La question du diable

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Raistlin
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Re: La question du Diable.

Message non lu par Raistlin » lun. 02 avr. 2012, 18:00

Didyme a écrit :Je ne veux pas jouer l'avocat du diable :-D
mais alors pour quelles raisons considère-t-on qu'il est irrémédiablement irrécupérable pour Dieu ?
Je sais que la question peut choquer mais c'est pourtant une vraie question.
C'est une vraie question, je vous le confirme.

La réponse est la suivante : le diable (et les démons) ont choisi en parfaite connaissance de cause. Nous pauvres humains n'avons qu'une intelligence limitée et de surcroit obscurcie par le péché. Ce n'est pas le cas des anges qui sont de purs esprits. Le diable ne reviendra donc jamais sur sa décision car son intelligence a mesuré dès le départ toutes les implications de sa révolte. Il est pour toujours enfermé dans son choix.

Le péché des anges est d'autant plus grave qu'ils savaient pertinemment ce qu'ils faisaient.

Cordialement,
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Re: La question du Diable.

Message non lu par Angelo » lun. 02 avr. 2012, 18:33

Je voudrais rajouter à ce que dit Raistlin qui a fait un commentaire plus que vrai, que Satan ne reviendra jamais sur sa décision, non pas parce que cela lui serait interdit, au contraire, Dieu est Amour et voudrait que tous soient pardonnés, mais parce que Satan en refusant Dieu a incarné tout ce qui ne pouvait être Dieu: Orgueil, Gourmandise, ...
Bref, en résumé, Satan ne peut demander le Pardon car il est trop orgueilleux, et c'est cette orgueil qui le blesse et qui lui fait incarner le Mal et à séduire les hommes.
C'est une sorte de cercle qui commence par l'Orgueil d'un Ange et finit par ce même Orgueil de ce même Ange (voir Apocalypse) et ce cercle englobe ce qui n'est pas Dieu et de ce fait le Pardon ne "figure pas sur la liste" du Diable.
†Ad majorem gloriam Dei†

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Re: La question du Diable.

Message non lu par Cinci » lun. 02 avr. 2012, 23:22

Pour Didyme (en souvenir d'heures passées),
mais alors pour quelles raisons considère-t-on qu'il est irrémédiablement irrécupérable pour Dieu ?
Le père Gignac qui expliquait cela aux enfants de l'élémentaire (blague ici), il répondait :

«... ils sont fixés pour toujours dans le péché. Pourquoi ? À cause de leur simplicité. «Simplicité», ici, non pas dans le sens de facilité ou de naïveté, mais dans le sens qu'ils ne sont pas composés, ils n'ont pas de corps.

Vu cette simplicité, ils ne peuvent pas changer d'idée, se dédire, ils sont fixés dans leur révolte contre Dieu. Il sont fixés dans leur rebellion, dans leur haine de Dieu et dans la privation de Dieu. Voilà ce qu'ils sont.»


Auparavant :

« ...ils n'ont pas de tête, pas de bouche, ils n'ont pas de cerveau, ils ne peuvent pas faire de phrase, ils ne peuvent rien prononcer, c'est leur esprit qui communique par un acte de volonté. Un ange qui sait une chose et qui voudrait qu'un autre le sache, il n'a seulement qu'à se dire : je veux que l'autre le sache, et l'autre le sait.»

et

« ... chaque ange est une espèce à part : ils sont spécifiquement distincts. Nous autres, les humains, nous sommes spécifiquement un. Il n'y a qu'une espèce humaine. Ça veut dire qu'il n'y a pas deux anges de la même sorte. [...] on est tous semblables, c'est l'enseignement officiel de l'Église : nous sommes tous égaux, donc spécifiquement un, et nous nous transmettons l'espèce humaine par voie de génération. [...] Les anges n'ont pas besoin de ça, eux. Ii ne faut pas penser que les anges se mettent à deux pour faire un petit. Ils n'engendrent pas d'autres anges. Dieu les crée directement, un par un. Alors chacun, c'est une espèce à part.»

