Ancien et Nouvel Israël

« Assurément, il est grand le mystère de notre religion : c'est le Christ ! » (1Tm 3.16)
Règles du forum
Forum de discussions entre chrétiens sur les questions de théologie dogmatique
Avatar de l’utilisateur
Xavi
Prætor
Prætor
Messages : 2203
Inscription : mar. 28 juil. 2009, 14:50

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Xavi » mer. 13 mars 2024, 12:32

Bonjour Gaudens,

Je suis toujours heureux de lire les écrits de celui qui allait devenir notre bien-aimé Pape Benoît XVI après avoir été l’artisan principal de cet ouvrage extraordinaire qu’est le Catéchisme de l’Église Catholique promulgué en 1992 et, pour ma part je rejoins et comprends tout ce que vous citez.

En fait, votre message me semble confirmer que votre perplexité n’est pas principalement théologique mais politique.

Et là, comment ne pas vous comprendre en présence des faits dramatiques qui se succèdent dans l’antique pays de Canaan, car il est, hélas, toujours très tentant de rejeter la religion juive à cause des fautes de quelques-uns de ses chefs et de leurs partisans.

C’est ainsi que, pendant des siècles, la mise à mort du Christ, par quelques autorités juives et leurs partisans il y a deux mille ans, a étendu ce grief à la religion juive à laquelle ils se référaient et, en conséquence, à tous les juifs. C’est probablement la racine majeure de l’antisémitisme.

Et, pourtant, nous savons que la responsabilité véritable en incombe aux péchés de tous et pas seulement des Juifs, nous savons que Jésus lui-même était juif, de même que tous ses apôtres et la plupart de tous ses disciples de l’époque. Nous savons aussi que des foules immenses de juifs le suivaient et l’acclamaient, y compris encore quelques jours avant sa passion, comme nous nous en souviendrons dimanche lors de la fête des rameaux.

Nous pensons vite que tous ces juifs ont changé d’avis et que ceux qui l’applaudissaient le dimanche ont demandé sa mort le vendredi, mais étaient-ils davantage que quelques centaines dans la cour de Ponce Pilate ? Rien ne permet de l’affirmer.

La religion juive serait-elle ainsi la cause de la mise à mort du Christ ? En quoi les fautes de quelques-uns pourraient-ils justifier une responsabilité de tous et de leur religion ? Que dire, avec un tel raisonnement, des innombrables fautes d’autorités religieuses de notre Église ?

Aujourd’hui, c’est exactement le même raisonnement que suscitent les choix politiques et militaires des autorités de l’État d’Israël et, ici, votre perplexité.

Dieu reste le maître de l’histoire, malgré les fautes des humains, même les plus graves, et jamais ces fautes ne peuvent être transformées en bien, ni les condamnations qu’elles méritent se trouver amoindries, ni être recherchées ou justifiées parce que Dieu parvient toujours à les faire concourir à sa volonté.

Ce n’est pas parce que le Christ a annoncé que des guerres précéderont son retour qu’il faut faire des guerres pour le hâter. Il en est évidemment de même pour l’extraordinaire retour des Juifs dans la terre sainte de Canaan suite à l’horreur de la shoah ou pour les développements actuels de cette présence.

Hélas, il est certain que les textes bibliques et les religions seront toujours exploités par ceux qui y trouvent un intérêt. Ne nous laissons cependant pas égarer et ne perdons pas pour autant confiance.

Combattez les références bibliques ou religieuses des Juifs d’aujourd’hui qui vous semblent injustifiées, mais ne perdez pas confiance dans la Parole de Dieu à cause de ce que des hommes en font.

Pour le surplus, je me rallie aux deux messages qui précèdent d’Olivier JC qui me semblent judicieux et je l’en remercie ici, tout en précisant, que, contrairement à ce qu’il pense, ce qu’il développe ne me semble pas du tout « à rebours de l'idéologie du dialogue interreligieux tel qu'il s'est malheureusement développé depuis le dernier Concile ».

Il me semble, bien au contraire, rappeler d’importantes nuances et précisions qu’il ne faut pas perdre de vue et qui se trouvent dans le principal et excellent document de synthèse publié en 2015 par la Commission du Vatican pour les relations religieuses avec le Judaïsme et intitulé : « Les dons et l’appel de Dieu sont irrévocables » (Rm 11, 29) Une réflexion théologique sur les rapports entre catholiques et juifs à l'occasion du 50e anniversaire de Nostra Ætate (n°4) :
http://www.christianunity.va/content/un ... ne/fr.html

Avatar de l’utilisateur
Olivier JC
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1108
Inscription : mer. 16 avr. 2008, 23:57
Localisation : Bordeaux

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Olivier JC » mer. 13 mars 2024, 13:44

Xavi a écrit :
mer. 13 mars 2024, 12:32
Pour le surplus, je me rallie aux deux messages qui précèdent d’Olivier JC qui me semblent judicieux et je l’en remercie ici, tout en précisant, que, contrairement à ce qu’il pense, ce qu’il développe ne me semble pas du tout « à rebours de l'idéologie du dialogue interreligieux tel qu'il s'est malheureusement développé depuis le dernier Concile ».
Il ne me semble pas que le présupposé du dialogue interreligieux tel qu'il se pratique soit que l'existence même d'Israël à l'heure actuelle soit la conséquence de son infidélité envers Dieu, et que la vocation de tout juif, de manière plus pressante encore que tout être humain à raison de sa qualité de récipiendaire des promesses divines, est de reconnaître que Notre Seigneur est le Messie envoyé par Dieu avec tout ce que cela implique conséquemment.

