La réforme liturgique en question

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Boris
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Message non lu par Boris » sam. 16 sept. 2006, 8:54

In illo tempore a écrit :Si le Pape indiquait nettement quelle est la position du Magistère, je le suivrais sans a priori, mais à ma connaissance, il n'y a jamais eu de parole d'autorité sur ce sujet.
Le Pape célèbre selon le Missel de 2002, en Latin et grégorien et surtout en respectant toutes les normes et rubriques.

Ce que fait le Pape est-il pour vous une indication nette ?
UdP,
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In illo tempore
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Message non lu par In illo tempore » sam. 16 sept. 2006, 20:45

Merci beaucoup à François-Xavier qui nous cite ce texte intéressant.

Je vais être incorrigible (désolé), il dit "qu'on ne parle pas de deux rites" et non pas "il n'y a pas deux rites" (on voit que le texte romain reste très mesuré). Il est dommage qu'il se place dans le cadre du motu proprio Ecclesia Dei afflicta (vous voyez, je suis capable de faire des progrès et de mettre ce troisième mot qui n'est pas mis sur le site du Vatican). Certaines autorités romaines ont dit de manière privée que le missel de 1962 n'avait jamais été aboli, ce qui est en contradiction avec le point 1. Qu'en est-il du nouvel Institut du bon Pasteur ?

De plus quand on lit cette citation de Paul VI, on peut se poser des questions :
Paul VI a écrit :Nous voulons encore une fois vous inviter à réfléchir sur cette nouveauté que constitue le nouveau rite de la Messe… Nouveau rite de la Messe ! C’est là un changement qui affecte une vénérable tradition multiséculaire…
Lui-même parle de nouveau rite, pas de nouveau missel.
Comme la question liturgique est en pleine évolution, c'est une question qui pour moi est loin d'être tranchée.
Boris a écrit :Le Pape célèbre selon le Missel de 2002, en Latin et grégorien et surtout en respectant toutes les normes et rubriques.
Quand vous dites que le Pape célèbre selon le missel de 2002, j'ajoute qu'il a utilisé l'ancien missel à plusieurs reprises. Et en plus il encourage ce missel de 1962, j'ose dire qu'il est dans la lignée du Cardinal Ratzinger qui avait présidé les journées liturgiques de Fontgombault il y a quelques années. (Il a utilisé les deux missels, serait-il birituel ?)

Je constate que ceux qui défendent l'utilisation du missel de Paul VI en latin sont toujours très tranchés sur cette question parce qu'ils ont l'impression qu'ils n'obtiendront la liturgie qu'ils désirent à juste titre qu'en construisant un argumentaire sur le fait qu'on n'a jamais vu l'utilisation simultanée de missels de différentes époques d'un même rite, c'est je crois la thèse de M. Crouan qui a écrit de nombreux livres sur la liturgie. J'ai lu quelques uns de ses livres qui sont très sérieux mais aucune analyse critique sur la révolution liturgique faite sous Paul VI. Peut-être quelqu'un aura-t-il un titre à me conseiller ?

Pour ma part, je pense que c'est une question très intéressante mais qui n'a aucune implication sur l'utilisation de l'ancien missel. "La bataille de la Messe", comme le dit l'Abbé Laguérie, est gagnée.

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Message non lu par Boris » dim. 17 sept. 2006, 10:30

In illo tempore a écrit :Quand vous dites que le Pape célèbre selon le missel de 2002, j'ajoute qu'il a utilisé l'ancien missel à plusieurs reprises. Et en plus il encourage ce missel de 1962, j'ose dire qu'il est dans la lignée du Cardinal Ratzinger qui avait présidé les journées liturgiques de Fontgombault il y a quelques années. (Il a utilisé les deux missels, serait-il birituel ?)
Si il utilise les 2 formes, c'est justemetn pace que c'est le même et unique rite romain. Sans quoi il ne pourrait pas le faire.
In illo tempore a écrit :Pour ma part, je pense que c'est une question très intéressante mais qui n'a aucune implication sur l'utilisation de l'ancien missel. "La bataille de la Messe", comme le dit l'Abbé Laguérie, est gagnée.
Si on développe l'idée du Dr Denis Crouan, la thèse est que l'autorisation de 2 éléments empêche l'application de la restauration de la Liturgie.

Cest 2 éléments sont d'une part l'ancienne forme du rite romain et d'autre part le n'importe quoi à la Bayard et companie.
Pourquoi ?
- inutile d'institer sur le coté mauvais et faux du n'importe quoi, je pense que tous ici sont conscient la pratique Liturgique telle qu'elle se fait en paroisse est fausse et induit une foi qui n'est pas celle de l'Eglise. Néanmoins le poit fort de cette forme est le fait de céder aux pulsions en résumé.

- l'ancienne forme pemet aux Evêques (guarants de la Liturgie) d'avoir un discour qui est : vous voulez l'ancienne dignité (qui en fait a toujours court) alles chez les "tradis". Sinon prenez ce que l'on vous donne car il n'est pas question de faire fuire les pratiquants (malheureusement non croyants) en les astreignants à suivre les normes. Ainsi la majorité des Evêques et l'ensemble des responsables diocésains de la Liturgie ne veulent pas comprendre que le sens du sacré et la dignité des célébrations telles qu'ont les voient appliquer là où on utilise l'ancienne forme sont normalement (donc de manière normée) applicable à la nouvelle forme. Ils dressent ainsi un "cordon sanitaire" (expresion du Dr Crouan) autour du n'importe quoi qui est l'ancienne forme.

C'est en cela que l'usage trop répandu de l'ancienne forme va à l'encontre du respect de la Liturgie : non pas de manière direct, car l'ancienne forme est très respectueuse, mais de manière indirect par ce que les Evêques en font.

Maintenant de 2 choses :
- ou bien la promotion de l'ancienne forme reste très limmité en nombre de fidèles, et cela continuera d'empêcher la restauration
- ou bien l'ancienne forme accueillera de plus en plus de fidèles et videra les paroisses et là les Evêques devront se poser les bonnes questions.

Néanmoins, on voit certains Evêques commencer à s'intéresser sérieusement la question de la diginité de la Liturgie et les plus jeunes des prêtres sont plus carré sur ce point (même s'ils ne sont toujours pas plus formés).