La notion de «récupérabilité» renvoie à celle de la rédemption, Didyme. Et la rédemption n'est que pour les hommes à cause de Jésus. Dieu a crée l'homme en pensant à son Fils, etc. Crée à l'image de Dieu, etc. La rédemption n'est pas pour les anges.

Le père Gignac explique comment chaque ange est unique et communique par un acte de volonté invariable; c'est ta réponse que tu voulais.

Le fait de la génération en lui-même (qui ne concerne pas les anges) nous rattache à «la promesse faite aux pères», etc. Jésus s'est fait chair ( = nous) Les anges sont hors de cause dans cette histoire de rédemption de l'homme. La chute de Satan, mais ce n'est pas comme la chute de l'homme. Nous naîtrons (un processus temporel; générationel), nous, tel dans un monde affecté/abimé. L'ange est crée directement et dans un environnement ''sin free''.

Enfin

Il n'est qu'un seul péché irrémissible dira le Christ. Et puis c'est le péché contre l'Esprit. Il s'agit spécifiquement du péché commis par «nos fameux esprits rebelles» car le spirituel est le rayon qui les concerne au premier chef, leur domaine de compétence primordiale.


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Re: La question du Diable.

Message non lu par Didyme » lun. 02 avr. 2012, 23:25

Ça reste tout de même quelque chose qui me laisse perplexe.

Car d’un côté, il est clair qu’en ce qui concerne Satan, on ne peut pas dire que c’est le résultat du péché qui l’a poussé à refuser Dieu car il n’était pas encore apparu avant ce choix comme en ce qui concerne l'homme (quoique le péché était déjà présent dans le fait du libre-arbitre. Celui-ci ouvrant la possibilité de s’écarter de Dieu). Donc oui, je comprends quand on dit que c’est un choix en parfaite connaissance de cause.

Mais qu’est-ce qui a bien pu produire cet écart ? Il est facile de dire que c’est son orgueil ou autre chose mais on peut dire quelque part que depuis leur création, ils sont restés « vierge » du mal. D’où a donc bien pu jaillir ce rejet ? Les réponses qu’on me donne renvoi généralement à l’idée que c’est de son propre fond. Mais comment un être crée par Dieu, de nature fondamentalement bonne peut-elle de son propre fond rejeter Dieu ?!
Il semblerait alors que ce soit le péché qui excite d’une certaine façon. Il me semble que c’est un peu ce qui est développer dans Romains 7 où il n’est pas question du « diable saisissant l’occasion, me séduisit par le commandement » mais du « péché saisissant l’occasion, me séduisit par le commandement ».
Comme je le comprends, ce serait le libre-arbitre qui a « produit » le péché et qui a séduit le diable et conduit à la chute. Non pas que le libre-arbitre soit mauvais car nécessaire pour permettre la relation avec Dieu mais il a cet à côté.
Donc quelque part, si c’est fait en connaissance de cause, il y a que c’est le péché qui l’a éveillé.

Comment comprendre que le Christ a vaincu le péché si celui-ci demeure présent dans le fait d’un rejet irrémédiable ?

Par ailleurs, s’écarter de Dieu est quelque chose d’instable. Je comprends mal qu’on puisse s’enfermer dans le mal comme s’il y avait une plénitude atteinte dans le mal qui ne permettait plus de changement, comme si aussi il n’y avait plus de Dieu dans l’être.
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Re: La question du Diable.

Message non lu par Cinci » lun. 02 avr. 2012, 23:37

Par contre, Raistlin :
le diable (et les démons) ont choisi en parfaite connaissance de cause.
Le père Gignac ne serait pas tout à fait d'accord là-dessus. Du moins, il mettrait peut-être une précision.

« ... remarquez bien que les anges, par leur nature crée, n'avaient pas plus que nous le droit de voir Dieu. Dieu, par définition, c'est un être inaccessible. Personne ne peut l'approcher à moins qu'il l'invite; c'est ainsi qu'il avait invité les anges. Nous, il nous invite aussi, mais ni les anges ni nous n'avons le droit à la vie intime de Dieu.