Parce qu'hormis dans la liturgie du Vendredi Saint, quoique de manière bien plus explicite dans la forme extraordinaire, j'avoue ne pas trop en voir les traces dans le dialogue interreligieux...
Missel 1962 a écrit :Orémus et pro Iudǽis : ut Deus et Dóminus noster illúminet corda eórum ; ut agnóscant Iesum Christum, salvatórem ómnium hóminum.
Prions aussi pour les Juifs, afin que notre Dieu et Seigneur éclaire leurs cœurs, et qu'ils reconnaissent Jésus-Christ comme le Sauveur de tous les hommes.
Missel 2002 a écrit :Toi qui as choisi Abraham et sa descendance pour en faire les fils de ta promesse, Conduis à la plénitude de la rédemption le premier peuple de l’Alliance comme ton Église t’en supplie.
Etant précisé, la matière étant sensible, que je considère, ainsi que j'ai eu l'occasion de l'écrire, que la position des juifs qui ont refusé de reconnaître le Messie en la personne de Notre Seigneur n'est pas illégitime dans le cadre de l'interprétation qui était faite des promesses divines à l'époque. Reconnaître que Jésus accomplissait en sa personne les promesses messianiques était une possibilité dans le cadre de cette interprétation, elle n'était pas la seule possibilité, ni même la plus évidente d'ailleurs (preuve en est, je l'ai déjà souligné ailleurs, la question posée à Notre Seigneur le jour de l'Ascension sur le rétablissement de la royauté sur Israël). Il y a des raisons parfaitement défendables d'un point de vue rationnel en théologie juive pour refuser d'accorder foi à Notre Seigneur : en résumé rapide, le Royaume messianique tel que promis par Dieu n'est pas uniquement un Royaume spirituel, il est bel et bien un Royaume "corporel" ; il est certes la loi de Dieu inscrite dans le cœur, il est également le lion dormant avec l'agneau ; et il est de fait que cette deuxième partie de la promesse n'est pas encore réalisée ; or, ce qui permet de reconnaître le Messie, c'est précisément qu'il accomplit les promesses.

+
MOTUS IN FINE VELOCITOR

Avatar de l’utilisateur
Xavi
Prætor
Prætor
Messages : 2203
Inscription : mar. 28 juil. 2009, 14:50

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Xavi » mer. 13 mars 2024, 16:39

Bonjour Olivier JC,

Merci pour votre partage.

Pour les bonnes raisons que vous avez indiquées vous-même dans vos messages précédents, il est exact que le dialogue de l’Église avec les Juifs ne se base pas sur un jugement de leur fidélité à Dieu. Nous ignorons ce qui se passe dans le cœur de chacun des Juifs et les obstacles à leur conversion.

Nous pouvons et devons annoncer l’Évangile mais la foi ou l’absence de foi des autres reste pour chacun un mystère.

L’existence et la persistance des Juifs depuis 2000 ans est un fait et, si nous pouvons considérer et annoncer fermement qu’ils sont dans l’erreur en rejetant la messianité du Christ et sa divinité, nous ne pouvons en juger en affirmant qu’il s’agit d’une infidélité dans le chef de chacun d’eux. Car, on ne peut être coupable d’infidélité qu’en connaissance de cause et que sait-on de ce que chaque juif connaît du Christ ?

Pour le surplus, vous indiquez cependant un second point sur lequel le dialogue interreligieux actuel de l’Église avec les Juifs vous paraît critiquable, mais, en réalité, tout ce que j’ai lu confirme, comme vous l’écrivez à juste titre, que « la vocation de tout juif, de manière plus pressante encore que tout être humain à raison de sa qualité de récipiendaire des promesses divines, est de reconnaître que Notre Seigneur est le Messie envoyé par Dieu avec tout ce que cela implique conséquemment ». Bien sûr !

Tout amoindrissement de l’annonce de l’Évangile et de l’appel de tout homme (y compris évidemment tout juif) à la conversion au Christ serait une erreur qui créerait de la confusion.

Vous avez parfaitement raison de vous écarter d’un dialogue qui irait en ce sens, mais il me semble que c’est à tort que vous le reprochez à l’Église. Pour en voir la trace, il vous suffira de relire le document de synthèse indiqué à la fin de mon message précédent.

Mais, attention, les mots sont parfois de significations complexes et susceptibles d’interprétations erronées. Il va de soi, par exemple, que des restrictions exprimées concernant la conversion des Juifs ne peuvent contredire ce que vous indiquez mais doivent se comprendre en ce sens qu’il n’est pas demandé aux Juifs de changer de religion.

Parce que nous savons que, bien comprise selon la lumière du Christ, cette religion fondée sur l’Ancien Testament est un excellent pédagogue qui conduit au Christ.

Souvenons-nous de ces paroles fortes de saint Jean-Paul II, prononcées le 13 avril 1986 à la synagogue de Rome, lorsqu’il a dit que « La religion juive ne nous est pas extrinsèque, mais, d’une certaine manière, elle est intrinsèque à notre religion. Nous avons donc avec elle des rapports que nous n’avons avec aucune autre religion. Vous êtes nos frères préférés, et d’une certaine manière, on pourrait dire nos frères aînés ».

L’Église ne demande pas aux Juifs de changer de religion, mais de découvrir Celui que leur religion elle-même leur indique et, par Lui, toutes les grâces de l’Église et des sacrements ainsi que le dépassement des anciens prescrits.

Vous comparez deux prières des missels de 1962 et 2002. Il faut bien sûr les lire sans les mettre en contradiction et il est important d’observer que la formule de 2002 a l’avantage de coller davantage au réel des Juifs d’aujourd’hui en ce qu’ils sont (même sans en être conscients) sur un chemin (la loi juive) qui les mène vers le Christ.

Aussi, la prière de 2002 demande de les « conduire » à la plénitude de la rédemption (qui est en Jésus-Christ) ce qui demande à Dieu de les accompagner sur le chemin qu’ils suivent pour les conduire « vers » cette plénitude à atteindre, là où la prière de 1962 ne considère que le but ultime en demandant « qu’ils reconnaissent » mais sans tenir compte du chemin à parcourir afin d’atteindre ce but.

Il faut bien sûr prier pour qu’ils se convertissent (c’est le but), mais, de même que l’incarnation fut précédée d’un cheminement de nombreux siècles, cela reste vrai pour le chemin à parcourir par ceux qui suivent aujourd’hui la religion juive et, à cet égard, par la prière de 2002 que vous citez, l’Église ne se soucie pas seulement du but (reconnaître Jésus-Christ, la plénitude de la rédemption), mais aussi de toutes les difficultés du chemin qui y mène.

Vos observations sur les difficultés de compréhension des Juifs sont d’ailleurs très pertinentes à cet égard et elles ne peuvent que vous aider à comprendre ce que la prière de 2002 ajoute à la prière de 1962 dont elle reprend le contenu dans les mots « plénitude de la rédemption » même si elle ne l’explicite pas davantage du fait que la reconnaissance du Christ n’est pas encore atteinte sur le chemin où les Juifs se trouvent ici et maintenant du fait, notamment, des difficultés intellectuelles que vous indiquez.

