé par l’Esprit Saint et le Seigneur s’est manifesté à lui de diverses manières, mais a priori il ne faut pas oublier qu’il était aussi un pécheur comme chacun de nous, qu’il n’a pas reçu un don d’infaillibilité, et que ce que l’Esprit Saint lui a fait connaître a été reçu par son esprit humain et son intelligence humaine dans son système psychique personnel marqué comme tout son être par le péché originel.

Le discernement reste donc nécessaire et il ne faut pas prendre ses réflexions comme un tout à prendre ou à laisser.

Quelques pensées de don Guido me semblent cependant très pertinentes pour comprendre ce qu’a pu être la réalité concrète et historique de la création sans discordance avec ce que la science peut dire dans ses propres limites mais aussi sans mise en doute de la réalité de l’action créatrice de Dieu qui peut intervenir dans la matière comme l’a rappelé le pape Benoît XVI.

Sur les préhumains

« En résumé, Dieu dit que chaque création d'une nouvelle espèce a toujours démarré avec une graine et que jamais une plante ou un animal ne fut créé développé et adulte, comme par magie, bien que cela lui soit possible, car Il est Tout-Puissant. Ce principe de démarrer chaque création d'une graine s'applique autant pour l'univers que pour la vie. Ainsi, le premier Homme et la première Femme ne furent pas créés adultes, comme le voudraient les créationnistes fondamentalistes, ni en cours d'évolution comme le voudraient les évolutionnistes, mais dans leur première cellule avec déjà la perfection absolue. Où se serait développée la vie de l'embryon, si ce n'est dans l'utérus d'une femelle existante ? Pour ce faire, le Seigneur se servira, comme 'moyen' pour la création de l'Homme et de la Femme, d'une femelle appartenant à une espèce aujourd'hui éteinte, celle des ancêtres. » (p. 11)

« Dieu se servit de ce qui était déjà créé comme 'moyen', ou support; une règle déjà utilisée pour la création de toute nouvelle espèce. La seule différence, très importante toutefois, par rapport à toutes les autres espèces, fut que, dans la création de l'Homme et de la Femme, Dieu, dès l'instant de leur conception, ajouta un nouvel élément, son esprit, afin qu'ils deviennent spirituellement ses fils. Par conséquent, l'homme prend sa source, mais 'ne descend pas' de l'espèce immédiatement inférieure » (p. 12).

« Les "ancêtres" sont des individus appartenant à une seule espèce, aujourd'hui éteinte, de laquelle Dieu prit une femelle préparée pour le développement de l'embryon de l'Homme, créé par Dieu » (p. 124)

Sur l’esprit spécifique de l’humain

« dans la dernière phase, celle de la création de 'l'Homme' et de la 'Femme', l'Oméga, dans lesquels Dieu introduisit 'l'Élément Spirituel', les deux pôles extrêmes de la première image que l'on m'avait montré, avaient en commun une même réalité, l'Esprit de Dieu. L'Homme, le premier Homme, véritable fils légitime de Dieu et, avec lui, la Femme, était le dépositaire des dons de toute la création…
Dans le septième temps, 'Dieu se reposa'. C'est un euphémisme pour dire que Dieu, volontairement, s'abstint d'intervenir face aux erreurs de l'Homme, par respect à la liberté qu'il lui avait donnée
» (p. 175-176).

« On pourrait dire que le Père a transféré dans Ses Fils légitimes Son "ADN spirituel", Sa propre vie. Et, si l'Esprit que possédait l'Homme parfait était une "particule de la vie même de Dieu", il s'ensuit que l'Homme originel ressemblait davantage à Dieu qu'à toute autre créature, y compris l'homme actuel » (p. 464).

« L’Esprit dépasse donc les facultés intellectuelles. Cela pourrait être défini comme «l'âme de l'âme», où l'âme, ou psyché, est également immortelle. C'est une vraie et appropriée Vie Divine, un germe de la Vie même de Dieu, introduite dans l'homme: quelque chose que l'homme a du mal à comprendre pleinement dans toute sa splendeur. C’est l’Esprit qui devient la véritable identité surnaturelle du fils adoptif de Dieu » (p. 500)

« la culture gréco-romaine, qui avait une vision dualiste de l'homme, influença la doctrine de l'Église, qui était essentiellement constituée de Gentils. C'est pourquoi certains théologiens, presque sans s'en rendre compte, ont réduit la connaissance de l'homme racheté à la synthèse de l'âme et du corps, en donnant au terme "âme" le sens que nous devrions attribuer correctement à l'Esprit. D'où la confusion linguistique entre âme et esprit » (p. 503).

Sur l’intelligence spécifique de l’humain

« Dès le moment où le Créateur confia son règne sur toutes les créatures du monde à l'Homme et, pour qu'il puisse assumer convenablement cette tâche, soit dans l'ordre, il lui avait donné une intelligence parfaite, ainsi que le libre arbitre » (p. 379).

« "L'usage conscient de la parole, ou la manifestation de la pensée à travers la parole, comme l'avait dit Paul VI, est le privilège exclusif de l'Homme entre tous les êtres créés, car fait à l'image de Dieu" » (p. 290), « car seul l'Homme fut doté d'un cerveau parfait, bien plus parfait que n'importe quel autre animal, un appareil ordinateur émetteur-récepteur » (p. 296).

Sur la mort physique dans la création

« La mort dont parle la Bible, comme conséquence naturelle du 'péché originel' est le retrait, ou perte de l'Esprit, que l'on ne doit pas confondre avec la mort physique » (p. 193).

« Saint Paul a donc bien réfléchi … que "en Adam, tous (les hommes) ont péché" et que "pour le péché d'un seul homme, la mort a passé en tous les hommes" (Rm 5,12). Donc "tout le monde" indique que "tous aujourd'hui"…
Cette dernière déclaration a fait penser à beaucoup qu'après le péché originel, tous les êtres vitaux ont connu la mort physique à la fin de leur vie. Mais Saint Paul ne voulait pas dire la mort physique du tout…
En fait, la mort physique d'un Fils de Dieu n'est pas une conséquence du péché originel, car, comme l'a dit Don Guido: "Même les Fils de Dieu sont morts, car celui qui est né meurt". Seulement que les Fils de Dieu, si fidèles à Dieu, à la fin de leur vie terrestre montèrent au Ciel aussi avec leur corps, comme la Sainte Vierge Marie…
la mort physique n'est pas une des conséquences du péché originel. Dans la plupart des ouvrages antérieurs, le terme «mort» a été mal compris. Ce terme, qui apparaît fréquemment dans la Bible, a presque toujours été interprété littéralement et compris comme une mort physique. Nous savons que la mort physique a toujours existé sur la Terre, des millions et des millions d'années avant que l'homme n'apparaisse…
la mort physique a toujours existé, même avant le péché de l'Homme. La terre a connu la mort des êtres vivants depuis ses origines. Ce n'était pas une conséquence du péché de l'Homme. Cela confirme que la mort évoquée par Saint Paul était "la mort spirituelle" d'un homme contaminé par le péché d'Adam
» (p. 497-499).

Sur le péché originel

« Dieu savait donc, en tout son esprit, que ce serait «seulement» l'Homme qui serait tenté de briser cet ordre et de tomber ensuite. Cependant, Il l'a créé par amour, car Il savait qu'à la fin le Bien prévaudra et que le bonheur éternel serait supérieur à toute souffrance transitoire causée par lui et provoquée par son péché. Dieu est la Sagesse aussi bien que l'Amour. Il voulait un Homme libre, même libre de faire des erreurs » (p. 461).