Mis à l'épreuve

Pour entrer ainsi dans la vie de Dieu il faut le mériter; il faut faire quelque chose. Le Seigneur nous a donc donné des épreuves, certaines épreuves de foi, pour entrer sans sa famille. Les anges ou les esprits avaient aussi une épreuve à subir. On ne sait pas exactement ce qu'elle a été. Saint Thomas d'Aquin pense que le Seigneur leur aurait révélé qu'un jour Dieu se ferait homme , et qu'il leur faudrait l'adorer. Mais ce n'est pas si certain que cela. Saint Alphonse pense aussi comme saint Thomas. D'une façon ou d'une autre, il y a eu une épreuve et l'épreuve a été fatale pour plusieurs de ces esprits.

[...]

... ces esprits ont été très orgueilleux et ils ont été repoussés par Dieu. Dieu ne peut plus les inviter car ils ont dit qu'ils n'en voulaient pas. Mais ceux qui ont accepter l'épreuve, ceux-là sont devenus de bons anges ou les esprits bienheureux. C'est à ce moment-là qu'ils sont entrés au Ciel. Il ne faut pas penser que les démons ont déjà vu Dieu. Ils ne l'ont jamais vu, jamais ! Parce qu'ils ne l'avaient pas mérité. Les bons l'ont mérité, ils ont vu Dieu tout de suite, ils n'ont pas eu à vivre sur la terre. Ils ont été invités chez Dieu pour partager la vie de Dieu. Mais les autres, jamais, jamais !

Quand on dit en prédication populaire : si les anges ont péché dans le Ciel [...] Eh bien, ce n'est pas vrai ! Ils n'ont pas péché «dans» le Ciel. Pourquoi ? C'est que lorsqu'on a vu Dieu , on n'est pas capable de ne pas rester avec Lui. Il est d'une beauté qui nous nécéssite (nous captive), On est nécéssité par Dieu lorsqu'on l'a vu.

Or les mauvais esprits ne l'avaient pas vu; ils l'avaient connu par la foi : ce n'est pas la même chose. Ils avaient eu une révélation : Dieu leur disait ce qu'il voulait d'eux; ils connaissaient Dieu, ils savaient que c'était un Être infini, un Être magnifique ... Ils le savaient, mais ils ne le voyaient pas. Ceux qui ont mérité la vie divine, la vie de participation à Dieu, eux, ils sont entrés au Ciel et ils l'ont vu.»



Bref, le Satan, le diable ou les esprits impurs n'ont jamais vu Dieu. Et ainsi leur décision «en parfaite connaissance de cause» ne pouvait se résumer qu'à une certaine qualité d'inférence propre, partant d'une part de révélation ayant pu déjà leur avoir été communiqué au préalable et dans la foi; la foi et non pas la claire vision. C'est en matière de foi qu'ils auront achoppé.

Le diable ou les mauvais esprits ont choisi - avec leur simplicité de purs esprits - en engageant toute leur volonté sur la base seulement de ce qui leur aura été donné de pouvoir connaître.

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Re: La question du Diable.

Message non lu par Didyme » mar. 03 avr. 2012, 0:21

La remarque est intéressante Cinci en ce qui concerne les conditions de ce choix des anges.

Mais j’ai quand même du mal avec la question de mérite.
Non pas que je n’y suis pas sensible car après un effort on apprécie d’avoir une récompense, de mériter quelque chose.
Mais quelque part, c’est un certain orgueil qui se balade là-dedans, une forme de vanité.
D’ailleurs, les personnes qui oeuvrent tendent généralement à tout attribuer à Dieu. De même, quand on parle du salut on dit bien que c’est par grâce. Or si c’est par grâce et si cela vient de Dieu, il n’est plus question de mérite.

Par ailleurs, là où la question de mérite me gène un peu c’est quand elle me renvoi à l’idée d’un Dieu joueur qui crée un tel et un tel et qui les places dans des conditions pour voir s’ils vont faire le bon choix. Ça fait un peu « le grand jeu de la vie », si tu gagnes tu vas au paradis, si tu perds tu vas en enfer, dommage.
Je ne sais pas, expliquez-moi comment il faudrait prendre les choses parce que là, je bute un peu.
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Re: La question du Diable.