« Conduis-les » sur le chemin qui est le leur, celui de l’ancienne alliance, durant ce temps où ils ne voient pas le Christ tel qu’il est. Souvenons-nous que Jésus lui-même fut très discret sur sa messianité et sa divinité et que la préparation d’un cœur peut être longue avant la moisson.

Gaudens
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1561
Inscription : mer. 25 avr. 2018, 19:50
Conviction : chrétien catholique

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Gaudens » mer. 13 mars 2024, 18:58

Bonjour à tous deux,
Oivier :Cette question du « Royaume corporel » est ben la pierre d’achoppement,je crois,celle qui empêche les Juifs actuels d reconnaitre la pleine messianité du Christ et c’est plus qu’une question politique.Tant qu’eux et nous n’aurons pas compris que le Royaume du Messie n’est pas de ce monde ,selon les paroles mêmes du Christ à Pilate, le dialogue en restera à des échanges courtois, à condition même que la partie chrétienne ne consente pas à voir dans le judaïsme une voie parallèle et équivalente, bénéficiant pleinement des Allliances anciennes, jusqu’à la fin des temps et supposée être en charge de l’aspect terrestre de la Rédemption… Ce qui me semble être le courant dominant jusqu’à maintenant chez les professionnels de ce dialogue . Avec en effet le risque de devoir reconnaitre ,le jour venu, des débordements de type géopolitique auxquels je me référais.
Pour le reste, Xavi ,vous avez raison : ’Eglise n’a pas le droit de demander aux Juifs qui reconnaitraient pleinement Jésus comme Messie et Fils de Dieu, de renoncer à ce qui fait la forme (et un peu plus qu’elle) de leur religion actuelle.Nous devrions admettre qu’ils auraient le droit d’appllquer les préceptes de la Loi, tenir des services synagogaux autour de la Torah ,etc…. voire de créer une Eglise orientale juive au même titre que les autres. Ce que l’Eglise a de facto refusé depuis l’an 135 ,quand les évêques de Jérusalem cessèrent d’être des Juifs de la famille même de Notre Seigneur .Elle leur donnait seulement le choix de cesser d’être eux-mêmes , ce qui était inacceptable pour eux.
Cela dit, l’extrême popularité de Jésus quand il multipliait ses voyages, messages et miracles sur la terre d’Israel et un peu au-delà, ainsi que la foule enthousiaste de Jérusalem le jour de sa grande entrée, tendent à montrer que dans les années qui suivirent l’accueil de Sa messianité était peut -être dominant parmi le peuple.Les judéo-chrétiens, avant de se heurter à l’incompréhension des Eglises des Gentils après 135 ,eurent à affronter la persécution rabbinique ,commencée avec la lapidation d’Etienne. C’est à cette époque que peut avoir été composée la Bénédiction/malédiction des minims et nostrim que j’évoquais plus haut.Pire encore, pendant la guerre de 132/135 , le faux messie Simon Bar Kochba, devenu chef de guerre des révoltés, imposait aux Judéo-chrétiens la rétractation ou la mort, avant d'être massacré par l'armée romaine avec tout le reste de la rébellion judéenne. Après cette douloureuse et double "solution finale", cette communauté fondit alors et jamais les Eglises apostoliques n’eurent depuis lors le souci de lui redonner vie :l es frères Ratisbonne au XIXè siècle, « convertis » du judaïsme ,en sont un bon exemple.

Avatar de l’utilisateur
Xavi
Prætor
Prætor
Messages : 2203
Inscription : mar. 28 juil. 2009, 14:50

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Xavi » mer. 13 mars 2024, 22:04

Cher Gaudens,

Il n’est en aucun cas question d’une équivalence entre le judaïsme et le christianisme. Le Christ est le chemin, la vérité et la vie. Il n’a ni équivalent, ni alternative.

À cet égard, même si des obstacles demeurent par ailleurs, il y a tout ce qu’il faut dans l’Ancien Testament pour permettre aux Juifs de le reconnaître et de dépasser la pierre d’achoppement de l’idée d’un royaume messianique qui serait seulement ou principalement corporel, terrestre. Pour le reste, il m’est difficile de suivre vos craintes et d’imaginer une prise en charge par les Juifs de « l’aspect terrestre de la rédemption » comme si l’homme était divisible, ce qu’il n’est pas. L’être humain est corporel et spirituel.

Pour le surplus, merci pour votre évocation historique des événements des environs l’an 135 qui cependant ne semblent plus guère influencer l’Église actuelle.

Avatar de l’utilisateur
Olivier JC
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1108
Inscription : mer. 16 avr. 2008, 23:57
Localisation : Bordeaux

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Olivier JC » jeu. 14 mars 2024, 9:44

Bonjour Gaudens,
Gaudens a écrit :
mer. 13 mars 2024, 18:58
Oivier :Cette question du « Royaume corporel » est ben la pierre d’achoppement,je crois,celle qui empêche les Juifs actuels d reconnaitre la pleine messianité du Christ et c’est plus qu’une question politique.Tant qu’eux et nous n’aurons pas compris que le Royaume du Messie n’est pas de ce monde ,selon les paroles mêmes du Christ à Pilate, le dialogue en restera à des échanges courtois, à condition même que la partie chrétienne ne consente pas à voir dans le judaïsme une voie parallèle et équivalente, bénéficiant pleinement des Allliances anciennes, jusqu’à la fin des temps et supposée être en charge de l’aspect terrestre de la Rédemption… Ce qui me semble être le courant dominant jusqu’à maintenant chez les professionnels de ce dialogue . Avec en effet le risque de devoir reconnaitre ,le jour venu, des débordements de type géopolitique auxquels je me référais.
C'est exactement cela : ce qui fonde la légitimité du refus de reconnaître le Messie en théologie juive est précisément que cet aspect des promesses n'a pas été encore réalisé. Il y eut, après Jésus, une autre personne qui a été pressentie comme étant le Messie. La raclée dispensée par l'armée romaine en 70 est venue démontrer qu'il ne l'était pas.

Pour autant, l'attente du royaume corporel est également une donnée de la théologie chrétienne, ce qui est plutôt logique puisqu'elle est biblique. Il s'agit donc à la fois d'une pierre d'achoppement pendant le temps des nations, mais ce sera aussi le motif de la réunion. C'est en voyant Notre Seigneur établir son Royaume et, de ce fait, achever la réalisation des promesses, qu'Israël pourra le reconnaître, et le reconnaîtra, comme le Messie.

