Dites, quel livre lisez-vous en ce moment ?

[deniserp]

Pour ma part, j'aime beaucoup la littérature française. Plus particulièrement ces grands auteurs que je redécouvre depuis quelques mois maintenant :

Chateaubriand > Les mémoires d'outre-tombe (Il me manque les deux derniers tomes et je les aurais finis)
Zola > La série des Rougon-Macquart (Au bonheur des dames pour l'instant).

Mais, en ce moment je suis en train de terminer du côté de chez Swann de Marcel Proust, premier tome du roman A la recherche du temps perdu dont j'apprécie beaucoup le style, mais aussi l'histoire. La grande littérature est en effet, pour moi, avant tout un style.

Ces oeuvres sont de véritables découvertes et témoignent de la beauté de la langue française, lorsque celle-ci est utilisée correctement. Cela nous change de tous les livres que l'on cherche à nous vendre actuellement d'auteurs francophones (français et étrangers). Mais, il semble qu'un écrivain sorte quand même du lot parmi tous les "écrivaillons" actuels ; je veux parler de Yasmina Khadra que je n'ai pas encore lu mais qui, paraît-il, serait à classer parmi les "grands écrivains" francophones actuels.

[stephlorant]

Je m'intéresse toujours aux oeuvres des convertis du XXème siècle, lecture toujours réjouissante:

De la fin du xixe siècle aux années trente, un phénomène collectif sans précédent vient bouleverser le monde de l’art et de la pensée : la conversion des intellectuels au catholicisme, alors même que l’Église se constitue en citadelle assiégée face aux coups de boutoir de la déchristianisation. Au-delà des noms bien connus de Claudel, Foucauld, Péguy ou Maritain, ce retour à la religion concerne plus de cent cinquante personnalités dont le romancier à succès Paul Bourget, de nombreux membres de la NRF naissante comme Henri Ghéon, Jacques Copeau, Jacques et Isabelle Rivière, et des poètes, Max Jacob, Jean Cocteau ou Pierre Reverdy. Témoins désenchantés de la faillite du lien social, ces intellectuels travaillent ardemment à sa refonte, dans des lieux aussi divers que les coopératives de prières ou les écoles d’art chrétien. Dans cette étude devenue un classique, Frédéric Gugelot montre l’étendue de ces conversions, l’originalité des parcours spirituels et l’ampleur de leur influence au moment où l’Église est confrontée aux interrogations de la modernité.

[stephlorant]

Autre découverte pour le 'décodage' de notre époque:





« La barbarie intérieure : essai sur l'immonde moderne », de Jean-François Mattei

Pour le professeur de philosophie Jean-François Mattei, la crise de civilisation qui nous atteint trouve ses racines dans le marxisme et, au-delà, dans la Révolution française. Mais c'est en mai 68 qu'elle a pris une nouvelle dimension, particulièrement destructrice. L'auteur prend l'exemple de l'art, qui est très probant. La peinture moderne ne représente plus ni la figure humaine, ni les paysages, ni l'homme, ni le monde. Elle représente les états d'âme du « sujet ». Et l'on tombe vite dans l'immonde car le sujet replié sur lui-même, prisonnier de lui-même, est l'antithèse du monde civilisé. C'est la « terrible bête » aux cent appétits, aux instincts libérés de toute contrainte civilisatrice dont parlait Platon.

A la suite de Freud et de Marx, les idéologies soixante-huitardes venues des Etats-Unis (où elles ont prospéré avec l'émigration de l'Ecole de Francfort en Amérique) n'ont cessé de prôner la libération de la bête des contraintes de la civilisation bourgeoise. Et l'on s'étonne de la montée de la criminalité aux USA puis en Europe !