Message non lu par Raistlin » mar. 03 avr. 2012, 9:43

Cinci a écrit :Bref, le Satan, le diable ou les esprits impurs n'ont jamais vu Dieu. Et ainsi leur décision «en parfaite connaissance de cause» ne pouvait se résumer qu'à une certaine qualité d'inférence propre, partant d'une part de révélation ayant pu déjà leur avoir été communiqué au préalable et dans la foi; la foi et non pas la claire vision. C'est en matière de foi qu'ils auront achoppé.

Le diable ou les mauvais esprits ont choisi - avec leur simplicité de purs esprits - en engageant toute leur volonté sur la base seulement de ce qui leur aura été donné de pouvoir connaître.
J'admets que la remarque est très pertinente. Merci beaucoup ! Je pense que l'intelligence angélique permet d'avoir une connaissance de Dieu bien plus poussée que la nôtre. Par exemple, les anges n'ont aucun doute sur l'existence de Dieu.

Ainsi, si je suis d'accord pour dire qu'ils n'avaient pas la claire vision béatifique réservée aux Élus, je pense que les anges ont une vision de Dieu proportionnelle à leur nature créée et bien supérieure à la nôtre. La Bible ne décrit-elle pas les anges comme présents devant le trône de Dieu (c'est bien sûr une image mais qui signifie une réelle proximité) ?

Bien à vous,
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Re: La question du Diable.

Message non lu par PaxetBonum » mar. 03 avr. 2012, 13:57

Didyme a écrit :Je ne veux pas jouer l'avocat du diable :-D
mais alors pour quelles raisons considère-t-on qu'il est irrémédiablement irrécupérable pour Dieu ?
Je sais que la question peut choquer mais c'est pourtant une vraie question.

Il a rejeté Dieu en connaissance de cause, en le voyant face à face.
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Re: La question du Diable.

Message non lu par Cinci » mer. 04 avr. 2012, 0:56

Raistlin,
La Bible ne décrit-elle pas les anges comme présents devant le trône de Dieu (c'est bien sûr une image mais qui signifie une réelle proximité) ?
Oui, nous le dirons des anges au service de Dieu.
Je pense que l'intelligence angélique permet d'avoir une connaissance de Dieu bien plus poussée que la nôtre. Par exemple, les anges n'ont aucun doute sur l'existence de Dieu.
En effet.


Didyme,
Par ailleurs, là où la question de mérite me gène un peu c’est quand elle me renvoi à l’idée d’un Dieu joueur qui crée un tel et un tel et qui les places dans des conditions pour voir s’ils vont faire le bon choix. Ça fait un peu « le grand jeu de la vie », si tu gagnes tu vas au paradis, si tu perds tu vas en enfer, dommage.
La notion de Dieu pouvant récompenser des élus est pourtant très biblique. Puis ne serait-ce pas un peu (un peu) un coup de dé pour nous de devoir prendre fait et cause pour un Dieu que nous n'aurons jamais vu ?

Comment entendrais-tu cette histoire de décision personnelle à vouloir opter pour le bien, didyme ? Qui prend la décision ? Dieu ? le diable ? Nous ?

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Re: La question du Diable.

Message non lu par Raistlin » mer. 04 avr. 2012, 10:23

Didyme a écrit :De même, quand on parle du salut on dit bien que c’est par grâce. Or si c’est par grâce et si cela vient de Dieu, il n’est plus question de mérite.
Oui, mais le mérite consiste justement a accueillir cette grâce convenablement. La notion de mérite n'implique de se sauver soi-même à la force du poignet mais de s'ouvrir à la grâce de Dieu et de la faire fructifier.

Didyme a écrit :Par ailleurs, là où la question de mérite me gène un peu c’est quand elle me renvoi à l’idée d’un Dieu joueur qui crée un tel et un tel et qui les places dans des conditions pour voir s’ils vont faire le bon choix. Ça fait un peu « le grand jeu de la vie », si tu gagnes tu vas au paradis, si tu perds tu vas en enfer, dommage.
Je ne sais pas, expliquez-moi comment il faudrait prendre les choses parce que là, je bute un peu.
Je crois qu'il faut bien comprendre deux choses :
:arrow: Dieu n'est pas un pervers qui nous tend des pièges.
:arrow: Dieu nous veut libres et responsables et nous devrons assumer les conséquences de nos choix.

