Jésus a-t-il toujours eu conscience d'être Dieu ?

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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Raistlin » mer. 02 janv. 2013, 18:42

Aldous a écrit :Dire que Jésus a pris concience peu à peu de sa nature divine n'est pas en contradiction avec le fait qu'il avait cette nature depuis le début.
Je ne vous parle pas seulement de nature, mais aussi de personne. Le Christ est l'union de deux natures dans l'unique personne du Verbe. Par quelle aliénation l'union à la nature humaine pourrait-elle amoindrir le Verbe de Dieu dans la connaissance qu'il a de lui-même ?

Moi je veux bien, mais qu'on m'explique comment cela se peut... Cette vision d'un Jésus ignorant de sa nature divine me semble être le fruit d'un tropisme humano-centré. Car je repose cette question : pourquoi donc ne considérer que l'aspect humain des choses ? On pourrait tout aussi bien imaginer un Jésus bébé se jouant des limites imposées à la nature humaine.

Cordialement,
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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Aldous » mer. 02 janv. 2013, 18:50

Raistlin a écrit :
Aldous a écrit :Pensez-vous que Jésus connaissait sa nature divine à l'age de trois mois, six mois, un an, trois ans, cinq ou sept ans?
Oui, parce qu'il est le Verbe de Dieu. Sa nature humaine, elle, devait suivre le développement normal propre à toute nature humaine. Mais n'oubliez que même à 3 mois, les Christ était aussi vrai Dieu, donc tout-puissant, omniscient, etc. Le Christ n'a pas acquis une meilleure connaissance des pleines potentialités de sa nature divine avec sa croissance humaine.
Justement je le dis plus haut que Jésus est dès le départ de condition divine (donc je ne l'oublie pas). Et j'ajoute que comme nous tous de par sa condition humaine c'est peu à peu qu'il accède à la conscience de ce qu'il est profondément.
Raistlin a écrit :Comprendre le mystère du Christ n'est pas simple, j'en conviens, et sans doute nous ne le pouvons pas vraiment. Mais il ne me semble pas défendable de ramener la conscience du Christ à une simple conscience humaine. Pourquoi donc vouloir tirer la couverture davantage du côté de l'humanité ? On pourrait très bien considérer, comme le font certains apocryphes, que Jésus parlait dès le berceau et faisait des miracles tape-à-l'oeil tout petit, signes qu'il n'était enfant qu'en apparence. La vérité me semble plus équilibrée : oui Jésus a pleinement suivi les étapes normales de développement d'un être humain (son corps a changé, ses facultés humaines se sont développées,etc.), mais pour autant jamais il n'a cessé d'être le Verbe de Dieu et le Verbe de Dieu ne peut ignorer qui il est. D'ailleurs, l'Évangile selon saint Luc nous montre bien Jésus à 12 ans qui enseigne les docteurs et qui parle de son Père.
Je vous fait la même réponse: dire que Jésus a suivi les étapes normales de développement d'un être humain ne fait pas qu'il avait cessé d'être de condition divine (ce que je dis depuis le début: il avait cette condition dès la conception). Mais sa condition humaine fait qu'il ne prend conscience (comme nous tous humain) de son identité profonde que petit à petit.

Ce que j'écris là ne me vient pas de nulle part. C'est ce que soutient Bernard Sesboué, jésuite, théologien fort reconnu dont je lis le livre "Croire - Invitation à la foi catholique pour les femmes et les hommes du XXième siècle") depuis plusieurs semaines...
Raistlin a écrit :
Aldous a écrit :Dire que Jésus a pris concience peu à peu de sa nature divine n'est pas en contradiction avec le fait qu'il avait cette nature depuis le début.
Je ne vous parle pas seulement de nature, mais aussi de personne. Le Christ est l'union de deux natures dans l'unique personne du Verbe. Par quelle aliénation l'union à la nature humaine pourrait-elle amoindrir le Verbe de Dieu dans la connaissance qu'il a de lui-même ?
Le fait que Jésus prend conscience petit à petit de sa condition divine n'amoindrit pas le Verbe de Dieu dans la connaissance qu'il a de lui-même (cette connaissance il l'a juste en temps voulu selon qu'il grandit en sagesse, en taille et en grâce, etc...)

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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Raistlin » mer. 02 janv. 2013, 19:02

Aldous a écrit :Mais sa condition humaine fait qu'il ne prend conscience (comme nous tous humain) de son identité profonde que petit à petit.
Mais je crois qu'il y a profond malentendu sur ce que signifie s'unir à la nature humaine. En quoi le fait d'assumer la nature humaine signifierait que le Verbe de Dieu a été limitée par elle ? Le Verbe de Dieu a-t-il cessé d'être infini et omniscient parce que cela ne convient pas à la condition humaine (quelque soit son stade de développement d'ailleurs) ? Non, je ne crois pas. Alors pourquoi vouloir à tout prix aliéner le Verbe de Dieu dans la connaissance qu'il a de lui-même ?