« En fait, pour mener à bien toute la Vie de l'Homme, l'acte créateur de Dieu ne suffit pas, mais on a également besoin de la collaboration active de l'Homme. Par conséquent, l'Homme, et de même la Femme, est l'autre sujet qui doit s'unir à Dieu pour que l'opération salvatrice soit accomplie » (p. 418)

« La Genèse dit: (Gen. 6: 3). "Mon esprit ne restera pas toujours en l'homme, car il est (que) chair" (à savoir les instincts animaux seuls). Il n'est resté qu'une trace de ce qui était un fil allégorique, coupé d'en haut et la marque d'un trou obturé par un peu de plâtre brut » (p. 194).


Mais, l’axe central de l’interprétation particulière de don Guido Bortoluzzi c’est de penser que Ève n’est pas la femme « tirée » du premier homme nommé Adam, ni la mère de Abel et de Seth, mais la mère biologique pré-humaine d’Adam qui serait l’objet réel de l’interdit de l’arbre de la connaissance. Le péché originel, selon don Guido, serait l’union sexuelle entre Adam et Ève, sa mère pré-humaine, dont serait issu Caïn. Les faits se seraient produits il y a environ 40 à 50 millions d’années (p.258) et auraient entraîné une déchéance totale suivi d’une reconstruction dont l’évolution des hominidés n’en serait que la trace concrète observable par le scientifiques.

Selon don Guido, la femme « tirée » tirée de la côte d’Adam serait la fille d’Adam mais aussi la mère de Abel et de Seth. Elle serait innocente du péché originel et Adam aurait eu ainsi deux partenaires sexuelles féminines : sa mère (Ève) et sa fille.

Pour Don Guido, « le personnage féminin appelé Ève dans la Bible, n'était pas la Femme [tirée de la côte d’Adam], mais la 'femelle ancêtre' » (p. 319) et le péché originel serait un « acte d'hybridation de l'espèce humaine parfaite [qui] entraîna la régression des générations futures jusqu'à donner aux descendants hybrides des caractères d'hominidés. Seules les interventions régénératrices répétées du Seigneur dirigèrent l'espèce humaine vers sa" ré-évolution", jusqu'à être, à nouveau capable, dans la plénitude des temps, d'accueillir sa parole et la Rédemption. » (p. 3-4).

Malgré les nombreux éléments que don Guido apporte pour soutenir une telle thèse, il faut bien constater que, selon la Genèse, « L’homme s’unit à Ève, sa femme : elle devint enceinte, et elle mit au monde Caïn. Elle dit alors : « J’ai acquis un homme avec l’aide du Seigneur ! ». Dans la suite, elle mit au monde Abel, frère de Caïn. » (Gn 4, 1-2) et « Adam s’unit encore à sa femme, et elle mit au monde un fils. Elle lui donna le nom de Seth (ce qui veut dire : accordé), car elle dit : « Dieu m’a accordé une nouvelle descendance à la place d’Abel, tué par Caïn. » » (Gn 4, 25).

Mais, don Guido pense qu’il y a là une traduction déformante du texte original de Moïse et que « au verset 2, chapitre 4 où il est dit que: "Adam connut Ève, sa femme, elle conçut et accoucha de Caïn, puis elle accoucha de son frère Abel". Le verbe 'accoucher', qui, ici, parle du féminin, devrait être remplacé par générer, indiquant dans les deux cas la paternité d'Adam, au masculin. Pour la même raison, le pronom féminin devrait être remplacé par un pronom masculin qui implique Adam comme ceci "Adam connut Ève, avec elle, il engendra Caïn, puis (Adam) engendra, avec la Femme, son frère Abel". » (p. 298-299)

Selon don Guido, il faudrait donc traduire les versets 1, 2 et 25 précités comme suit : « L’homme s’unit à Ève, sa femme : elle devint enceinte, et il [Adam] engendra Caïn. Il dit alors : « J’ai acquis un homme avec l’aide du Seigneur ! ». Dans la suite, il engendra Abel, frère de Caïn. » (Gn 4, 1-2) et « Adam s’unit encore à sa femme, et il engendra un fils. Il [Adam] lui donna le nom de Seth (ce qui veut dire : accordé), car il dit : « Dieu m’a accordé une nouvelle descendance à la place d’Abel, tué par Caïn. » » (Gn 4, 25).

Don Guido s’est engagé, dès lors, dans une remise en cause générale de la compréhension traditionnelle du texte biblique en considérant qu’en réalité, « la Femme est totalement étrangère au péché originel, alors que contrairement, dans la Genèse mosaïque [que nous utilisons maintenant], c'était précisément elle la responsable de la chute de la Souche »

À cet égard, don Guido croit qu’il s’agit d’un « malentendu » qui « ne doit pas être attribué à Moïse, mais aux hagiographes du roi Salomon qui, sensibles à la culture de leur temps, avaient retouché le texte original, faisant retomber la responsabilité du péché originel sur la Femme. » (p. 318).

Il est vrai que, dans le détail des textes bibliques, on est souvent devant une multitude de variantes et d’incertitudes dans les traductions.

L’Église admet que les traductions, même officielles ou les plus anciennes, restent soumises aux textes primitifs et qu’à cet égard, la recherche reste ouverte.

Le fait que des modifications, voire des erreurs, se soient glissées dans les traductions, au cours de l’histoire, est possible, y compris dans les plus vieilles versions disponibles en hébreu, en grec ou en latin.

À cet égard, on ne peut que rappeler qu’il ne faut jamais dissocier l’Écriture et la Tradition transmise par le Magistère dans le corps du Christ qu’est l’Église.

Il faut donc être très prudent, attentif à l’autorité du Magistère et soumis à sa prudence autant qu’à ses éventuels jugements futurs.

Selon don Guido, dans notre version actuelle de la Genèse, « nous ne lisons que ce qui reste de la vraie révélation faite à Moïse » (p. 407) et « la Genèse mosaïque que nous utilisons maintenant est le résultat d'innombrables interventions plus ou moins désirées et conscientes au cours des millénaires, chacune ayant laissé sa marque » (p. 412).

Selon don Guido « Ève n'est pas la vraie femme d'Adam, mais la mère ! » (p. 220) et « Ève, était 'le passage obligé' entre l'espèce sous-humaine et celle humaine! Je compris qu' “Ève” n’était pas un nom propre, mais qu'une appellation voulant simplement dire 'mère de tous les vivants', exactement comme le dit la Bible. Elle fut donc aussi la mère d'Adam, comme celle de la Femme. Puis, malheureusement, celle de Caïn aussi, quand une fois seulement, elle fut la partenaire de l'Homme, celle fatale, comme je l'ai vu dans la révélation du 'péché originel' » (p. 221).

Mais, l’Écriture écarte l’idée que Ève serait la mère d’Adam lorsque Saint Paul considère que « En effet, Adam a été modelé le premier, et Ève ensuite » (1 Tim 2, 13). Faut-il comprendre que le mot « ève » serait un nom commun attribuable à des êtres différents ?

Don Guido en tremble : « Non, avant Adam, il n'y avait pas de femme. Je suis avec la Bible. Si c'était une œuvre diabolique? A quel dessein? Me faire perdre la foi en les saintes Ecritures? Ah non! Ça, jamais !" » (p. 208).

