La Cène et le sacrifice eucharistique

« Assurément, il est grand le mystère de notre religion : c'est le Christ ! » (1Tm 3.16)
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Boris
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Message non lu par Boris » mer. 15 nov. 2006, 8:51

Jésus à dit je suis la Pierre d'angle que les bâtisseurs ont rejetté, il a aussi dit (et l'Ancien Testament parle de lui dans ce sens) qu'il est le sacrifice parfait et ultime. Tout cela amène à l'Autel qui symbolise le Christ lui-même et en même temps la table du sacrifice.

A ce sujet, je vous recommande la lecture du Père Louis Bouyer, parmis les plus grand théologien du XXe siècle.

Mais je vois poindre au loin votre argument suivant : l'Eucharistie est un repas. Il n'y a rien de plus faux !
La Cène en elle-même est effectivement le repas pascal de la tradition Juive. Mais cette première Cène n'était pas l'Eucharistie : Jésus n'était pas encore mort et ressucité. Ce n'est qu'après sa résurection que la Cène devient l'Eucharistie, mémoriale de la mort et de la Résurection du Christ, mémorial du sacrifice parfait refait sur l'ordre du Christ : "faites cela en mémoire de moi".


Mais pour revenir au "quand 2 ou 3 sont réunis ...", cela ne contredit pas la présence sur l'Autel. Cela renforce le coté écclésiale et ce que dit St Paul sur le corps mystique duChrist qu'est l'Eglise. Ainsi quand la communauté paroissiale est réunie pour célébrer la Messe, elle se trouve assemblée au nom de Jésus Christ. Donc il est présent au milieu d'elle, et d'autant plus présent qu'il se rend présent sur l'Autel.
UdP,
Boris

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Message non lu par el Padrecito » dim. 26 nov. 2006, 18:09

A Boris,

Désolé de vous contredire, mais vous avez dit une bêtise sur un point assez important.

Vous dites: "Mais je vois poindre au loin votre argument suivant : l'Eucharistie est un repas. Il n'y a rien de plus faux !
La Cène en elle-même est effectivement le repas pascal de la tradition Juive. Mais cette première Cène n'était pas l'Eucharistie : Jésus n'était pas encore mort et ressucité. Ce n'est qu'après sa résurection que la Cène devient l'Eucharistie, mémoriale de la mort et de la Résurection du Christ, mémorial du sacrifice parfait refait sur l'ordre du Christ : "faites cela en mémoire de moi".

Je ne puis être d'accord avec cette formulation! La Cène est bien la première Eucharistie! Le Christ offre à ses disciples Son Corps et Son Sang qu'Il va donner pour nous racheter du péché à partir de cet instant même où commence Son Agonie et Sa Passion.

Soutenir l'inverse serait contraire à la théologie catholique, je doute que cela soit votre intention.

In Christo.

Quentin.

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Message non lu par el Padrecito » dim. 26 nov. 2006, 18:18

A tous et toutes,

Je vous dirai que le problème de la Messe Tridentine se poserait beaucoup moins si, l'après-Concile n'avait pas été une période fast en désacralisation et autres abus liturgques et pastoraux.
Combien pourrez faire la différence entre la Messe Tridentine et la Messe dite de Paul VI en latin, dos au peuple?
Pas des foules immenses!

La première chose à faire est de rétablir de belles et nobles liturgies dansns paroisses et partout aileurs, tout le reste suivra!
Comment vivre l'Unité, si chacun se fait sa propre liturgie? Qu'on ne me dise pas qu'unité n'est pas unicité, cet argument est nul, pour vivre dans l'Unité, il faut tout de même une certaine unicité, unicité demandée par Dieu Lui-même, carnous ne faisons pas la Liturgie, mais nous la recevons de Dieu et de Son Eglise.

Quant au projet de libéralisation, je ne vous cacherai pas que si je suis ordonné prêtre je ne serai pas contre de célébrer la Messe tridentine de temps à autre.

In Pace.

Quentin.

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Message non lu par Boris » dim. 26 nov. 2006, 21:10

el Padrecito a écrit :A Boris,

Désolé de vous contredire, mais vous avez dit une bêtise sur un point assez important.

Vous dites: "Mais je vois poindre au loin votre argument suivant : l'Eucharistie est un repas. Il n'y a rien de plus faux !
La Cène en elle-même est effectivement le repas pascal de la tradition Juive. Mais cette première Cène n'était pas l'Eucharistie : Jésus n'était pas encore mort et ressucité. Ce n'est qu'après sa résurection que la Cène devient l'Eucharistie, mémoriale de la mort et de la Résurection du Christ, mémorial du sacrifice parfait refait sur l'ordre du Christ : "faites cela en mémoire de moi".

Je ne puis être d'accord avec cette formulation! La Cène est bien la première Eucharistie! Le Christ offre à ses disciples Son Corps et Son Sang qu'Il va donner pour nous racheter du péché à partir de cet instant même où commence Son Agonie et Sa Passion.

Soutenir l'inverse serait contraire à la théologie catholique, je doute que cela soit votre intention.

In Christo.

Quentin.
Lisez ou relisez SE le Cardinal Ratzinger (devenu Benoît XVI) in "L'esprit de la Liturgie".
La cène nepeut aucunement être la première eucharistie car le christ n'a pas encore offert le Sacrifice parfait. C'est une question de chronologie.

Mais encore une fois, ce n'est pas moi ui le dit mais l'actuel Pape. Si vous êtes en désaccord avec le Pape, ...
UdP,
Boris

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Message non lu par el Padrecito » lun. 27 nov. 2006, 20:45

Cher Boris,

Veuillez lire ceci:

"Notre Sauveur, à la dernière Cène, la nuit où il était livré, institua le sacrifice eucharistique de son Corps et de son Sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long des siècles, jusqu'à ce qu'il vienne, et pour confier à l'Eglise, son Epouse bien-aimée, le mémorial de sa mort et de sa résurrection: sacrement de l'amour, signe de l'unité, lien de la charité, banquet pascal dans lequel le Christ est reçu en nourriture, l'âme est comblée de grâce et le gage de la gloire future nous est donné" (Sacrosanctum Concilium 47).