L'Écriture est formelle : nous avons cette vie pour nous convertir et chercher Dieu. Après, il est trop tard. Cela ne signifie pas que ceux qui n'ont pu trouver le Christ durant leur vie (pour une raison ou une autre) ne seront pas sauvés, mais il ne faut pas non plus nier l'importance de nos choix et de la façon dont nous orientons notre vie. La question du Salut est grave, et Jésus n'est pas mort sur la Croix "just for fun". Cette gravité appelle de notre part une réponse totale.

L’erreur contemporaine est de croire que Dieu nous sauvera envers et contre tout. Si Dieu faisait cela, ce serait le pire tyran ayant jamais existé car il n’y aurait même plus la possibilité de refuser de L’aimer. Quel amour peut être bâti sur la contrainte ?
C’est pourquoi l’Enfer est le dogme de la tolérance absolue : Dieu tolère qu’on Lui dise non pour l’éternité.

Cordialement,
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Re: La question du Diable.

Message non lu par Cinci » mer. 04 avr. 2012, 17:03

Raistlin,
Dieu n'est pas un pervers qui nous tend des pièges.
... ni pièges ni spectacles. On imagine pas Dieu se faisant un spectacle pour s'amuser des difficultés dans lesquelles il aurait plongé l'un l'autre. Ce serait trop moche.


Une idée

Alors probablement que le langage de la révélation ou de la contemplation conviendrait mieux. Il se révèle que ... Dieu permet que soit révélé ... rend possible l'achèvement d'un être jusqu'à son achèvement ultime ... que la lumière soit faite ... qu'un tri à la fin ...

Il y a tellement de paraboles qui associe la croissance du royaume à une sorte de loi organique intervenant en-dehors de Dieu lui-même. On pense au figuier stérile, au semeur qui est sorti dans son champ pour découvrir [...], le royaume qui est comme le filet qu'on ramène sur la rive au final et pour effectuer le tri, etc. ll me semblerait que tous ces paraboles parlent aussi bien du diable [le mal, Satan] à leur manière. Ce sont des analogies. Il y a les invités du banquet qui seront laissés, il y a le candidat qui voudrait s'infiltrer dans le banquet sans avoir la robe ... l'histoire de Judas, l'histoire de Satan ... analogie ... l'invité qui se dérobe ... Il y a un reflet miroir ... un drame spirituel humain à l'image du drame spirituel originel ...

Sur le mérite ...

Didyme soulevait :
Mais quelque part, c’est un certain orgueil qui se balade là-dedans, une forme de vanité. D’ailleurs, les personnes qui oeuvrent tendent généralement à tout attribuer à Dieu.
C'est normal de se reconnaître une dette réelle envers infiniment plus grand que soi.

Cette dette envers «ce qui est dû au plus grand» n'élimine pourtant pas la personnalité, ni la liberté se trouvant chez cette dernière et ni comme le fait d'une décision personnelle de bien faire. Je ne vois donc pas pourquoi la question du mérite personnel devrait disparaître. L'humilité fonctionne dans les deux sens dans le christianisme, il me semble. Dieu n'est pas infatué de sa propre personne, comme narcissique au point d'être incapable de voir l'autre dans sa vérité.

L'anéantissement total du serviteur au pied de Sardanapale reste peut-être telle une vision orientale de l'humilité. Mais moi je penserais que Dieu est encore «plus serviteur que le serviteur» et encore plus humble, plus capable de considérer l'homme en partant de la base et pour lui trouver de la grandeur.

Du côté des purs esprits, moi il me conviendrait de trouver du mérite aux bons anges. Pourquoi non ? Que des hommes pécheurs puissent de «fierer» à mauvais droit de toutes sortes de choses comme un don de Dieu est peut-être une chose. Il ne m'en permettrait pas de penser que le bon ange à l'origine aurait dû être vaniteux, tourné fondamentalement vers lui-même au lieu de l'être vers Dieu.