Je rappelle encore et toujours que la personne de Jésus n'est pas la résultante des natures humaine et divine mises côte-à-côte et forcées de collaborer ensemble. Il est le Verbe de Dieu qui a pris la condition humaine. Mais sans jamais cesser d'être le Verbe de Dieu (comme vous le dites fort justement), ce qui implique nécessairement la connaissance de soi. Car si vous dites que le Verbe de Dieu (Jésus) n'avait pas à un moment donné conscience de qui il était, vous créez une aliénation au sein même de la deuxième personne de la Trinité. Et je ne vois pas comment la justifier.

Aldous a écrit :Ce que j'écris là ne me vient pas de nulle part. C'est ce que soutient Bernard Sesboué, jésuite, théologien fort reconnu dont je lis le livre "Croire - Invitation à la foi catholique pour les femmes et les hommes du XXième siècle") depuis plusieurs semaines...
Fort bien, je m'incline devant un théologien reconnu, peut-être qu'un point méchappe. Mais dans ce cas, pourriez-vous nous donner quelques éléments supplémentaires ? Sur quel raisonnement se base Bernard Sesboué pour affirmer cela. Des textes patristiques ? Du magistère ? Un raisonnement théologique rigoureux ?

Bref, si vous en avez le temps, j'aimerais vraiement que vous développiez ce point car, en l'état, je ne vois pas comment défendre cette position. Et de mon côté, j'irai chercher ce que dit saint Thomas d'Aquin sur la question.

Cordialement,
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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Mac » mer. 02 janv. 2013, 19:16

Bonjour bonne année a tous toutes, :)

Si nous consultons le texte de l'annonciation cette thèse selon laquelle Jésus ne saurait pas qu'Il est Dieu ne tient pas.

« Au sixième mois, l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth, vers une vierge, qui était fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph ; et le nom de la vierge était Marie. »

[...] « L'ange salue la Vierge : " Salut, pleine de grâce ! " [...] " Le Seigneur est avec vous ". »
[...] « L'ange lui dit : " Ne craignez point, Marie, car vous avez trouvé grâce devant Dieu. Voici que vous concevrez, et vous enfanterez un fils, et vous lui donnerez le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il règnera éternellement sur la maison de Jacob, et son règne n'aura point de fin. "
Marie dit à l'ange : " Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais point l'homme? "
L'ange lui répondit : " L'Esprit-Saint viendra sur vous, et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre. C'est pourquoi l'être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu. »

Fraternellement en Jésus Christ. :ciao:

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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Raistlin » mer. 02 janv. 2013, 19:28

Bon, j'ai regardé rapidement ce que dit Saint Thomas d'Aquin (je poursuivrais demain) et il enseigne qu'en Jésus-Christ, il y a bien une science divine et une science crée (humaine), l'une ne niant pas l'autre. Si donc l'enfant Jésus a grandi en intelligence et en sagesse humaines, il n'en est pas moins vrai que dès le début, il disposait de la science du Verbe de Dieu.

En fait, en Jésus, il y a deux opérations, divine et humaine. L'opération divine en Jésus n'a jamais cessé sous prétexte que l'opération humaine ne pouvait la recevoir. D'ailleurs, elle ne peut jamais : aucun être humain ne peut recevoir pleinement la lumière de Dieu. Si donc vous dites que Jésus était aliéné dans la connaissance qu'il avait de lui-même par sa nature humaine, il faut affirmer que ce fut le cas tout le temps, même une fois devenu adulte, car vous donnez la primauté à l'opération humaine sur l'opération divine, et jamais la nature humaine ne pourra pleinement "intégrer" la nature divine.

Cordialement,
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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Aldous » mer. 02 janv. 2013, 19:37

Raistlin a écrit :Bon, j'ai regardé rapidement ce que dit Saint Thomas d'Aquin (je poursuivrais demain) et il enseigne qu'en Jésus-Christ, il y a bien une science divine et une science crée (humaine), l'une ne niant pas l'autre. Si donc l'enfant Jésus a grandi en intelligence et en sagesse humaines, il n'en est pas moins vrai que dès le début, il disposait de la science du Verbe de Dieu.
Vous aussi vous disposez dès le début de ce que vous êtes , ce n'est pas pour cela que vous en aviez conscience à 3 ou 4 ans.
Raistlin a écrit :En fait, en Jésus, il y a deux opérations, divine et humaine. L'opération divine en Jésus n'a jamais cessé sous prétexte que l'opération humaine ne pouvait la recevoir. D'ailleurs, elle ne peut jamais : aucun être humain ne peut recevoir pleinement la lumière de Dieu. Si donc vous dites que Jésus était aliéné dans la connaissance qu'il avait de lui-même par sa nature humaine, il faut affirmer que ce fut le cas tout le temps, même une fois devenu adulte, car vous donnez la primauté à l'opération humaine sur l'opération divine, et jamais la nature humaine ne pourra pleinement "intégrer" la nature divine.
Je ne vois pas en quoi ce que j'affirme de la conscience de Jésus tout enfant devrait s'appliquer à sa conscience adulte...
Et je ne dis nulle part que l'opération divine cesse parce l'opération humaine ne peut la recevoir. Je dis que l'opération divine est là depuis le début (elle ne cesse donc pas) mais que l'opération humaine fait que la conscience de l'opération divine vient petit à petit.