En fait, don Guido pense que « Ève n'était pas une personne, mais un animal » (p. 230) et que « le responsable indirect de la mort d'Abel est l'Homme, pour avoir, contre la volonté de Dieu, engendré Caïn, un irresponsable » (p. 382)

Selon don Guido, dans le récit biblique du péché originel, « au verset 3,1, le terme «serpent» remplace la femme ancestrale Ève, puis aux versets 3,2 et 3,3, dans lesquels figure le monologue d’Adam, les termes "serpent" et "femme" remplacent tous les deux Adam. Ce monologue exprimé sous forme poétique a une très grande valeur car il clarifie le raisonnement d’Adam et donc sa tentation. Par conséquent, le terme «serpent» est un terme polysémique, car il remplace maintenant Ève, maintenant Adam. La même chose peut être dite du terme 'femme' qui peut maintenant remplacer le terme Ève, comme dans le verset Gn 3,12: ‘La femme que vous m'avez donnée comme compagnon ...’, maintenant le terme Adam reflétant pour lui-même, comme dans les versets de Gn 3,2-3 » (p. 422).

« D'après la révélation donnée à Don Guido, nous savons que la femme Ève, définie par le Seigneur comme étant "le serpent" (§ 133), était en réalité le plus intelligent et le plus évolué des animaux. Ce n'était pas un ophidien et même pas le diable, mais « l'arbre de la connaissance du bien et du mal », plus précisément appelé « arbre de la connaissance pour le bien et le mal », d’où Adam croyait en avoir des Fils parfaits. Pour le tenter ("Et celle-ci dit ...), elle n'utilisait pas le langage, parce qu'elle n'avait pas la faculté de parler, mais pour communiquer elle utilisait son attitude de femelle entrée dans la période physiologique de la fertilité…
Nous sommes confrontés à un dialogue qui n'aurait pas pu avoir lieu avec un animal car il ne pouvait pas parler
» (p 421)

« Adam était le seul à pouvoir exprimer un concept. Tout ce qui est dit dans ces versets est un jeu de mots qui reflète un monologue d'Adam. Une forme rhétorique poétique pour se concentrer sur le conflit entre la tentation et sa conscience. C'est toujours lui, Adam, qui réfléchit à lui- même ». (p. 422)

Don Guido Bortoluzzi s’attache à cet égard au texte de Saint Paul qui répète à huit reprises que la faute originelle a été commise par « un seul » pour soutenir l’idée d’une innocence totale de Ève (la mère biologique d’Adam) qui n’est qu’une ancêtre pré-humaine, la matrice biologique de l’humanité.

« 12 Nous savons que par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et que par le péché est venue la mort ; et ainsi, la mort est passée en tous les hommes, étant donné que tous ont péché.
...
15 Mais il n'en va pas du don gratuit comme de la faute. En effet, si la mort a frappé la multitude par la faute d’un seul, combien plus la grâce de Dieu s’est-elle répandue en abondance sur la multitude, cette grâce qui est donnée en un seul homme, Jésus Christ.
16 Le don de Dieu et les conséquences du péché d’un seul n’ont pas la même mesure non plus : d’une part, en effet, pour la faute d’un seul, le jugement a conduit à la condamnation ; d’autre part, pour une multitude de fautes, le don gratuit de Dieu conduit à la justification.
17 Si, en effet, à cause d’un seul homme, par la faute d’un seul, la mort a établi son règne, combien plus, à cause de Jésus Christ et de lui seul, régneront-ils dans la vie, ceux qui reçoivent en abondance le don de la grâce qui les rend justes.
18 Bref, de même que la faute commise par un seul a conduit tous les hommes à la condamnation, de même l’accomplissement de la justice par un seul a conduit tous les hommes à la justification qui donne la vie.
19 En effet, de même que par la désobéissance d’un seul être humain la multitude a été rendue pécheresse, de même par l’obéissance d’un seul la multitude sera-t-elle rendue juste.
» (Rm 5, 12-19)

Don Guido y trouve une confirmation que le péché originel a été commis par le seul Adam car Saint Paul ne fait aucune mention de sa femme comme un autre être humain coauteur.

Selon don Guido, « Adam fut créé il y a 40 ou 50 millions d'années ». (p. 258) et « Actuellement, tous les hommes de la terre sont hybrides, car l'espèce humaine pure s'est éteinte avec la mort de Noé, dernier Fils de Dieu » (p. 190)

« Actuellement, tous les hommes de la terre sont hybrides, car l'espèce humaine pure s'est éteinte avec la mort de Noé, dernier Fils de Dieu, tandis que tous les hybrides alors existants furent emportés par le déluge dit 'universel'. Ne resta en vie que Noé, génétiquement pur et sa femme, qui par obligation, était hybride, donna naissance à une descendance hybride. De par leurs fils hybrides, déjà moins corrompus que les anciens, descend la totalité de l'humanité actuelle » (p. 190-191)

« nous, hommes d'aujourd'hui, sommes tous descendants de Caïn » (p. 291).

« l'espèce humaine se serait éteinte, si Celui qui est la Résurrection ne l'avait pas guidée des millions d'années durant à la récupération, partielle, de l'intégrité originelle au moyen de la sélection naturelle, par l'incapacité de survivre pour les individus les plus tarés, tout comme par la récupération artificielle, au moyen de la suppression totale des irrécupérables (avec, par exemple, le déluge à l'époque de Noé, ou des cataclysmes d'un autre genre comme à Sodome et à Gomorrhe), ainsi qu'au niveau génétique, par l'introduction ou la création de nouveaux gamètes, parfaits, au cours des millénaires. » (p. 230)

« En vérité, Dieu n'a jamais cessé de créer de nouvelles vies, même après l'Oméga. Dieu a aussi créé l'ovule de Sarah, mère d'Isaac, l'ovule d'Hanna, mère de Samuel, l'ovule d'Elisabeth, mère de Jean le Baptiste, diminuant ainsi le taux d'hybridation de moitié, l'ovule d'Anne, la mère de Marie et, simultanément, la semence qui l'a fécondée, puisque Marie s'auto définit comme étant “l'Immaculée Conception”, ce qui veut dire que Marie n'a reçu aucun gène imparfait de ses parents. Donc, Marie est une nouvelle création à part entière. Finalement, il créa la semence qui féconda l'ovule parfait de Marie, donnant à Jésus une nature humaine parfaite, à laquelle s'unit sa nature divine. Cependant, Dieu ne créa plus aucune nouvelle espèce » (p. 255).

« Ce n'est qu'après avoir éliminé, au moyen de sélections diverses, les branches les plus abîmées, que le Seigneur entama le sauvetage de l'espèce humaine hybride, lançant un processus de reconstruction. Parce que aujourd'hui l'humanité descendante de la branche illégitime d'Adam appartient entièrement à l'espèce hybride. Les découvertes archéologiques ne sont donc pas la preuve de l'évolution de l'espèce humaine, mais plutôt de son déclin et de sa récupération, phénomènes qui souvent se sont entrelacés. Ce processus de reconstruction est toujours en cours. Quand, par la suite, l'humanité ré-évoluée eut récupéré une aptitude suffisante au discernement, à savoir la plénitude du temps, Dieu envoya son fils Jésus afin qu'il redonne son Esprit à tous les paisibles et à tous les justes de la terre pour que par Son obéissance et Sa médiation, ils puissent être réadmis à l'héritage spirituel et que les portes de la félicité éternelle puissent être à nouveau ouvertes » (p. 14).

Il serait trop long d’analyser ici cette interprétation particulière. Beaucoup d’autres affirmations de don Guido demandent à être confrontées à l’Écriture et la foi de l’Église.

Mais, quelles que soient les réserves ou contestations que peuvent susciter certaines orientations majeures de l’interprétation de don Guido, il avance quelques réflexions essentielles qui rejoignent l’enseignement actuel de l’Église tel que l’exprime le Pape François dans sa récente encyclique Laudato si.

