Suliko a écrit : ↑dim. 12 mars 2017, 13:47
Il est assez éclairant de se renseigner sur la manière dont étaient perçus les mariages civils, les divorces et les remariages dans les milieux encore profondément catholiques de la première moitié du XXe siècle (et bien sûr même avant cela) : ces actes étaient vus comme d'énormes scandales et les catholiques concernés clairement ostracisés. Cela peut paraître bien dur à nos consciences modernes, mais le résultat, c'était que de tels péchés tendaient à ne pas trop se multiplier, car les fidèles savaient bien ce qu'il leur en coûterait de s'éloigner ainsi des (...) Suliko
Bonjour Suliko, je rebondis sur ce passage ou vous décrivez ce fait bien réel que les Catholiques divorcés (qu'ils soient remariés ou non d'ailleurs, comme les pauvres filles mères) étaient ostracisés. vous reconnaissez que c'était "bien dur" à nos yeux d'aujourd'hui en tout cas.
Moi, je pense que dans ces jugements implacables sur les personnes et sur leur vie privée, leur capacité à rejeter les autres pour demeurer dans l'entre-soi des biens-pensants, la capacité d'ostracisation qui concernait même les enfants (une cousine à moi, âgée de 56 ans a été rejetée d'un goûter d'enfant quand elle était petite quand les parents,grands catholiques très engagés dans l'Eglise !, se sont aperçus qu'elle était fille de divorcée ) toute cette attitude donc était plus que de la dureté :
c'était fondamentalement de l'immoralité. C'était fondamentalement la trahison pure et simple de la morale Catholique, je parle de la vraie morale catholique , celle qui repose sur la charité. Celle qui fait que Jésus accepte qu'une prostituée lui verse du parfum sur ses pieds alors que les bien-pensants disent "mais il devrait savoir qui elle est !". Celle qui fait dire à Jésus "ne jugez as si vous ne voulez pas être jugé".
Kerniou vous témoigne régulièrement de ces manques de charité dans l'Eglise d'autrefois. Vous pensez qu'elle dénigre l'Eglise du passé mais elle ne fait que dire ce qu'elle a concrètement vécu et observé : les innombrables manques à la charité dans l'Eglise et je le répète, les marques d'une foncière immoralité, d'une trahison de la morale évangélique.
La morale chrétienne, c'est la charité : c'est donner à boire à qui a soif, c'est visiter le prisonnier (sans juger sa vie et ce qui l'a mené en prison !), c'est accueillir l'étranger, c'est (nous dit le pape François) prendre le temps d'écouter les personnes ennuyeuses (c'est dur !), c'est offrir un espace d'accueil et d'écoute, de non jugement à toute personne telle qu'elle est sans jugement (ce qui ne veut pas dire tolérer tout comportement qui justement manquerait à la charité : la charité ne tolère pas le manque de charité)
Le combat du pape François, c'est de faire grandir dans l'Eglise la conscience de ce qu'est l'essence même de la morale chrétienne : la charité. prendre soin d'autrui, ouvrir son coeur à la souffrance d'autrui, se réjouir avec celui qui rit, pleurer avec celui qui pleure. la douceur, l'accueil, l'empathie, le temps de la compréhension. Le souci du plus pauvre avant tout.Et cela repose sur un vrai examen de conscience pour chacun de nous, la prise de conscience de notre orgueil et de notre égoisme, tout ce qui nous maintient dans un confort aussi bien matériel que psychologique et qui nous coupe des appels au secours de ce monde, qui nous coupe des appel au Salut : le monde souffre, le monde est à sauver.
Ces gens que vous décrivez capables de fermer leur porte et leur coeur à ceux qui vivaient justement certaines souffrances personnelles, ces gens qui donnaient priorité aux convenances, qu'avaient-ils de Chrétiens ? ils étaient d'identité catholique mais fort éloignés de la morale catholique. Franchement je ne regrette pas cette époque et je suis heureuse de vivre dans l'Eglise d'aujourd'hui qui, malgré ses tatonnements et ses faiblesses, donne priorité à la charité.
Il n'est pas impossible d'ailleurs que l'hémorragie des partiquants commencée dans les années 60 mais surtout dans les années 70, a un lien avec que les faits que les Catholiques étaient nombreux à n'être que des Catholiques identitaires et que leur"foi" bien fragile n'était pas enracinée dans la charité, ils ont donc été balayés comme fétus de paille par le grand vent de mai 68. (j'attribue la fuite des catholiques non pas au concile comme vous mais à la période révolutionnaire de mai 68 qui entraîna une mutation profonde de la société et de la manière de voir la vie chez les individus)
Vous dîtes que le divorce était rarissime à cause de cet état d''esprit jugeant et coercitif. Même pas, c'est parce que les femmes ne travaillaient pas qu'elles ne divorçaient pas,elles n'avaient pas le moyen de subvenir à leurs besoins. Aujourd'hui, le divorce est demandé par 70 pour cent par les femmes, elles ont la possibilité matérielle de le faire. Mon arrière arrière grand mère et mon arrière grand mère ont divorcé à la fin du XIX et au début du XX ième, incroyable ! Et bien elles étaient médecins toutes les deux, elles étaient indépendantes et pouvaient sortir d'un mariage calamiteux. Bien sur, il fallait assumer le regard réprobateur de la société mais visiblement, l'indépendance prenait largement le pas sur la peur du jugement.