La barbarie a envahi l'éducation. Aux USA, en 2000, on comptait dans les écoles 11 000 agressions à main armée, 7 000 vols déclarés et 4 000 viols constatés. « Selon le département de la Justice, 25 % des adolescents font état de gangs à l'école et 66 % déclarent pouvoir se procurer de la drogue directement en classe. L'erreur pédagogique majeure a été d'ouvrir l'école sur la vie au lieu de la protéger contre les intrusions. De plus, l'erreur vient de ce que l'élève ou ce qu'il en reste, ne s'intéresse plus aux connaissances extérieures que l'école peut lui apporter et donc à ce qu'il pourrait devenir, un homme cultivé, mais à ses besoins intérieurs qui ne renvoient en dernier ressort qu'à sa subjectivité brute. Non seulement le sujet n'est plus en mesure de se hausser à l'excellence requise par la culture mais il n'est plus en mesure de se dépasser lui-même en sortant de son exclusion intérieure. »

Il y a aussi la barbarie politique qui prend deux aspects : la férocité des totalitarismes et la « vanitas » démocratique qui fait du sujet un Dieu. Pour le professeur Mattei, « le totalitarisme ne peut advenir que sur le sol d'une démocratie préalable dont les principes ruinent les sentiments, dont le formalisme subjectif ruine la substance de l'homme. Le monde démocratique a été la matrice de ces figures de la barbarie que sont le nazisme et le communisme parce qu'il avait déjà ramené l'homme à cette figure nouvelle de l'homme masse, la foule remplaçant le peuple ».

Et l'auteur cite Soljenitsyne pour nous avertir : « Un monde civilisé et timide n'a rien trouvé d'autre à opposer à la renaissance brutale et à visage découvert de la barbarie que des concessions (…). C'est l'état d'âme permanent chez ceux pour qui le bien-être matériel est devenu le but principal de leur vie sur terre. »


Yvan BLOT
© Polémia
10/03/06

Jean-François Mattei, « La Barbarie intérieure : essai sur l'immonde moderne », PUF

[Cinci]

Hum ... il y aurait une remarque à faire au moins s'agissant de Freud. En même temps, ce n'est pas la place ici pour le débat. Donc, o.k pour les opinions du professeur. Ça permet de voir ce que lui pense. Merci.

[stephlorant]

Je viens de commander ce livre qui nous apporte une image différente de la philosophe et mystique juive qui a été jusqu'au bout de la recherche de la vérité.

[Harfang]

Je viens de commander ce livre qui nous apporte une image différente de la philosophe et mystique juive qui a été jusqu'au bout de la recherche de la vérité.

Cher stephlorant, il est indubitable que la fidélité au judaïsme mosaïque débouche sur le Christianisme.

[stephlorant]

Cher stephlorant, il est indubitable que la fidélité au judaïsme mosaïque débouche sur le Christianisme.

En réalité, Simone Weil était née juive dans une famille complètement agnostique. Mais en appliquant à la philosophie la recherche de la vérité, une recherche absolue et sans trêve, elle a rencontré le Christ. Elle l'a rencontré à Solesmes, tandis qu'elle participait (sans évidemment communier) à tous les offices de la semaine sainte. Les seuls mots qu'elle ait écrits pour dépeindre sa conversion, c'est : "A un moment, Jésus lui-même est descendu et m'a emportée". Sa quête de vérité correspondait exactement à ce que Jésus répond à Pilate: "Je suis né et venu dans le monde pour témoigner de la vérité; quiconque cherche la vérité entend ma voix". (Je trouve ça énorme, fabuleux, merveilleux....) Simone Weil a dû le sentir ainsi, car elle écrit plus tard: "Le Christ veut qu'on lui préfère la Vérité, car Il est la Vérité. Vous ne sauriez vous écartez du Christ sans lui tomber dans les bras"... Je lui donne un A+ !

[Serge BS]

A+ ? C'est tout ! C'est nul selon les agences qui jugent les Etats et les hommes, et selon les médias peoples ! A+ (bref 16/20 puisqu'il y a 20 degrés dans l'échelle de notation de Standard & Poors, 22 chez Fitch, ou encore A1 chez Moddy's), c'est lamentable selon eux ! Vous êtes bien dur avec notre Sainte et philosophe !

