Je m'interroge sur l'opportunité d'encenser ce curieux personnage et je m'appuie pour cela sur la réflexion d'un certain nombre d'islamologues et de scientifiques : reconnus :
Cela n'a l'air de rien, mais le battage médiatique actuel orchestré par certains (qu'on peut très bien identifier) autour de la question du "dialogue islamo-chrétien" centré sur la pensée massignonienne ne se limite pas à l'hebdomadaire France-Catholique, il est vrai peu lu.... Il faut voir qu'en même temps, en première page du site web du diocèse de Lyon - http://lyon.catholique.fr/ , sous l'intitulé "à voir," et "M. le président Gaci, merci", on a une vidéo réalisée par RCF Fourvière (2) interview d'Azzedine Gaci, qui commence par ces mots : la diversité religieuse, c'est une volonté divine, c'est Dieu qui a voulu qu'il y ait des Juifs, des Chrétiens et des Musulmans"... C'est immédiatement contraire à l'enseignement de l'Eglise : http://www.vatican.va/roman_curia/congr ... us_fr.htmlExposé du P. Edouard-Marie Gallez lors de la soirée organisée par la Fondation de Service Politique le 16 mars 2011, avec Mr Xavier Lemoine
http://www.libertepolitique.com/politiq ... ologique-r
Extraits du texte et des commentaires
“… La théologie occidentale a fait de l’acte de foi l’agent du salut, à la place du Christ lui-même. De la sorte, inexorablement, cette pensée théologique a glissé vers la promotion des « religions » comme autres moyens de salut. Pour autant, ce n’est pas ce qu’ont voulu dire les Evêques réunis lors du Concile Vatican II. Leur jugement global sur « les religions » est loin d’être positif :
« Bien souvent, malheureusement, les hommes trompés par le démon, se sont égarés dans leurs raisonnements, ils ont délaissé le vrai Dieu pour des êtres de mensonges, servi la créature au lieu du créateur, ou bien, vivant et mourant sans Dieu dans ce monde, ils sont exposés aux extrémités du désespoir » (Lumen gentium n. 16).
En fait, le Concile voulait s’attacher au cheminement de chacun vers la vérité, ce qui explique que les textes conciliaires ne mentionnent jamais aucun système de pensée comme tel : ni le communisme, ni l’islam, ni le bouddhisme par exemple, mais uniquement des personnes, les musulmans et les juifs – le Concile ne pouvait pas manquer de parler de ceux-ci, ce qui explique sans doute que ceux-là soient également mentionnés explicitement. Pour le reste, les allusions sont indirectes pour éviter, justement, d’enfermer le cheminement personnel dans l’étiquette d’un système.
On commence donc à voir pourquoi les chrétiens occidentaux de 2011 ont spontanément tendance à considérer leur foi comme une foi parmi d’autres. Une certaine tradition et un manque de contacts avec les chrétiens orientaux expliquent ce relativisme. Mais il existe d’autres raisons. Parmi celles-ci, il faut évoquer, rapidement hélas, l’influence qu’a eue Louis Massignon en milieu catholique. Baptisé à sa naissance en 1883 mais élevé dans une famille ayant une foi assez particulière, Massignon découvrit l’Islam et l’Orient à la suite d’un voyage en Egypte avec son amant espagnol Luis De Cuadra, qui s’était fait musulman. Plus tard, selon ce qu’il raconte, il découvrit Dieu, en 1908, à Bagdad. Cette expérience solitaire, vécue sans contact avec les chrétiens autochtones, servira par la suite de base à sa théologie et à celle de ceux qu’il influença et qui, d’ailleurs, s’y réfèrent aujourd’hui encore. Massignon avait été faussement arrêté comme espion puis, et atteint de fièvre, fut hospitalisé ; c’est durant ces jours-là qu’il dit avoir fait une expérience religieuse « mystique », une « expérience de Dieu le Père », située en quelque sorte au-dessus du christianisme et de l’islam.
En réalité, cette expérience « mystique » n’était pas sans lien avec l’atmosphère dans laquelle il avait baigné dans son enfance et sa jeunesse ; son père, qui portait le nom d’artiste de Pierre Roche, n’était pas vraiment un athée ; il s’était lié à un prêtre défroqué (et ex-communié), l’abbé Boullan, qui avait élaboré une doctrine mystique par laquelle il imaginait que le chrétien pouvait se substituer au pécheur. En d’autres termes, le chrétien aurait le pouvoir de valoir à d’autres le salut, indépendamment de toute rencontre avec le Christ. Cette théorie-là de la substitution, à laquelle Jésus devient évidemment extrinsèque, donnera naissance à la mystique islamo-chrétienne de Massignon qu’il appellera plus tard lui-même en arabe badaliya, c’est-à-dire « substitution ». Dans cette pensée, l’évangélisation devient inutile, voire nuisible, puisque le dialogue mystique est lui-même instrument de salut. Louis Massignon réussit à en convaincre des autorités catholiques romaines, du fait de leur ignorance en matière d’islamologie. Après sa mort en 1962, ses adeptes créèrent ainsi à Rome le Pontificio Istituto di Studi Arabi e d’Islamistica (PISAI), où jusqu’il y a peu les cours étaient souvent en français, et que Benoît XVI voulut supprimer au début de son Pontificat ; mais il dût y renoncer.