C'est une drôle de soupe que l'on nous sert.
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François-Xavier
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Signification de "rite"

Message non lu par François-Xavier » lun. 18 sept. 2006, 10:28

Pour bien éclairer les lanternes, il faut bien se mettre d'accord sur la signification du mot "rite".

Il a en général une acception double :
- 1 : synonyme, hyponyme ou hyperonyme du mot "rituel" : le rituel du mariage, ou les rites composant le rituel du mariage, du baptême. L'ensemble de ces rites, de ces rituels forment un "ordo", qui sont des prescriptions liturgiques.

- 2 : synonyme d'Eglise rituelle : c'est le sens du droit canon, et de façon générale le sens qui est donné au mot rite par les documents magistériels : le rite romain, les rites latins, le rite byzantin, le rite melkite ou le rite grec. Désigne une famille liturgique dirigée par un patriarche.

Ce sont deux choses assez différentes a priori ; mais lorsqu'on regarde de plus près, théologiquement parlant, on sait que l'Eglise vit de l'Eucharistie, comme le rappelait Jean-Paul II lors d'une encyclique. Et que généralement, une communauté chrétienne sous l'autorité d'un évêque se forme et se développe autour d'une célébration eucharistique, c'est à dire d'une liturgie. Il y a donc des recoupements larges entre ces deux acceptions du mot "rite".

Pour bien être sûr de ce dont on parle, il faut alors cesser de parler de "rite de S. Pie V" et "rite de Paul VI', mais plutôt parler d'ordo de 1962 et ordo de 2002. Les disputes sont souvent apaisées par de bonnes définitions sur leur objet.

In illo tempore
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Message non lu par In illo tempore » mar. 19 sept. 2006, 22:37

Boris a écrit :Si on développe l'idée du Dr Denis Crouan, la thèse est que l'autorisation de 2 éléments empêche l'application de la restauration de la Liturgie.

Cest 2 éléments sont d'une part l'ancienne forme du rite romain et d'autre part le n'importe quoi à la Bayard et companie.
Ben voyons ! C'est l'ancienne forme du rite romain qui empêche l'application de la restauration de la Liturgie.
Boris a écrit :C'est en cela que l'usage trop répandu de l'ancienne forme va à l'encontre du respect de la Liturgie : non pas de manière direct, car l'ancienne forme est très respectueuse, mais de manière indirect par ce que les Evêques en font.
Usage trop répandu !
Regardez les événements des quarante dernières années : l'ancienne messe interdite.
L'application large et généreuse du motu proprio, où la voyez-vous ? Aux évêques qui vous disent d'aller chez les tradis, prenez-les aux mots et demandez leur une messe suivant le motu proprio. Dans plus de 30 % des diocèses, il n'y a aucune célébration de ce type.

Il faut le dire : la messe de Paul VI est un échec pastoral, elle a vidé les églises (même si ce n'est pas la seule cause). Aujourd'hui est considéré comme pratiquant celui qui va à la messe une fois par mois ! Regardez l'assistance dans nos provinces, une population âgée.
Ce qui est rarement le cas dans les assemblées suivant l'ancien missel. Parmi les catholiques qui ont abandonné la pratique, combien reviendraient dans les églises si la messe traditionnelle était célébrée ?

Sur la question de l'utilisation de l'ancien missel, excusez-moi de le dire, les thèses de M. Crouan sont d'un rubricisme étriqué. Il n'arrive pas à percevoir les besoins des fidèles, c'est au coeur, à l'intime de la personne que la liturgie parle et pas seulement à l'intelligence. L'homme est charnel, pas seulement spirituel, et ce n'est pas une liturgie intellectuelle et désincarnée que je veux. Le missel de 1962 même si son sanctoral n'a plus évolué est vivant. Il n'est pas issu d'une fabrication froide d'intellectuels.

Il y a d'autres raisons qui me font préférer l'ancien missel au nouveau : la multiplicité des Prières eucharistiques et ce canon d'Hippolyte, l'aspect sacrificiel qui est raboté, l'offertoire, la suppression des secrètes qui anticipaient sur le sacrifice, la suppression de l'octave de la Pentecôte, de la Septuagésime, l'organisation des lectures, les messes de Carême, la concélébration qui devrait être exceptionnelle, ... Même si beaucoup ne perçoivent pas tout cela, c'est pour toutes ces raisons que j'aime l'ancien missel.

Pardonnez moi la véhémence de ma protestation.

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Message non lu par Deo Gratias » mar. 19 sept. 2006, 23:20

J'avoue que je me sens trés proche de vous, meme si la liturgie de Paul VI est bien célébrée, je la trouve moins "mystérique" que celle de St-Pie V.
CHRISTUS VINCIT!
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marchenoir
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Tout de même

Message non lu par marchenoir » mar. 19 sept. 2006, 23:22

In illo tempore a écrit : Il faut le dire : la messe de Paul VI est un échec pastoral, elle a vidé les églises (même si ce n'est pas la seule cause).
Bonsoir In illo tempore.

Bien loin de moi l'idée de me lancer avec vous dans une polémique qui serait de toute façon stérile, mais il me paraît très audacieux d'affirmer comme vous le faites que "[la messe de Paul VI] a vidé les églises", même en adoucissant votre propos par l'évocation d'autres causes.

Je vois bien sûr ce que vous voulez dire : une certaine volonté de désacralisation s'est immiscée dans la mise en pratique du changement d'ordo et a conduit à ce que vous décrivez. Cela dit, je le répète, ce que vous appelez la messe de Paul VI n'y entre pour aucune part. Disons qu'elle a autant sa part dans la cagade actuelle que la messe de saint Pie V dans "l'esprit Vatican II"...

En fait, ce qui gêne dans ce que vous dites, c'est que la conclusion directe en est que le nouvel ordo, donné par l'Eglise, nuit à l'Eglise. Or, c'est impossible puisque, pour reprendre les termes du regretté Dom Guy-Marie Oury, "la liturgie romaine est de droit pontifical ; sans engager nécessairement l'autorité infaillible prononçant "ex cathedra", elle est en dépendance étroite à l'égar du magistère ordinaire. L'approbation explicite donnée par le pape à une formule liturgique doit la faire considérer comme exempte de toute erreur concernant la foi et les moeurs. Il y va de la même valeur que le magistère ordinaire." (La Messe de S.Pie V à Paul VI. Solesmes).