:)

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Re: La question du Diable.

Message non lu par Cinci » jeu. 05 avr. 2012, 2:47

(p'tite reprise pour la dernière ligne insuffisamment développée)

Que des hommes pécheurs puissent s'enfler à mauvais droit de toutes sortes de choses comme d'un don de Dieu : il en pourrait représenter une certaine réalité. Admettons ! Ce sera une réalité humaine. C'est égal combien il ne m'en permettrait pas de penser que les purs esprits à l'origine (ceux qui vont devenir les anges de Dieu) auraient dû être des esprits vaniteux, tournés fondamentalement vers eux-mêmes au lieu de l'être vers Dieu, et ce, parce qu'ils se seraient orientés dans la direction de Dieu (!) Ça n'a pas de sens. Il me semble que leur mérite se détacherait par rapport aux esprits impurs. Le mérite des premiers est de n'avoir pas été forcés et pourtant avoir fait choix du service de Dieu. On trouverait une liberté dans la foi ... même pour les anges. On ne parle pas de robots. J'exprime une idée sous réserve ici de devoir la corriger si des observations justes peuvent être faites.

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Re: La question du Diable.

Message non lu par Didyme » jeu. 05 avr. 2012, 12:42

Raistlin a écrit :
Didyme a écrit :De même, quand on parle du salut on dit bien que c’est par grâce. Or si c’est par grâce et si cela vient de Dieu, il n’est plus question de mérite.
Oui, mais le mérite consiste justement a accueillir cette grâce convenablement. La notion de mérite n'implique de se sauver soi-même à la force du poignet mais de s'ouvrir à la grâce de Dieu et de la faire fructifier.
Quel mérite avez-vous de vous ouvrir à la grâce ? Pourquoi y avez-vous répondu ? Pourquoi votre ami athée n’y a pas répondu ?
Je comprends cette idée de mérite mais dès que je creuse un peu, je me demande ce qu’il en reste.
Raistlin a écrit :L’erreur contemporaine est de croire que Dieu nous sauvera envers et contre tout. Si Dieu faisait cela, ce serait le pire tyran ayant jamais existé car il n’y aurait même plus la possibilité de refuser de L’aimer. Quel amour peut être bâti sur la contrainte ?
C’est pourquoi l’Enfer est le dogme de la tolérance absolue : Dieu tolère qu’on Lui dise non pour l’éternité.
Je ne suis pas aussi convaincu sur ce dernier point.
La question est de savoir si Dieu nous a donné le libre-arbitre afin qu’on puisse ou l’accepter ou le refuser. Mais à la vue de nombreux passages bibliques, il ne me semble pas que le libre-arbitre ait été donné pour le refuser. Où voit-on dans la Bible un seul passage où Dieu semblerait respecter qu’on le rejette ?
Non, à chaque fois, il blâme et condamne et demande la repentance et la conversion. Même à la base, on ne voit pas en Eden qu’il est dit à l’homme de manger de l’arbre de la connaissance et de faire son choix mais il lui est poser l’interdit d’en manger.
Sur ce que je vois, le libre-arbitre n’a été donné que dans le but d’aimer Dieu. Le fait est que sans libre-arbitre, il n’y a pas de relation, d’échange donc le libre-arbitre est nécessaire mais le refus est l’à côté du libre-arbitre. Il n’est pas voulu selon moi mais il est possible. Il n’est tellement pas donné pour ça que l’homme n’est pas crée par autre chose que par l’amour et est donc destiné à la base à l’amour. Pourquoi donc donnerait-on le libre-arbitre pour permettre de s’égarer et d’aller contre ce qu’on est ? Quel en serait le sens ?! Si encore on était indépendant à Dieu à la base de telle sorte qu’on puisse penser un libre-arbitre pour décider de rallier Dieu ou pas serait concevable mais là, on parle d’un libre-arbitre qui permet à la créature de s’égarer, de se refuser en quelques sortes ?!
D’ailleurs, si on ressuscite avec des corps incorruptibles, n’est-ce pas afin de palier à ce « défaut » du libre-arbitre. N’est-ce pas aussi ça vaincre le péché ?
Sinon, qu’est-ce qui m’empêcherait de dire si je pars sur le principe de votre dernière phrase que Dieu n’est pas éternellement tolérant puisqu’il ne permet plus à ce moment-là qu’on puisse lui dire non un jour.