Si quelqu'un nait avec des dispositions d'intelligence ou artistique , il n'en a pas conscience avant longtemps pourtant ces dispositions d'intelligence ou de talent artistique sont bien là depuis le début. Le fait de ne pas en avoir conscience dans un premier temps n'aliène pas ces dispositions.

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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par spk » jeu. 03 janv. 2013, 12:18

Ce qui me semble intéressant, c'est de savoir précisément ce qu'enseigne la théologie catholique à ce sujet, et c'est d'ailleurs ce qui vous a poussé l'un et l'autre à chercher des références, ce qui me semble une bonne méthode. Deux points sont acquis:
1) Jésus est pleinement homme. Il n'est pas un Dieu ayant pris l'apparence humaine, comme dans certains contes orientaux, mais il est homme comme vous et moi (semblable en tout à nous, sauf le péché). Il s'ensuit qu'il a nécessairement appris ce qu'un homme apprend, il a par exemple dû apprendre à lire. Et donc, il a eu un âge où il ne savait pas parler.
2) Jésus est pleinement Dieu. La divinité n'est pas une récompense qu'il aurait reçue par ses mérites, ni le résultat d'une initiation ou d'une illumination qui serait survenue peu avant sa vie publique. Le bébé Jésus est Dieu, même s'il pleure et réclame sa mère comme tous les enfants de cet âge.
Il s'ensuit que tout ce que dit Aldous, jusqu'à preuve du contraire, me paraît totalement conforme à ce qu'enseigne l'Eglise. Evidemment, cet enseignement est bien mystérieux. L'image que propose Aldous pour aider à comprendre ce mystère me paraît très bien choisie. Le génie est parfois inné, mais il ne se révèle qu'après un apprentissage. On peut aussi évoquer le sentiment qu'ont éprouvé beaucoup d'amoureux, d'avoir aimé leur conjoint avant même de l'avoir rencontré. Ainsi faudrait-il penser que Jésus avant même de savoir parler, et sans doute du fait de son impeccabilité, avait une certaine conscience de sa divinité, mais d'une façon évidemment ineffable.
Louis Bouyer, dans son dictionnaire de théologie, précise bien que Jésus n'était pas omniscient, sauf en ce qui est relatif au salut. Quelqu'un a-t-il d'autres sources?

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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Raistlin » jeu. 03 janv. 2013, 12:24

Aldous a écrit :Vous aussi vous disposez dès le début de ce que vous êtes , ce n'est pas pour cela que vous en aviez conscience à 3 ou 4 ans.
Ben non, je ne dispose pas de la conscience de moi dès le départ, je ne dispose pas de mon intelligence en étant nourrisson, etc. En gros, je suis en puissance ce que je serai plus tard en acte.

Aldous a écrit :Je ne vois pas en quoi ce que j'affirme de la conscience de Jésus tout enfant devrait s'appliquer à sa conscience adulte...
Dans ce cas, je vous réexplique : si vous dites que la science du Verbe de Dieu est limitée par ses facultés humaines, cela signifie que c'était aussi le cas pour Jésus adulte. Or bien que les facultés humaines furent, comme le dit saint Thomas d'Aquin, à leur plein accomplissement en Jésus, elles restent des facultés crées et donc incapables de saisir la lumière incréée du Verbe de Dieu. Donc dans tous les cas, Jésus est amputé dans sa divinité puisque celle-ci ne peut, selon vous, que s'exprimer à travers ses facultés humaines limitées. En gros, si je suis votre raisonnement, Jésus ne comprenait pas mieux qui il était que les théologiens les plus compétents, car il restait limité par ses facultés humaines.

La question me semble donc plus complexe. Jésus, même tout petit bébé, n’a jamais cessé d’être la personne du Verbe de Dieu, infinie, omnisciente, toute-puissante, unie au Père, etc. Jamais donc le Verbe de Dieu n’a pu perdre conscience de qui il était, et il ne convient pas de dire que l’Incarnation a changé quelque chose à cela. En revanche, comme il convenait qu’il respectât les étapes de la croissance humaine, il est vrai de dire que les facultés liées à la nature humaine ont grandi en Jésus. D’où la nécessité de distinguer deux opérations en Jésus, une divine et une humaine.

Aldous a écrit :Et je ne dis nulle part que l'opération divine cesse parce l'opération humaine ne peut la recevoir. Je dis que l'opération divine est là depuis le début (elle ne cesse donc pas) mais que l'opération humaine fait que la conscience de l'opération divine vient petit à petit.
Je vous propose alors plutôt la formulation suivante (sans savoir si elle est exacte) : les facultés humaines de Jésus ont eu la science de qui il était selon leur stade de développement. Mais il me semble important de ne pas dire simplement que Jésus n’a pas toujours eu conscience de qui il était car c’est incomplet. L’homme Jésus n’a pas toujours eu conscience de qui il était (et peut-être était-ce ce que voulait dire Sesboué) mais Jésus en tant que Verbe de Dieu a toujours eu parfaitement conscience de sa condition. La difficulté vient du fait qu’on ne peut penser Jésus simplement selon l’aspect humain des choses.

