A propos du mal physique dans la création
Publié : mar. 09 sept. 2008, 20:41
Dans le jardin un début de fleuve qui l’arrose, de l’herbe, des plantes, des arbres fruitiers. Dieu, en sa forme encore invisible, Adam, Eve, le serpent s’y promènent dans l’indifférenciation, c’est-à-dire dans l’harmonie. Dieu s’adresse à eux et leur donne deux commandements : ‘Vous croîtrez, vous mangerez’. Dieu précise à chacun en quoi consiste cette nourriture. A la créature animale, les plantes du jardin, à la créature humaine, les fruits de ce même jardin. Avant que Dieu ne crée Adam, il le nomme ‘homme’ et dit comment il le veut : ‘A sa ressemblance’. La lumière, qui ne relève ni du charnel ni du végétal, reçoit, simultanément à sa séparation d’avec les ténèbres, et son nom et son commandement : ‘Que la lumière soit’. La lumière nourrit l’esprit spirituel, comme les produits du jardin nourrissent le corps. ‘Vous êtes la lumière du monde’, dira Jésus, c’est-à-dire, vous êtes la Justice, que par vous, Dieu exerce.
Le commandement de croître n’a subi aucune modification. Il devient réalité par la création d’Eve, en laquelle et par la semence d’Adam, advient une nouvelle créature. Désormais, Dieu ne modèlera plus la glaise, la descendance s’établira de façon autonome, c’est-à-dire que Dieu n’insufflera plus son souffle pour que la vie soit. A présent, le souffle réside en le charnel tout entier, et se transmet d’âge en âge par la procréation. Adam et Eve sont les prophètes du souffle, autrement dit prophètes de l’Esprit même de Dieu. ‘Vous êtes des dieux’, dira Jésus, en mémoire de ce premier souffle.
Le second commandement, la nourriture, par l’effet de la même Providence, (car la semence d’Adam qui pourvoit au peuplement de la terre, relève de la Providence) donne la nourriture pour maintenir la vie à la multitude à venir, inaugurée par Adam et Eve. Cette nourriture se voit attribuer à présent un commandement opposé et subit, de fait, une modification. A manger des fruits, suit l’interdit de ne pas manger ceux d’un arbre géographiquement localisé. Avec le peuple que Dieu va se constituer, la nourriture devient un culte religieux, donc déjà, nourriture spirituelle. Au temps fixé par Dieu pour sa nouvelle création, Jésus instituera une nouvelle nourriture pour laquelle il dira : ‘Prenez et mangez-en tous, ceci est mon corps’. De fait, l’ancien culte par les produits de la terre, subit une nouvelle et dernière modification. Le corps se maintiendra et spirituellement en vie par un corps, et charnellement en vie par les produits de la terre. Ainsi, par le corps de Jésus se renouvelle et la condition purement charnelle de la nourriture, et la condition purement spirituelle par le corps de Jésus.
Adam et Eve ne sont pas arrivés le ventre creux devant l’arbre du milieu du jardin. La nourriture qu’ils mangent déjà, ils la connaissent. Ils ne sont pas arrivés non plus devant ce même arbre, l’esprit vide. Ils possèdent un vocabulaire. Dieu regarde minutieusement comment ils nomment les éléments extérieurs de la création. Le nom qu’ils donnent à chaque chose, leur donne la mémoire de chacune, une fois qu’elle n’est plus à la portée de leur regard. Nommer c’est voir une chose extérieure, donc visible, en mémoriser le nom, c’est voir en soi l’image de cette chose sans que la parole intervienne. L’écriture première consistera à dessiner sur les éléments même de la création, les images contenues en soi que la mémoire de l’œil conserve.