+
MOTUS IN FINE VELOCITOR

Gaudens
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1561
Inscription : mer. 25 avr. 2018, 19:50
Conviction : chrétien catholique

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Gaudens » ven. 15 mars 2024, 18:27

Le terme de Royaume corporel employé par Olivier est ambigu.Il est exact que le Christ reviendra avec son corps glorieux,en avant - garde de celui que nous recevrons à la résurrection des morts.Mais nulle part l'enseignement de l'Eglise ne me semble parler d'un Royaume terrestre .Le CEC dit bien "jusqu' à l'heure où (971) seront réalisés les nouveaux cieux et la nouvelle terre où la justice habite..."(671,citant LG 48).
La notion de millenium terrestre n'est-elle pas la source d'hérésies récurrentes ,reprises par une bonne part des Evangéliques actuels ?

Avatar de l’utilisateur
Olivier JC
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1108
Inscription : mer. 16 avr. 2008, 23:57
Localisation : Bordeaux

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Olivier JC » ven. 15 mars 2024, 18:43

Bonsoir Gaudens,

La notion de millenium terrestre a effectivement été à la source de bien des hérésies, à l'exemple de celle de Joachim de Flore et sa triste postérité si bien étudiée par le Card. de Lubac.

Ce qui fait déraper dans l'hérésie est de le placer avant le jugement dernier, alors qu'il se situe après le jugement dernier et avant que Notre Seigneur ne remettre au Père toute royauté. Il n'y a pas, il n'y a jamais eu et il n'y aura jamais de règne de Notre Seigneur autre que spirituel (doctrine de la royauté sociale) avant son retour à fin du temps des Nations.

+
MOTUS IN FINE VELOCITOR

Gaudens
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1561
Inscription : mer. 25 avr. 2018, 19:50
Conviction : chrétien catholique

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Gaudens » lun. 18 mars 2024, 11:38

Olivier,je ne vois pas du tout ce que pourrait concrétement signifier un règne terrestre de Notre Seigneur ,même en le limitant à une période (mais serions nous encore dans le temps?) entre Jugement dernier et remise de toutes choses au Père.
Si règne terreste il y avait,à qui s'imposerait-il? Aux centaines de milliards d'hommes ressuscités,qui auraient pourtant de la peine à tenir ensemble sur notre pauvre terre? Et pour y faire quoi? Vivre d'agriculture, d'élevage,d'industrien certes débarassées de tout péché ? Ou pour rester en simple adoration ? Il me semble que ce genre de supputations n'a pas de sens .Le Royaume du Christ est spirituel.

Ombiace
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 2808
Inscription : dim. 24 août 2014, 14:38

Re: Ancien et Nouvel Israel

Message non lu par Ombiace » mar. 19 mars 2024, 4:18

Olivier JC a écrit :
lun. 26 févr. 2024, 14:18
Quant au retour des juifs sur la terre d'Israël, il faut savoir que le sionisme trouve son origine dans un courant de pensée judaïque qui considère que le Messie viendra (puisque de leur point de vue il n'est point encore venu) non pas tant lorsque le peuple aura retrouvé sa terre, mais lorsque le Temple aura été reconstruit. C'est d'ailleurs toute la difficulté du conflit israélo-palestinien puisque de ce point de vue, à ce jour le plus influent en Israël, l'objectif n'est pas seulement d'expulser les palestiniens, il est in fine de détruire dôme du Rocher et mosquée Al-Aqsa aux fins de faire place nette pour bâtir le troisième Temple de Jérusalem. Ce pourquoi ce conflit n'est pas prêt d'être réglé.

Il faut savoir, pour être complet, qu'il y a discussion sur le point de savoir si la reconstruction du Temple précède la venue du Messie, ou si c'est le Messie qui procèdera à la reconstruction du Temple en même temps qu'il rétablira la royauté en Israël et soumettra les nations à celui-ci.

S'agissant enfin de votre interrogation, il est évident que l'installation des juifs en Terre Sainte à compter de 1948 entre dans les desseins de la Providence divine, comme d'ailleurs tout ce qui se passe ici bas selon qu'il est écrit : "Tout ce que veut le Seigneur, il le fait, dans les cieux et sur la terre, dans la mer et dans tous les abîmes". Pour autant, à mon humble avis, l'Eglise n'a pas plus à autoriser, favoriser, défavoriser ou prendre partie dans cette problématique. La mission de l'Eglise est le salut des âmes et non la géopolitique.
Bonjour Olivier, et autre intervenants

Ce que je vais écrire est peut-être simpliste, vous me direz.. (ou pas) :

Il me semble en effet plausible qu'il existe une rancune persistante entre une frange de l'humanité, celle (1) des véritables israélites, comme Gaudens le rappelle le 27/02 au sujet de Nathanael , et celle (2) des autres.

Considérons simplement la manière de concevoir le don chez ces (1) et respectivement ces (2):

Je suppute que pour les (1), il y a une gratuité absolue de leur générosité. Quant aux (2), j'imagine que leur générosité n'est pas "véritable", et qu'ils en comptabilisent au contraire la prodigalité, dans l'espoir d'avoir un retour.
Les (1) sont bien logiquement surpris de l'aigreur que les (2) peuvent entretenir à leur égard, qui viendrait tout droit des espoirs déçus de ces (2) à recevoir une compensation pour leur générosité.
En effet, la générosité de ces (1), absolument gratuite, ne requiert pas de retour de générosité, et lorsqu'un geste, un don une générosité leur est faite, ils n'estiment pas avoir de retour à prodiguer, puisqu'ils pensent que cette générosité est vraiment gratuite, elle aussi.
Ils sont dépourvus de ces calculs que je suppose assimilables à cette ruse
évoquée par Jésus en Jn 1,
47 Lorsque Jésus voit Nathanaël venir à lui, il déclare à son sujet : « Voici vraiment un Israélite : il n’y a pas de ruse en lui. »
C'est ce différentiel de générosité qui, selon moi, peut probablement entretenir bien des conflits

Gaudens
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1561
Inscription : mer. 25 avr. 2018, 19:50
Conviction : chrétien catholique

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Gaudens » mar. 19 mars 2024, 19:00

C'est sans doute psychologiquement et spirituellement bien vu,Ombiace. Reste à savoir qui sont les personnes en catégories 1 et 2 ...Pas simple !

Avatar de l’utilisateur
Xavi
Prætor
Prætor
Messages : 2203
Inscription : mar. 28 juil. 2009, 14:50

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Xavi » mar. 19 mars 2024, 19:49

Bonsoir à chacun,

Quel homme pourrait prétendre être dans la catégorie 1 de ceux chez qui il y aurait une « une gratuité absolue de leur générosité » ?