Cela dit, j'ai apprécié ce que vous avez dit au sujet d'un intellectualisme de mauvais aloi dont on nous gratifie trop souvent dans nos "célébrations".
Voilà ce que disait le bon moine dans le même livre : "L'enseignement qui se dégage de la liturgie a un caractère particulier, en harmonie avec la nature propre de celle-ci. c'est une catéchèse, encore faut-il bien comprendre de quel genre de catéchèse il s'agit. La liturgie a pour but immédiat, premier, déterminant, de susciter un acte de foi qui s'épanouit en hommage cultuel. Elle se propose de faire prier, même lorsqu'elle donne un enseignement formel."

Cordialement.

Marchenoir
Dernière modification par marchenoir le mer. 20 sept. 2006, 7:46, modifié 1 fois.
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Message non lu par VexillumRegis » mer. 20 sept. 2006, 1:29

Bonsoir,

[align=center]- [Au sujet de l'Offertoire] -[/align]

[align=justify]Voici quelques extraits de La Sainte Messe expliquée dans son histoire et sa liturgie (1945), ouvrage majeur de ce grand liturgiste que fut Pius Parsch.

L’évolution historique :

C’est à la suite de cette pratique [l’agape] que l’offrande des fidèles se développa dans la messe des premiers chrétiens. Au début de la messe proprement sacrificielle, ils portaient processionnellement leurs offrandes sur la table du sacrifice (Prothesis), placée non loins de l’autel. Ces offrandes se composaient surtout de pain et de vin (plus tard on fit usage de petites cruches, amulae), mais il y avait aussi d’autres offrandes : des lainages, de l’huile, des fruits, de la cire, de l’argent, de l’or : tout à quoi tenait d’une manière particulière. Ces dons étaient recueillis par le diacre et disposés sur la table. Qu’en faisait-on ? Ce qui était nécessaire au sacrifice : pain et vin, était porté sur l’autel par le diacre. Tout le reste était mis de côté pour servir à l’entretien du clergé et des pauvres. Dans ces conditions, l’Offertoire durait longtemps et était une cause facile de distraction. Aussi, dès le Vème siècle, on y exécutait un chant de procession : le peuple et le clergé devaient avoir une attitude de recueillement et approfondir la signification de l’Offertoire. Pendant ce temps, l’évêque choisissait parmi les offrandes, et, à la fin, récitait une seule prière, l’ “oratio super secreta”, l’oraison sur les dons qu’il avait séparés. Tel était l’Offertoire en un temps où le prêtre et le peuple prenaient une part active à la célébration de la messe. Nous voyons que l’essentiel et le sens même de l’Offertoire résidaient dans l’offrande des fidèles. - p. 138.

Le synode de Mâcon (585) prescrit que, le dimanche, hommes et femmes doivent apporter à l’autel du pain et du vin (can. 4). - p. 140

Au moyen âge, l’Offertoire devint de moins en moins l’affaire du peuple. En vain des synodes en recommandèrent-ils la pratique. Mais, par le fait de l’accoutumance populaire, les lacunes qui résultaient de cette abstention furent comblées par un ensemble de prières récitées par le prêtre. Ce sont les prières que nous avons aujourd’hui à l’Offertoire et qui, dans leur teneur actuelle, étaient en usage dès le XIVème siècle. Par leur contenu, ces prières expriment des idées comparables à celles du Canon ; c’est pourquoi on les appelait au moyen âge “petit canon”. Toutefois ce ne sont pas ces pières, mais c’est l’antique Offertoire qui en donne le sens. - pp. 142-143

Autrefois, l’Offertoire était surtout un acte ; aujourd’hui, il est surtout une prière. (...) Dès qu’il se détacha du peuple, des abrévations se produisirent dans le chant, mais en même temps on incorpora tout un ensemble de prières propres au prêtre, dont le but était, notamment aux messes privées, de remplir les vides produits par l’absence du peuple à l’Offertoire. Ces prières sont passées en usage dans l’Eglise romaine, selon leur ordonnance actuelle, aux XIVème siècle. Hors de Rome, il y eut jusqu’à Pie V une diversité considérable. Depuis lors, bien des choses ont été changées, quant au contenu, en ce qui touche l’idée que l’on se fait de l’Offertoire. Autrefois, la pensée était exclusivement tournée vers les offrandes du peuple : elles exprimaient sa participation à l’Offertoire. C’est ce que nous pouvons voir encore aujourd’hui d’après les anciennes Secrètes (1). Mais depuis qu’a cessé la procession de l’Offertoire, la pensée se tourne en premier lieu vers les offrandes à consacrer. - pp. 147-148

(1) Quant à leur contenu, les plus anciennes Secrètes parlent des offrandes des fidèles et supposent l’Offertoire. Les plus récentes ont trait à l’acte sacrificiel qui suit. - p. 163

On peut dire en général que la stricte unité, le style classique et les idées de l’ancienne liturgie sont absents des prières de l’Offertoire au missel actuel. - p. 148


Le sens de l’antique Offertoire :

1- (...) l’offrande est le symbole de la personne qui offre. (...) à l’Offertoire, nous apprenons à faire le sacrifice le plus beau, le plus dur, mais aussi le plus agréable à Dieu, notre véritable offrande, nous-mêmes (...) C’est cette entrée dans le sacrifice du Seigneur qui était si magnifiquement exprimée à l’offrande, quand les chrétiens apportaient leurs dons à l’autel. Leurs dons représentaient leurs propres personnes. Ainsi, ils se plaçaient eux-mêmes sur la table du sacrifice pour mourir avec le Christ. Alors ils montaient sur la croix pour être crucifiés avec le Seigneur. Tel est le sens profond de l’Offertoire : l’entrée dans le sacrifice de la mort du Christ. En bref : c’est le Christ et nous qui composons le sacrifice.
2- Le pain est l’image de notre travail (...) Dans le pain et le vin, nous apportons toute notre vie, tout nous-mêmes.
3- L’idée de communauté : chacun donne du sien, de ce qui lui appartient en propre, ce qu’il a personnellement choisi, et il l’apporte à l’autel pour qu’il en soit fait une seule grande offrande de la communauté. (...) ce sont des hommes qui viennent à l’Offertoire avec leur individualité propre ; cependant ils grandissent dans l’unité du corps mystique du Christ.
4- Il y a contenu dans l’Offertoire un fort beau symbole : le chrétien a porté le pain et le vin à l’autel et, à la communion, il vient reprendre le même pain et le même vin, mais divinisés, quand ils sont devenus corps et sang du Christ. Le pain et le vin représentent la personne ; l’homme naturel vient au sacrifice et il revient divinisé, changé en la personne du Christ. La parole de saint Paul ainsi se vérifie : “Ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi”. L’Offertoire et la Communion nous montrent à l’évidence que, par la sainte Eucharistie, “nous devenons participants de la divinité (du Christ)”. - p. 143-146 | A la Communion, nous recevons de nouveau le pain que nous avons déposé à l’Offertoire, -mais il a été consacré, divinisé. C’est un profond symbole de la messe : notre pain d’hommes est devenu pain de Dieu. Mais comme le don vaut pour le donateur, “l’homme naturel” venu à la messe s’en retourne chez lui “homme divinisé”. Nous sommes devenus participants de la divinité. Tel est le sens de la Rédemption qui nous est impartie au sacrifice de la messe. - p. 225