Après, je ne pense pas un seul instant que Dieu oblige à l’aimer mais qu’il conduise à l’aimer.
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Re: La question du Diable.

Message non lu par Didyme » jeu. 05 avr. 2012, 12:57

Cinci,

Sur la remarque du père Gignac, c’est vrai que c’est particuliers en ce qui concerne les anges et qu’on sait trop peu de choses en ce qui les concerne, les constitue. Donc c’est vrai que je ne peux pas tellement transposer le cas de l’homme sur eux. D’autant plus que la rédemption, l’incarnation concerne effectivement l’humanité.

Cinci a écrit :Didyme,
Par ailleurs, là où la question de mérite me gène un peu c’est quand elle me renvoi à l’idée d’un Dieu joueur qui crée un tel et un tel et qui les places dans des conditions pour voir s’ils vont faire le bon choix. Ça fait un peu « le grand jeu de la vie », si tu gagnes tu vas au paradis, si tu perds tu vas en enfer, dommage.
La notion de Dieu pouvant récompenser des élus est pourtant très biblique. Puis ne serait-ce pas un peu (un peu) un coup de dé pour nous de devoir prendre fait et cause pour un Dieu que nous n'aurons jamais vu ?

Comment entendrais-tu cette histoire de décision personnelle à vouloir opter pour le bien, didyme ? Qui prend la décision ? Dieu ? le diable ? Nous ?
C’est bien la question.
Logiquement, Dieu appel et l’homme répond (ou pas).
Mais en ce qui concerne ma décision personnelle, je n’ai vraiment pas l’impression d’y être pour quelque chose. Il y a un tas de facteurs (culture, éducation, environnement, expériences, épreuves, etc…) qui m’ont poussé dans ce sens. Et si ça venait de mon propre fond de répondre à cet appel, encore une fois je n’ai pas l’impression d’y être pour quelque chose, il est tel qu’il a été crée. Et c’est aussi l’impression qui m’habite en ce qui concerne celui qui prendra une route différente.
Les mérites, non vraiment j’ai du mal avec ça, bien que biblique je te l’accorde. Et pourtant, je trouverais bien des mérites à des tas de personnes, j’en admire aussi.
Mais ce n’est tellement pas simple, le terme d’élus compliquant encore plus la chose en renvoyant à l’idée de prédestination. Et alors là, les mérites ne sont plus qu’une histoire de grâce.

Je ne sais pas, tu le vois comment toi ?

Après je suis assez d’accord quant à ta remarque sur l’humilité.
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Re: La question du Diable.

Message non lu par Cinci » ven. 06 avr. 2012, 18:42

Difficile de résister à l'envie de placer ici une petite tranche d'Augustin :


«... à la différence des premiers auteurs chrétiens qui se préoccupaient surtout de la création matérielle, Augustin voit dans le ciel du premier verset de la Genèse non seulement le firmament visible, mais aussi les créatures spirituelles. À elles aussi il consacrera la suite du commentaire. En Gn 1,3 en effet on parle du «il a dit» et non pas seulement du «il a fait» quand il s'agit de la création de la lumière. La lumière semble être une créature spirituelle, même s'il n'est pas exclu qu'il s'agisse aussi d'une lumière matérielle.