Le peuple élu d’Israël, comme l’Église, est fait de pécheurs souvent infidèles, souvent dans l’erreur, et parfois pires encore. C’est Dieu, par son alliance, qui forme un peuple et Dieu reste toujours fidèle de sorte que les fautes des hommes ne peuvent jamais suffire à détruire son alliance.

À toutes les époques et dans toutes les sociétés, la religion a toujours été instrumentalisée par ceux qui aiment le pouvoir pour servir leurs politiques.

C’est inévitablement le cas, dans une mesure variable, dans le contexte actuel de l’État d’Israël. La politique du gouvernement de Benjamin Netanyahou, les opérations de Tsahal à Gaza ou les actions des colons israéliens en Cisjordanie peuvent chercher et trouver des arguments ou des motivations dans les textes bibliques, mais sont dénués de pertinence pour mettre en doute l’alliance de Dieu avec le peuple qui, dans la vie terrestre de la chair, continue à se référer à l’alliance conclue avec Abraham, Moïse puis David.

La distinction proposée entre les purs (les vrais) et les autres me semble donc impraticable. Le bon grain et l’ivraie sont et resteront mélangés non seulement parmi toutes les personnes mais même en chacune des personnes.

Une seule chose nous importe c’est de ne pas confondre, d’une part, l’alliance donnée par Dieu avec, d’autre part, le peuple de ceux qui l’acceptent. Parmi le peuple élu destinataire de cette alliance, il y a de tout : des fidèles et des infidèles, qui sont tous des pécheurs avec leurs failles. Jamais aucune faute de ce peuple, ni aucun développement religieux au sein de ce peuple, ni aucune action de ses dirigeants ne peuvent en rien modifier l’Alliance donnée par Dieu, ni la révoquer.

À cet égard, les opinions sur le règne de mille ans ne sont que des interprétations parmi beaucoup d’autres, plus ou moins bien inspirées.

Un « vrai » israélite, comme Nathanaël en est un exemple, n’est pas un homme sans péché, ni un homme dont la théologie ou les pensées seraient parfaites. C’est seulement un homme qui tourne son regard vers la Torah et cherche à comprendre ce qui est vrai dans la lumière qu’il reçoit d’elle. Et cet homme peut être rempli de questions sans réponse ou de réponses erronées, mais il ne cesse de chercher le vrai dans la fidélité à la Torah.

Il y a certes aujourd’hui, un « nouvel Israël » en ce sens que le Christ a ouvert un chemin de vie éternelle pour tous les hommes, greffé sur l’Israël d’Abraham, Isaac et Jacob, mais l’expression est susceptible d’être mal comprise comme si le greffon qu’est l’Église avait anéanti les racines et l’arbre qui le porte, ce qui n’est pas le cas.

Ce que le Catéchisme de l’Église nous enseigne c’est que « L’Ancienne Alliance n’a jamais été révoquée » (C.E.C., n° 121) et que « le Peuple de Dieu de l’Ancienne Alliance et le nouveau Peuple de Dieu tendent vers des buts analogues : l’attente de la venue (ou du retour) du Messie » (C.E.C., n° 840).

L’exhortation apostolique Evangelii Gaudium du Pape François enseigne que « même si certaines convictions chrétiennes sont inacceptables pour le Judaïsme » et que « l’Église ne peut pas cesser d’annoncer Jésus comme Seigneur et Messie », l’Église considère que « Dieu continue à œuvrer dans le peuple de la première Alliance », qu’il y fait naître « des trésors de sagesse qui jaillissent de sa rencontre avec la Parole divine », que, pour cela, l’Église « s’enrichit lorsqu’elle recueille les valeurs du Judaïsme », et qu’il existe « une riche complémentarité qui nous permet de lire ensemble les textes de la Bible hébraïque et de nous aider mutuellement à approfondir les richesses de la Parole » (n° 249).

Comment ne pas penser à ses mots prononcés le 13 avril 1986 à la synagogue de Rome par saint Jean-Paul II lorsqu’il a déclaré que « La religion juive ne nous est pas extrinsèque, mais, d’une certaine manière, elle est intrinsèque à notre religion. Nous avons donc avec elle des rapports que nous n’avons avec aucune autre religion. Vous êtes nos frères préférés, et d’une certaine manière, on pourrait dire nos frères aînés ».

En 2015, la Commission du Vatican pour les relations religieuses avec le Judaïsme a publié un important et remarquable document de synthèse intitulé : « Les dons et l’appel de Dieu sont irrévocables » (Rm 11, 29) Une réflexion théologique sur les rapports entre catholiques et juifs à l'occasion du 50e anniversaire de Nostra Ætate (n°4).

Certains éclaircissements majeurs y apparaissent en toute clarté :

« Tout en affirmant que le salut dépend de la foi au Christ, explicite ou même implicite, l’Église ne met pas en doute la permanence de l’amour de Dieu pour le peuple élu d’Israël. La théologie du remplacement ou de la supersession, qui oppose deux entités séparées, l’Église des gentils et la Synagogue rejetée dont elle aurait pris la place, est dépourvue de tout fondement. » (n° 17)

« [u]La foi des juifs[/u] attestée dans la Bible, que l’on trouve dans l’Ancien Testament, n’est pas pour les chrétiens une autre religion, mais le fondement de leur propre foi, même s’il est clair que pour eux la figure de Jésus est la seule clé de lecture des Écritures de l’Ancien Testament » (n° 20).

