Carhaix a écrit : ↑dim. 29 déc. 2019, 19:13
Certitude et foi me paraissent incompatibles. Comment arrivez-vous à les associer ?
Carhaix a écrit : ↑lun. 30 déc. 2019, 2:27
Si je me place du point de vue de la foi, je crois. Je crois ce que je ne peux ni voir, ni vérifier, ni expérimenter, ni savoir. C'est la définition même de la foi. Mais à aucun moment je ne peux dire que je sais. Je sais seulement que je ne sais rien du tout, en dehors de ce monde visible. Tout ce que je sais a pour sujet le monde visible. Le monde invisible m'est complètement inconnu. Tout ce que je crois du monde invisible repose entièrement sur quatre piliers :
- ma croyance confuse en Dieu.
- ma foi en Jésus-Christ.
- ma confiance dans l'Église.
- les indices de la Providence divine que je relève dans mon expérience personnelle de la vie.
Bonjour Carhaix et Bonne année à vous et à tous les lecteurs de ce message.
Sauf le mot «
confuse », je partage vos quatre piliers. Pourquoi la croyance devrait-elle être nécessairement confuse et contraire au «
savoir » ? Pourquoi penser que la foi serait incompatible avec la certitude ?
Ah, les mots !
Le mot «
savoir » qui paraît si simple peut se révéler très compliqué.
Il me semble que vous lui donnez une définition cérébrale. C’est un point de vue qui peut se justifier et se comprendre. De ce point de vue, on ne «
sait » que ce que la science et la raison démontrent de manière irréfutable et vérifiable par l’expérimentation personnelle.
La «
certitude » ou la «
conviction », c’est parfois différent.
Je ne «
sais » personnellement rien de l’astronomie, du carbone 14, du Big Bang ou des détails du fonctionnement du cerveau humain. Je «
crois » à la compétence des scientifiques lorsqu’ils s’accordent de manière apparemment convaincante sur des questions de science ou d’histoire. Mais, même en matière scientifique, les «
certitudes » ou «
convictions » reposent souvent sur de la confiance dans les observations d’autres que soi-même.
Sauf pour ce que chacun peut vérifier lui-même directement, le savoir «
scientifique » est aussi largement basé sur la confiance car, pour la plupart des connaissances scientifiques, nous sommes, souvent, incapables de vérifier nous-mêmes ce que nous apprenons.
Pour la foi, au contraire, nous avons chacun reçu un esprit qui nous permet d’expérimenter et de vérifier spirituellement la réalité. Notre cerveau, y compris notre raison, y participe, mais il ne peut prétendre saisir à lui seul ce qui dépasse les réalités naturelles.
Ici encore, la confiance est un passage nécessaire. Une confiance en ce que Dieu nous révèle par l’Écriture sainte et l’Église.
La «
certitude » ou la «
conviction » qui peuvent en résulter ne sont pas moindres qu’en matière scientifique. Beaucoup peuvent en témoigner.
La science et la raison n’ont pas l’exclusivité du savoir. Il y a certes un savoir du cerveau naturel, mais il y a aussi un savoir de l’esprit, du cœur.
Aussi, il ne me semble pas moins légitime de dire «
je sais » pour déclarer, par exemple, que le Christ est vivant que pour dire que Napoléon a perdu la bataille de Waterloo.
L’expression «
je crois » signifie parfois un doute, un manque de certitude ou de conviction.
Dans ce cas, il peut parfois être préférable et plus exact de dire «
je sais ».
La foi ce n’est pas nécessairement un manque de connaissance ou de conviction, ni la reconnaissance implicite d’un doute. C’est d’abord et avant tout de l’amour vécu. Je crois celui que j’aime. La foi, c’est d’abord aussi et avant tout de la confiance envers quelqu’un.
Dans une relation personnelle d’amour, la conviction peut être plus grande et plus certaine que dans un laboratoire scientifique.
À cet égard, Cinci apporte de précieuses nuances et ce que Zélie vous écrit me semble très juste. La connaissance scientifique est relativement contraignante. La connaissance spirituelle est libre. Elle n’existe que dans la liberté de l’amour, dans une communion libre avec Dieu. La vérité de l’Évangile ne contraint pas notre cerveau (nous ne serions plus que des robots sans liberté et sans capacité d’aimer librement) mais est proposée librement à notre cœur.
Comme dans le jardin d’Eden, tout humain reste libre de croire que le savoir n’existe que pour ce qu’il peut vérifier lui-même, ce que Ève semble avoir choisi en s’appropriant le fruit de l’arbre de la connaissance pour chercher à tout connaître par elle-même et en elle-même. Qu’est-ce que je pense que Dieu a vraiment dit ? Qu’est ce que je pense que cela signifie vraiment ? Qu’est-ce que je juge moi-même préférable ?
La tentation originelle c’était déjà de croire que la connaissance se trouve mieux en soi plutôt que dans une communion avec un autre, avec Dieu. Je sais par mon propre jugement ou je sais dans une communion d’amour. Où est le vrai savoir ?
Dieu nous propose de laisser la connaissance sur l’arbre divin, en dehors de nous-mêmes, pour «
savoir » dans une relation harmonieuse d’amour et non par notre seul cerveau individuel.
Elle est alors accessible par le cœur, par l’amour, et peut être vécue avec conviction et certitude, quoi qu’en pensent ceux qui le nient.
Le récit du jardin d’Eden est, à cet égard, lumineux. C’est bien la connaissance, le savoir, qui est au centre. Mais, la vraie connaissance passe par l’amour, la communion, l’harmonie.
Voyez le piège du Serpent : Dieu a-t-il «
vraiment » dit ? Où est la vérité ? Dieu avait dit qu’ils pouvaient manger de tous les arbres, sauf un. Satan inverse la même vraie phrase et la fait simplement regarder autrement, sans amour, pour que Ève regarde un manque (le fruit à ne pas manger) qui suscite la méfiance et non plus le don (tous les autres) qui réjouit dans l’amour.
Croire que seule la science permet de «
savoir », n’est-ce pas un piège qui fait oublier que la science est un excellent outil, mais qui peut aussi devenir une cause d’aveuglement si on oublie ses limites ?