‘Vous pouvez manger des fruits de tous les arbres, sauf ceux de l’arbre du milieu’. C’est un double commandement : l’un mémoire des fruits à manger, l’autre qui casse l’indifférenciation par la localisation précise de l’arbre du milieu, dont les fruits ne sont pas à manger. L’arbre est au milieu du jardin, il n’est pas séparé des arbres alentour, desquels les fruits sont à manger, et dont ils connaissent le goût. Le goût fonctionne d’une façon universelle sur ce qui désole les papilles. Cette universalité du goût, Dieu la rappelle dans sa Pâque, accompagnée d’herbes amères. L’individualité du goût porte sur les choses bonnes. Untel appréciera ceci, untel ne l’appréciera pas. Le discernement portera simultanément sur la mémoire du goût des fruits qu’ils connaissent des arbres alentour, et sur la mémoire tout aussi visuelle, de l’arbre du milieu, auquel le commandement de n’en pas manger les fruits est directement associé : ils seront devant, ils le verront. L’interdit de Dieu instaure la mémoire des sens. Au moment de la tentation, l’œil se souviendra de l’arbre du milieu du jardin, (sans oublier ceux d’alentour). Le goût se souviendra des fruits déjà mangés. L’oreille se souviendra de la parole de Dieu. L’ouïe est le sens des sons : chacun porte son nom : le vent, les vagues, etc. La parole est un son que l’ouïe a mémorisé. L’écriture, c’est-à-dire l’évolution du dessin des choses en mots de ces choses, et sa conséquence naturelle, la lecture, sont une parole qui n’émet plus le son. Le toucher a une double fonction : celle de la procréation, les corps s’uniront qui assureront la descendance, celle de la grâce qui touche l’esprit spirituel.
L’interdit de Dieu met en mouvement chaque mémoire propre des sens qui convergeront vers l’esprit. Le renoncement de la nourriture ne porte pas sur un fruit inconnu, mais sur un fruit, dont par ailleurs Adam et Eve ont reçu le commandement d’en manger. D’où le rappel de Dieu : ‘Vous pouvez manger de tous les fruits’. Il n’y a ni privation, ni frustration, il n’y a aucun danger pour la vie. Le renoncement porte sur une connaissance acquise (et non sur une ignorance), connaissance véhiculée par la mémoire. Dieu instaure la maîtrise de l’esprit charnel par l’esprit spirituel. Ce renoncement, ce premier jeûne de l’humanité, est un sacrifice d’action de grâce.
La créature animale reçoit les deux premiers commandements : croître et se nourrir. D’une part, sur sa nourriture, Dieu ne lui demande pas de sacrifice d’action de grâce, et d’autre part, sa nourriture (les plantes du jardin), est distincte de celle d’Adam et Eve (les fruits). Pour tenter, le serpent a entendu et mémoriser le commandement qu’Adam et Eve ont reçu de Dieu. ‘Vous pouvez manger de tous les fruits, sauf ceux de l’arbre du milieu’. Et c’est par ce que le serpent ne devait pas manger de ‘tous les fruits des arbres du jardin’, qu’il entre en contact avec Adam et Eve : ‘Alors, Dieu a dit, vous ne mangerez pas tous les fruits des arbres !’ Il ne tente pas pour qu’ils mangent les fruits de l’arbre du milieu du jardin, il tente pour qu’ils ne mangent d’aucun fruit d’aucun arbre. Il n’exclut pas l’obéissance à Dieu, c’est là toute sa ruse, toute son intelligence. Il rend à tous les arbres l’indifférenciation initiale, il les rattache les uns aux autres comme l’on rattache un wagon à un autre, afin que l’ensemble devienne un train. Et qu’est-ce qu’un train, sinon une série de wagons indifférenciés. Et qu’est-ce le jardin initial, sinon des arbres indifférenciés. Et qu’est la nature de la créature encore toute une, dans cette harmonie initiale, sinon un doux asservissement, que Dieu casse par le moyen d’un renoncement.