Cordialement,
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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Mac » jeu. 03 janv. 2013, 17:32

Bonjour, :)

Pour compléter les réflexions intéressantes nous pouvons nous arrêter sur la réponse de Jésus à Sa Sainte Mère : "Ne saviez-vous pas que je dois être aux affaires de mon père"?

Une chose est sûre dès lors, c'est qu'à douze ans Jésus avait pleinement conscience qu'Il était le fils de Dieu.

Fraternellement en Jésus Christ. :ciao:

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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Aldous » ven. 04 janv. 2013, 9:31

Raistlin a écrit :
Aldous a écrit :Vous aussi vous disposez dès le début de ce que vous êtes , ce n'est pas pour cela que vous en aviez conscience à 3 ou 4 ans.
Ben non, je ne dispose pas de la conscience de moi dès le départ, je ne dispose pas de mon intelligence en étant nourrisson, etc. En gros, je suis en puissance ce que je serai plus tard en acte.
Bonjour,
Je n'ai pas dit que vous disposiez de la conscience de vous dès le départ. J'ai dit que vous disposiez dès le départ de ce que vous êtes, et non de la conscience de ce que vous êtes.
Ainsi par exemple vous disposez dès le départ de votre nature humaine, ce n'est pas pour cela que vous en aviez conscience à 3 ou 4 ans.

Raistlin a écrit :
Aldous a écrit :Je ne vois pas en quoi ce que j'affirme de la conscience de Jésus tout enfant devrait s'appliquer à sa conscience adulte...
Dans ce cas, je vous réexplique : si vous dites que la science du Verbe de Dieu est limitée par ses facultés humaines, cela signifie que c'était aussi le cas pour Jésus adulte.
(Quand je dis je ne vois pas en quoi etc... cela ne signifie pas que je n'ai pas compris votre première explication mais que je ne suis pas d'accord avec...)

Je n'ai dit nulle part que la science du Verbe est limité pas ses facultés humaines, j'ai dit que Jésus va en prendre conscience petit à petit.
Voilà ce que dit Bernard Sesboué à ce propos dans le livre que je vous ai cité:

Chacun d'entre nous a un long chemin à parcourir pour se rejoindre lui-même à travers toute sa croissance et tous les évènements de son existence. Au départ de notre vie, nous sommes donnés à nous-mêmes sous la forme d'avoir à nous construire. Le bébé dans son berceau, qui ne parle pas encore, n'a aucune conscience réfléchie de sa propre identité. Pourtant il a déjà une première conscience de lui-même. Il sait inconsciemment qu'il est déjà le regard d'un JE. Dans sa manière de sourire, de pleurer ou d'exiger, un embryon de personnalité s'affirme, que sa mère discerne rapidement.
...
Plus il grandira, plus il sera explicitement conscient de lui-même et des autres. A partir de ses expériences d'homme, il se rejoindra vraiment comme un homme et vivra tous les aspects de la condition humaine. C'est cela être un homme.
Il en est allé de même pour Jésus, mais avec une différence radicale. Jésus a eu à rejoindre son identité profonde d'homme comme chacun d'entre nous. Mais ce qu'il rejoignait progressivement au cours des années, c'était l'identité de cet homme qui au regard de Dieu, est le Fils. Il n'a pas connu d'instant décisif, au cours duquel il aurait réalisé comme une nouveauté qu'il était le Fils de Dieu. Mais depuis toujours, il était habité par cette relation filiale qui se concrétisera à mesure qu'il lira les Psaumes, recevra son éducation religieuse et se livrera à la prière.

Raistlin a écrit :
Aldous a écrit :Et je ne dis nulle part que l'opération divine cesse parce l'opération humaine ne peut la recevoir. Je dis que l'opération divine est là depuis le début (elle ne cesse donc pas) mais que l'opération humaine fait que la conscience de l'opération divine vient petit à petit.
Je vous propose alors plutôt la formulation suivante (sans savoir si elle est exacte) : les facultés humaines de Jésus ont eu la science de qui il était selon leur stade de développement. Mais il me semble important de ne pas dire simplement que Jésus n’a pas toujours eu conscience de qui il était car c’est incomplet. L’homme Jésus n’a pas toujours eu conscience de qui il était (et peut-être était-ce ce que voulait dire Sesboué) mais Jésus en tant que Verbe de Dieu a toujours eu parfaitement conscience de sa condition. La difficulté vient du fait qu’on ne peut penser Jésus simplement selon l’aspect humain des choses.
Ma formulation ne pense pas simplement Jésus selon l'aspect humain des choses puisque je vous ai dit (et répété) que dès le départ sa condition divine est là.