« Jean-Paul II, lors d'une entrevue accordée au professeur Nicola Cabibbo, physicien et enseignant à l'Université la Sapienza de Rome et président de la Pontificia Accademia delle Scienze, déclara qu'il ne voyait aucun problème pour que l'Eglise accepte qu'un 'continuum' existe entre toutes les espèces, de la première cellule à l'homme, à condition que Dieu garde son rôle de Créateur direct. » (p. 9)

À cet égard, peu importe qu’Adam et Ève soient situés il y a 50 millions d’années ou seulement quelques milliers d’années, l’important est de confirmer leur existence réelle dans l’histoire concrète de notre monde et la réalité historique du péché originel.

Très imprégné de la conviction que l’humain a été créé ex nihilo, don Guido en a déduit que « rien » de la nature animale ne pourrait avoir été impliqué dans cette création et, plus encore, il a pensé que même les éléments chimiques de la nature ne pouvaient être impliqués dans cette création. Pour don Guido, Dieu a créé matériellement des gamètes ex nihilo et à plusieurs reprises, car « il suffit d'avoir un pourcentage infiniment petit de sang animal pour ne pas atteindre la perfection absolue » (p. 500).

« Une autre position, très proche du créationnisme, mais qui ne considère pas la "création à partir de rien" qui est la modalité utilisée par Dieu, est celle qui donne à Dieu le rôle de Celui qui "modifie" de temps en temps ce qu’Il a déjà créé en transformant les cellules germinatives lors de la conception des premier et deuxième exemples de chaque nouvelle espèce, y compris l’espèce humaine. Par conséquent, la vision de cette école préfère la thèse de la «modification» de ce qui existe déjà plutôt que la thèse exacte de la création à partir de rien. Par conséquent, elle assume les caractéristiques d’"innovation" plutôt que de "création" et interprète trop peu le processus de création. Il est difficile de comprendre pourquoi ces penseurs réduisent le rôle de Dieu uniquement pour "modifier" ce qui existe déjà, alors que pour Dieu Créateur, il n'y a pas d'obstacle à "créer à partir de rien" ce qu'Il veut faire exister » (p. 446).

« Il me semble que ces penseurs transformistes ont une faiblesse de foi en ne considérant pas la possibilité que Dieu travaille à créer, c'est-à-dire à partir de rien et à ne pas modifier l'existant » (p 447).

Et pourtant, la Genèse elle-même nous indique que Dieu a créé l’humain en le façonnant avec de la glaise. L’encyclique Laudato si du Pape François enseigne l’indivisibilité de la nature.

Don Guido rappelle lui-même que le principe « selon lequel "Deus non facit per Se quod facere potest per creaturas" signifie que Dieu ne recourt à aucun acte créateur lorsqu'Il peut utiliser ce qu'Il a déjà créé » (p. 447) et il n’oublie pas « la finalité de la création, qui est l'Homme » (p. 149).

Mais, puisque l’humain est la finalité de toute la création, pourquoi donc écarter la création de l’humain dans la réalité matérielle créée pour lui ? La théologie du corps n’est-elle pas profondément en cause ?

Il y a beaucoup à réfléchir...

Trinité
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Re: La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par Trinité » dim. 02 févr. 2020, 0:01

Oh la la!

J'ai survolé...il faudrait que je relise tranquillement!
C'est carrément révolutionnaire cette conception!
Dites moi Xavi ?
Mais si Eve pré-humaine est la mère d'Adam, qui est le père?

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Re: La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par aldebaran » dim. 02 févr. 2020, 19:37

Bravo Xavi,
Vous avez été plus audacieux que moi si vous avez tout lu à fond, j'ai marqué une pause après la lecture de la première vision qui m'a plongé dans un abîme de perplexité.
Pour l'instant deux choses m'ennuient:
- le manque de signes d'une inspiration surnaturelle, mais cela viendra peut-être, les voies du Seigneur... Pour l'instant il est clair qu'on ne peut le considérer que comme un support de réflexion en attendant mieux.
- à ma connaissance les traces fossiles n'ont jamais indiqué de régression des hominidés depuis une forme plus "aboutie", mais toujours au contraire, même si c'est buissonnant, une amélioration au moins pour une lignée. A moins que Baraq n'ait un joker a sortir de sa manche :-D

Il me semble avoir lu de Hildegarde de Bingen qu'elle avait "vu" que la faute était en fait celle d'Adam plus particulièrement et non celle d’Ève. Il faudrait que je retrouve.
Xavi a écrit :Mais, puisque l’humain est la finalité de toute la création, pourquoi donc écarter la création de l’humain dans la réalité matérielle créée pour lui ?
Je ne vous comprends pas? Adam aurait écarté sa première lignée du initialement créé, les autres lignées auraient disparu car elles se seraient hybridées à maintes reprises.
La théologie du corps n’est-elle pas profondément en cause ?
Pouvez-vous préciser? Ce qui est sûr, c'est que la thèse du beau corps parfait en prend un sacré coup, et que notre animalité s'explique d'autant.
Il y a beaucoup à réfléchir...
Ce serait au moins le mérite de l'ouvrage... Mais apparemment tout le monde s'en moque?

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Re: La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par Xavi » lun. 03 févr. 2020, 20:34

Bonjour à chacun,
Trinité a écrit :
dim. 02 févr. 2020, 0:01
Mais si Eve pré-humaine est la mère d'Adam, qui est le père ?
Du point de vue de don Guido Bortoluzzi, Dieu aurait créé directement le gamète masculin qu’il aurait uni à un ovule de cette « ève » préhumaine sans père biologique.

Selon don Guido, « Dieu prit une femelle préparée pour le développement de l'embryon de l'Homme, créé par Dieu » (de la Genèse biblique, p. 124) et « pour créer le premier Homme, Dieu créa en elle l'ovule de la nouvelle espèce humaine, ainsi que le spermatozoïde qui la féconda » (p. 280)
aldebaran a écrit :
dim. 02 févr. 2020, 19:37
j'ai marqué une pause après la lecture de la première vision qui m'a plongé dans un abîme de perplexité.
Pour l'instant deux choses m'ennuient:
- le manque de signes d'une inspiration surnaturelle, mais cela viendra peut-être, les voies du Seigneur... Pour l'instant il est clair qu'on ne peut le considérer que comme un support de réflexion en attendant mieux.
- à ma connaissance les traces fossiles n'ont jamais indiqué de régression des hominidés depuis une forme plus "aboutie", mais toujours au contraire, même si c'est buissonnant, une amélioration au moins pour une lignée.
Nous nous comprenons bien. Je suis aussi perplexe.

aldebaran a écrit :
dim. 02 févr. 2020, 19:37
Xavi a écrit :Mais, puisque l’humain est la finalité de toute la création, pourquoi donc écarter la création de l’humain dans la réalité matérielle créée pour lui ?
Je ne vous comprends pas? Adam aurait écarté sa première lignée du initialement créé, les autres lignées auraient disparu car elles se seraient hybridées à maintes reprises.
La théologie du corps n’est-elle pas profondément en cause ?
Pouvez-vous préciser? Ce qui est sûr, c'est que la thèse du beau corps parfait en prend un sacré coup, et que notre animalité s'explique d'autant.
Cher Aldebaran,

Vous connaissez ma conviction d’une réelle création concrète dans l’histoire par laquelle Dieu a uni le fini et l’infini, le corporel et le spirituel. C’est avec et par un corps naturel que Dieu nous a créés avec et par un souffle spirituel. Un corps + un esprit = une âme, une personne avec une double nature corporelle et spirituelle dès sa conception.

Comme le dit notre Pape, la nature est notre mère en ce qui concerne notre corps.