CEC 1337-1340

1337 Le Seigneur, ayant aimé les siens, les aima jusqu'à la fin. Sachant que l'heure était venue de partir de ce monde pour retourner à son Père, au cours d'un repas, il leur lava les pieds et leur donna le commandement de l'amour (cf. Jn 13,1-17 ). Pour leur laisser un gage de cet amour, pour ne jamais s'éloigner des siens et pour les rendre participants de sa Pâque, il institua l'Eucharistie comme mémorial de sa mort et de sa résurrection, et il ordonna à ses apôtres de le célébrer jusqu'à son retour, "les établissant alors prêtres du Nouveau Testament" (Cc. Trente: DS 1740 ).


1338 Les trois évangiles synoptiques et S. Paul nous ont transmis le récit de l'institution de l'Eucharistie; de son côté, S. Jean rapporte les paroles de Jésus dans la synagogue de Capharnaüm, paroles qui préparent l'institution de l'Eucharistie: Le Christ se désigne comme le pain de vie, descendu du ciel (cf. Jn 6 ).


1339 Jésus a choisi le temps de la Pâque pour accomplir ce qu'il avait annoncé à Capharnaüm: donner à ses disciples son Corps et son Sang:


Vint le jour des Azymes, où l'on devait immoler la pâque. (Jésus) envoya alors Pierre et Jean: 'Allez dit-il, nous préparer la Pâque, que nous la mangions'... Ils s'en allèrent donc ... et préparèrent la Pâque. L'heure venue, il se mit à table avec ses apôtres et leur dit: 'J'ai désiré avec ardeur manger cette pâque avec vous avant de souffrir; car je vous le dis, je ne la mangerai jamais plus jusqu'à ce qu'elle s'accomplisse dans le Royaume de Dieu' ... Puis, prenant du pain et rendant grâces, il le rompit et le leur donna, en disant: 'Ceci est mon Corps, qui va être donné pour vous; faites ceci en mémoire de moi'. Il fit de même pour la coupe après le repas, disant: ''Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon Sang, qui va être versé pour vous' ( Lc 22,7-20 cf. Mt 26,17-29; Mc 14,12-25; 1Co 11,23-26 ).


1340 En célébrant la dernière Cène avec ses apôtres au cours du repas pascal, Jésus a donné son sens définitif à la pâque juive. En effet, le passage de Jésus à son Père par sa mort et sa résurrection, la Pâque nouvelle, est anticipée dans la Cène et célébrée dans l'Eucharistie qui accomplit la pâque juive et anticipe la pâque finale de l'Eglise dans la gloire du Royaume.

Après cette lecture, comment pourriez-vous me dire, que notre Saint Père le Pape Benoît XVI aurait affirmé l'inverse. J'ai déjà lu l'ouvrage, et je pense que vous avez mal saisi le sens de la réflexion du Pape sur ce point, ce qui est sûr, c'est qu'il n'a jamais dit ce que vous lui avez prêté comme paroles.
Enfin sachez que je suis un prompt défenseur de la Doctrine écclésiale et de tout ce que certains appellent "Romanité", alors je sais ce que je dois faire, dire ou penser.

Merci de prendre ce message comme une correction fraternelle et pas autrement.

In Christo.

Quentin.

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Message non lu par Boris » mar. 28 nov. 2006, 8:26

Je suis entièrement d'accord avec vous pour les "Romanités". Je me considère comme ultramontain dans une France où les pratiquants ne sont plus croyant ou en tout cas plus en communion avec Rome.

Pour le sujet qui nous intéresse :

Remarquez que vous parlez de sacrifice : or celui-ci n'a pas encore eu lieu au moment de la Cène.
Il ne faut confondre institution et célébration.

L'Eucharisite est le Mémorial de la Mort et de la Résurection du Christ; Don du mystère de la Croix. Pas celui du dernier repas Pascal.
Le Christ a profité de ce dernier repas marquant un passage fort de la Liturgie juive pour donner la matière au futur mémorial.
Mais au moment de la Cène, il ne fait mémoire de rien du tout puique rien n'a encore eu lieu.

le N°1340 du CEC est ambigu pour moi : il parle d'anticipation.

C'est dommage, on ne trouve l'excellent livre du Père Bouiller 'l'Eucharistie" dans lequel (de mémoire) il montre que la Cène est avant tout un repas Pascal et non une Eucharistie à cause du non lieu de Mort et de Résurection à ce moment là.

SS le Pape dit à la page 46 :
L'Esprit de la Liturgie a écrit :Si le Seigneur nous donne son corps, c'est qu'il l'a réellement "livré";
Mais le Père Bouiller exprime cela beaucoup mieux. Malheureusement j n'ai pas le texte.
UdP,
Boris

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Message non lu par el Padrecito » mar. 28 nov. 2006, 21:54

Boris,

Je ne comprends pas que cela vous gêne, l'anticipation. Car si tel est le cas, comment comprenez-vous que Marie soit Vierge et Immaculée, c'est bien par anticipation de la Passion Salvifique de Notre Seigneur Jésus Christ, que Marie a été préservée du péché.

Je comprends que cela soit un peu difficile à digérer, mais c'est cela aussi le Mystère de la Révélation Divine, ne pas tout comprendre maintenant, mais croire en ce que l'Eglise nous donne à croire car nous savons qu'Elle ne peut se tromper quand elle définit la Foi et que l'Esprit du Seigneur la guide toujours, Elle et ses Pasteurs.

In Christo.


Quentin.