(Note à spk à qui je dis que son post ne m'a pas échappé... :cool: )

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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par taliesin » ven. 04 janv. 2013, 11:05

Je pense pour ma part que Jésus a su très tôt - si pas dès sa "conception" - ce qu'il en était; en revanche on est en droit de penser qu'il ait pu éprouver par moments quelques doutes, notamment lorsqu'il a été tenté dans le désert, et sur la croix, probablement...
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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Raistlin » ven. 04 janv. 2013, 11:22

Aldous a écrit :Je n'ai dit nulle part que la science du Verbe est limité pas ses facultés humaines, j'ai dit que Jésus va en prendre conscience petit à petit.
Mais si vous le dites puisque vous partez du principe que Jésus prend peu à peu conscience de qui il est selon son développement humain. Car, je vous le répète, Jésus est la 2ème personne de la Trinité qui s’est unie à la nature humaine. Donc dire simplement que Jésus a pris conscience petit à petit de qui il était, c’est dire que le Verbe de Dieu a pris conscience petit à petit de qui il était. C’est absurde.

Voilà pourquoi je propose de préciser, à la suite de saint Thomas d’Aquin, que les facultés humaines de Jésus ont peu à peu saisi ce qu’elles pouvaient de la lumière du Verbe, selon leurs capacités. Mais comme je le disais également dans un message précédent, si vous limitez la conscience de Jésus à ce que ses facultés humaines peuvent en saisir, même Jésus adulte ne sera jamais pleinement conscient de qui il est puisque jamais une conscience créée ne pourra saisir l’incréé.

Saint Thomas d’Aquin a donc raison : il faut distinguer les choses.

Aldous a écrit : Chacun d'entre nous a un long chemin à parcourir pour se rejoindre lui-même à travers toute sa croissance et tous les évènements de son existence. Au départ de notre vie, nous sommes donnés à nous-mêmes sous la forme d'avoir à nous construire. Le bébé dans son berceau, qui ne parle pas encore, n'a aucune conscience réfléchie de sa propre identité. Pourtant il a déjà une première conscience de lui-même. Il sait inconsciemment qu'il est déjà le regard d'un JE. Dans sa manière de sourire, de pleurer ou d'exiger, un embryon de personnalité s'affirme, que sa mère discerne rapidement.
...
Plus il grandira, plus il sera explicitement conscient de lui-même et des autres. A partir de ses expériences d'homme, il se rejoindra vraiment comme un homme et vivra tous les aspects de la condition humaine. C'est cela être un homme.
Il en est allé de même pour Jésus, mais avec une différence radicale. Jésus a eu à rejoindre son identité profonde d'homme comme chacun d'entre nous. Mais ce qu'il rejoignait progressivement au cours des années, c'était l'identité de cet homme qui au regard de Dieu, est le Fils. Il n'a pas connu d'instant décisif, au cours duquel il aurait réalisé comme une nouveauté qu'il était le Fils de Dieu. Mais depuis toujours, il était habité par cette relation filiale qui se concrétisera à mesure qu'il lira les Psaumes, recevra son éducation religieuse et se livrera à la prière.
Mais ce que dit Bernard Sesboué est tout à fait juste… en ce qui concerne les facultés humaines de Jésus. L’erreur est de réduire la personne du Christ aux seules opérations de sa nature humaine, et de faire dépendre la conscience qu’il a de lui-même au développement de son intelligence créée.

Encore une fois Aldous, si vous subordonnez la personne du Christ à ses facultés humaines, vous êtes dans l’impasse car jamais des facultés créées ne pourrons saisir pleinement l’incréé donc, dans votre approche, jamais Jésus n’a jamais pu comprendre pleinement ce qu’il était.
Voilà pourquoi je propose de changer de formulation en disant que l’intelligence humaine de Jésus a peu à peu compris qui il était. Mais Jésus en tant que Verbe de Dieu a toujours eu conscience de sa condition, même lorsqu’il était couché dans la mangeoire.

La question n’est pas simple car l’union hypostatique reste un mystère pour nous. Comment concevoir deux types d’opérations - divines et humaines - dans une même personne ? Difficile à concevoir…

Cordialement,
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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par elenos » ven. 04 janv. 2013, 12:12

Relire TOUTES les réponses de Raitslin

TOUTES
Je ne vais pas vous les recopier (sauf pour moi !)

Je les considère comme un modèle d'intelligence chrétienne.
(je n'ose pas dire qu'elles sont "inspirées" mais elles forment le résultat d'un vraie méditation chrétienne sans doute celle d'une vie.

Très beau dialogue avec Aldous que je remercie aussi de tout coeur.

Merci à plusieurs chrétiens qui ont mis ici toute leur conscience dans ce sujet difficile.