Je ne vois pas de problème à considérer qu’outre l’action spirituelle de l’Esprit Saint et son action dans la matière existante, Dieu a aussi utilisé la nature pour nous créer aussi bien que pour s’incarner parmi nous. Pourquoi aurait-il fallu créer une nouvelle matière physique ?

L’interprétation de don Guido est portée par sa conviction que « rien » de la nature n’a contribué à la création de l’humain, mais qu’elle a seulement contribué à son développement comme une mère porteuse. Les premiers gamètes paternel et maternel nécessaires à la conception d’Adam auraient une origine physique exclusivement divine, en étant créés directement par Dieu, sans père, ni mère terrestres biologiques, dans une femelle préhumaine animale utilisée comme mère porteuse d’Adam. Cette femelle, qui serait « ève », aurait ensuite été la mère porteuse d’un ovule (un gamète féminin) créé directement par Dieu qui aurait formé la première femme avec la semence d’Adam. À suivre don Guido, Adam serait à la fois le partenaire sexuel de sa mère et le père de sa future femme.

Cette « ève » préhumaine, mère d’Adam et de la première femme, aurait été un être spécialement créé pour faire le pont entre l’espèce de sa propre mère préhumaine et l’espèce nouvelle d’Adam. Elle aurait été capable de fécondité tant avec les mâles de l’espèce préhumaine de sa mère naturelle qu’avec Adam et ses descendants. À l’exception de la conception de la première femme conçue par un ovule créé directement par Dieu, toute union d’Adam avec sa mère que don Guido identifie à l’arbre de la connaissance du bien et du mal était interdite car, sans Dieu, elle ne pouvait produire qu’une descendance hybride.

Selon don Guido, l’humanité parfaite créée à l’image de Dieu devait résulter exclusivement d’une union d’Adam avec la première femme, sa sœur utérine, puis d’unions de leurs descendants entre eux.

Dans ces conditions, don Guido considère que le péché originel fut un péché d’hybridation physique de la nouvelle espèce humaine qui aurait été commis lorsqu’Adam a engendré Caïn avec sa mère « ève » représentée de manière imagée, dans le récit de la Genèse par le serpent, la femme et l’arbre de la connaissance, ce qui aurait confondu les lignées et corrompu l’humanité.

Nous serions tous, selon don Guido, des descendants de Caïn issu de cette union hybride et toute l’évolution depuis environ 50 millions d’années ne serait qu’une lente reconstruction qui aurait atteint son apogée avec le Christ.

Selon don Guido, « Dieu n'a jamais cessé de créer de nouvelles vies, même après l'Oméga. Dieu a aussi créé l'ovule de Sarah, mère d'Isaac, l'ovule d'Hanna, mère de Samuel, l'ovule d'Elisabeth, mère de Jean le Baptiste, diminuant ainsi le taux d'hybridation de moitié, l'ovule d'Anne, la mère de Marie et, simultanément, la semence qui l'a fécondée, puisque Marie s'auto définit comme étant “l'Immaculée Conception”, ce qui veut dire que Marie n'a reçu aucun gène imparfait de ses parents. Donc, Marie est une nouvelle création à part entière. Finalement, il créa la semence qui féconda l'ovule parfait de Marie, donnant à Jésus une nature humaine parfaite, à laquelle s'unit sa nature divine. » (p. 255)

Dans l’explication de don Guido, nous sommes tous des hybrides sauf la Vierge Marie et le Christ, mais cela n’affecte-t-il pas directement son incarnation « en tout semblable, sauf le péché » ?

Dans l’interprétation de don Guido, Jésus serait-il encore « en tout semblable » à nous sauf le péché dès lors qu’il aurait été recréé entièrement comme le premier Adam. En quoi serait-il encore fils de David et fils d’Adam ? Marie serait elle-même issue de gamètes créés directement par Dieu et ne serait pas l’enfant biologique d’Anne et Joachim. Anne n’en serait qu’une mère porteuse d’un zygote créé ex nihilo et implanté directement en elle. Joachim n’en serait en rien le père biologique.

Lors de l’incarnation du Christ, un ovule de Marie aurait été fécondé par un gamète créé directement par Dieu.

Cette explication qui fait de la mère de la Vierge Marie une mère porteuse et de la Vierge Marie une mère par insémination divine a été beaucoup discutée dans ce forum. Comment serait-elle compatible avec la pleine humanité de Dieu et avec sa qualité de fils de David et de fils d’Adam attestée par les évangiles ?

Pourquoi nier toute union du créé et de l’incréé et considérer que ni notre création, ni l’incarnation n’auraient pu se faire dans une continuité naturelle en ce qui concerne le corps ?

L’Eucharistie instituée par le Christ n’est-elle pas, au contraire, l’affirmation que des réalités naturelles (le pain, le vin) peuvent devenir le Christ ? Si du pain et du vin peuvent devenir le Christ, pourquoi prétendre que des éléments de la nature n’aient pu devenir des humains capables de partager la vie de Dieu, lors de la création d'Adam ?

Le corps du Christ qu’est l’Église est elle-même composée d’humains pécheurs. Malgré leurs imperfections, ils forment le corps du Christ.

Le souci de don Guido de rejeter tout mélange biologique entre les humains parfaits créés à l’image de Dieu et le reste de la nature paraît d’ailleurs sans issue car, même s’il croit à une lente et longue reconstruction, il ne peut éviter le fait que les humains actuels sont tous, au moins en partie, des hybrides et que ce sont bien des hybrides biologiques que le Christ vient sauver.

Alors, s’il peut les sauver dans un état naturel hybride, pourquoi penser qu’il n’aurait pas été capable de les créer parfaitement dans la nature.

Hélas, des gnoses ont souvent présenté le corps comme une prison et les réalités terrestres comme étant déchues ou sans réelle valeur. Cela peut générer d’importantes dérives.

Il y a une différence nette entre :
- d’une part, une création parfaite, en laquelle le corporel et le spirituel sont unis, et que l’humain aurait pu et dû gérer librement et de manière harmonieuse en communion d’amour avec Dieu, mais qui, depuis le péché originel, est soumise aux désordres et à la mort parce que l’humain n’y assume pas son rôle du fait d’une rupture spirituelle avec Dieu,
- et, d’autre part, une création dans laquelle la nature et le corps sont étrangers à l’humanité créée par Dieu.

Il y a une différence nette entre, d’une part, une nature créée dès l’origine pour y créer et y faire vivre l’humain en communion spirituelle avec Dieu et, d’autre part, une nature qui n’en serait qu’une mère porteuse.

Serions-nous des corps étrangers à cette nature, implantés par Dieu de manière extraterrestre ?

La réflexion de don Guido ne mène-t-elle pas, notamment, à une vision altérée du mariage ?

Faudrait-il vraiment penser, comme don Guido, que l’union conjugale de référence indiquée par le Christ lui-même comme fondement du mariage, serait une union d’un fils (Adam) avec sa fille (la première femme « pure ») ?

Ces critiques importantes n’excluent pas que don Guido ait pu être un saint homme et avoir des révélations surnaturelles, mais ce qu’il a pensé pouvoir en déduire et comprendre ne met pas à l’abri d’erreurs.

Le mélange de vrai et d’erroné, voilà qui est bien humain et confirme sans cesse notre besoin de l’Église, comme corps du Christ indivisible conduit par le successeur de Pierre, pour avancer sur le chemin de la vérité.