Derrière cette institution existent des réseaux 2 qui, très concrètement, ont monopolisé les questions islamo-chrétiennes. Ceci a eu pour effet d’empêcher toute recherche scientifique islamologique en milieu catholique, au profit de la poursuite du rêve de Massignon. Néanmoins, certains responsables catholiques latins reconnaissent en privé ou même ouvertement parfois que les dizaines d’années d’existence du dialogue islamo-chrétien n’ont abouti qu’à l’établissement de liens personnels, avec parfois des retombées positives. Ce modèle de dialogue a d’ailleurs été copié un peu partout dans le monde, y compris à Tripoli sous l’égide de Mouammar Kadhafi.”
—extraits des commentaires —
Dans un contexte de confusions, le jeune Massignon n’a pas rectifié les déviations mystico-théologiques dans lesquelles il avait baigné, et s’est intéressé ainsi à Al-Hallaj et aux mystiques chrétiens qui semblent illustrer son idée de la « substitution ». Et il se détourna de l’homosexualité. Au faîte de sa gloire et à l’instance de Mary Khalil, ce professeur de sociologie musulmane au Collège de France durant 35 ans, dévoué à ses élèves, se fit ordonner prêtre en janvier 1950 alors qu’il était marié depuis des années à une certaine Marcelle Dansaert ; pour ce faire, il passa par la Communauté melkite catholique d’Egypte. Il ne célébrait la messe que discrètement et seul. Voilà le personnage réel que d’aucuns évitent de présenter. Et utiliser les moines de Tibhirine ou Charles de Foucauld pour le cautionner n’est pas honnête (seul le P. de Chergé, formé au Pisaï, partageait la mystique massignonienne, comme son Testament le suggère – Charles de Foucauld avait une perspective toute autre). Massignon a enseigné que l’Islam résultait d’une « volonté positive de Dieu » par Ismaël (lequel est dépourvu de tout fondement comme figure islamique) : “L’Islam constitue une réponse mystérieuse de la grâce à la prière d’Abraham pour Ismaël et les Arabes” auxquels “Dieu a donné le Coran en signe de bénédiction” (Parole donnée, Paris, Seuil, rééd. 1983, p.267) ; il a également affirmé le contraire, à savoir que l’Islam était diabolique – mais peut-être n’est-ce pas le contraire selon sa mystique [de substitution-badalyyia]. Quoi qu’il en soit, lui-même et son mouvement se sont toujours opposés aux recherches historiques, au nom d’un supposé respect dû aux Musulmans, et c’est pourquoi l’islamologue Maxime Rodinson le traitera de « confit en dévotion islamique ».
Quant aux conséquences anti-évangélisatrices de ses positions, même s’il a pu écrire parfois le contraire et le contraire du contraire, voici ce qu’en pensait Pierre Rocalve :
“Jusqu’à Massignon, le christianisme cherchait à convertir. Lui préconise une attitude de compassion-substitution... pour lui, l’Islam est non seulement une vraie religion, avec ses saints (Hallaj, Salmân,...), mais une religion vraie qui a sa place dans l’histoire de la Révélation”(Louis Massignon et l’Islam, coll. Témoignages et documents n° 2, Institut Français, Damas, 1993, p.28.95).
Massignon se justifie ainsi : “Cet expatriement où nous entraîne notre « substitution » aux âmes musulmanes, cette grâce de Dieu qui les justifie devant Lui, en nous sanctifiant”, et expliquait que la vie chrétienne est une “mise à la disposition spirituelle, toute offerte au désir que Jésus a des âmes, pour répondre à leur place à Son Appel” (Lettre de la Badaliya n° 3 et 4, citées par Jacques Kéryel (Louis Massignon et..., Paris, Karthala, 1997, p.365). Les textes sont nombreux et clairs. Pour en savoir plus sur la massignolâtrie :
http://www.notredamedekabylie.net/Autre ... etien.aspx et également http://www.notredamedekabylie.net/FORUM ... fault.aspx .
J'ose espérer que ce n'est pas cela que les participants à la formation sur le dialogue interreligieux de février dernier à Lyon auront retenu....
Cela va de pair avec la lecture biaisée de l'affaire de Thibérine par certains (.... aussi également très identifiables) qui cherchent à faire du P. de Chergé le fondateur d'une théologie du dialogue islamo-chrétien, chose qu'il n'a jamais prétendu faire ou être. Il ne se décrivait lui même comme quelqu'un qui n'était pas théologien.
http://www.laprocure.com/livres/christi ... 78183.html
J'insiste : c'est dangereux. Avec ce genre de choses, nous allons dans une direction sans issue théologique....
(1) L'article n'est pas disponible en ligne pour le moment, mais du même auteur, on trouve sur le site de France Catholique la recension d'un autre livre du même tonneau : http://www.france-catholique.fr/Louis-M ... logue.html Je vous laisse y goûter...
(2) A quelques jours du premier tour des élections du Conseil Régional du Culte Musulman / Rhône-Alpes (CRCM), dimanche 5 juin, la web TV / lyon fourvière donne la parole à Azzedine Gaci, son président sortant. Cette vidéo a été tournée le 16 février 2011, à Lyon, en marge de la session doctrinale des évêques de France sur le dialogue interreligieux. Cette vidéo est proposée par la Web TV / lyon fourvière, rendez-vous vidéo du site http://www.lyon.catholique.fr, réalisée en partenariat avec KTO.