[stephlorant]

Cher Serge,

Je voudrais vous dire combien votre commentaire sur les notations de ces organismes m'a aidé (je parle de votre msg de ce matin, en réaction avec celui que j'avais posté concernant "catéchisme et spéculation".) Car j'ai eu un client ce matin ! Il était totalement paniqué parce qu'il a investi une partie de sa pension de retraite en "actions compartimentées" et il ne se sentait vraiment pas bien ! Mais en ce qui me concerne, tout ce que vous avez écrit à ce sujet m'a remonté. Je n'ai jamais été boursicoteur, mais je gère "en bon père de famille" l'héritage de mon père.

Je dois dire que beaucoup de textes que vous écrivez ont le don de me replacer "au centre", car je suis hypersensible et j'ai tendance à démarrer "au quart de tour", dans des sujets où je suis vraiment novice, ce qui n'est parfois pas très judicieux !

Avec mes amitiés,

Steph/Etienne

[espoir1001]

"La foi des démons" de Fabrice Hadjaj je l'ai trouvé excellent et auparavant, j'avais lu "les fruits d'une conversion" d'Elisabeth smadja, juive loubavitch convertit au catholisisme.

[Hélène]

Je suis aussi en train de lire "La foi des démons" de Fabrice Hadjadj. Quelques passages m'ont fait penser à ceux qui ont la "science" de Dieu, qui connaissent la Somme Théologique de Saint Thomas d'Aquin par coeur :> (et non par le coeur) et peuvent vous balancer les versets bibliques par la tête pour étoffer leur théologie, croyant qu'ils parlent au nom de Dieu mais qui ont oublié cette Parole de saint Paul : "sans la Charité, je ne suis qu'une cymbale qui résonne" (ou qui raisonne ? Mais qui n'aime pas...). Ils servent plus le démon que le Bon Dieu. Ou encore ceux qui prêtent à Dieu une fausse miséricorde, celle que les tenants de l'euthanasie tiennent ou celle qui dit que nous irons tous au paradis. Vraiment le Malin il a beau jeu de nous diviser en groupes extrêmes : progressistes vs intégristes, etc.

Vraiment un excellent ouvrage. À ne pas mettre entre les mains de n'importe qui toutefois... par exemple entre les mains de ceux qui font une obsession du démon ou une névrose religieuse.

[espoir1001]

Bonsoir Helène,

Je suis moi-même en train de le lire et je suis tout à fait d'accord avec vous, excellent livre à ne pas mettre entre toutes les mains quoique .

[Petit Matthieu]

Les frères Karamazov, de Fiodor Dostoïevski.
Extraordinaires passages en lien avec le "starets" Zossima, sorte de père spirituel dans un monastère russe.

[Isabelle47]

Je lis et relis plusieurs livres en même temps.
Cet après-midi, j'ai rouvert pour la cinquantième fois "Histoire d'une âme"; chaque fois je suis sous le choc de cette surabondance d'amour;
Cette phrase, par exemple (reprise d'Ezechiel) "Passant auprès de moi, Jésus a vu que le temps était venu pour moi d'être aimée... il a étendu sur moi son manteau, il m'a lavée dans les parfums précieux, m'a revêtue de robes brodées, me donnant des colliers et des parures de prix... il m'a nourrie de la plus pure farine, de miel et d'huile en abondance... alors je suis devenue belle à ses yeux et Il a fait de moi une puissante reine..."
De quoi être envieuse non? (je sais, c'est un vilain défaut)

[Hélène]

Cette phrase, par exemple (reprise d'Ezechiel) "Passant auprès de moi, Jésus a vu que le temps était venu pour moi d'être aimée... il a étendu sur moi son manteau, il m'a lavée dans les parfums précieux, m'a revêtue de robes brodées, me donnant des colliers et des parures de prix... il m'a nourrie de la plus pure farine, de miel et d'huile en abondance... alors je suis devenue belle à ses yeux et Il a fait de moi une puissante reine..."
De quoi être envieuse non? (je sais, c'est un vilain défaut)

Bah non, puisque cette Parole s'adresse aussi à vous personnellement...