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Re: La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par Trinité » mar. 04 févr. 2020, 0:24

Bonsoir Xavi,
En effet.
Dans sa conception, il différencie complètement le biologique, homme pré humain et l'homme spirituel créé à l'image de Dieu, puisque l'ovule d'Eve aurait été implanté par Dieu.
Par contre, ou j'ai du mal encore à suivre...c'est comment Eve aurait pu être fécondé par Adam, puisqu'il n'existait pas...
Après, sur la relation sexuelle d'Adam avec Eve qui aurait pu être le péché originel, cela peut encore se concevoir, avec Caïn objet du péché...
Mais "quid" de Seth et Abel ?

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Re: La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par Xavi » mar. 04 févr. 2020, 13:48

Bonjour Trinité,

C’est, en effet, assez difficile à comprendre.

Pour don Guido, avant de devenir la mère biologique de Caïn, enfanté naturellement lors d’un accouplement de Ève avec Adam (Le péché originel qui aurait corrompu l’espèce humaine), Ève aurait donné naissance successivement :
1. d’abord à Adam, dont Ève ne serait cependant que la mère porteuse et non pas la mère biologique car tant le gamète féminin que le gamète masculin d’Adam auraient été créés directement par Dieu,
2. puis à la première femme humaine (la future épouse d’Adam et mère naturelle de Abel puis de Seth), dont Ève ne serait ici encore que la mère porteuse d’un gamète féminin créé directement par Dieu mais dont Adam serait, par accouplement, le père biologique.

3. Ce n’est que quelques années plus tard lorsque Adam est devenu pubère, que Ève a enfanté Caïn dont Adam et Ève sont les parents biologiques par accouplement naturel.

4. Don Guido ajoute que, chassés tous deux vers l’orient, Ève et Caïn s’y sont retrouvés et que, par accouplement naturel avec Caïn, Ève est même devenue la mère biologique de Hénoc et de toute la descendance de Caïn.

Selon don Guido, Abel et Seth ne seraient pas les enfants de Ève, mais les enfants par accouplement naturel d’Adam et de la première femme humaine. Ce serait la souche pure que don Guido oppose à la souche illégitime issue de Caïn, conçu par le péché originel d’accouplement d’Adam et Ève.

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Re: La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par Trinité » mar. 04 févr. 2020, 14:22

Xavi a écrit :
mar. 04 févr. 2020, 13:48
Bonjour Trinité,

C’est, en effet, assez difficile à comprendre.

Pour don Guido, avant de devenir la mère biologique de Caïn, enfanté naturellement lors d’un accouplement de Ève avec Adam (Le péché originel qui aurait corrompu l’espèce humaine), Ève aurait donné naissance successivement :
1. d’abord à Adam, dont Ève ne serait cependant que la mère porteuse et non pas la mère biologique car tant le gamète féminin que le gamète masculin d’Adam auraient été créés directement par Dieu,
2. puis à la première femme humaine (la future épouse d’Adam et mère naturelle de Abel puis de Seth), dont Ève ne serait ici encore que la mère porteuse d’un gamète féminin créé directement par Dieu mais dont Adam serait, par accouplement, le père biologique.

3. Ce n’est que quelques années plus tard lorsque Adam est devenu pubère, que Ève a enfanté Caïn dont Adam et Ève sont les parents biologiques par accouplement naturel.

4. Don Guido ajoute que, chassés tous deux vers l’orient, Ève et Caïn s’y sont retrouvés et que, par accouplement naturel avec Caïn, Ève est même devenue la mère biologique de Hénoc et de toute la descendance de Caïn.

Selon don Guido, Abel et Seth ne seraient pas les enfants de Ève, mais les enfants par accouplement naturel d’Adam et de la première femme humaine. Ce serait la souche pure que don Guido oppose à la souche illégitime issue de Caïn, conçu par le péché originel d’accouplement d’Adam et Ève.
Cher Xavi,

Ces conceptions multiples me paraissent très "rocambolesques"...il est patent que Don Guido, cherche en l'espèce à dissocier la création de l'homme,d'avec le biologique ...
Dans le cas de figure, cette première mère porteuse, dont serait issus par accouplement avec Adam; Abel et Seth, on en entend parler nulle part dans la genèse, même dans le cadre d'une allégorie et en se torturant l'esprit, je ne vois pas ou l'on pourrait la situer :)
La genèse, dans ce cheminement, me paraît de plus en plus compliquée à suivre...

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Re: La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par aldebaran » mer. 05 févr. 2020, 16:18

Bonjour Xavi,
Je suis à peu près d'accord avec votre commentaire plus haut, suffisamment en tout cas pour ne pas faire de polémique dérisoire.
Par contre je ne partage pas votre dernier point.
Xavi a écrit :Ces critiques importantes n’excluent pas que don Guido ait pu être un saint homme et avoir des révélations surnaturelles, mais ce qu’il a pensé pouvoir en déduire et comprendre ne met pas à l’abri d’erreurs.

Le mélange de vrai et d’erroné, voilà qui est bien humain et confirme sans cesse notre besoin de l’Église, comme corps du Christ indivisible conduit par le successeur de Pierre, pour avancer sur le chemin de la vérité.
Si vraiment le Ciel désire préciser les écritures, et c'est Son droit (on oublie trop souvent ce point, les voies de Dieu ne sont pas nos voies), alors Dieu veille à ce qu'il n'y ait pas d'incompréhensions de fond. Ici les visions et les commentaires supposés reçus sont clairs et non ambiguës. Par exemple l'arbre de vie est Ève animale (le serpent) ou non, il n'y a pas de milieu.
Donc quatre solutions possibles :
a) vraies révélations et elles sont claires,
b) faux message du démon,
c) affabulation
d) psychose.
Ce qui m'ennuie, c'est que le livre rapporte que ce prêtre a rencontré Padre Pio. Lequel aurait certainement détecté un danger pour la foi. Et pourtant pas de réaction de sa part spécifiquement sur ce sujet, pourtant grave. Par ailleurs quelle assurance avons-nous d'une telle rencontre, et si oui de ce qui s'est réellement passé.
Non décidément j'ai un sentiment négatif sur ces écrits. Pour l'instant, en attendant d'éventuels éléments nouveaux.

Le seul point, assez indirect qui retient mon attention, est cette hypothèse que pour toute espèce Dieu aurait utilisé une mère porteuse d'une espèce source, mais les gamètes seraient ex-nihilo. Cela concilie le fond de notre croyance reposant sur un certain créationnisme, et les fossiles dans le temps d'espèces voisines, mais sans qu'on ait retrouvé les chaînons manquants entre. Les espèces semblant effectivement évoluer par paliers et non continûment de micro mutations. Voilà qui va ravir Altior, mais cette explication me sied complètement.

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Re: La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par Xavi » lun. 25 mai 2020, 21:00

La réaction de Aldebaran me semble un peu trop tranchée et la parabole du bon grain et de l’ivraie me paraît mieux appropriée pour exprimer ma perplexité à l’égard des écrits de don Guido Bortoluzzi.

Je ressens de l’affection pour ce prêtre en recherche et je n’aperçois rien qui m’incite à douter de sa bonne volonté ou de sa bonne foi. Je partage son désir de mieux comprendre la création en tenant compte des découvertes de la science autant que sa foi dans la création de notre humanité par Dieu. Comme lui, je suis convaincu par la réalité historique de la création d’Adam et Ève dans le cours de l’histoire concrète, par le fait que d’autres hominidés (des pré-humains) les ont précédés dans le cours naturel de l’histoire, ou encore par le fait que le phénomène de la mort physique fait partie de la nature créée par Dieu et surtout avec le fait que c’est l’esprit de l’humain qui fait sa singularité comme le Pape François l’a rappelé dans sa récente encyclique.