Résumé :

Essentiellement, l’Offertoire est l’offrande des fidèles ; par elle ils expriment leur participation au sacrifice. Depuis qu’a cessé l’offrande des fidèles, l’Offertoire est devenu une offrande anticipée du sacrifice eucharistique qui suit. Dès lors, elle est devenue la liturgie du prêtre. Toutefois, le laïc ne doit pas cesser de voir dans l’offrande l’essence même de l’Offertoire, cette offrande dût-elle être spirituelle. - p. 163[/align]

[align=center]__________[/align]

[align=center]L’Offertoire de l’Ordo de Paul VI :[/align]

[align=justify]Il est entièrement revenu à la grande tradition du rit romain (ad normam Sanctorum Patrum), à sa “noble simplicité” (dixit Paul VI).

Il ne prend toutefois sa véritable signification que dans le cadre de la procession des dons par les fidèles, ce qui est vivement encouragé par la Présentation générale du Missel romain 2002 :

[font=Arial]Au commencement de la liturgie eucharistique, on apporte à l'autel les dons qui deviendront le Corps et le Sang du Christ.

D'abord on prépare l'autel, ou table du Seigneur, qui est le centre de toute la liturgie eucharistique [70], en y disposant le corporal, le purificatoire, le missel et le calice, à moins que celui-ci ne soit préparé à la crédence.

Puis on apporte les offrandes : il est louable que les fidèles présentent le pain et le vin, toutefois le prêtre ou le diacre les reçoit à un endroit favorable et les dépose sur l'autel. Bien que ce ne soit plus, comme autrefois, de leurs propres biens que les fidèles amènent du pain et du vin destinés à la liturgie, néanmoins ce rite de l'apport garde sa valeur et sa signification spirituelle.

On peut aussi recevoir de l'argent, ou d'autres dons au profit des pauvres ou de l'Église, qui sont apportés par les fidèles ou recueillis dans l'église ; on les dépose à un endroit approprié, hors de la table eucharistique[/font]
. (n° 73)

Par cette procession, l’Offertoire retrouve la plénitude de sens spirituel qu’il possédait autrefois, en rendant au peuple de Dieu une participation active, objectif premier de la réforme liturgique. Les dons offerts par les fidèles -le pain et le vin, fruits du travail des hommes- représentent leurs propres personnes, et signifient ainsi mieux que l’ancien Offertoire la part qu’ils doivent prendre au sacrifice : s’offrir eux-mêmes avec le Christ et dans le Christ. Car si c’est la Tête qui est offerte et qui s’offre, tout le Corps doit s’offrir avec elle. Les dons offerts par les fidèles à l’Offertoire, ils les retrouvent à la Communion, mais divinisés. On a souvent accusé le nouvel Ordo Missae d’avoir dénaturé l’offrande en la dégradant, ne la faisant plus consister que dans un simple échange entre Dieu et les hommes (cf. Bref examen critique). Ne tenant compte ni de l’ancienne forme de l’Offertoire, ni de la procession qui en était le centre, cette critique est injustifiée. Certes, il s’agit bien d’un échange, mais combien grand, combien profond et magnifique ! (cf. point 4 ci-dessus). C’est un échange de nature sacrificielle, et qui doit donc être agréé de Dieu : c’est ce qui est signifié sans ambiguïté dans les prières conservées de l’ancien Offertoire : le In spiritu humilitatis et l’Orate Frates (ce que le BEC ne remarque étrangement pas, lui qui aurait dû plutôt se demander pourquoi ces deux prières avaient été conservées...).

Disons-le clairement : l’Offertoire restauré a rétablit l’intégrité (j’insiste sur le mot) spirituelle et dogmatique de l’Offertoire romain classique :

1°- La procession des dons et les deux prières sur le pain et le vin mettent bien en valeur que l’essence de l’offertoire est l’offrande, à laquelle tous les fidèles doivent participer (au moins spirituellement) en s’offrant eux-mêmes avec leurs dons.
2°- Les deux prières conservées de l’ancien Ordo signifient clairement que c’est un sacrifice qui se prépare, et qu’il doit être agréé de Dieu.
3°- L’Orate Frates marque parfaitement la fin de l’offrande et le début du sacrifice ; la distinction limpide que cette prière établie entre le prêtre et les fidèles signifie bien que le sacrifice est uniquement réservé au sacerdoce consacré.

Comment être plus complet, plus concis et plus clair ?