La conséquence de la ‘nouvelle’ indifférenciation des arbres du jardin proposée par le serpent, est l’obtention de l’obéissance envers lui, identique à celle envers Dieu, puisque l’arbre du milieu du jardin reste intact. Cependant, tout en restant intact, il perd ipso facto la spécificité que Dieu lui a donnée, pour devenir celle du serpent qui l’étend aux arbres alentour. Leurs fruits ne sont plus rattachés à l’instinct naturel de la faim, puisque le serpent en interdit à présent la nourriture. C’est-à-dire que chacun de ces arbres alentour devient parodie de l’arbre unique de Dieu, parodie de l’obéissance envers Dieu, auquel cet arbre seul se rattachait. Chacun des arbres alentour devient ‘arbre du milieu du jardin’. C’est le changement radical de l’instinct naturel de la faim sur lequel va se greffer un instinct nouveau : celui de ‘conservation’, de ‘survie’ se propageant à tous les instincts naturels, les rendre indifférenciés, comme les arbres sont rendus indifférenciés par le serpent disant : ‘Alors, Dieu a dit, vous ne mangerez pas les fruits de tous les arbres’.
L’arbre de Dieu reste intact, et avec, l’esprit d’Adam, l’esprit d’Eve. Dieu ne discute pas avec le serpent. Dieu se met en attente de l’acte d’obéissance ou de désobéissance. Et de fait, cette nourriture mortelle du fruit de l’arbre du milieu du jardin redonne à Adam et Eve la mémoire de ce qu’ils ont été prévenus : ‘Si vous mangez de ce fruit, certainement vous mourrez’. De fait, l’obéissance à Dieu est ridiculisée, outragée, qui fait que manger les fruits de l’arbre du milieu est la même chose que de n’en pas manger.
Jésus va détruire cet instinct de ‘conservation’, de ‘survie’ par une phrase lapidaire : ‘Qui sauve sa vie, la perd, qui la perd, la sauve’. Jésus détruit cette ancienne nourriture par sa mort en croix, et en confirme la destruction par sa résurrection et par la nourriture de cette résurrection. La conséquence de l’heureuse résurrection de Jésus, en un, efface la désobéissance introduite en l’humanité, en deux, elle restaure la maîtrise du charnel par le spirituel et configure à nouveau la ressemblance de l’homme, de la femme et de l’enfant, à celle de Dieu. De fait, l’ancien commandement, en quoi consiste la nourriture, devient un nouveau commandement : ‘Prenez et mangez-en tous, ceci est mon corps’. Quel est l’effet de cette nourriture là ? De perpétuer l’illusion de l’immortalité inaugurée par le serpent, et cela par le moyen de la résurrection de Jésus ? Non ! Cette nourriture conduit à la fin de l’immortalité dont Adam et Eve ont été assujettis, et à la suite, la descendance.
Adam et Eve connaissaient la mort ! Dans l’indifférenciation harmonieuse, les animaux mourraient, le végétal se fanait. Quand il ne pleuvait pas, ils voyaient la terre se dessécher. Ils géraient la vie, ils géraient la mort, qu’ils ont nommée de son nom, comme ils ont nommé toute chose sous le regard bienveillant de Dieu. Lorsqu’ils sont devant l’arbre du milieu du jardin, (et simultanément devant les arbres alentour) ils ont l’expérience de la mort extérieure à eux-mêmes. Le serpent, également.
La mort n’est pas une création que Dieu aurait greffée spontanément sur l’arbre du milieu du jardin, au cas où les fruits seraient mangés. La mort entre dans le temps pour faire sortir du temps. Elle est une existence précédant la vie. Lorsque Dieu a modelé la chair d’Adam à partir de la glaise, l’existence d’Adam est achevée. C’est un corps qui marchera, qui parlera, qui entendra, selon leur sens bien spécifique, qui mangera en fonction de son instinct qui lui sera associé, qui procréera en fonction de cet instinct qui lui sera affecté, dès que Dieu insufflera son souffle à ce corps. Quand le serpent dit à Adam et Eve, donc à Dieu présent en ce jardin, ‘Vous ne mourrez pas’, son venin insuffle l’instinct d’immortalité, c’est-à-dire de ‘conservation’ de ‘survie’. Quand Dieu indique que la conséquence de la nourriture des fruits de l’arbre du milieu du jardin est la mort, cette nourriture est la mort du discernement. C’est-à-dire le retour à l’indifférenciation tant des arbres du jardin, que la nature indifférenciée d’Adam et Eve, instincts et spirituel ne faisant qu’un. Le serpent va rendre l’humanité non pas esclave de la mort, mais de l’instinct de ‘survie’, donc de l’immortalité.