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Message non lu par Boris » mar. 28 nov. 2006, 21:58

Padrecito,

Comment la Cène peut-elle être le mémorial de ce qui n'a pas encore eu lieu ?
UdP,
Boris

jaco
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Message non lu par jaco » mar. 28 nov. 2006, 22:16

Cher Boris, il me semble que vous oubliez votre catéchisme....
Voici ce que dit le catéchisme de Saint Pie X :

Quand est-ce que Jésus-Christ a institué le sacrement de l’Eucharistie ?

Jésus-Christ a institué le sacrement de l’Eucharistie dans la dernière cène qu’il fit avec ses disciples, le soir qui précéda sa passion.

Voici un extrait d'une conférence donnée lors d'une retraite sacerdotale par le Chanoine LAHITTON :
Le saint sacrifice de la Messe est réellement distinct du sacrifice de la Croix, tout en lui demeurant intimement et totalement coordonné. Telle est la pensée que nous avons maintenant à développer.

On a coutume de dire que le sacrifice de l'Autel est le même que celui de la Croix.

Il faut bien s'expliquer sur ce point : il est d'importance.

Les deux sacrifices présentent certains éléments d'identité parfaite ; la chose va de soi. Mais il est non moins évident qu'ils diffèrent, au point de constituer deux espèces bien distinctes.

Mettons tout d'abord en lumière les côtés où éclate leur identité absolue ; un philosophe dirait : leur identité numérique.

Le Concile de Trente les signale on ne peut plus clairement au second chapitre de la vingt-deuxième session.

Dans l'un et dans l'autre sacrifice, explique-t-il, nous avons une seule et même victime : una enim eademque hostia.

Dans l'un et l'autre, le même prêtre principal, qui offre par les mains de prêtres subordonnés : idem nunc offerens sacerdotum ministerio.

De l'un à l'autre, enfin, identité de fruits ; car le sacrifice non sanglant de la Messe ne fait que distribuer, avec une somptueuse largesse, les fruits du sacrifice sanglant de la Croix : cujus quidem oblationis cruentæ fructus, per hanc incruentam uberrime percipiuntur.

Mais, si nous n'avons pas oublié les principes posés au début de cette étude, nous savons que la triple identité de la victime, du prêtre principal et des fruits, n'entraîne pas encore l'identité des deux sacrifices.

Le sacrifice, avons-nous dit, est formellement constitué par l'immolation de la victime. Si le rite de l'immolation est le même, nous aurons donc la même espèce de sacrifice. Mais si l'immolation diffère, les deux sacrifices différeront d'autant, selon l'adage : qui variat formant rei, variat speciem.

Or, le Concile de Trente ajoute : sola offerendi ratione diversa. Les deux sacrifices ne diffèrent que par le mode d'immolation.

Ils ne diffèrent que sur ce point ; mais cette seule divergence nous suffit. Car, en divergeant sur ce point essentiel, ils se classent sous deux espèces différentes : qui variat formant rei, variat speciem.

Et donc, quoique nous ayons, à l'Autel, la même victime que sur la Croix, et présentée par le même prêtre principal, et distribuant à la terre les mêmes grâces célestes, puisque, nonobstant cette triple identité, nous constatons que la victime est offerte, immolée, ici et là, de deux manières complètement différentes : là, sanglante ; ici, non sanglante, il est inexact de soutenir l'identité des deux sacrifices ; il est inexact de dire que le sacrifice de la Messe renouvelle ou reproduit le sacrifice de la Croix. Il ne reproduit, il ne renouvelle, au pied de la lettre, que le sacrifice de la Cène. Quant au sacrifice de la Croix, il demeure unique, « specie et numero », dans sa double unité spécifique et numérique ; et le sacrifice de l'Autel ne nous en donne qu'une représentation purement figurative par la séparation des deux espèces sacramentelles, recouvrant, ici le corps, là le sang de Jésus-Christ(7).

Donc, en distinguant les deux sacrifices par la seule différence du mode d'oblation : sola offerendi ratione diversa, le saint Concile les a distingués d'une distinction réelle, formelle, spécifique, bien qu'inadéquate.

On raconte qu'un novice de l'Ordre des Frères-Prêcheurs fut jeté dans les fers et condamné à mort pour la cause du Christ. Du cachot où il attendait son martyre, il écrivit à son Supérieur pour lui exprimer son vif désir d'être reçu à la profession religieuse avant de mourir.

Sa pieuse requête fut exaucée ; et dans sa prison, entre les mains de son Prieur, il eut le bonheur de se donner à Dieu par les trois vœux de religion, la veille même du jour où il devait se donner de nouveau par l'effusion du sang : pridie quam pateretur.

Ne voyez-vous pas l'application ?

Ici et là, c'est bien le même don et le même donateur : le novice s'offrant lui-même. Il n'y a de différence que dans la manière de s'offrir : sola offerendi ratione diversa.

Néanmoins, et parce que les deux façons dont ce religieux se donne sont tout à fait différentes, nul n'osera contester que nous ne soyons en présence de deux donations spécifiquement distinctes, malgré l'indéniable identité du donateur et du don. Identité et diversité que l'on pourrait fort bien exprimer par cette formule, imitée du saint Concile : « Ce religieux qui se donne aujourd'hui à Dieu par l'oblation sanglante du martyre, est celui-là même qui se donnait hier par l'oblation non sanglante de la profession religieuse (8). »

Je m'excuse d'avoir tant insisté sur une chose qui semble si claire. Mais elle a été si fort obscurcie dans certaines controverses récentes, qu'il a paru nécessaire d'y projeter une lumière intense.

Pour échapper à nos conclusions, on dira peut-être que le Concile de Trente parle d'une diversité dans l'oblation et non dans l'immolation : sola OFFERENDI ratione diversa.