Ainsi que l’indique Adrien Nocent : « cette simplification apportée par le Missel actuel centre davantage sur le sacrifice qui va être offert et ne dilue pas ce geste sacrificiel dans des prières préparatoires qui ont souvent faussé le sens même de l'offertoire et diminué le dynamisme de la Prière eucharistique elle-même. » - Les prières d’Offertoire de l’ancien Ordo supprimées, aussi belles soient-elles, ne représentaient pas le véritable esprit le l’Offertoire romain classique : «On peut dire en général que la stricte unité, le style classique et les idées de l’ancienne liturgie sont absents des prières de l’Offertoire au missel actuel. » (Pius Parsch, p. 148) Si leur caractère d’anticipation du sacrifice n’est pas en lui-même condamnable, il n’en reste pas moins étranger à l’esprit du rit romain ancien, et démontre au contraire une influence orientale évidente (par le biais de l’ancienne liturgie gallicane). Leur caractère et leur origine hétérogènes est incontestable (les informations qui suivent sont tirée de Dom Guy Oury, La Messe de saint Pie V à Paul VI). Le Suscipe sancte Pater, tiré du Liber precationum de Charles le Chauve, introduisit dans le rite romain une prière de dévotion privée sans rapport originel avec la liturgie. Le Veni Sanctificator est une épiclèse pré-consécratoire d’origine gallicane, et n’a par conséquent aucune raison objective de se trouver dans l’Offertoire. L’Offerimus est une prière d’offrande après la consécration dans la liturgie hispanique. Le Suscipe sancta Trinitas, combinant l’anamnèse, l’offrande du sacrifice, la mémoire de l’Eglise triomphante, l’intercession et la conclusion, à toute les caractéristiques d’une prière post-consécratoire. Ces prières n’ont été combinées pour former l’Offertoire qu’au XIIème ou au XIIIème siècle ; les autres églises d’Occident ont conservé jusqu’au XVIème siècle des ensembles différents. La grande variété des rites et des prières d’Offertoire dans le bas moyen âge est indubitablement le signe du caractère récent de toute cette partie de la Messe. Sa réorganisation n’a donc pas touché à l’essence de la liturgie.[/align]

In Christo cum Petro,

- VR -

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Message non lu par Boris » mer. 20 sept. 2006, 9:19

In illo tempore a écrit :
Boris a écrit :Si on développe l'idée du Dr Denis Crouan, la thèse est que l'autorisation de 2 éléments empêche l'application de la restauration de la Liturgie.

Cest 2 éléments sont d'une part l'ancienne forme du rite romain et d'autre part le n'importe quoi à la Bayard et companie.
Ben voyons ! C'est l'ancienne forme du rite romain qui empêche l'application de la restauration de la Liturgie.
Boris a écrit :C'est en cela que l'usage trop répandu de l'ancienne forme va à l'encontre du respect de la Liturgie : non pas de manière direct, car l'ancienne forme est très respectueuse, mais de manière indirect par ce que les Evêques en font.
Usage trop répandu !
Regardez les événements des quarante dernières années : l'ancienne messe interdite.
L'application large et généreuse du motu proprio, où la voyez-vous ? Aux évêques qui vous disent d'aller chez les tradis, prenez-les aux mots et demandez leur une messe suivant le motu proprio. Dans plus de 30 % des diocèses, il n'y a aucune célébration de ce type.
Parce que vous croyez sincèrement que ce qui se fait dans les paroisses depuis 40 ans c'est "l'Ordo de Paul VI" ?
Mais pas du tout !
Prenez les livres liturgiques de Paul VI (même le Missel en français de 1979) et allez à la Messe dans la paroisse à coté de chez vous !
(Prenez aussi un cahier plutôt qu'une feuille pour relever les différences entre l'Ordo et ce que vous verrez)

Il faut arrêter de dire que ce qui se fait dans les paroisse est l'Ordo de Paul VI : ce n'est pas vrai ! Quand un prêtre prétend célébrer "una cum Papa nostro" et qu'il invente la prière eucharistique, c'est autant illicite qu'une Messe de la FSSPX ! C'est peut-être même invalide, ce qui n'est pas le cas pour la FSSPX !

Ce que je remarque c'est que dans tous les cas personnes n'obéit au Pape !

Ceux qui critiquent le nouvel Ordo sont comiques : ils comparent la version latine de l'ancien ordo avec le n'importe quoi qui se fait en français dans les paroisses françaises et québécoises ! Or ces dernières ne sont pas le nouvel Ordo !
Il faut comparer avec ce que le Pape fait à Rome ou avec ce qui se fait à Solesmes (notamment chez les moniales). En somme il faut comparer avec le nouvel Ordo.
Si on compare un livre, il faut le comparer avec un autre livre !
Or cela n'est pas fait ! De quoi ont-ils peur ? De se rendre compte que tout ce qu'ils disent ne tienne pas la route 2 min ?
Dernière modification par Boris le jeu. 21 sept. 2006, 17:02, modifié 3 fois.
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Message non lu par Boris » mer. 20 sept. 2006, 9:32

Je pense personnellement qu'il y a plusieurs questions qui ne sont pas du même ordre :

- la dignité de la Liturgie, le sens de la célébration, le sens Ecclésiale : c'est là que je dis que les prêtres de l'ancienne forme, même s'ils ne savent ce qu'ils font, ils le font bien. Il s'agit ici d'humilité, donc d'obéissance aux normes et aux rubriques. (appeler rigorisme) C'est un point très important.

- l'édition des Missels : plus que de dire 1962 ou 2002, je crois qu'il faut regarder comment ils sont faits. Clairement celui de 2002 (comme l'était celui de 1969) est destiné à une élite. Je pense que cela aide à expliquer le n'importe quoi Liturgique. Par contre celui de 1962 présente des incohérences concernant le sens Liturgique (celui de 2002 aussi).
Il faut donc repartir de celui de 1962, voir de la Liturgie de 1965 pour retrouver un véritable "Ordo" (car c'est de cela qu'il s'agit) adapté à tous. La question de la validité de l'un ou de l'autre n'existe pas en réalité. Les 2 sont théologiquement corrects etc. Non, je crois vraiment que la question est de retrouver une forme qui exprime bien la Liturgie, en gardant certains points de la tradition qui ont été redécouvert (plusieurs Prières Eucharistiques par exemple mais pas plus de 3 ou 4, car la prière Eucharistique N°4 vient de St Basile, ce n'est qu'un exemple avec tous les limites qu'il comporte), avec l'incorporation de la langue vernaculaire mais dans des rites précis : proclamation de la Parole mais pas dans les salutations ni les répons, ni dans la prière eucharistique (Canon ou autre) (retour peut-être au Canon tel qu'il était mais je ne parle pas de l'Offertoire qui hors du Canon et qui pose d'autres questions).


Je lance des idées.

En fait, ce que le Pape attends vraiment c'est un nouveau mouvement Liturgique comme dans les années 1920-1930 (pas après). Ce fut d'abord un retour au sens des rites et de la Liturgie. Ainsi cette excellente compréhension (savoir ce que l'on fait) a permis de découvrir (ou de retrouver) les trésors cacher de la Liturgie. Il faut comprendre comment :
- pour le clergé, ils avaient tout sous leurs yeux, il "suffisait" de s'y intéresser.
- pour les laïcs, il fallait nettoyer les missels de toutes les prières à dire pendant la Messe et les remplacer par des explications de textes (cf. Missel de Don Lefebvre ou encore l'Année Liturgie de Dom Guéranger)


Que faut-il faire aujourd'hui ?