Dans votre manière de dire les choses, j'ai un peu l'impression que votre vision des choses appartient à l'Islam, pas au Christianisme finalement : vous voulez l'application de la "charia catholique" : tout le monde doit suivre toutes les règles édictées et on est "sauvé" ainsi, en ayant fait tout bien comme il faut. Et puis vous avez la nostalgie d'une grande "oumma catholique", ou tous les gouvernements sont liés à l'Eglise, et demanderaient à tous de suivre "la charia". Sauf que le christianisme repose sur la charité et non sur un monde de règles et d'appartenance coercitive. la charité implique de grands interdits (les 10 commandements), des comportements à éviter et d'autres à promouvoir POUR servir la charité justement, c'est elle qui est le guide comportemental.
J'ai l'impression aussi à vous lire qu'il faut respecter "la charia" pour "sauver son âme". Qu'est ce que le salut en Christ , suivre un petit défilé de règles à faire et ne pas faire ? C'est bien plus : c'est permettre au Christ de vivre en nous sa mort et sa résurrection. La croix, c'est le coeur et la spécificité du christianisme et l'exigence chrétienne, qui est très grande, (La Porte Etroite), c'est le passage par le Croix, vécue en Christ.
"Bienheureux les pauvres de coeur" : prendre conscience de sa pauvreté et de sa misère, de sa souffrance parfois indicible, laisser le Christ nous rejoindre là dans l'en - bas, mourir en nous et nous amener ensuite dans une autre vie, c'est accueillir le salut que Dieu veut nous donner. Se reconnaître infiniment pauvre et reconnaître ainsi la pauvreté de l'autre.
Ouvrir les yeux sur soi, ouvrir les yeux sur l'autre.
Nous n'avons pas à "faire notre salut", cela est une démarche volontariste qui n'a rien à voir avec le christianisme. Nous avons à nous ouvrir, à laisser le "Père et le Fils vivre faire en nous leur demeure" et nous laisser inonder de leur charité, celle là même qui nous permet de regarder nos frères avec un regard habité de cette charité là. C'est cela, la morale catholique, c'est ce regard là, c'est cette Rencontre là avec le Christ et avec nos frères, c'est cette histoire d'amour là. (j'imagine que tous ces propos ont plus leur place en Morale et Ethique)
Suliko a écrit :
(réponse de Suliko à Altior)Nous en revenons toujours à la même problématique : vous avez une conception fort restrictive de l'infaillibilité. A vous lire, elle ne s'exercerait que quelques fois par siècles et il n'est pas problématique que le "vrai" concile n'existe que sur le papier. Pourtant, d'un point de vue catholique, il y a aussi une infaillibilité du magistère ordinaire de l'Eglise, que j'avais déjà évoquée dans un autre fil et sur laquelle je vais revenir. (Cinci en parle d'ailleurs dans son fil sur la question du schisme.) Comment mettre sa confiance dans le pape ("règle prochaine de la foi") et les évêques en communion avec lui dans ces conditions ? Suliko
Vous dîtes Suliko, si je vous comprend bien, que vous accordez une grande importance à l'infaillibilité papale et écclésiale. Vous étendez même la notion d'infaillibilité habituellement attribuée au magistère extraordinaire au Magistère ordinaire. Bien. mais dans ce cas, comment cela se fait-il que vous n'acceptiez pas l'infaillibilité papale et écclésiale du concile Vatican 2 ?
Alors quoi l'Eglise est infaillible quand cela vous plaît et n''est pas infaillible quand cela ne vous plaît pas ? Tiens donc...
Que s'est -il donc passé ? L'Esprit saint qui est censé guider l'Eglise peu à peu a pris des vacances lors de ce concile ? Il s'est mis en grève ?
L'Esprit Saint abandonne son Eglise, tiens, un burn out qu'Il nous fait l'Esprit saint ? merde alors...
Suliko a écrit : ↑dim. 12 mars 2017, 13:47
(propos de Cinci : En ce qui concerne la liberté religieuse, l'Eglise, comme elle l'a toujours fait, exprime à nouveau le dogme afin de corriger certaines déviations et donc de le rendre plus clair au fidèle. En l'occurrence, elle rejette l'idée selon laquelle il est légitime et souhaitable de persécuter les religions autres que la catholique romaine, et nie formellement le préjugé selon lequel la foi traditionnelle obligerait au contraire à pratiquer l'intolérance.)
(réponse de Suliko à Cinci) Vous aurez beau tourner la question dans tous les sens, le fait est que jusqu'au concile, l'Eglise enseignait que non seulement les individus, mais aussi les sociétés et les gouvernements avaient pour devoir de reconnaître le vrai Dieu et de lui offrir un culte agréable (catholique). Elle était clairement contre la liberté religieuse !
Ah ! nous sommes enfin d'accord sur un point. Oui l'Eglise a pondu une encyclique CONTRE la liberté de conscience et la liberté religieuse au XIX ième siècle et en a pondu une autre POUR au XX ième siècle. Oui, l'Eglise vit parfois de vraies ruptures. Est- elle pour autant en contradiction avec elle même ? Nenni, elle répond aux appels du temps DANS LA CHARITE : L'Esprit Saint est souffle de charité, Il a une intelligence amoureuse de l 'Humain que nous n'avons pas. La première encyclique était sans aucun doute riche de sens dans le contexte du XIXième, la seconde est sans aucun doute riche de sens dans le contexte du XX. Elle s'inscrit d'ailleurs dans la prise de conscience des horreurs de la seconde guerre mondiale, et avant Vatican 2, l'Esprit a suscité des initiatives oeucuméniques comme chez frère Roger de Taizé qui a crée ce haut lieu pour la réconciliation spirituelle de l'Europe.
L'Esprit Saint sait ce qu'Il fait, dans l'Eglise et dans nos vies. (si on le laisse faire, ce qui n'a rien d'évident vu nos résistances à la Lumière et notre attachement secret à nos obscurités)
Bien à vous,
Axou