Mais, faut-il pour autant attribuer un caractère surnaturel aux rêves et visions de don Guido qui peuvent avoir des causes psychologiques et cérébrales complexes liées à ses réflexions personnelles d’autant plus qu’ils sont non seulement très différents des révélations d’autres voyants mais surtout qu’ils contredisent sensiblement l’enseignement traditionnel de l’Église et même de l’Écriture Sainte ?

La compréhension de don Guido est fondée sur sa conviction que la nature physique aurait été complétée à de multiples reprises par des ajouts matériels extraterrestres créés par Dieu ex nihilo tout au long de l’histoire concrète, tant pour la création des humains à l’image de Dieu que pour celle des espèces végétales ou animales ou pour l’incarnation du Christ. Même le Christ est compris physiquement, par don Guido, comme un corps étranger sans aucun lien génétique avec David ou Adam.

Cette conviction est partagée par beaucoup et fait l’objet de discussions difficiles récentes dans d’autres sujets de ce forum intitulés
« L’apparition de la vie » :
https://www.cite-catholique.org/viewtop ... &start=120
« L’évolution du vivant est-elle impossible sans Dieu ? » :
https://www.cite-catholique.org/viewtop ... 97#p417597
« Questions concrètes sur l’incarnation » :
https://www.cite-catholique.org/viewtop ... 44#p421644
« De la scientificité de la théorie de l’évolution » :
https://www.cite-catholique.org/viewtop ... 27#p421527

Selon les visions de don Guido, la première femme tirée de la côte d’Adam est déclarée « innocente » et le péché originel aurait été commis par le seul Adam. Ce péché consisterait en une relation sexuelle interdite d’Adam avec sa mère biologique qui serait Ève et dont Caïn serait issu.

L’incompatibilité avec l’enseignement de l’Église est manifeste.

L’incompatibilité avec le récit biblique l’est tout autant, mais don Guido l’explique en considérant que le texte biblique actuel aurait, en réalité, été modifié au temps du roi Salomon de sorte que le texte canonique ne serait pas le bon.

Ici encore, l’incompatibilité avec l’enseignement de l’Église est aussi manifeste.

Faut-il pour autant en déduire immédiatement et totalement que les visions de don Guido ne peuvent qu’être rejetées ?

Il me semble que la réponse peut être nuancée car il ne faut pas oublier que Saint Pierre lui-même a été traité de Satan par le Christ juste après avoir eu une révélation surnaturelle essentielle sur sa divinité.

On peut avoir une révélation surnaturelle et ensuite se tromper dans son interprétation ou ses développements en s’égarant dans des visions personnelles inspirées de pensées humaines.

Un même homme peut recevoir et transmettre une connaissance lumineuse et véridique, directement inspirée par Dieu de manière surnaturelle, puis, immédiatement après, se laisser égarer dans d’autres pensées.

Avoir des rêves, des voix intérieures et des visions sont des réalités bien connues des médecins et psychologues auxquelles il ne faut pas attribuer trop vite un caractère surnaturel.

À cet égard, en lisant les écrits de don Guido, il faut constater qu’il mélange beaucoup d’interprétations personnelles à ses visions et qu’en outre, celles-ci paraissent largement inspirées par ses propres réflexions sur les hominidés et ses convictions sur la création.

Mais, heureusement, don Guido se montre cependant lui-même très prudent : « Ce que j'écris ne peut être déclaré d'origine surnaturelle que par l'autorité ecclésiastique compétente, qui, tout en reconnaissant son authenticité, peut faire ses recherches sur l'opportunité de la publication de tout ou de certaines parties de l'écrit. Je me soumets à toute décision prise par le magistère » (de la genèse biblique, p. 70).

C’est ce qui lui a confirmé le futur pape Jean-Paul 1er, Mgr Albino Luciani, qui fut son condisciple au séminaire : « Il me répondit en me disant que l'on ne peut faire usage des révélations personnelles touchant au contenu de la Bible, avant que le Saint-Siège en ait reconnu l'authenticité, soit l'origine supranaturelle, ainsi que l'absence d'erreurs. » (p. 286)

En écoutant le récit d’un voyant, il est utile de se rappeler ce qu’en disait sainte Bernadette Soubirous : « Je suis chargée de vous le dire, pas de vous le faire croire ». À cet égard, il est important de ne pas confondre un message et les efforts explicatifs que peut faire un messager pour « le faire croire ».

Celui qui reçoit une révélation surnaturelle n’est pas choisi parce qu’il serait meilleur ou plus intelligent. Cela aussi, Sainte Bernadette Soubirous l’avait bien compris lorsqu’elle disait « Si la Vierge avait trouvé une plus ignorante que moi, elle l’aurait choisie ».

À cet égard, il ne faut pas oublier que celui qui reçoit une vision ne reçoit pas nécessairement le don de l’interpréter lui-même, mais, au contraire, « Quant aux prophètes, …que les autres exercent le discernement » (1 Cor. 14, 29) car « À chacun est donnée la manifestation de l’Esprit en vue du bien. À celui-ci est donnée, par l’Esprit, … une parole de sagesse ; à un autre, une parole de connaissance…un autre reçoit, dans le même Esprit, un don … de les interpréter » (1 Cor. 12, 7-10).

Déjà dans l’Ancien Testament, lorsque Pharaon ou Nabuchodonosor reçoivent une vision en songe, ce n’est en rien à cause d’un mérite quelconque et c’est un autre, Joseph ou Daniel, qui reçoit le don de l’interprétation (cf. Gn 40 et 41 ou Dn 2)

Que comprenait la petite Bernadette lorsque la Vierge lui a déclaré « Je suis l’Immaculée Conception » ?

Don Guido se méfiait d’ailleurs de lui-même : « moi aussi, suis un homme qui, parfois, est enclin à juger les choses selon ses propres mesures » (de la genèse biblique, p. 101) et « Pourtant, il connaît ma médiocrité. Je lui avais dit que je n'étais pas capable d'assumer quelque chose de si important. Je ne suis ni un Moïse ni un prophète et encore moins un saint » (p. 140).

Mais, lors de ses rêves et visions, don Guido, au contraire de Sainte Bernadette, n’était plus un enfant, mais un adulte préoccupé et intéressé, depuis des dizaines d’années, par les questions concernant la création physique du monde et des humains par rapport aux constatations scientifiques. Nul ne sait à quel point ses recherches intellectuelles personnelles intenses ont pu contribuer à ses rêves et visions, mais il en fait largement mention dans l’interprétation qu’il en donne.

À cet égard, pour qu’un message surnaturel puisse être jugé pour ce qu’il est, il semble essentiel, de ne pas le mélanger avec l’interprétation particulière ou les développements personnels qu’en donne le voyant lui-même.

Un voyant est, comme chacun de nous, un homme pécheur qui n’a pas nécessairement le don de l’infaillibilité, ni le don de l’interprétation ou de l’intelligence de ses propres visions, qu’elles soient surnaturelles ou non. Même si une vision est surnaturelle, les pensées personnelles du voyant n’en donnent pas nécessairement la bonne interprétation et peuvent, au contraire, brouiller ce que ses visions peuvent avoir d’authentique en y mélangeant des pensées humaines qui peuvent être erronées.

Prudence donc !

Tout n’est pas à prendre ou à rejeter dans les écrits de don Guido, mais restons fermement accrochés à la foi de l’Église !

Ève, la « mère de tous les vivants », n’est pas un animal pré-humain comme le prétend don Guido. C’est la première femme créée à l’image de Dieu.

Hélas, même si la faute de Ève n’aurait pas suffi à séparer l’humanité de Dieu sans celle, décisive d’Adam, la première femme a contribué avec le premier homme (masculin) au péché originel.