- tout le monde dispose des textes Liturgiques : il faut donc les expliquer et peut-être créer des groupes de "prière Liturgique", il faut faire pression sur les curés pour ré-obtenir les vêpres les dimanches et fêtes de précepte (en plus c'est dans Vatican II)
- un prêtre cet été nous disait cet été que de toute manière, il fallait un bon coup de pied dans la fourmillière. Etant donné le point où on en était, il ne restait que la manière forte.
Il faut demander cette manière forte à Rome.
Si on oblige "par la Force" les prêtres à célébrer selon les normes et les rubriques, à chercher à imiter la Messe du Pape, peut-être sortirons-nous du n'importe quoi.

Le Pape a déjà déclaré la guerre :
- reprendre son discours du mois de Décembre 2005 à la Curie
- nomination de Mgr Randjith en plus de Mgr Arinze
- rappel à l'ordre du chemin néocatéchuménal
- ouverture du Bon Pasteur

Plus près de nous :
- nomination de Mgr Centène, Mgr LeVert (ex-St Martin), Mgr Le Gall comme Archevêque, ...

Imbéciles sont ceux qui ne veulent pas voir la préparation au retour aux normes.
"La réforme de la réforme" : le souci est que vatican II avait demandé une restauration. pas une réforme. Or nous avons eu une réforme. La solution est peut-être de faire enfin cette restauration.
En plus cette expression va braquer certains et je pense que les fidèles de l'ancienne forme ne vont se sentir concerner.
Si au contraire on parle de refaire une restauration , quelque chose de ce goût là, on va voir se dresser plusieurs personnes (et ils le font déjà) qui vont dire : "Mais ceux qui ont appliqué sincèrement Vatican II ..." : il faut que les Evêques aient le courage de dire que ceux-là n'ont pas appliqué Vatican II et surtout pas de manière sincère.
Peut-être pourrons-nous revenir à Vatican II et repartir de là (donc forme de 1962) pour faire cette restauration.

Voilà ce que je pense. Mais ma pensée évolue selon les signes et les arguments.
UdP,
Boris

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Message non lu par Boris » jeu. 21 sept. 2006, 17:21

In illo tempore a écrit : Il y a d'autres raisons qui me font préférer l'ancien missel au nouveau : la multiplicité des Prières eucharistiques et ce canon d'Hippolyte, l'aspect sacrificiel qui est raboté, l'offertoire, la suppression des secrètes qui anticipaient sur le sacrifice, la suppression de l'octave de la Pentecôte, de la Septuagésime, l'organisation des lectures, les messes de Carême, la concélébration qui devrait être exceptionnelle, ... Même si beaucoup ne perçoivent pas tout cela, c'est pour toutes ces raisons que j'aime l'ancien missel.
Je suis entièrement d'accord avec vous sur la surmultitude de Prières Eucharistiques en plus du Canon. 3 ou 4 me parait plus raisonnable (on retire bien évidemment l'actuelle N°2, par contre l'actuelle N°4 nous fait redécouvrir un grand pan de la Tradition de l'Eglise)

Par contre pour le sacrifice, visiblement vous n'avez jamais ouvert le nouveau Missel, de même pour l'offertoire (dont le déroulement est strictement le même, seul les mots sont plus en accord avec le rite lui-même).

Si vous trouvez que les secrètes ont disparues, c'est parce qu'elles sont dites à voix haute !
La simplification du calendrier a permi de célébrer plus de fêtes du sanctoral, car ainsi il y a moins de chevauchement des temps particuliers entre eux.
Les anciennes lectures sont toujours là, elles ont été augmentées les Dimanches et sollennités.
Les Messes de carêmes : je n'ai encore jamais vu (sauf à Solesmes) une messe de carême célébrée selon le nouvel ordo (correctement je veux dire).
La concélébration marque l'Unité du sacrifice : il ne s'agit pas de réunir toutes les messes de la journée en une seule, mais plutôt celles qui ont lieu en même temps au même endroit. Il ya clairement un abus sur l'usage de la concélébration.

Le vrai problème est que l'ordo de Paul VI n'est pas appliqué (normes de la PGMR et rubriques du Missel).
UdP,
Boris

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Message non lu par In illo tempore » jeu. 21 sept. 2006, 21:05

Boris a écrit :Prenez les livres liturgiques de Paul VI (même le Missel en français de 1979) et allez à la Messe dans la paroisse à coté de chez vous !
Comme je l'ai expliqué, il n'y a jusqu'à présent aucune application large et généreuse du motu proprio. Et je suis obligé en semaine d'aller à la Messe dans la paroisse à côté de chez moi comme vous dites. Je peux vous dire que je connais l'état de la liturgie dans nos paroisses et quand on va à la messe dans une telle paroisse il vaut mieux éviter de prendre un missel.
Boris a écrit :Par contre pour le sacrifice, visiblement vous n'avez jamais ouvert le nouveau Missel, de même pour l'offertoire (dont le déroulement est strictement le même, seul les mots sont plus en accord avec le rite lui-même).
Contrairement à ce que vous croyez, je connais le nouveau missel. Et c'est parce que je connais les deux missels que je peux préférer l'ancien. Je ne vous ferai pas la pareille en vous répondant que vous n'avez jamais ouvert l'ancien missel. Sur l'offertoire, je n'ai pas trouvé la prière Suscipe Sancta Trinitas dans le missel de Paul VI et celle-ci a trait au sacrifice.
Boris a écrit :Si vous trouvez que les secrètes ont disparues, c'est parce qu'elles sont dites à voix haute !
Vous lisez un peu vite, j'ai parlé de la suppression des secrètes qui anticipaient sur le sacrifice, uniquement de celles-ci pas des super oblata en général ! Il suffit de comparer sur un certain nombre de messes. La plupart des secrètes qui parlent de sacrifice ont été modifiées.
Boris a écrit :Les anciennes lectures sont toujours là,
Je n'ai pas dit le contraire, mais pourquoi avoir chamboulé l'organisation du lectionnaire surtout pour les messes de Carême ?
Boris a écrit :Clairement celui de 2002 (comme l'était celui de 1969) est destiné à une élite.
Désolé, mais je ne fais pas partie de l'élite mais du petit peuple chrétien. C'est la raison pour laquelle le peuple a déserté les églises et il ne reste que quelques intellectuels dans les églises.
marchenoir en citant Dom Oury a écrit :L'approbation explicite donnée par le Pape à une formule liturgique doit la faire considérer comme exempte de toute erreur concernant la foi et les moeurs.
Je n'ai pas dit le contraire mais je persiste à croire que les deux missels n'ont pas la même valeur.
Et cela a été l'avis des évêques lors du vote du 27 octobre 1967 sur la messe dite normative (on peut noter la partialité avec laquelle M Crouan rapporte ce résultat dans son livre Histoire du missel romain en ajoutant les placet juxta modum aux placet) qui aurait alors due être profondément modifée. La formule liturgique bien qu'imparfaite est certes exempte d'erreur mais pas le processus qui a conduit à établir celle-ci. C'est ce qu'expliquait le Cardinal Ratzinger qu'en instituant une liturgie "préfabriquée", on donnait l'impression qu'elle dépendait de notre vouloir et chaque communauté était alors amenée à décider de sa propre liturgie.