La réponse est facile ; car, ainsi que nous l'avons observé, en matière de sacrifice, oblation et immolation se confondent, parce que la manière d'offrir une hostie en sacrifice est précisément de l'immoler.

Et c'est bien ainsi que l'entendent les Pères de Trente. Et la preuve palpable qu'à leurs yeux, dans le cas présent du sacrifice, oblation est synonyme d'immolation, c'est qu'ils divisent l'oblation en sanglante et non sanglante : cujus quidem ohlationis cruentæ fructus, per hanc incruentam uberrime percipiuntur (loc. cit.).

Or, c'est là, de toute évidence, une division qui concerne l'immolation, ou l'oblation-sacrifice ; car la simple offrande ne fut jamais sanglante : la chose offerte, qu'elle fût vivante ou inanimée, — pain de froment ou jeune agneau, poignée de farine ou couple de colombes, — demeurait intacte. On la présentait telle quelle, sans changement, à Dieu et à ses ministres (9).

Des théologiens récents — le P. de la Taille en tête — ont recours à un procédé nouveau, dans le but d'identifier les deux sacrifices de la Cène et du Calvaire.

Pour un sacrifice, disent-ils, il faut l'oblation actuelle d'une immolation ; mais il est indifférent que cette immolation soit présente, passée ou future. L'actualité de l'oblation suffit pour avoir un sacrifice actuel, à la seule condition que l'oblation que nous faisons maintenant se réfère à une victime à immoler, fût-ce le lendemain, ou déjà immolée, fût-ce depuis des semaines, des années et des siècles.

La Cène offrait la victime à immoler le lendemain ; notre Messe offre la victime immolée depuis des siècles.

Ils ajoutent ceci : au Calvaire, il n'y a pas eu oblation rituelle de la victime, mais son occision brutale par les bourreaux. Pareille occision, qui fut un vrai crime, ne saurait constituer un acte religieux. Si elle est quand même un sacrifice, c'est que l'oblation rituelle, qui lui fit défaut ce jour-là, avait été faite la veille au soir, par le Divin Maître, dans l'institution de la Sainte Eucharistie : pridie quam pateretur. Cette oblation rituelle et la tuerie du lendemain se complètent donc pour former un seul et même sacrifice, ici offert, là odieusement perpétré. Et notre Messe ne serait également qu'une nouvelle oblation, sans immolation actuelle, une nouvelle oblation du drame sanglant du Calvaire.

Si cette théorie est ingénieuse, elle ne résiste pas à l'examen des faits, ni aux termes dont se sert le Concile de Trente.

C'est une thèse très certaine de la Christologie que la passion fut un vrai sacrifice, un sacrifice absolu, et qu'on pourrait appeler subsistant par soi. Il fut complet par lui-même, sans avoir besoin de tel ou tel rite complémentaire posé la veille, ou reproduit le lendemain.

La Cène de la veille n'eût pas existé et nos Messes ne s'échelonneraient pas tout le long des siècles, que le sacrifice rédempteur offert sur la Croix ne perdrait aucun de ses éléments et garderait toute sa valeur.

Une preuve entre milles, c'est que, dans les pages où les théologiens, saint Thomas en tête, établissent l'existence du sacrifice rédempteur, ils ne font pas la moindre allusion à l'acte rituel de la veille, lequel, cependant, au dire des opposants, en aurait constitué l'élément principal.

Saint Thomas dit purement et simplement que la mort du Christ fut un vrai sacrifice.

Et qui ne sait que la Tradition est unanime à nous enseigner que Jésus, sur la croix, fit vraiment acte de prêtre, qu'il y remplit la fonction suprême de son sacerdoce, qu'il y prononça des paroles d'oblation vraiment sacerdotales, expression très claire de sa volonté actuelle de s'offrir en sacrifice : Consummatum est... Pater, in manus tuas commendo spiritum meum.

Qui ne sait, enfin, que Jésus avait plein pouvoir sur sa propre vie ; que son âme jouissait d'un domaine parfait sur son propre corps ; que personne ne pouvait la lui ravir contre son gré : nemo tollit eam a me; qu'il pouvait seul en disposer selon son bon plaisir : sed ego pono eam a meipso(10).

Il l'a bien prouvé au cours de sa passion. Les coups qu'il a reçus, le sang qu'il a versé auraient dû amener plus d'une fois la mort ; mais, chaque fois, Jésus, usant de sa puissance souveraine, a retenu d'autorité son âme prête à s'échapper. Enfin, quand la mesure des souffrances fut comble, Jésus constate tout haut que le programme imposé par la divine justice est rempli jusqu'au bout : consummatum est ! N'ayant plus à retenir son âme prête à s'envoler, il va la laisser sortir de ce corps qui ne la garde plus ; et, par un acte solennel, qui est l'acte sacerdotal de son sacrifice, il la prend toute palpitante de souffrances et d'amour, pour la présenter à son Père en holocauste de louange et d'expiation : « Père, je remets mon âme entre vos mains. » — « Et, ce disant, ajoute l'Évangile, il expira : et hæc dicens expiravit(11) »

« Ce fut par élection, et non par la force du mal qu'il mourut... et, partant, il n'est pas dit que son esprit s'en alla, le quitta ou se sépara de lui, mais, au contraire, qu'il mit son esprit dehors, l'expira, et le remit ès-mains de son Père éternel ; si que saint Athanase remarque qu'il baissa la tète pour mourir, afin de consentir et pencher à la venue de la mort, laquelle autrement n'eût osé s'approcher de lui ; et, criant à pleine voix, il remet son esprit à son Père, pour montrer que, comme il avait assez de force et d'haleine pour ne point mourir, il avait aussi tant d'amour qu'il ne pouvait plus vivre sans faire revivre par sa mort ceux qui sans cela ne pouvaient jamais éviter la mort ni prétendre à la vraie vie.