Le commandement de croître n’a subi aucune modification. Il devient réalité par la création d’Eve, en laquelle et par la semence d’Adam, advient une nouvelle créature. Désormais, Dieu ne modèlera plus la glaise, la descendance s’établira de façon autonome, c’est-à-dire que Dieu n’insufflera plus son souffle pour que la vie soit. A présent, le souffle réside en le charnel tout entier, et se transmet d’âge en âge par la procréation. Adam et Eve sont les prophètes du souffle, autrement dit prophètes de l’Esprit même de Dieu. ‘Vous êtes des dieux’, dira Jésus, en mémoire de ce premier souffle.
Le second commandement, la nourriture, par l’effet de la même Providence, (car la semence d’Adam qui pourvoit au peuplement de la terre, relève de la Providence) donne la nourriture pour maintenir la vie à la multitude à venir, inaugurée par Adam et Eve. Cette nourriture se voit attribuer à présent un commandement opposé et subit, de fait, une modification. A manger des fruits, suit l’interdit de ne pas manger ceux d’un arbre géographiquement localisé. Avec le peuple que Dieu va se constituer, la nourriture devient un culte religieux, donc déjà, nourriture spirituelle. Au temps fixé par Dieu pour sa nouvelle création, Jésus instituera une nouvelle nourriture pour laquelle il dira : ‘Prenez et mangez-en tous, ceci est mon corps’. De fait, l’ancien culte par les produits de la terre, subit une nouvelle et dernière modification. Le corps se maintiendra et spirituellement en vie par un corps, et charnellement en vie par les produits de la terre. Ainsi, par le corps de Jésus se renouvelle et la condition purement charnelle de la nourriture, et la condition purement spirituelle par le corps de Jésus.
Adam et Eve ne sont pas arrivés le ventre creux devant l’arbre du milieu du jardin. La nourriture qu’ils mangent déjà, ils la connaissent. Ils ne sont pas arrivés non plus devant ce même arbre, l’esprit vide. Ils possèdent un vocabulaire. Dieu regarde minutieusement comment ils nomment les éléments extérieurs de la création. Le nom qu’ils donnent à chaque chose, leur donne la mémoire de chacune, une fois qu’elle n’est plus à la portée de leur regard. Nommer c’est voir une chose extérieure, donc visible, en mémoriser le nom, c’est voir en soi l’image de cette chose sans que la parole intervienne. L’écriture première consistera à dessiner sur les éléments même de la création, les images contenues en soi que la mémoire de l’œil conserve.