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Message non lu par Boris » ven. 22 sept. 2006, 8:48

"In illo Tempore"

Le but n'est pas de se battre.

Le but est de comprendre le sens de la Liturgie afin de générer un nouveau mouvement liturgique.

Lorsque vous parlez des anciennes secrètes, vous dîtes vous-même qu'elles anticipent le sacrifice. Est-ce le rôle de l'Offertoire que d'anticiper la consécration ? Non, sinon ce n'est plus l'offertoire.

Voici un schéma comparatif des 2 formes de l'Offertoire :
Le but est d'avancer dans la théologie Liturgique et non de sa battre, je préfère le redire.

Image

UNE PREMIERE CONSTATATION: LA STRUCTURE DE L'OFFERTOIRE EST INCHANGEE.
En restaurant la liturgie romaine, Vatican II n'a pas modifié la structure de l'offertoire: les différentes étapes du déroulement de l'offertoire avant le Concile se retrouvent toutes dans le déroulement de l'offertoire après le Concile.
Il n'y a donc ni bouleversement... ni révolution.

UNE DEUXIÈME CONSTATATION: CERTAINES PRIÈRES ONT ÉTÉ MODIFIÉES...
Cette modification des prières de l'offertoire posent plusieurs questions:
- le changement a-t-il pu choquer les fidèles?
- en quoi ont consisté les changements?
- pourquoi l'Eglise a-t-elle décidé de faire des changements?
- ... et la "Tradition" dans tout cela?

a) Le changement a-t-il pu choquer les fidèles?
A cette question on peut répondre négativement. En effet, avant Vatican II, l'offertoire se faisait à voix basse, les fidèles ne pouvant entendre que deux choses: le Dominus vobiscum du début du rite, et le Per omnia saecula saeculorum de la fin de l'offertoire.
Que faisaient les fidèles durant l'offertoire? Aux messes basses, ils s'occupaient à des prières privées; à certaines messes ils étaient invités à chanter un cantique; à la "grand-messe" célébrée dans une paroisse assez importante, ils pouvaient écouter l'antienne d'offertoire grégorienne ou un motet polyphonique exécuté par une schola.
Peu de fidèles étaient véritablement attentifs à ce que devait dire le prêtre à l'autel, ce qui fait que les paroles fixées par Vatican II pour le rite d'offertoire leur a paru davantage comme une nouveauté que comme un changement.
b) En quoi ont consisté les changements?
Pour répondre à cette question, le mieux consiste à prendre les prières de l'offertoire les unes après les autres, de voir comment elles étaient avant le Concile et ce qu'elles sont devenues après le Concile.

-l’"oremus".
Dans le vieille liturgie, l'offertoire commençait avec une invitation à la prière faite par le prêtre: Oremus. Mais il n'y avait aucune oraison... Cet oremus invitait les fidèles plus à s'asseoir qu'à faire oraison.
Vatican II a restauré ici les "prières universelles" qui existaient autrefois dans de nombreux rites et que le rite romain n'avait conservées que dans la liturgie du Vendredi-saint. Le Concile est donc revenu à une tradition fort ancienne. Il y avait un choix à faire: soit supprimer l’oremus qui n'avait plus de raison d'être, soit rétablir une prière venant logiquement après l’oremus. C'est la deuxième solution qui a été retenue, parce que plus conforme à la tradition liturgique.

- L'offrande du pain et la prière "Suscipe".

Suscipe, sancte Pater, omnipotens aeterne Deus, hanc immaculatam hostiam, quam ego, indignus famulus tuus, offero tibi Deo meo vivo et vero, pro innumerabilibus peccatis, et offensionibus, et negligentiis meis, et pro omnibus circumstantibus, sed et pro omnibus fidelibus christianis, vivis atque defunctis, ut mihi et illis proficiat ad salutem in vitam aeternam. Amen.

Recevez, Père saint, Dieu éternel et tout-puissant, cette offrande sans tache que moi,
votre indigne serviteur, je vous présente à vous, mon Dieu vivant et vrai, pour mes péchés, offenses et négligences sans nombre, pour tous ceux qui m'entourent, ainsi que pour tous les fidèles vivants et morts: qu'elle serve à mon salut et au leur pour la vie éternelle. Amen.

Cette prière ne fait pas partie de la liturgie romaine: on peut dire qu'elle n'est pas "traditionnelle". On peut faire plusieurs remarques à son sujet:
- elle utilise la première personne du singulier, ce qui est contraire aux habitudes du rite romain qui, lui, utilise habituellement la première personne du pluriel.
- cette utilisation de la première personne du singulier s'explique parfaitement: il s'agit d'une prière privée qu'on retrouve au IXème siècle non pas dans un missel "romain", mais dans le Liber precationum (c'est-à-dire le "livre de prières") de Charles-le-Chauve (875-877).
- cette prière contient des germes d'erreurs théologiques. En effet, elle conduit à attribuer à un simple morceau de pain -désigné ici sous les termes d' "hostie sans tache"- une vertu incroyable, puisqu'on lui attribue le pouvoir d'agir pour le salut des vivants et des morts.