Pourquoi don Guido s’est-il engagé dans des développements et des interprétations s’éloignant de la Bible et de la foi de l’Église en ce qui concerne Ève et le péché originel ?

En fait, dans son souci de concilier la science et la foi, il est resté attaché, comme beaucoup de ses contemporains, à une conception matérielle fixiste de la création ex nihilo des espèces et de l’humanité pour en déduire une vision matérielle et physique de la création dans laquelle Dieu aurait, à de multiples reprises, créé ex nihilo de nouveaux éléments matériels.

Selon don Guido, la création de chaque espèce, y compris les humains, « ne porte aucun gène qui soit passé de l'espèce inférieure à celle supérieure » (p. 12).

Pourquoi cette conviction que, du physique, il ne pourrait « rien » sortir de bon, car « il suffit d'avoir un pourcentage infiniment petit de sang animal pour ne pas atteindre la perfection absolue » (p. 500), alors que c’est Dieu lui-même qui est le créateur du physique et de ses règles ?

Pourquoi penser que toute réalité « hybride », mêlant physique et spirituel, aurait un effet dégradant ou incompatible avec le spirituel ?

L’incarnation ne nous invite-t-elle pas, au contraire, à contempler une extraordinaire union de l’infini et du fini, de l’éternel et du précaire, de l’incréé et du créé ?

Mais, là où les fixistes imaginent plutôt la création instantanée de chaque nouvelle espèce comme celle d’Adam dans un état parfait à l’âge adulte, don Guido l’imagine à l’état de germe dans une matrice ou une « mère » biologique préexistante, mère porteuse de la nouvelle espèce. Don Guido imagine chaque création d’une espèce nouvelle comme une insertion dans la nature déjà créée d’une matière physique nouvelle. Et il imagine, en outre, de multiples interventions semblables dans le cours de l’histoire de l’humanité.

Non seulement durant les six jours de la création, mais encore tout au long des siècles et même lors de l’incarnation. Don Guido aboutit hélas ainsi à cette conclusion hétérodoxe que Jésus lui-même serait physiquement comme un extra-terrestre qui ne serait pas biologiquement le fils d’Adam, ni celui de David, mais un humain créé matériellement ex nihilo et implanté dans le sein de Marie en trois temps : Dieu aurait créé d’abord « l'ovule d'Anne, la mère de Marie et, simultanément, la semence qui l'a fécondée » (les deux gamètes ayant formé la Vierge Marie seraient ainsi entièrement et exclusivement extra-terrestres), de sorte que « Marie n'a reçu aucun gène imparfait de ses parents » (elle ne serait donc pas génétiquement l’enfant de ses parents Anne et Joachim, mais une créature physique absolument nouvelle), et « Finalement, Il créa la semence qui féconda l'ovule parfait de Marie » (p. 255).

Don Guido étend cette idée à divers patriarches des temps anciens.

Mais, en fait, il faut constater qu’il s’agit ici d’interprétations de don Guido car les visions qu’il relate n’en disent rien de clair. Rien n’impose la compréhension physique qu’en retient don Guido.

Que peut-on en penser ?

En fait, pour toute interprétation comme pour toute méditation d’un mystère de la foi, il me semble que deux limites sont essentielles pour se protéger des égarements toujours possibles d’un humain qui accueille toute vérité dans sa propre fragilité marquée par le péché originel.

Ces limites ce sont l’Ecriture et la Tradition authentique confiée au Magistère de l’Église, en dehors desquelles les interprétations particulières peuvent s’égarer dans toutes les directions.

Il me semble essentiel, en effet, que tous ceux qui aspirent à comprendre la création en tenant compte des connaissances scientifiques veillent, avec la même rigueur que celle que la science profane exige dans son domaine, à respecter la foi de l’Église telle que l’enseigne le Magistère. S’en écarter, c’est s’engager dans des voies dispersées et augmenter la confusion plutôt que l’intelligence de la foi.

Il y a un autre danger qui se profile d’ailleurs pour celui s’en écarte, dans la recherche d’une harmonie entre science et foi, c’est de se laisser déporter dans les seules réalités terrestres auxquelles sont limitées les connaissances scientifiques, en séparant totalement ce qui vient de la terre et ce qui vient de Dieu.

Pourquoi soutenir, comme le pense don Guido, que Ève ne serait qu’une femelle biologique animale irresponsable alors que l’Écriture enseigne que « c’est la femme qui s’est laissée tromper et qui est tombée dans la transgression » (1 Tim 2, 14) et que Saint-Paul présente, au contraire, « Ève séduite par la ruse du serpent » (2 Cor. 11, 3) ?

Fidélité à la Parole de Dieu et fidélité à son interprétation authentique par le Magistère de l’Église, n’est-ce pas l’essentiel pour méditer un sujet aussi difficile et essentiel que celui de la création ? Dommage que don Guido s’en soit écarté.

Faut-il pour autant tout rejeter ? Non, le mélange du bon grain et de l’ivraie est une réalité chez les voyants comme chez chacun. C’est bien pourquoi, la nécessité de l’enseignement de l’Église, corps du Christ assisté par l’Esprit Saint, nous est indispensable.

La nouveauté de ce que don Guido a reçu comme une révélation, et qui peut être compris comme une « parole de connaissance », c’est que le corps humain provient bien d’une mère biologique dans la réalité physique. Les pré-humains sont une réalité dont les anciens n’avaient guère conscience avant d’avoir nos connaissances scientifiques.

Il aurait pu en déduire que notre création fut un fait spirituel, que nous n’avons pas été créés au moment où Dieu a commencé à façonner notre corps dans la nature, mais au moment où il y a insufflé une vie spirituelle.

Pourquoi don Guido s’est-il accroché à l’idée que Dieu aurait complété matériellement et physiquement sa création à de multiples reprises, alors même qu’il a découvert que notre corps provient d’une mère biologique et qu’il réaffirme la foi de l’Église qui enseigne que l’humain est le but de toute la création ce qui devrait faire comprendre que Dieu a pourvu la nature de tout ce qui était nécessaire à sa création ?

Acceptons simplement que ni don Guido, ni chacun de nous, n’a reçu un don d’infaillibilité.

Ce qui ne supprime pas ce que ses révélations ont pu contenir de vrai, ni sa bonne volonté pour tenter de concilier notre foi avec ce que la science nous enseigne de manière convaincante.


NB : L’ensemble de mes réflexions concernant l’historicité d’Adam et Ève et du livre de la Genèse a été développé dans une synthèse réactualisée ce 24 mai 2023, sous le titre « Un jardin dans l’Eden », disponible en pdf dans la section Théologie de ce forum sous l’intitulé « Évolution, création, incarnation : un livre à télécharger » :
https://www.cite-catholique.org/viewtop ... 92&t=20369

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Re: La genèse biblique selon don Guido Bortoluzzi

Message non lu par Carolus » mar. 26 mai 2020, 1:23

Xavi a écrit :
sam. 01 févr. 2020, 17:27
Xavi :

Et pourtant, la Genèse elle-même nous indique que Dieu a créé l’humain en le façonnant avec de la glaise.
C’est vrai, cher Xavi. :)
CEC 362 La personne humaine, créée à l’image de Dieu, est un être à la fois corporel et spirituel. Le récit biblique exprime cette réalité avec un langage symbolique, lorsqu’il affirme que " Dieu modela l’homme avec la glaise du sol ; il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l’homme devint un être vivant " (Gn 2, 7). L’homme tout entier est donc voulu par Dieu.
D’après CEC 362, « Dieu modela l’homme avec la glaise du sol ».

Obliviscimur nos de limo terrae ipsos esse (cfr Gn 2,7) (LAUDATO SI').

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