‘Vous pouvez manger des fruits de tous les arbres, sauf ceux de l’arbre du milieu’. C’est un double commandement : l’un mémoire des fruits à manger, l’autre qui casse l’indifférenciation par la localisation précise de l’arbre du milieu, dont les fruits ne sont pas à manger. L’arbre est au milieu du jardin, il n’est pas séparé des arbres alentour, desquels les fruits sont à manger, et dont ils connaissent le goût. Le goût fonctionne d’une façon universelle sur ce qui désole les papilles. Cette universalité du goût, Dieu la rappelle dans sa Pâque, accompagnée d’herbes amères. L’individualité du goût porte sur les choses bonnes. Untel appréciera ceci, untel ne l’appréciera pas. Le discernement portera simultanément sur la mémoire du goût des fruits qu’ils connaissent des arbres alentour, et sur la mémoire tout aussi visuelle, de l’arbre du milieu, auquel le commandement de n’en pas manger les fruits est directement associé : ils seront devant, ils le verront. L’interdit de Dieu instaure la mémoire des sens. Au moment de la tentation, l’œil se souviendra de l’arbre du milieu du jardin, (sans oublier ceux d’alentour). Le goût se souviendra des fruits déjà mangés. L’oreille se souviendra de la parole de Dieu. L’ouïe est le sens des sons : chacun porte son nom : le vent, les vagues, etc. La parole est un son que l’ouïe a mémorisé. L’écriture, c’est-à-dire l’évolution du dessin des choses en mots de ces choses, et sa conséquence naturelle, la lecture, sont une parole qui n’émet plus le son. Le toucher a une double fonction : celle de la procréation, les corps s’uniront qui assureront la descendance, celle de la grâce qui touche l’esprit spirituel.
L’interdit de Dieu met en mouvement chaque mémoire propre des sens qui convergeront vers l’esprit. Le renoncement de la nourriture ne porte pas sur un fruit inconnu, mais sur un fruit, dont par ailleurs Adam et Eve ont reçu le commandement d’en manger. D’où le rappel de Dieu : ‘Vous pouvez manger de tous les fruits’. Il n’y a ni privation, ni frustration, il n’y a aucun danger pour la vie. Le renoncement porte sur une connaissance acquise (et non sur une ignorance), connaissance véhiculée par la mémoire. Dieu instaure la maîtrise de l’esprit charnel par l’esprit spirituel. Ce renoncement, ce premier jeûne de l’humanité, est un sacrifice d’action de grâce.
La créature animale reçoit les deux premiers commandements : croître et se nourrir. D’une part, sur sa nourriture, Dieu ne lui demande pas de sacrifice d’action de grâce, et d’autre part, sa nourriture (les plantes du jardin), est distincte de celle d’Adam et Eve (les fruits). Pour tenter, le serpent a entendu et mémoriser le commandement qu’Adam et Eve ont reçu de Dieu. ‘Vous pouvez manger de tous les fruits, sauf ceux de l’arbre du milieu’. Et c’est par ce que le serpent ne devait pas manger de ‘tous les fruits des arbres du jardin’, qu’il entre en contact avec Adam et Eve : ‘Alors, Dieu a dit, vous ne mangerez pas tous les fruits des arbres !’ Il ne tente pas pour qu’ils mangent les fruits de l’arbre du milieu du jardin, il tente pour qu’ils ne mangent d’aucun fruit d’aucun arbre. Il n’exclut pas l’obéissance à Dieu, c’est là toute sa ruse, toute son intelligence. Il rend à tous les arbres l’indifférenciation initiale, il les rattache les uns aux autres comme l’on rattache un wagon à un autre, afin que l’ensemble devienne un train. Et qu’est-ce qu’un train, sinon une série de wagons indifférenciés. Et qu’est-ce le jardin initial, sinon des arbres indifférenciés. Et qu’est la nature de la créature encore toute une, dans cette harmonie initiale, sinon un doux asservissement, que Dieu casse par le moyen d’un renoncement.
La conséquence de la ‘nouvelle’ indifférenciation des arbres du jardin proposée par le serpent, est l’obtention de l’obéissance envers lui, identique à celle envers Dieu, puisque l’arbre du milieu du jardin reste intact. Cependant, tout en restant intact, il perd ipso facto la spécificité que Dieu lui a donnée, pour devenir celle du serpent qui l’étend aux arbres alentour. Leurs fruits ne sont plus rattachés à l’instinct naturel de la faim, puisque le serpent en interdit à présent la nourriture. C’est-à-dire que chacun de ces arbres alentour devient parodie de l’arbre unique de Dieu, parodie de l’obéissance envers Dieu, auquel cet arbre seul se rattachait. Chacun des arbres alentour devient ‘arbre du milieu du jardin’. C’est le changement radical de l’instinct naturel de la faim sur lequel va se greffer un instinct nouveau : celui de ‘conservation’, de ‘survie’ se propageant à tous les instincts naturels, les rendre indifférenciés, comme les arbres sont rendus indifférenciés par le serpent disant : ‘Alors, Dieu a dit, vous ne mangerez pas les fruits de tous les arbres’.