« les douze tribus sont vraiment devenues une nation, conscientes d’être le peuple de Dieu, dépositaire de son message et de ses promesses et témoin de sa préférence miséricordieuse parmi les nations et pour les nations (cf. Is 26, 1-9 ; 54 ; 60 ; 62). Pour instruire son peuple en vue de l’accomplissement de sa mission et de la transmission de la révélation qu’il lui a confiée, Dieu a donné au peuple d’Israël la Loi qui détermine un mode de vie particulier (cf. Ex 20 ; Dt 5) et le distingue des autres peuples. » (n° 21)

« Dieu s’étant révélé à travers sa Parole, il peut être compris par l’humanité dans les situations historiques concrètes. Cette parole invite tous les hommes à répondre. Si leur réponse est en accord avec la parole de Dieu, ils ont une relation juste avec lui. Pour les juifs, cette parole peut être apprise grâce à la Torah et aux traditions qui en découlent. La Torah donne des instructions pour une vie réussie dans une relation juste avec Dieu. Celui qui observe la Torah a la plénitude de vie (cf. Pirqe Avot II, 7). Et surtout, en observant la Torah, les juifs prennent part à la communion avec Dieu. » (n° 24)

Gaudens
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1561
Inscription : mer. 25 avr. 2018, 19:50
Conviction : chrétien catholique

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Gaudens » mer. 20 mars 2024, 0:26

Je suis bien d'accord, cher Xavi, pour dire avec vous qu'aucun d'entre nous ne peut affirmer être de la "première" catégorie. Il y a en nous toujours, au moins virtuellement, un petit quelque chose qui est prêt à ruser, à marchander avec Dieu et avec les hommes.
Mais je crois qu’il ne faut pas jouer sur les mots. S’il est vrai que Dieu est fidèle et ne révoque pas son Alliance, celle-ci peut être rompue par l’autre partie . L’Écriture abonde en citations expresses en ce sens.
Et par ailleurs, il ne faut pas non plus se payer de mots au bénéfice de concepts certes magnifiques mais qui appellent une traduction concrète (un peu comme lorsqu’on parle de « Royaume terrestre »). L’Alliance sinaïtique avec Israël se concrétisait du côté de Dieu par un soutien aux guerres menées par Israël , dont la Révélation chrétienne nous enseigne qu’elles servaient à la pérennité du peuple, maintenu souvent difficilement dans la fidélité à cette alliance, afin que de ce peuple vienne le Messie Fils de Dieu, seul capable d’établir une Alliance nouvelle et éternelle avec l’humanité entière, à travers l’Église, Nouvel Israël. La part de Dieu dans cette alliance là est de maintenir éternellement l’Église, malgré les fautes de ses enfants et les vicissitudes historiques, comme source de grâce et de bénédiction. Qu’aurait aujourd’hui le sens réel de l’Alliance sinaïtique supposée maintenue telle quelle avec le Vieil Israël ? Ne croyez-vous pas que celui-ci l’interpréterait (de fait l’interprète ) de la même manière, belliqueuse en fait, que dans les temps pré-christiques ?
Pourquoi l’Église devrait-elle faire comme si elle ne percevait pas cette réalité ?
Dernière modification par Gaudens le jeu. 21 mars 2024, 13:55, modifié 1 fois.

Ombiace
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 2808
Inscription : dim. 24 août 2014, 14:38

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Ombiace » mer. 20 mars 2024, 7:35

Gaudens a écrit :
mar. 19 mars 2024, 19:00
C'est sans doute psychologiquement et spirituellement bien vu,Ombiace. Reste à savoir qui sont les personnes en catégories 1 et 2 ...Pas simple !
Bonjour Gaudens, vous dites également à Xavi:
Gaudens a écrit :
mer. 20 mars 2024, 0:26
Je suis bien d'accord,cher Xavi, pour dire avec vous qu'aucun d'entre nous ne peut affirmer être de la "première" catégorie.Il y a en nous toujours , au moins virtuellement, un petit quelque chose qui est prêt à ruser, à marchander avec Dieu et avec les hommes.
et pour commenter également cette citation de Xavi (bonjour à vous, xavi) que vous rejoignez dans l'esprit :
Xavi a écrit :
mar. 19 mars 2024, 19:49
Quel homme pourrait prétendre être dans la catégorie 1 de ceux chez qui il y aurait une « une gratuité absolue de leur générosité » ?
Pour moi, je pensais simplement à la générosité dans les relations de bon voisinage, non dans la relation à Dieu, et sans non plus penser à la générosité des premiers chrétiens de Act 4 .

Je voulais dire que lorsque ceux de catégorie (1) offrent quelque chose à un voisin, à un proche, ou lui rendent un service, c'est sans autre intention que de témoigner de leur considération/affection à l'égard du destinataire, avec il est vrai l'attente de l'agrément de l'offrande par le destinataire (ce qui parfois n'est pas le cas ; il faut reconnaître que la générosité est parfois mal perçue).
Ainsi, même s'ils n'attendent pas de gestes en retour dans l'immédiat, ils peuvent cependant se demander si leur générosité a été vraiment accueillie lorsque ces gestes en retour ne sont pas réalisés, si ils sont possibles par le premier bénéficiaire (*), mais ce n'est pas la marque d'un souhait de "dédommagement".
Ce serait plutôt juste inspiré par le souci de vérifier que leur générosité a été bien vécue
Je me demande si ce ne serait pas la "générosité des enfants de lumière"(1)?

(*) Lorsque ces gestes en retour ne sont pas possible par le bénéficiaire, c'est l'humilité qui permet d'entretenir les relations entre les deux parties.

Je soupçonne les (2) d'adresser plus ou moins intentionnellement aux (1) des générosités, parfois secrètes, en tout cas comptabilisées secrètement, et de "récupérer" leur "mises généreuses" sans concertation avec les (1), en prélevant clandestinement ce qui les intéresse dans les biens que possèdent les (1).
On comprend que cela puisse devenir conflictuel.
Cela pourrait relever d'une "générosité des enfants des ténèbres" (2)?

Je pense en tout cas que cela peut s'inscrire non seulement dans la relation de voisinage, mais aussi quelquefois cela relève t il de la démarche politicienne.

Voilà ainsi circonscrit, ci dessus, le champs d'application de mon hypothèse. Vous voyez qu'elle s'étend aux relations humaines du quotidien, sans cette sublimation relevant du (1) qu'ont mise en œuvre Marie à l'Annonciation, éventuellement les mages, les bergers à Bethléem, assurément Dieu au Golgotha, les premiers chrétiens dans leurs partages d'Act 4, pas du tout Ananie dans Act 5, etc..

Avatar de l’utilisateur
Xavi
Prætor
Prætor
Messages : 2203
Inscription : mar. 28 juil. 2009, 14:50

Re: Ancien et Nouvel Israël

Message non lu par Xavi » mer. 20 mars 2024, 15:02

Bonjour à chacun,

@Gaudens

Merci pour votre réflexion profonde.

« jouer sur les mots », « se payer de mots »… Cela exprime certes la méfiance que vous ressentez.

Hélas, dans tout dialogue, nous n’avons que des mots pour nous exprimer et chacun de nous les ressent de manière personnelle avec des nuances parfois très inconscientes, de sorte qu’un dialogue exige toujours d’explorer le sens des mots pour celui qui les utilise. Cela peut donner l’impression d’une manipulation trompeuse et on trouve aisément dans la réalité des raisons pour nourrir cette impression.