C'est pourquoi la mort du Sauveur fut un vrai sacrifice, et sacrifice d'holocauste que lui-même offrit à son Père pour notre rédemption ; car encore que les peines et les douleurs de sa passion fussent si grandes et fortes que tout autre homme en fût mort, si est-ce que quant à lui il n'en fût jamais mort s'il n'eût voulu et que le feu de son infinie charité n'eût consumé sa vie. Il fut donc le sacrificateur lui-même qui s'offrit à son Père, et s'immola en amour, à l'Amour, pour l'amour et d'amour. » (S. François de Sales, Traité de l'amour de Dieu, L. X, ch. 17.)

Le sacrifice du Calvaire, sacrifice complet et subsistant par lui-même, le voilà !

Et c'est bien ainsi que le conçoit le Concile de Trente. Examinons, en effet, la manière dont il s'exprime, toujours dans cette célèbre session vingt-deuxième, dont les termes, précis et majestueux, semblent descendre directement du trône de la Vérité céleste.

Après avoir rappelé que Jésus se devait de réaliser en sa personne le type prophétique de Melchisédech, le saint Concile ajoute :

« Donc, notre Dieu et Seigneur Jésus, bien qu'il dût s'offrir une seule fois en sacrifice à Dieu sur l'autel de la Croix : in ara crucis oblaturus erat, par une mort qui rachèterait le monde ; néanmoins, parce que son sacerdoce ne devait pas s'éteindre à sa mort, il voulut, à la dernière Cène, laisser à l'Église, son Épouse bien-aimée, un sacrifice vraiment visible comme l'exige la nature de l'homme, sacrifice par lequel celui qu'il devait offrir une seule fois d'une manière sanglante fût représenté, et son souvenir ainsi que ses fruits perpétués jusqu'à la fin des siècles.

« Dans ce but, et pour bien marquer qu'il était prêtre selon l'ordre de Melchisédech, il offrit en sacrifice à Dieu son Père son corps et son sang sous les espèces du pain et du vin. Et il établit les Apôtres, ainsi que leurs successeurs, prêtres de ce sacrifice, en disant : Faites ceci en mémoire de moi. Ainsi l'a toujours compris et enseigné l'Église catholique. »

« C'est ainsi qu'il institua la Pâque nouvelle, ou le nouvel Agneau pascal, c'est-à-dire lui-même, que l'Église devra immoler, par ses prêtres, sous les signes visibles du pain et du vin : seipsum ab Ecclesia per sacerdotes sub signis visibilibus immolandum. »

Rien de plus clair ; et nous avons donc un sacrifice que Jésus-Christ devait offrir le lendemain sur l'autel de la Croix : in ara crucis oblaturus, — remarquez ce futur, — et un autre, institué la veille, un autre qui a son rite spécial, tout à fait distinct, dans lequel le Christ s'immole encore, mais non plus par effusion sanglante, sous les espèces du pain et du vin : sub signis visibilibus immolandum.

Notre sacrifice de la Messe est donc bien réellement distinct de celui de la Croix ; et, s'il est la représentation symbolique et le mémorial de celui-ci, in memoriam, on ne peut dire qu'il en soit la reproduction ou le renouvellement. Nous ne reproduisons pas, nous ne renouvelons pas, à la Messe, l'immolation sanglante du Calvaire, qui doit demeurer unique : semel oblaturus; nous reproduisons, nous renouvelons l'immolation de la Cène, immolation non sanglante, immolation mystique, mais très vraie, dont nous aurons bientôt à déterminer la nature et à revendiquer la réalité.

Avant d'achever, il nous sera utile d'étudier comment et pourquoi, au dire du saint Concile, le sacrifice de la Messe possède le privilège de nous obtenir l'application abondante, torrentielle, des fruits du Calvaire : « Cujus quidem oblationis, cruentæ inquam, fructus per hanc incruentam uberrime percipiuntur(12). »

Ce privilège lui vient précisément de ce qu'il est la représentation symbolique du sacrifice du Calvaire. Et telle paraît bien être la raison profonde pour laquelle Jésus-Christ rend présents son corps et son sang séparément, sous des espèces distinctes. Cette séparation nous paraît avoir une double fin : rappeler à la mémoire oublieuse de l'homme le sacrifice qui nous a rachetés ; d'autre part, présenter de nouveau à Dieu — « repræsentare » — ce sacrifice qui nous a ouvert un crédit illimité sur son miséricordieux Amour !

Inutile d'insister sur le premier but, que tout l'office du Saint-Sacrement s'applique à nous inculquer : O sacrum convivium... recolitur memoria passionis ejus. — Deus qui nobis, sub sacramento mirabili, passionis tuæ memoriam reliquisti.

Le second aspect nous met en face d'une vérité splendide. En renouvelant sans relâche, sur ses Autels, le mystère de l'immolation sacramentelle, l'Église catholique n'a pas d'autre souci que de maintenir sous les yeux de la justice divine son grand Crucifié, de le lui présenter sans cesse, comme un gage assuré de tous les pardons et un droit permanent à tous les bienfaits !

Et, quelle n'est pas l'efficacité d'une pareille présentation, quand elle s'adresse à Dieu !

Quand nous voulons émouvoir les pécheurs, le moyen le plus sûr est de les placer en face de la croix, en essayant de leur donner la sensation de la Passion présente. Ah ! si notre faculté d'évocation était telle que nous eussions le pouvoir de leur montrer Jésus crucifié, tel que le virent sa Mère, saint Jean, Marie-Madeleine ! Quel cœur serait assez dur pour nous résister !

Hélas ! pour nos semblables et pour nous-mêmes, nous en sommes réduits à des tableaux d'imagination, infiniment inférieurs à la terrible et poignante réalité.