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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Aldous » ven. 04 janv. 2013, 15:03

Raistlin a écrit :
Aldous a écrit :Je n'ai dit nulle part que la science du Verbe est limité pas ses facultés humaines, j'ai dit que Jésus va en prendre conscience petit à petit.
Mais si vous le dites puisque vous partez du principe que Jésus prend peu à peu conscience de qui il est selon son développement humain.
(Vous voulez à tout prix me faire dire ce que je ne dis pas et ce depuis le début!)
Or je ne le dis pas car partir du principe (qui est aussi le principe de Bernard Sesboué au passage) que Jésus prend peu à peu conscience de qui il est selon son développement humain ne limite nullement sa condition divine.
C'est vous qui depuis le début voulez à tout prix que je pense cela mais ce n'est pas du tout le cas (je vous l'ai dit en long et en large).
Raistlin a écrit : Car, je vous le répète, Jésus est la 2ème personne de la Trinité qui s’est unie à la nature humaine. Donc dire simplement que Jésus a pris conscience petit à petit de qui il était, c’est dire que le Verbe de Dieu a pris conscience petit à petit de qui il était. C’est absurde.
Je vous répète que je n'ai jamais dit cela simplement, puisque je dis depuis le début du fil que sa condition divine est là depuis sa conception!
C'est vous qui voulez à tout prix que dire que Jésus prend conscience peu à peu de ce qu'il est signifie que c'est sa condition divine qui prend conscience de cela peu à peu, mais je n'ai jamais dit une telle chose! (puisque je dis que sa condition divine est là depuis sa conception!)

Relisez ce que dit B. Sesboué:
Jésus a eu à rejoindre son identité profonde d'homme comme chacun d'entre nous. Mais ce qu'il rejoignait progressivement au cours des années, c'était l'identité de cet homme qui au regard de Dieu, est le Fils. Il n'a pas connu d'instant décisif, au cours duquel il aurait réalisé comme une nouveauté qu'il était le Fils de Dieu. Mais depuis toujours, il était habité par cette relation filiale qui se concrétisera à mesure qu'il lira les Psaumes, recevra son éducation religieuse et se livrera à la prière
Raistlin a écrit :
Aldous a écrit : Chacun d'entre nous a un long chemin à parcourir pour se rejoindre lui-même à travers toute sa croissance et tous les évènements de son existence. Au départ de notre vie, nous sommes donnés à nous-mêmes sous la forme d'avoir à nous construire. Le bébé dans son berceau, qui ne parle pas encore, n'a aucune conscience réfléchie de sa propre identité. Pourtant il a déjà une première conscience de lui-même. Il sait inconsciemment qu'il est déjà le regard d'un JE. Dans sa manière de sourire, de pleurer ou d'exiger, un embryon de personnalité s'affirme, que sa mère discerne rapidement.
...
Plus il grandira, plus il sera explicitement conscient de lui-même et des autres. A partir de ses expériences d'homme, il se rejoindra vraiment comme un homme et vivra tous les aspects de la condition humaine. C'est cela être un homme.
Il en est allé de même pour Jésus, mais avec une différence radicale. Jésus a eu à rejoindre son identité profonde d'homme comme chacun d'entre nous. Mais ce qu'il rejoignait progressivement au cours des années, c'était l'identité de cet homme qui au regard de Dieu, est le Fils. Il n'a pas connu d'instant décisif, au cours duquel il aurait réalisé comme une nouveauté qu'il était le Fils de Dieu. Mais depuis toujours, il était habité par cette relation filiale qui se concrétisera à mesure qu'il lira les Psaumes, recevra son éducation religieuse et se livrera à la prière.
Mais ce que dit Bernard Sesboué est tout à fait juste… en ce qui concerne les facultés humaines de Jésus. L’erreur est de réduire la personne du Christ aux seules opérations de sa nature humaine, et de faire dépendre la conscience qu’il a de lui-même au développement de son intelligence créée.
Mais je vous le dis encore une fois: je ne réduis pas la personne du Christ aux seules opérations de sa nature humaine.
Quant à faire dépendre la conscience qu’il a de lui-même au développement de son intelligence créée vous voyez bien que c'est la position de Bernard Sesboué dans ce que j'ai souligné ci-dessus.
Jésus a eu à rejoindre son identité profonde d'homme comme chacun d'entre nous. Mais ce qu'il rejoignait progressivement au cours des années, c'était l'identité de cet homme qui au regard de Dieu, est le Fils. Il n'a pas connu d'instant décisif, au cours duquel il aurait réalisé comme une nouveauté qu'il était le Fils de Dieu. Mais depuis toujours, il était habité par cette relation filiale qui se concrétisera à mesure qu'il lira les Psaumes, recevra son éducation religieuse et se livrera à la prière

Raistlin a écrit :Encore une fois Aldous, si vous subordonnez la personne du Christ à ses facultés humaines, vous êtes dans l’impasse car jamais des facultés créées ne pourrons saisir pleinement l’incréé donc, dans votre approche, jamais Jésus n’a jamais pu comprendre pleinement ce qu’il était.
Mais je ne subordonne pas la personne du Christ à ses facultés humaines, c'est vous qui voulez à tout prix que cela soit ma position or je le répète encore il n'y a aucune subordination de la condition divine de Jésus à sa condition humaine dans ce que je dis et ce que dit B. Sesboué.
Que Jésus prenne conscience peu à peu de qui il est (comme le dit aussi B. Sesboué) ne subordonne nullement sa condition divine à sa condition humaine.
Raistlin a écrit :Voilà pourquoi je propose de changer de formulation en disant que l’intelligence humaine de Jésus a peu à peu compris qui il était.
Vous êtes terrible! c'est ce que je dis depuis le début!!
Raistlin a écrit :Mais Jésus en tant que Verbe de Dieu a toujours eu conscience de sa condition, même lorsqu’il était couché dans la mangeoire.
Je n'ai jamais dit le contraire puisque je dis depuis le début que la condition divine de Jésus est là depuis le départ, depuis sa conception ai-je même dit!