Ainsi, lorsque vous écrivez que « S’il est vrai que Dieu est fidèle et ne révoque pas son Alliance, celle-ci peut être rompue par l’autre partie », c’est certain et personne ne le conteste et, pourtant, vous voulez exprimer une contradiction avec des mots qui sont exacts, mais qui, cependant, cachent le vrai désaccord. L’autre partie peut certes rompre l’alliance, mais tout ce sujet concernant les Juifs s’intéresse surtout au fait que cette rupture de la part d’humains ne supprime pas l’Alliance par Dieu. Dieu continue à maintenir son alliance et à inviter son peuple à y être fidèle même après qu’il l’ait rejetée et rompue. Cette alliance subsiste et n’est pas révoquée, même après avoir été rejetée et rompue par l'autre partie.

Mais, la difficulté concrète est réelle.

Vous en faites un excellent résumé de ce qui me semble être votre pensée et le fondement de votre méfiance : « L’Alliance sinaïtique avec Israël se concrétisait du côté de Dieu par un soutien aux guerres menées par Israël, dont la Révélation chrétienne nous enseigne qu’elles servaient à la pérennité du peuple, maintenu souvent difficilement dans la fidélité à cette alliance, afin que de ce peuple vienne le Messie Fils de Dieu, seul capable .d’établir une Alliance nouvelle et éternelle avec l’humanité entière, à travers l’Église, Nouvel Israël. ».

Vous semblez limiter ainsi l'alliance sinaïtique à la venue du Christ et vous méfier de cette alliance sinaïtique parce qu’elle « se concrétisait du côté de Dieu par un soutien aux guerres menées par Israël » ce qui, aussitôt, vous fait craindre le pire dans la réalité concrète actuelle : « Qu’aurait aujourd’hui le sens réel de l’Alliance sinaïtique supposée maintenue telle quelle avec le Vieil Israël ? Ne croyez-vous pas que celui-ci l’interpréterait (de fait l’interprète) de la même manière, belliqueuse en fait, que dans les temps pré-christiques ? ».

Merci d’être ainsi aussi franc que clair. Vous avez raison de craindre l’interprétation belliqueuse que vous indiquez dans la situation concrète actuelle dans l’antique pays de Canaan. Vous serez cependant d’accord pour considérer qu’aucune interprétation humaine ne peut suffire à écarter la Parole de Dieu elle-même qu’il incombe de comprendre à la lumière de l’Évangile.

Mais, à ce sujet, vous pouvez aussitôt penser qu’il ne « faut pas se payer de mots » et, à cet égard, la vraie difficulté se trouve dans la Parole de Dieu elle-même. Vous écrivez que « du côté de Dieu » cela se concrétisait, dans l’Ancien Testament, par un « soutien » aux guerres d’Israël.

Et, oui, c’est une vraie difficulté. Comment comprendre aujourd’hui un tel soutien ? Que signifie-t-il réellement ?

La violence de certains propos de Dieu dans l’Ancien Testament est parfois extrême.

Cette question nous plonge dans une perplexité tout aussi extrême. En 2024, notre sensibilité, notre culture, nos valeurs, sont tellement autres que ce qu’elles étaient il y a plus de 3.000 ans, que nous sommes confrontés à une réelle impossibilité de nous représenter exactement le sens des paroles exprimées à cette époque.

Je n’ai hélas pas de réponse satisfaisante à vous proposer et cette observation est très importante dans le sujet concernant le peuple d’Israël qui subsiste aujourd’hui encore depuis plus de 3.000 ans.

Dans le dialogue judéo-chrétien, un rabbin américain, Yozef Soloveitchik, a attiré l’attention à cet égard sur l’importance de pouvoir reconnaître une « incommunicabilité » entre les Juifs, héritiers d’une culture et d’un langage spécifiques nourris de la Torah et de sa mise en pratique depuis des millénaires, et les chrétiens qui, après quelques générations, ont abandonné cette mise en pratique et ont développé une compréhension particulière de la Torah fondée sur le Nouveau Testament.

Cette incommunicabilité ne concerne pas que le dialogue judéo-chrétien, mais fait partie de la réalité humaine qui peut se retrouver partout.

En effet, le langage de chacun de nous est façonné dans un creuset personnel jamais identique à celui de personne d’autre. Cette source, dans la chair de chacun de nous, nous différencie des autres dans une mesure plus ou moins grande selon ce que nous avons en commun.

Et, c’est à cet égard que notre dialogue avec les Juifs se révèle d’une importance essentielle pour nous chrétiens.

L’Israël de l’alliance avec Abraham et Moïse est, et restera à jamais, le berceau du Christ. Ce berceau subsiste, quelles que soient les évolutions qu’on peut constater. Ce berceau (le peuple juif) donne une compréhension particulière à ceux qui en vivent encore aujourd’hui dont nous ne disposons pas.

Le peuple juif est en cela semblable à une mère dont l’expérience de la maternité, avec neuf mois de grossesse et un accouchement, ne peut être « pleinement » partagée avec ceux qui n’ont pas vécu cette expérience dans leur chair. Il faut accepter qu’il y a là, par exemple, une partie incommunicable d’un vécu dont une mère peut être le témoin d’une manière plus étendue et particulière que celui qui n’a jamais été mère.

Il en est de même de Jésus de Nazareth et de sa vie dans la chair que nous rapportent les évangiles. N’oublions pas que non seulement Jésus, mais aussi que tous les apôtres et ses premiers disciples étaient juifs ou, du moins, pétris de culture juive. C’est dans le peuple juif que Dieu s’est incarné. Même si certains païens s’en sont rapprochés et ont été intégrés, les débuts de l’Église sont juifs.

Même les pèlerins de toutes les nations le jour de la Pentecôte étaient des personnes qui venaient en pèlerinage à Jérusalem, au temple de l’alliance mosaïque.

Ce n’est qu’après quelques dizaines d’années et l’intervention déterminante de saint Paul que l’adhésion à la foi chrétienne s’est détachée de la loi mosaïque et donc de la judéité lorsqu’il a été décidé que les chrétiens venant du monde païen ne devaient plus être circoncis, ce qui est la base de l’alliance selon la chair conclue avec Abraham.

Depuis lors, les chrétiens ont cependant perdu la connaissance de la pratique de la loi mosaïque et de l’ancienne alliance qui fonde le peuple juif.