Du côté de Dieu, au contraire, nous n'avons à recourir à aucun artifice. La Passion que nos Messes lui représentent ne se perd pas pour lui dans le lointain d'un passé brumeux. Celui qui est l'Être même ne vit pas sous le régime du temps qui s'écoule et s'enfuit, mais sous le régime de l'éternité immuable. Car, nous dit saint Thomas, l'éternité, ramassée tout entière en elle-même dans un perpétuel présent, embrasse et tient sous son regard toute la succession des temps : Æternitas, tota simul existens, ambit totum tempus(13).

Donc, en ce moment où la Passion est passée depuis des siècles, elle demeure aussi présente à Dieu qu'elle l'était à Marie au moment où cette Mère douloureuse se tenait debout contre le bois de la croix.

C'est ce spectacle que le corps et le sang de nos Messes ont le don de présenter, de représenter à Dieu : spectacle d'une éloquence infinie, par lequel nous parlons ainsi au Père céleste : « Mon Dieu ! par votre Fils qui souffre et meurt pour nous sous votre regard éternel ; par son sang que vous voyez sans cesse coulant à flots sur la terre et sur nos âmes coupables, pardon, Seigneur, pardon ! Pardon ! Et miséricorde ! Et votre bienveillance ! Et votre amour ! Et votre héritage ! Et votre ciel ! Et votre Cœur ! Et Vous, enfin ! J'ai droit à tout ! Je demande tout ! Et, je le sais, ô mon Père : par votre Fils, vous me donnerez tout ! »

Telle est l'éloquence de notre Messe dans son étroite dépendance avec le sacrifice de la Croix. Sous cet aspect, le sacrifice de nos Autels peut donc se définir : La re-présentation faite à Dieu de l'immolation du Calvaire, non comme passée, mais comme toujours présente à la Divine Éternité (14) !

Vous pensez peut-être, mes vénérés Confrères, que, repris par mes vieilles habitudes de professeur, j'en viens à oublier ma fonction actuelle de prédicateur.

Détrompez-vous ! à moins qu'il ne soit plus vrai que la première tâche, et la plus urgente du prédicateur de l'Évangile consiste à répandre la lumière : vos estis lux mundi... luceat lux vestra, et que son premier devoir est, non d'émouvoir la sensibilité, mais d'enseigner la vérité : docete.

Cet enseignement sur le sacrifice de la Messe, je le dépose dans vos âmes comme une semence divine, semence sacrée que le soleil de la grâce fera germer en son temps, semence féconde, sur laquelle, comme sur le sein virginal, le Saint-Esprit surviendra, et que la vertu du Très-Haut couvrira de son ombre.

Alors, de cette semence jaillira un prêtre nouveau, un prêtre, digne instrument du Souverain Prêtre, un prêtre sachant ce qu'il fait : agnoscite quod agitis, et qui, sachant ce qu'il fait, adaptera de plus en plus ses attitudes d'âme et de corps aux mystères sublimes que nous avons le redoutable pouvoir de manipuler !

Amen !

Et voici ce que dit le Concile de Trente ( c'est moi qui souligne) :
Ainsi donc, bien que notre Dieu et Seigneur dût s'offrir lui-même une seule fois à Dieu son Père par sa mort sur l'autel de la croix, en vue d'y réaliser une rédemption éternelle, cependant, parce que son sacerdoce ne devait pas s'éteindre par la mort, à la dernière Cène, la nuit même où il était livré, pour laisser à son épouse bien-aimée l'Eglise, comme le réclame la nature humaine un sacrifice visible propre à représenter ce sacrifice sanglant qui allait s'accomplir une fois pour toutes sur la croix, à en prolonger le souvenir jusqu'à la fin des siècles, ainsi qu'à en appliquer la vertu salutaire à la rémission de nos péchés quotidiens, se déclarant lui-même comme prêtre établi pour l'éternité selon l'ordre de Melchisedech, il offrit à Dieu son Père son corps et son sang sous les espèces du pain et du vin, les distribua sous ces mêmes symboles aux Apôtres qu'il établissait alors comme prêtres du Nouveau Testament, et leur donna, à eux ainsi qu'à leurs successeurs dans le sacerdoce, l'ordre de les offrir par ces paroles : Faites ceci en mémoire de moi, comme l'Eglise catholique l'a toujours cru et enseigné.

In Christo per Mariam

Jacques

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Boris
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Message non lu par Boris » mer. 29 nov. 2006, 0:26

Je ne remets pas en cause l'institution.

Je dis juste que l'institution n'est pas célébration car c'était à ce moment là le repas de la Pâque Juive.
Pa contre dès que les Apôtres ont refait cela, alors c'était bien le mémorial.

Mais si les conciles le disent, je ne peux que m'incliner.
UdP,
Boris

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François-Xavier
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Message non lu par François-Xavier » mer. 29 nov. 2006, 15:05