Théophile
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Re: Jésus aurait découvert peu à peu sa divinité (pas glop)

Message non lu par Théophile » sam. 05 janv. 2013, 1:53

Olalà ! Moi qui pensait que la question avait été tranchée depuis belles lurettes, comme on coupe un ennemi avec un sabre Jedi !

J'ai bien pris le temps de décortiquer tout ce fil, puis je me suis rappelé que j'ai un gros pavé de l'abbé Descouvremont, intitulé "guide des difficultés de la foi catholique". Merci à tous les intervenants, pour vos points de vue pertinents.

Pour ma part, j'aimerai vous proposer un résumé du chapitre intitulé "la conscience du Christ" dudit abbé, qui permet d'avoir un regard historique sur la question.
[+] Texte masqué
"1. La naissance de la question
C'est au début du VIe siècle que le problème commence à se poser, à partir des affirmations énoncées par le Concile de Chalcédoine (451). Puisque'il faut distinguer dans le Christ sa divinité et son humanité, il faut distinguer la connaissance qu'Il en avait en temps que Dieu et la connaissance qu'il en avait en temps qu'homme. Sa conscience humaine avait-elle une conscience plénière de sa divinité?"
Réponse de l'évêque Fulgence en 500 : "l'intelligence humaine de Jésus, connait pleinement sa divinité, mais non d'une plénitude identique à celle dont Dieu se connaît lui-même. Cette connaissance lui est communiquée par l'Esprit-Saint que le Père lui donne sans mesure".
Cette phrase de "Fulgence eut une grande influence chez les latins postérieurs.

2. Les trois niveaux de la conscience du Christ
"Les théologiens du Moyen-Age, et les théologiens modernes essaient, quant à eux, de répondre à une question que les Pères avaient laissée sans solution : COMMMENT la science divine du Verbe passe-t-elle dans l'intelligence humaine du Christ ? Ce n'est pas une question oiseuse ! C'est une façon de tirer toutes les conséquences du Concile de Chalcédoine : Comment l'intelligence humaine du Christ a-t-elle pu savoir qu'elle était intimement unie au Verbe même de Dieu, qu'elle était l'intelligence humaine du Fils unique ?
Pour répondre à la question, la plupart des théologiens distinguent trois niveaux dans la connaissance humaine de Jésus :

a. La connaissance acquise que possède tout homme - une connaissance capable de s'enrichir au contact de la réalité.(...) (Jésus) s'étonnera de l'incrédulité des gens de Nazareth (Mc 6,6). L'étonnement suppose la découverte d'une réalité à laquelle on ne s'attend pas.

b. La science infuse, du type de celle des prophètes transmettant aux hommes la révélation divine. (...) C'est de cette façon que Jésus pouvait recevoir de son Père les lumières dont il avait besoin pour l'accomplissement de sa mission. Des lumières que son Père lui envoyait jour après jour comme un pain quotidien." Exemple : "C'est par cette science infuse que Jésus a pu apprendre en temps voulu que Pierre le renierait et que Judas le trahirait. Il est très important pour l'économie du Salut que le Christ n'ait pas prévu ce reniement ni cette trahison grâce à la simple connaissance qu'il avait de la psychologie des ses apôtres. En pareil cas, la conduite de ces deux hommes n'aurait pas été une démarche libre; elle aurait été la simple conséquence prévisible de leurs antécédents psychologiques.

c. La vision béatifique, la vision de son Père face à face. Comment expliquer autrement le mot de l'Evangile : "Dieu, personne ne l'a jamais vu; Dieu, le Fils unique qui est dans le sein du Père, Lui, L'a raconté" (Jn 1, 18) ? La plupart des théologiens thomistes pensent que c'est par sa science de vision que Jésus savait avec évidence qu'Il était le Fils bien-aimé du Père. (...)
Mais, remarque avec justesse Jacques Maritain, cette évidence était incommunicable, car "supraconsciente". Seule, la science infuse en permettrait la formulation et la communication.
Que Jésus ait connu dès le début de sa vie qui Il était et de quel Amour Il était l'objet ne signifie pas qu'Il ait échappé à la condition humaine ni qu'Il n'ait pas vraiment souffert. C'est seulement au fond de lui-même qu'Il connaissait une paix merveilleuse. (...)
Au XXième siècle, grand chamboulement. "Le Christ n'a pris que progressivement conscience de son identité ou même qu'Il n'a jamais su avant sa résurrection qu'Il était le Fils unique du Père." (ibid.).