L’arbre de Dieu reste intact, et avec, l’esprit d’Adam, l’esprit d’Eve. Dieu ne discute pas avec le serpent. Dieu se met en attente de l’acte d’obéissance ou de désobéissance. Et de fait, cette nourriture mortelle du fruit de l’arbre du milieu du jardin redonne à Adam et Eve la mémoire de ce qu’ils ont été prévenus : ‘Si vous mangez de ce fruit, certainement vous mourrez’. De fait, l’obéissance à Dieu est ridiculisée, outragée, qui fait que manger les fruits de l’arbre du milieu est la même chose que de n’en pas manger.
Jésus va détruire cet instinct de ‘conservation’, de ‘survie’ par une phrase lapidaire : ‘Qui sauve sa vie, la perd, qui la perd, la sauve’. Jésus détruit cette ancienne nourriture par sa mort en croix, et en confirme la destruction par sa résurrection et par la nourriture de cette résurrection. La conséquence de l’heureuse résurrection de Jésus, en un, efface la désobéissance introduite en l’humanité, en deux, elle restaure la maîtrise du charnel par le spirituel et configure à nouveau la ressemblance de l’homme, de la femme et de l’enfant, à celle de Dieu. De fait, l’ancien commandement, en quoi consiste la nourriture, devient un nouveau commandement : ‘Prenez et mangez-en tous, ceci est mon corps’. Quel est l’effet de cette nourriture là ? De perpétuer l’illusion de l’immortalité inaugurée par le serpent, et cela par le moyen de la résurrection de Jésus ? Non ! Cette nourriture conduit à la fin de l’immortalité dont Adam et Eve ont été assujettis, et à la suite, la descendance.
Adam et Eve connaissaient la mort ! Dans l’indifférenciation harmonieuse, les animaux mourraient, le végétal se fanait. Quand il ne pleuvait pas, ils voyaient la terre se dessécher. Ils géraient la vie, ils géraient la mort, qu’ils ont nommée de son nom, comme ils ont nommé toute chose sous le regard bienveillant de Dieu. Lorsqu’ils sont devant l’arbre du milieu du jardin, (et simultanément devant les arbres alentour) ils ont l’expérience de la mort extérieure à eux-mêmes. Le serpent, également.
La mort n’est pas une création que Dieu aurait greffée spontanément sur l’arbre du milieu du jardin, au cas où les fruits seraient mangés. La mort entre dans le temps pour faire sortir du temps. Elle est une existence précédant la vie. Lorsque Dieu a modelé la chair d’Adam à partir de la glaise, l’existence d’Adam est achevée. C’est un corps qui marchera, qui parlera, qui entendra, selon leur sens bien spécifique, qui mangera en fonction de son instinct qui lui sera associé, qui procréera en fonction de cet instinct qui lui sera affecté, dès que Dieu insufflera son souffle à ce corps. Quand le serpent dit à Adam et Eve, donc à Dieu présent en ce jardin, ‘Vous ne mourrez pas’, son venin insuffle l’instinct d’immortalité, c’est-à-dire de ‘conservation’ de ‘survie’. Quand Dieu indique que la conséquence de la nourriture des fruits de l’arbre du milieu du jardin est la mort, cette nourriture est la mort du discernement. C’est-à-dire le retour à l’indifférenciation tant des arbres du jardin, que la nature indifférenciée d’Adam et Eve, instincts et spirituel ne faisant qu’un. Le serpent va rendre l’humanité non pas esclave de la mort, mais de l’instinct de ‘survie’, donc de l’immortalité.