Joseph Ratzinger, La célébration de la Foi a écrit :Ce que le Seigneur fait ici est quelque chose de nouveau, inséré dans le tissu d'un ensemble ancien, - celui du repas rituel juif - mais devient une réalité propre, clairement discernable ; cette réalité est donnée pour être répétée et est donc détachable du contexte au sein duquel elle se trouve.
Si nous allons au fond de ce diagnostic, nous décrouvrons que cet amalgame d'ancien et de nouveau n'est point du tout dû au hasard, mais correspond exactement et d'une façon nécessaire à la situation où l'histoire du salut se trouvait encore. La nouvelle prière de Jésus se trouve encore incluse dans la liturgie juive. Nous sommes encore avant la crucifixion, même si celle-ci commence ici, pour ainsi dire de l'intérieur. La séparation entre Jésus et la communauté du peuple juif n'est pas encore accomplie, c'est à dire que l'Eglise n'existe pas encore en tant qu'Eglise ; "l'Eglise" au sens strict ne s'est consistuée historiquement que lorsque la tentative de conquérir entièrement Israël a échoué. Comme le fait chrétien n'a pas encore d'existence autonome, mais existe encore sous une forme historiquement ouverte au sein du fait juif, il ne saurait donc y avoir non plus de "forme" liturgique chrétienne spécifique et autonome. Cela nous amène à une constatation fondamentale dont la méconnaissance constitue la véritable erreur de toutes les tentatives de faire dériver la "forme" liturgique chrétienne directement de la Cène, au mépris du sens critique. En effet, il nous faut dire maintenant ceci : la dernière Cène de Jésus est bien le fondement de toute la liturgie chrétienne, mais elle n'est pas encore une liturgie chrétienne. C'est dans le judaïsme que s'accomplit l'acte de l'institution du christianisme, sans avoir trouvé sa "forme" propre en tant que liturgie chrétienne.
Ce texte est de Joseph Cardinal Ratzinger, dans son ouvrage "la Célébration de la Foi", Tequi, 1985, chapitre sur "Forme" et contenu de la célébration eucharistique, pages 40 et 41. Quand ce théologien fait paraître cet ouvrage en Français, il a été nommé depuis 4 ans préfet de la congrégation de la doctrine de la Foi par le souverain pontife Jean-Paul II. Il lui a depuis succédé au siège apostolique sous le nom de Benoît XVI.

Je crois qu'il nous faut accepter d'être surpris par l'enseignement du magistère et des grands théologiens, pourvu que ces derniers soient autorisés.

In illo tempore
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Message non lu par In illo tempore » ven. 01 déc. 2006, 23:27

Cette discussion que je prends au vol est très intéressante.

Tout est parti de :
Boris a écrit :Mais je vois poindre au loin votre argument suivant : l'Eucharistie est un repas. Il n'y a rien de plus faux !
Tout le monde est d'accord pour dire que cette affirmation est fausse parce que la Messe est un repas sacrificiel. Il est important de n'oublier ni l'un ni l'autre.

La phrase du Cardinal Ratzinger que François-Xavier souligne parle de la forme liturgique et non de la réalité qui est célébrée. Elle ne permet donc pas de conclure. En revanche le début du texte est intéressant :
Ce que le Seigneur fait ici est quelque chose de nouveau, inséré dans le tissu d'un ensemble ancien, - celui du repas rituel juif - mais devient une réalité propre, clairement discernable ; cette réalité est donnée pour être répétée et est donc détachable du contexte au sein duquel elle se trouve.
C'est une réalité propre qui est donnée pour être répétée. Cette répétition c'est l'Eucharistie. Il semble donc que le Cardinal dise que la Cène du Jeudi Saint est bien la première Eucharistie.

La Pâque du Seigneur est une seule réalité depuis le Jeudi Saint en passant par le Calvaire qui s'est accomplie une seule fois. La Messe est aussi ce même sacrifice du Christ et lorsque nous y assistons, nous somme mystérieusement présents au Calvaire. C'est cette seule réalité que nous vivons et c'est cela qui est important.
jaco a écrit :Les deux sacrifices présentent certains éléments d'identité parfaite
Il y a un unique sacrifice rédempteur.

Je ne sais pas qui est ce Chanoine Lahitton que vous citez mais ces premières lignes me heurtent et je n'ai pas lu la suite de ce texte.

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Message non lu par el Padrecito » ven. 01 déc. 2006, 23:52

Merci à vous In illo tempore,

Votre petite synthèse récapitulative est très bien, je partage tout à fait cela.

Ce genre de discussion est bien, car il nous permet de faire le point sur notre théologie, et de nous mettre en adéquation avec l'Eglise le cas échéant.

Fraternellement.

Quentin.
in Christo Rege.

Quentin.

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Boris
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Message non lu par Boris » sam. 02 déc. 2006, 10:13

J'ai remarqué que les "tradis" distinguent 2 sacrifices : celui de la Croix et celui de la Messe.

Or j'ai toujours entendu que puisque le Christ c'est offert dans le sacrifice parfait, il n'y a plus besoin d'offrir de nouveaux sacrifices et que le sacrifice de la Messe est en réalité le prolongement dans le temps de celui de la Croix, que sa forme a été donnée au moment de l'intitution de l'Eucharistie et que cette institution n'est pas une célébration chrétienne. (cf. citation donnée par François-Xavier)

L'Eucharistie deviendra célébration chrétienne après la résurection.

C'est bien ce que dit le N°1323 du CEC qui cite entièrement le N°47 de SC :
Dans le CEC il y a écrit : "Notre Sauveur, à la dernière Cène, la nuit où il était livré, institua le sacrifice eucharistique de son Corps et de son Sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long des siècles, jusqu'à ce qu'il vienne, et pour confier à l'Eglise, son Epouse bien-aimée, le mémorial de sa mort et de sa résurrection: sacrement de l'amour, signe de l'unité, lien de la charité, banquet pascal dans lequel le Christ est reçu en nourriture, l'âme est comblée de grâce et le gage de la gloire future nous est donné"
C'est bien ce que dit le N°1330 du CEC :
Dans le CEC il y a écrit : Mémorial de la passion et de la résurrection du Seigneur.
Saint Sacrifice, parce qu'il actualise l'unique sacrifice du Christ Sauveur et qu'il inclut l'offrande de l'Eglise; ou encore saint sacrifice de la messe, "sacrifice de louange", sacrifice spirituel, sacrifice pur et saint, puisqu'il achève et dépasse tous les sacrifices de l'Ancienne Alliance.
(...)
Je crois que les "tradis", en réaction avec les années 70 où l'aspect sacrificiel a été suprimé en France, se sont trop alourdis et attardés sur ce point (même s'il est fondamental).
Aux années folles 60/90 que tout le monde à mis sur le dos du 2nd Concile de Vatican (par accusation ou par justification), les "tradis" ont opposé un autre Concile : celui de Trente.
Or sur le point du sacrifice, le Concile de Trente a justement donné un enseignement de combat contre la "réforme" qui niait ce point. Donc ils ont eu de la matière.
Cependant, autant le Concile de Trente a voulu insisté lourdement sur le Sacrifice de la Messe, autant le Concile de Vatican a tenu cela pour acquis et est reparti de ce point pour ajouter (sans supprimer ni occulter) l'aspect écclésial : l'assemblée joue un rôle dans la Liturgie, y compris dans la Messe en s'offrant elle-même dans le sacrifice.
Mais il s'agit toujours du même sacrifice du Christ sur la Croix : celui s'offrir totalement par réponse à l'Amour de Dieu et par Amour pour Dieu et dans l'Amour de Dieu. (Per ipsum ...)