Réponse de Rome, par le biais de la Commission théologique internationale, en 1985, dont faisais partie ... Sesboüé !!! : la conscience que Jésus avait de lui-même et de sa mission : cette question est difficile et on n'a pas le temps d'en faire une synthèse en tenant compte des trouvailles des théologiens et philosophes du XXième siècle.

On se bornera à "quatre grandes affirmations sur ce dont Jésus avait conscience concernant sa propre personne et sa mission. Les quatre propositions qui suivent se situent au plan de ce que la foi a toujours cru au sujet du Christ. Délibérément, elles n’entrent pas dans les élaborations théologiques qui tâchent de rendre compte de cette donnée de foi. Il n’y sera donc pas question des tentatives de formuler théologiquement comment cette conscience a pu s’articuler dans l’humanité du Christ."

Première proposition : "La vie de Jésus témoigne de la conscience de sa relation filiale au Père."
Deuxième proposition : "Jésus connaissait le but de sa mission : annoncer le Règne de Dieu et le rendre déjà présent dans sa personne, ses actes et ses paroles, afin que le monde soit réconcilié avec Dieu et renouvelé."
[+] Texte masqué
Commentaires de la Commission :
a. "La conscience que Jésus possède de sa relation filiale singulière à « son Père » est le fondement et le présupposé de sa mission. Inversement, on peut en inférer de sa mission à sa conscience." En d'autres termes : "La conscience qu’a Jésus de lui-même coïncide avec la conscience de sa mission."
b. Cela va beaucoup plus loin que la conscience d’une mission prophétique, reçue à un moment donné, serait-ce « dès le sein de sa mère » (Comme pour Jean-Baptiste, ou le prophète Jérémie). Cette mission s’enracine bien plutôt dans une « sortie » originaire de Dieu ce qui présuppose, comme condition de possibilité, qu’il ait été « dès l’origine » avec Dieu.
c. La conscience que Jésus a de sa mission implique donc la conscience de sa « préexistence ». En effet, la mission en est le « prolongement ». La conscience humaine de sa mission « traduit » pour ainsi dire, dans le langage d’une vie humaine, l’éternelle relation au Père.
d. Cette relation du Fils incarné au Père suppose en premier lieu la médiation de l’Esprit Saint. L’Esprit doit donc être dans la conscience de Jésus en tant que Fils.
Déjà sa pure existence humaine est le résultat d’une action de l’Esprit; depuis le baptême de Jésus toute son œuvre — qu’elle soit action ou passion parmi les hommes, ou communion de prière vers le Père — ne se réalise que dans et par l’Esprit."
Je trouve que ce texte n'est pas aisé à comprendre. D'ailleurs il ne parle pas de l'enfance de Jésus de manière claire.

En outre le Père Descouvrement ne cite que la première proposition. Pour revenir à ce prêtre : "Nous pensons aussi et surtout, avec le père Balthasar, que Jésus connaissait dès sa toute petite enfance, tout au fond de son coeur, son identité divine. Il ne l'a pas appris progressivement, par apprentissage : qui aurait pu lui apprendre ? Il l'a su immédiatement, en vivant dans sa conscience ce qui constituait l'essence même de sa Personne divine : sa relation et son union intime avec le Père. Sinon, remarque le Père Balthasar (...) " à l'instant où sa vie psychique aurait perçu sa personnalité divine, il n'y aurait pas eu seulement une évolution ascendante, mais une rupture dans sa conscience.

Le Christ, continue le théologien, a une "vision immédiate" de la mission définitive et universelle dont il est investi."

Pour terminer cette recherche, le Vatican n'a pas tranché, mais plutôt indiqué de grandes balises sans utiliser un attirail philosophico-théologique. De mon côté, je penche plutôt pour l'hypothèse de Balthasar.

Le dernier mot est à Descouvremont : "Mystère qui nous donne évidemment le vertige, mais qui suscite aussi notre adoration et notre jubilation."

@ Aldous.
Pourquoi j'ai dis que ça ne tenait pas debout ? Parce qu'en écoutant le prêtre, j'ai trouvé que son hypothèse diminuait la divinité et l'humanité de Jésus, car être conscient d'être le Fils de Dieu, seulement vers 12 ans, c'était un peu tard. Entre 18 et 24 mois, un enfant est capable de se reconnaître dans un miroir, alors qu'avant il pensait que c'était un autre enfant qu'il avait devant lui. Un prêtre raconte souvent l'histoire véridique d'un enfant de 2 ans et demi qui volontairement n'a pas voulu aimer ses parents. Il avait posé à ce moment un acte libre de volonté. Il relate aussi le refus catégorique d'un enfant de 5 ans à vouloir adorer avec ses parents. Il vécu un combat spirituel pendant une semaine, puis choisi de se donner à Jésus. Il est actuellement prêtre.
Ainsi, cette hypothèse sous-estime aussi la grandeur de l'homme, me semble-t-il. Mais on est d'accord que la grâce présuppose la nature, Aldous.

Cordialement, Théophile (désolé du pavé :-))

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