Ces créatures spirituelles, les anges, sont appelées par l'action du Verbe à la conversion au Créateur, et ainsi elles sont illuminées. Tel serait le sens de la création de la lumière, sagesse crée. La créature même spirituelle, informe en sa première étape, ne reproduit pas encore l'image du Verbe. Mais à partir de cette communication de la lumière se produit sa conversion au Créateur et elle devient un reflet de ce qu'est le Verbe. C'est seulement par cette illumination du Verbe que les créatures angéliques se convertissent en lumière. Si elles se séparent de cette lumière elles sont réduites aux ténèbres. Celles-ci n'ont pas de réalité en elles-mêmes, elles sont l'absence de lumière, alors que c'est la perte du bien qui reçoit le nom de mal. Les anges non seulement sont crées, mais illuminés, pour vivre dans la béatitude. La division de la lumière et des ténèbres de Gn 1,4 crée aussi des difficultés d'interprétation. D'une part il s'agit de démontrer que tout est déjà ordonné et que rien ne reste dans l'informité de Gn 1,2. Mais ce peut être aussi la séparation des anges bons et mauvais. En effet à la différence de ce qui arrivera les autres jours de la création, il est signalé ici que Dieu a vu que la lumière était bonne, avant la séparation d'avec les ténèbres : «Dieu vit que la lumière était bonne et Dieu séparera la lumière et les ténèbres» (Gn 1,4)

Augustin nous le voyons attribue une grande importance à la créature spirituelle dans ses réflexions sur les premiers versets de la Genèse. Non seulement la première dans l'ordre chronologique, mais d'une certaine façon aussi dans l'ordre hiérarchique Il reste malgré tout qu'il s'agit de créatures, qui ne sont pas coéternelles à Dieu.

  • N'est pas non plus coéternelle à toi cette créature dont tu es toi seul la volupté : qui s'abreuve à toi dans la plus constante chasteté et ne répand nulle part ni jamais sa mutabilité; qui, jouissant de ta perpétuelle présence, attachée à toi de tout son amour. [...] contemple tes délices sans qu'aucune défaillance ne la fasse sortir vers autre chose.

Les créatures intellectuelles vivent ainsi dans la contemplation permanente et béatifiante de Dieu; elles constituent l'Église céleste, notre mère, en laquelle, nous aussi, nous nous rassemblerons. Dans ces prémices de la création, on contemple la fin de celle-ci et en particulier celle des hommes.

Augustin n'a pas élaboré une synthèse cohérente de tous les éléments de sa doctrine. Ses interprétations des premiers versets de la Genèse sont des hypothèses qui n'excluent pas d'autres solutions. L'analyse de ses différentes oeuvres montre ses changements d'opinion, et surtout une différence d'accent tout au long de sa vie. Il s'agit d'approximations, qui, malgré tout, laissent entrevoir clairement quelques points clairement établis. Face au dualisme platonicien et manichéen et au monisme de type stoïcien, Augustin insiste sur la différenciation radicale de Dieu et de la créature et sur la bonté de cette dernière; si tout a été crée par Dieu, tout peut participer de sa bonté. Par conséquent le mal ne vient pas du monde matériel mais de la libre volonté de la créature rationnelle. Dieu fait sortir ex nihilo, par sa volonté, la créature différente de lui, sans que cette question implique la mutabilité en lui; et cette dissemblance informe se change en ressemblance par l'action du même Dieu.
  • Sans changer d'aucune façon ou sans qu'il ait surgi une volonté qui n'était pas là auparavant, tu as fait toutes choses; tu les as faites, non pas en tirant de toi ta Ressemblance, forme de toutes les choses, mais en tirant du néant une dissemblance informe qui prendrait forme par ta Ressemblance en revenant vers toi, l'Un, selon la capacité fixée à chaque être, autant qu'il lui serait donné selon son genre : ainsi serait fait les être tous très bons.

Selon la réflexion profonde d'Augustin, la bonté des choses vient de ce que Dieu les voit bonnes. Par conséquent, celui-là voit la bonté des choses qui les voit dans l'Esprit de Dieu :

  • Ainsi, tout ce qu'ils voient dans l'Esprit de Dieu, quand ils voient que c'est bon, ce n'est pas eux mais Dieu qui voit que c'est bon. Par cette Esprit nous voyons que toute chose, qui est d'une façon quelconque, est bonne, puisqu'il est par celui qui n'est pas d'une façon quelconque mais qui est celui qui est.

Source : Luis F. Ladaria, sj (société de Jésus), «La création du ciel et de la terre» dans L'Homme et son salut, Bernard de Sesboüe, dir., Paris, Desclée, 1995, tome II, p.53[/color]

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