Mais, ce peuple juif nous reste essentiel pour comprendre les évangiles dans lesquels Jésus parle et agit en juif à l’égard d’autres juifs.

L’évangile de dimanche nous a rappelé à cet égard que Jésus lui-même était attentif au caractère essentiel du cadre juif pour comprendre ses paroles, ses actes, sa messianité et sa divinité.

Dans cet évangile, quelques Grecs voulaient seulement « le voir » (Jn 12, 20-21) et il n’a donné aucune réponse positive à leur demande, mais au contraire il a choisi de se cacher (cf. Jn 12, 36). Il a dit ailleurs qu’il n’était venu que pour les brebis perdues d’Israël. Ce n’est pas par sectarisme qu’il le faisait, mais parce que sa présence, dans la chair, était seulement pour les Juifs à ce moment et Jésus a postposé la rencontre demandée par ces Grecs : « quand j'aurai été élevé de terre, j’attirerai tous les hommes à moi » (Jn 12, 32).

Qui, mieux que les Juifs, pourrait nous aider à comprendre le sens et la portée, dans la chair, des paroles et des actes de Jésus de Nazareth ? La connaissance par l’esprit est, bien certainement, prépondérante et l’Esprit Saint est essentiel pour notre connaissance. Mais, ce que nous ressentons dans la chair n’est pas négligeable car nous sommes faits d’une nature corporelle et spirituelle, indivisiblement. Aussi, la connaissance du berceau de la foi, dans la chair et par les Juifs qui continuent à en vivre, peut enrichir notre compréhension humaine de l’Évangile.

Les Juifs ont l’expérience de la vie juive qui était celle du Christ et des débuts de l’Église. C’est un trésor irremplaçable.

Nous ne cessons pas d’attendre des fruits de l’Ancienne Alliance par laquelle le Christ nous est donné et qui continue à pouvoir contribuer à la vie de l’Église.

Même sur les questions théologiques principales qui nous divisent, et en premier la messianité et la divinité du Christ, les Juifs sont, par l’alliance mosaïque, sur un chemin qui mène au Christ d’une manière particulière et la conversion des Juifs est au bout de ce chemin. Ils restent des témoins vivants du berceau du Christ qui peuvent éclairer de manière spécifique la judéité du Christ qui imprègne tout son être humain dans la chair.

Il y a, dans la Torah et les autres livres juifs qui forment notre Ancien Testament, toutes les écritures nécessaires pour révéler dans toute son étendue ce qu’est la promesse d’un Messie. Ce que les Juifs peuvent nous en dire dans le berceau juif de cette promesse peut enrichir notre compréhension du fait de leur pratique concrète de l’Ancienne Alliance que nous n’avons pas, et nos frères juifs pourraient eux-mêmes découvrir des aspects cachés dans ce que les chrétiens perçoivent de cette promesse d’un Messie et enrichir par là leur propre foi fondée dans l’Ancienne Alliance.

De même, à un niveau plus profond encore, la double interdiction pour les Juifs de représenter et de nommer le divin reste un socle fondamental qui, du fait même de cette interdiction, laisse des ouvertures dans la connaissance du divin qui n’épuisent pas l’enrichissement mutuel qui demeure possible là où, dans un contexte autre, les chrétiens ont l’habitude d’utiliser de manière banale des concepts comme la divinité de Jésus et la Trinité.

Mais, restons attentifs, notamment dans notre compréhension de l’Évangile, à la pensée juive dont Jésus et ses apôtres étaient pétris.

Le nom c’est l’identité et les Juifs attirent notre attention sur le fait que le divin ne peut être identifié par l’humain, ce qui est vrai en ce sens qu’aucun de nos mots, ni aucune de nos pensées, ne peut prétendre définir ou limiter le divin, ni le représenter, car il est au-delà de tout ce que nous pouvons dire ou penser. Il est transcendant. Absolument.

Les chrétiens le savent, bien sûr, et peuvent entrer en dialogue sans restriction avec les Juifs à cet égard. Tout est affaire de nuances parfois très subtiles dont la Bible est remplie.

Le « nom » que nous, chrétiens, attribuons au divin sans gêne en parlant de « Dieu » est un mode de langage largement « incommunicable » qui fait partie de notre langage et de notre culture dont nous avons une expérience que nos frères juifs n’ont pas en ce que leur expérience est autre.

Parler de « Trinité », de « Dieu », ou d’une « incarnation » de « Dieu », ou encore d’un « Fils » de « Dieu », n’a pas de place dans leur langage puisque le concept même de « Dieu » n’y a pas et ne peut pas y avoir de contenu précis et puisqu’il ne peut en rien représenter ou nommer le divin.

Mais, Juifs ou Chrétiens, nous sommes des humains en présence de la même réalité et en présence d’un Juif nommé Jésus. La lumière que nous recevons de Lui est incomparable, mais, mystérieusement pour nous, elle continue à passer encore d’une manière particulière par le peuple élu d’Israël, pour le bien de toute l’Église et pour l’avènement de Jésus-Christ, notre Seigneur.

Et vos craintes d’interprétations déviantes et belliqueuses dans tout cela ? Bien réelles, bien concrètes, bien terrestres.

Avec un brin d’humour ou du moins de manière un peu décalée, je pense que Dieu devait craindre et se dire la même chose que vous lorsqu’il a fait alliance avec Abraham. Et avec raison.

« l’Église devrait-elle faire comme si elle ne percevait pas cette réalité ? » Non, bien sûr !

Mais, néanmoins, deux conclusions possibles et différentes se présentent à nous : soit l’incarnation du Christ et la réalisation de son œuvre, par la mort, la résurrection et l’effusion de l’Esprit, a achevé pleinement l’Ancienne Alliance désormais totalement morte et sans objet, soit cet achèvement ne se réalisera pleinement qu’à l’avènement du Christ à la fin des temps et, entretemps, l’Ancienne Alliance subsiste pour contribuer à l’œuvre du Christ.

Et l’enseignement de l’Église est qu’elle subsiste. Avec et malgré les craintes pertinentes que vous exprimez.


@Ombiace


Je vous remercie pour vos précisions qui nuancent votre message précédent. Mais par rapport au sujet en cause ici, je ne peux que vous confirmer mes réserves par rapport à cette approche exprimées dans mon message précédent.

Les questions en cause étant difficiles, il est important d’éviter de développer davantage des réflexions hors sujet.

Répondre

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 252 invités