Isabelle47 a écrit :
On peut donc dire que les manifestants ont désobéi, ce que j'avais bien cru comprendre! Chacun en tirera les conclusions qu'il souhaite
Vous avez certainement dû mal comprendre, et donc je remets le seul document officiel (disponible sur le site de la CEF), émanant de la CEF et susceptible de présenter un quelconque caractère juridictionnel :
« L'Eglise catholique en France condamne les violences perpétrées lors de récents spectacles. Elle n'est pas organisatrice de la manifestation du 29 octobre prochain. Elle promeut le dialogue entre la culture et la foi. Elle réagit quand c'est nécessaire, avec détermination, et toujours par moyens pacifiques. En l'occurrence, la Conférence des évêques de France a communiqué spécifiquement sur Golgota Picnic, après consultation de source sûre. Elle appelle à une liberté d'expression respectueuse du sacré. Elle appelle à un échange avec les élus, concernant cet enjeu. L'Eglise catholique en France n'est, ni intégriste, ni obscurantiste. Les catholiques aspirent, comme citoyens, à être respectés dans ce qui est le cœur de leur foi. »
Nulle part il n’y a dans cette déclaration une quelconque interdiction faite aux fidèles de se regrouper, de manifester et de défendre l’honneur du Christ, nulle part.
La seule condamnation porte sur les violences, et rien que sur les violences, sans même d’ailleurs les qualifier et les rattacher à des auteurs.
Donc encore une fois de plus, les passions obstruent la raison et font lire à certains non pas ce que la CEF a écrit mais ce que eux auraient voulu voir écrit.
Deuxième point, et là encore c’est une déformation caractérisée des propos de la CEF : il n’est pas écrit «Nous désapprouvons la manifestation du 29 octobre prochain », mais «Elle n'est pas organisatrice de la manifestation du 29 octobre prochain ».
Or il se trouve qu’il y a une multitude d’événements dont l’Eglise catholique de France n’est pas l’organisatrice, est-ce que cela signifie pour autant que l’Eglise les désapprouve ? Chaque fois que vous allez faire votre marché avez-vous besoin de l’approbation de l’Eglise de France pour y aller ? Dans la même veine : est-ce que tous les livres qui n’ont pas l’Imprimatur sont à l’Index ?
Il faut savoir que lorsque l’Eglise désapprouve, réprouve, condamne et inflige des peines, elle le fait d’une façon extrêmement réglée, en y mettant toutes les formes canoniques, de façon à ce que le contrevenant ne soit pas surpris, charité chrétienne oblige. Ainsi voici ce que dit le code de droit canonique :
« Can. 1371 -
Sera puni d'une juste peine:
1) qui, en dehors du cas dont il s'agit au can. 1364, § 1, enseigne une doctrine condamnée par le Pontife Romain ou le Concile OEcuménique, ou bien qui rejette avec opiniâtreté un enseignement dont il s'agit au can. 750, §2 ou au can. 752, et qui, après avoir reçu une monition du Siège Apostolique ou de l'Ordinaire, ne se rétracte pas,
2) qui, d'une autre façon,
n'obéit pas au Siège Apostolique, à l'Ordinaire ou au Supérieur lorsque
légitimement il donne un
ordre ou porte une
défense, et qui, après
monition, persiste dans la désobéissance ».
C’est pour cela que lancer une accusation de désobéissance vis-à-vis de l’autorité juridictionnelle ou magistérielle, est quelque chose de grave et doit être solidement justifiée (sinon c’est une accusation mensongère et diffamatoire).
Passons sur les exceptions qui confirment la règle (comme quoi il vaut parfois mieux être du côté de Jeanne que de Cauchon), et attardons nous sur l’aspect explicite, légitime, graduelle et juste de la sanction :
D’abord il faut qu’il y ait un ordre ou une défense : dans l’affaire qui nous intéresse aucun ordre, aucune défense.
Il faut que cet ordre ou cette défense soit légitime.
Il faut l’assortir d’une monition
Et il faut que la peine soit juste.
Faisons remarquer qu’il y a un cas où il n’y a pas de monition et où la peine est portée automatiquement, directement et implicitement c’est le cas de la peine latae sententiae (dans le cas de l’avortement par exemple) :
« Can. 2217, § 1, 2° Est Latae sententiae une peine déterminée par la loi ou le précepte, de façon à être encourue par le fait qu’on commet un délit;
ferendae sententiae, la peine qui doit être infligée par le juge ou le supérieur.
Dans le premier cas, la sentence est comme portée d'avance, lata est sententia; elle se trouvait déjà dans le précepte ou dans le texte législatif statuant, par ex., que quiconque se battra en duel encourra, comme automatiquement, une excommunication. »
Dans le cas qui nous intéresse il s’agit de la peine ferendae sententiae, celle portée par l’Ordinaire. Celui ou ceux qui encourent une telle peine doivent recevoir une monition, c’est à dire un avertissement (un homme averti en vaut deux...):
« La monition dont parle le Code est un avertissement adressé par l'Ordinaire au chrétien, clerc ou laïque, qui se trouve dans l'occasion prochaine de commettre un délit, ou sur qui pèse, après enquête, un soupçon grave de culpabilité (can. 1946 § 2, 2°; 2307).
C'est donc à juste titre que la monition est mentionnée au l. V du Code sous le titre : Des remèdes pénaux. Elle est en effet un remède préventif, en tant qu'elle est adressée à quelqu'un dont la culpabilité n'est pas démontrée, et qu'elle tend à empêcher de commettre l'infraction caractérisée ».
Or dans l’affaire qui nous concerne il n’y pas eu de monition canonique.
L’accusation de désobéissance est donc canoniquement nulle et non avenue : ni défense de la part de l’Ordinaire, ni monition, ni désapprobation, rien, le dossier est vide.
Un des rares a avoir gardé son sang froid dans cette affaire est l’abbé de Tanouärn interviewé chez Henri de Lesquen ( http://www.dailymotion.com/video/xm32ay_l-abbe-grosjean-par-h-de-lesquen-sur-radio-courtoisie-castellucci_news), et faisant très calmement et très justement remarquer que l’abbé Grosjean avait assisté à une représentation de la pièce expurgée des éléments les plus outrageants et scandaleux, que par conséquent c’était bien plutôt lui qui s’était fait manipuler.
Enfin après avoir voulu faire croire que la CEF avait condamné les manifestants, on a voulu faire croire que les déclarations de Myriam Piccard et de l’abbé Grosjean avaient valeur explicative, un peu comme si de telles déclarations s’inscrivaient dans le prolongement du communiqué de la CEF. Alors que non seulement on sait maintenant que la représentation à laquelle ils ont assisté différait des précédentes, mais en plus on ne voit pas en quoi ces deux personnes (un clerc et une laïque) auraient une plus grande légitimité que la multitude des laïques et des clercs (de l’aumônier jusqu'à l’évêque) ayant clairement dénoncé ce spectacle. Henry de Lesquen, qui est un homme remarquablement instruit et cultivé, faisait remarquer que de telles explications vaseuses sont à mettre sur le compte de la jeunesse et de l’inexpérience, nous aurions préféré avoir bien évidemment les explications de la CEF elle-même.
Un Tel verra comme feu Celui qu'il n'a pas connu comme lumière (St Grégoire Le Théologien)