Voici les premiers mot du Missel de 2002, mots qui ont été ajoutés par SS le Pape Paul VI en 1975 :
Dans l'IGMR il y a écrit :PREAMBULE
1. Alors qu´il allait célébrer avec ses disciples le repas pascal où il institua le sacrifice de son Corps et de son Sang, le Christ Seigneur ordonna de préparer une grande salle aménagée. L´Église a toujours estimé que cet ordre la concernait, en ce qu´il réglait la disposition des esprits, des lieux, des rites et des textes relatifs à la célébration de l´Eucharistie. De même, les règles d´aujourd´hui qui ont été prescrites en s´appuyant sur la volonté du IIe concile oecuménique du Vatican et le nouveau Missel dont l´Église de rite romain usera désormais pour célébrer la messe prouvent cette attention de l´Église, sa foi et son amour inchangés envers le suprême mystère eucharistique, et témoignent de sa tradition continue et ininterrompue, quelles que soient les nouveautés qui s´y sont introduites.
2. La nature sacrificielle de la messe, solennellement affirmée par le concile de Trente en accord avec toute la tradition de l´Église, a été professée de nouveau par le IIe concile du Vatican, qui a émis, au sujet de la messe, ces paroles significatives: "Notre Sauveur, à la dernière Cène ..., institua le sacrifice eucharistique de son corps et de son sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long des siècles, jusqu´à ce qu´il vienne, et en outre pour confier à l´Église, son épouse bien-aimée, le mémorial de sa mort et de sa résurrection.
Cela coupe court à toutes les discussions sur la forme actuelle de la Messe.
Mais malheureusement il y a un monde entre ce qui est dans les livres Liturgiques et ce qui est pratiqué par trop de prêtres et d'assemblées. (Cf. Discours de SE le Cardinal Ratzinger pour les 10 ans du Motu Proprio "Ecclesia Dei Adflicta).
Donc il est absoluement malhonnête de comparer ce qui se pratique dans les paroisses qui se réclament du Concile Vatican II et se qui se pratique dans les chapelles "tradis" :
- dans le second cas nous avons bien le rite romain (selon l'ancienne forme)
-mais dans le premier cas nous avons des rites privés propres à chaque paroisse. (cf. Instruction "Doctrina et Exemplo" de SS le Pape Paul VI ou encore N°22 de SC, cité par SS le Pape Jean-Paul II in "Ecclesia de Eucharistia" n°52)

Or ces rites privés, sous prétexte que la forme actuelle du rite a ré-introduit des éléments de l'antique Tradition Chrétienne (Prière Universelle comme au IVe siècle, idem pour la formule de la Confirmation), donc sous ce prétexte, ces paroisses ont voulu refaire "comme au premiers temps" en omettant la partie vivante de la Tradition et par là la partie théologique de la Liturgie :
- NSJC a institué le Saint Sacrifice de la Messe au cours du repas Pascal de la Liturgie Juive : ces paroisses n'ont malheureusement gardé que le terme "repas", occultant toute la théologie de l'Eucharistie et en particulier le Concile de Trente (rupture de la Tradition) et le fait que ce dernier repas était une réalité Liturgique pour les Apôtres : la Liturgie Juive.
- a cause de cette erreur grossière et d'une volonté de rupture avec la Tradition et l'enseignement "rigide" (mais comment peut-il en être autrement ?) de l'Eglise, ces communautés en sont arrivées à supprimer cet enseignement et par là la signification de la Liturgie (face à l'Orient et au Christ devient dos au peuple, volonté de communier dans la main pour s'auto-communier comme l'aurait hypothétiquement fait les Apôtres, ...)
- il ne faut oublier que tout cela a trouvé un terreau favorable et une semence dès les années 50. Le Concile de Vatican, ne profitant pas encore des moyens modernes de communication (Internet), fut largement déformé par les médias et ni son texte ni son véritable esprit n'arriva jusqu'aux prêtres ni jusqu'aux fidèles.




Pour en revenir à ma question : y a-t-il un seul sacrifice réalisé sur la Croix et perpétué dans la Sainte Messe ou 2 sacrifices, un sur la Croix et un dans la Sainte Messe ?
UdP,
Boris

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Message non lu par el Padrecito » sam. 02 déc. 2006, 11:50

Bonjour Boris,

Il n'y a qu'un seul Sacrifice, l'Unique Sacrifice de la Victime parfaite.

La Messe nous rend présent au Sacrifice de la Croix; le Christ n'estpas re-crucifié à chaque Eucharistie, Il est mort et ressuscité une fois pour toutes. Mais par la Messe, c'est nous qui devenons contemporains de ce Sacrifice, la Messe nous permet de nous retrouver au pied de la Croix.

L'Institutuion de l'Eucharistie donne son sens définitif à la Pâque juive, et devient célébration chrétienne, même si jusqu'à après la Pentecôte, judaïsme et christianisme sont encore non différenciés.

J'espère que cela vous éclairera.

Fraternellement.

Quentin.
in Christo Rege.

Quentin.

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