Il y avait certainement des choses améliorables dans le Missel de St Pie V, concernant surtout, je dirais:
- la façon dont les ordres sacrés de l'Eglise, tels que décrits dans Lumen Gentium, sont présents à la Messe, en évitant la privatisation de la messe, et de façon que chacun participe vraiment à la Messe selon son ordre. Le nouveau missel a fait un pas dans cette direction, mais avec la laïcisation des fonctions sacrées (simples laïcs "en civil" faisant office de lecteurs, distribuant la communion, manipulant les objets sacrés...), la liturgie latine en a fait un grand dans la direction opposée.
En ce qui me concerne, je suis d'avis que les fidèles laïcs ne touchent ni la Sainte Eucharistie ni les objets sacrés. Cela me semble logique.
Quant à la tenue des laïcs, je suis opposé à tout signe distinctif, excepté bien sûr dans certains cas pour les servants de Messe. Il est nécessaire d'opérer clairement le départ entre prêtres et laïcs, et rien ne justifie que les fidèles soient habillés d'une façon spécifique pour les lectures. Même pour servir la Messe, cela n'a rien d'indispensable.
- les rubriques réputées trop contraignantes et envahissantes... mais on est certainement allé trop loin en sens inverse en négligeant la formation liturgique du clergé, indispensable dans ce cadre.
Il ne va pas de soi que le clergé d'avant le Concile était mieux formé à la liturgie. J'ai lu dernièrement un article qui expliquait comment se faisait l'apprentissage de la célébration de la Messe. Même à cette époque il s'agissait d'une formation assez pauvre.
- la Communion sous les 2 Espèces, qui était à mon avis un manque grave dans l'Eglise latine depuis le XII/XIIIe Siècle (je ne pense pas que le Seigneur ait institué 2 espèces pour rien...). Dans le même ordre de choses, disparues d'ailleurs vers la même époque, je mettrais la communion des enfants et une Confirmation précoce (mais on s'écarte du missel proprement dit). Toujours est-il que la communion sous les 2 Espèces n'a été restaurée qu'en faible part, et surtout on n'a pas confié au diacre la communion sous l'espèce du vin, comme le veut la Tradition...
Sans doute la communion sous les deux espèces est une bonne chose, mais il faut savoir que celui qui communie à l'une des deux espèces communie au tout. Autrement, celui qui reçoit le Corps du Christ reçoit aussi le Sang du Christ, quand bien même il n'a pas bu au calice. Il en est ainsi dans l'Eglise latine depuis des siècles. S'il avait été opportun de faire autrement, le Saint-Siège s'en serait soucié. Or ce n'est pas le cas.
- et il était bon développer avec prudence la liturgie en vernaculaire. On n'a pas gardé cette prudence... dommage.
Au contraire, on a tout fait pour supprimer le latin, qui est la langue officielle de la liturgie de l'Église catholique. Je n'ai rien contre l'emploi de langues vulgaires, mais je trouve que cela désacralise énormément la liturgie. Heureusement, nous revenons peu à peu, doucement mais sûrement, au latin que nous n'aurions jamais dû abandonner. La quasi-interdiction de la langue sacrée n'était d'ailleurs pas ce que voulait le Concile.
Quant à faire toutes les révisions qui ont été faites dans les textes eux-mêmes... je n'en vois vraiment guère le besoin.
Bien souvent, les révisions qui ont eu lieu montrent surtout une volonté de faire disparaître ce qui ne convient pas à une théologie très moderniste...
Cela est vrai pour les traductions, qui souvent sont idéologiques ; la version française en est un bon exemple. Mais je ne crois pas qu'on puisse formuler cette critique contre l'édition originale du missel de Paul VI en langue latine.
Le missel de Paul VI a le mérite de faire participer le peuple, même en latin. Je donnerais deux exemples :
- le mois dernier j'ai assisté à Paris à une Messe selon la forme extraordinaire. Je suis tout à fait favorable à ce que les personnes qui le désirent puisse avoir accès à cette liturgie. Mais pour ma part, j'ai eu beaucoup de mal à prier, car je me suis senti étranger.
- il y a quinze jours, j'ai assisté en Espagne à une Messe célébrée par le Prélat de l'Opus Dei. Hormis quelques chants en castillan, la Messe était en latin, selon la forme ordinaire. Je n'ai eu aucun problème pour prier. Pour les personnes qui, éventuellement, n'étaient pas habituées au latin (ce qui d'ordinaire n'est pas le cas des membres de l'Opus Dei), nous avions des livrets imprimés pour l'occasion en latin et en espagnol, de façon à ce que tous puissent répondre. et suivre. Il s'agissait d'une Messe avec ordinations sacerdotales.
En tout état de cause, la chose la plus sage à faire est d'obéir à l'Église en mettant en œuvre les réformes prescrites, sans chercher à discuter de façon inopportune ou à remettre en cause son autorité.