Vatican II a donc supprimé ce qui pouvait être cause d'erreur et a opté pour une formule plus simple, plus proche de la Tradition romaine comme on le verra plus loin:
Benedictus es, Domine, Deus universi, quia de tua largitate accepimus panem, quem tibi offerimus, fructum terrae et operis manuum hominum, ex quo nobis fiet panis vitae.(3)

Tu es béni, Dieu de l'univers, toi qui nous donnes ce pain, fruit de la terre et du travail des hommes; nous te le présentons: il deviendra le pain de la vie.

Cette formule -qui sera reprise ultérieurement pour l'offrande du vin- s'inspire des bénédictions juives. Le Christ, lors de la dernière Cène, a prononcé des formules du même genre: c'est en elles que l'on trouve les sources des prières eucharistiques utilisées dans les différents rites tant orientaux qu'occidentaux.
Il faut remarquer que la traduction française a quelque peu appauvri le contenu du texte
original latin: le vocatif "Domine" (Seigneur) a disparu, tout comme la formule "ex quo nobis" (... il deviendra pour nous...). Il n'en est pas de même dans les traductions italienne, espagnole, portugaise, anglaise et allemande que nous avons pu voir.

- la prière dite pendant que le célébrant verse l'eau dans le calice.
Deus, qui humanae substantiae dignitatem mirabiliter condidisti, et mirabilius reformasti: da nobis, per huius aquae et vini mysterium, eius divinitatis esse consortes, qui humanitatis nostrae fieri dignatus est particeps, Iesus Christus, Filius tuus. Dominus noster: qui tecum vivit et regnat in unitate Spiritus Sancti, Deus, per omnia saecula saeculorum. Amen.

Dieu qui, d'une manière admirable, avez créé la nature humaine dans sa noblesse, et l'avez restaurée d'une manière plus admirable encore, accordez-nous, selon le mystère de cette eau et de ce vin, de prendre part à la divinité de celui qui a daigné partager notre humanité, Jésus-Christ votre Fils, notre Seigneur qui, étant Dieu, vit et règne avec vous en l'unité du Saint-Esprit, dans tous les siècles des siècles. Amen.

Voici une magnifique prière qui accompagne l'un des plus anciens rites liturgiques: le mélange de l'eau et du vin. Cette prière est véritablement "romaine"... Mais ici, elle n'est pas à sa place: il s'agit d'une ancienne oraison que trois sacramentaires romains (4) (les ancêtres de notre actuel "Missel") proposaient pour la fête de Noël. C'est ici tout le sens du mystère de l'Incarnation qui est évoqué; cette oraison a simplement été "complétée" par les mots "per huius aquae et vini mysterium", afin qu'elle puisse mieux "coller" avec le rite d'offertoire.

[3] Quand on ne chante pas l'antienne d'offertoire, le Peuple répond: "Benedictus Deus in saecula" (Béni soit Dieu, maintenant et toujours).
[4] On la retrouve dans les Sacramentaires léonien, gélasien et grégorien.

Vatican II a abrégé cette prière pour ne conserver que les paroles qui éclairent le rite :
Per huius aquae et vini mysterium eius efficiamur divinitatis consortes, qui humanitatis nostrae fieri dignatus est particeps.(5)

Comme cette eau se mêle au vin pour le sacrement de l'Alliance, puissions-nous être unis à la divinité de celui qui a pris notre humanité.

Ce ne sont que les paroles centrales de l'ancienne prière qui ont été conservée pour souligner le geste que fait le célébrant; le développement plus théologique, issu de la célébration du mystère de l'Incarnation, a été laissé de côté: il n'avait pas véritablement sa place dans le rite d'offertoire dont les gestes se suffisent à eux-mêmes.


[5] La Lettre 63ème de S. Cyprien à Cecilius, qui daterait de l'automne 253, commente la pratique de l'Eglise de mêler de l'eau au vin pour l'Eucharistie: cette goutte d'eau, explique-t-il, est le signe que l'Eglise entend participer au sacrifice du Christ; le vin, c'est le Christ, l'eau, c'est le peuple des rachetés purifiés dans la piscine baptismale: "Le sang du Christ n'est pas offert si le vin manque dans le calice, et le sacrifice du Seigneur n'est pas régulièrement célébré si notre oblation et notre sacrifice ne répondent pas à la Passion. Comment boirons-nous du vin nouveau, produit de la vigne, avec le Christ dans le royaume de son Père, si dans le sacrifice de Dieu le Père et du Christ nous n'offrons pas du vin et ne mêlons pas l'eau dans le calice selon la tradition du Seigneur?" (Cf. Dom Guy-Marie Oury, La Messe, éd. CLD, Chambray, 1985.)

- L'offrande du vin et la prière "Offerimus tibi".
Avant la restauration conciliaire, le célébrant disait la prière suivante en élevant un peu le calice au-dessus de l'autel:
Offerimus tibi, Domine, calicem salutaris, tuarn deprecantes clementiam, ut in conspecta divinae Maiestatis tuae, pro nostra et totius mundi salute, cum odore suavitatis ascendat. Amen.

Nous vous offrons, Seigneur, le calice du salut, et nous demandons à votre bonté qu'il s'élève en parfum agréable devant votre divine Majesté, pour notre salut et celui du monde entier. Amen.

Cette prière qui, dans l'ancien rite, est dite à la première personne du pluriel et fait symétrie
avec la prière d'offrande du pain "Suscipe sancte Pater", ne se rencontre qu'à partir du Xlème siècle dans certains missels dits "romains".
Nul ne peut nier qu'elle contient quelques "maladresses" qu'il convenait de corriger;
- le calice est désigné sous les mots "calice du salut", alors que la consécration n'a pas encore eu lieu;
- on demande à Dieu que ce calice soit offert "pour notre salut"... ce qui revient à attribuer au vin un pouvoir qu'il n'a pas;
- la formule double et amoindrit d'autant l'Orate fratres qui sera dit à la fin du rite d'offertoire.
On voit très nettement que ces prières d'offertoire sont des décalques de formules qui seront dites au cours de la Prière eucharistique: il était nécessaire de les revoir si l'on voulait que la liturgie ait une réelle cohérence et ne soit pas le support d'approximations théologiques. La restauration conciliaire a simplement conduit à supprimer cette prière pour la remplacer par la formule déjà employée au moment de l'offrande du pain, avec la réponse du peuple si l'antienne d'offertoire n'est pas chantée:
Benedictus es. Domine, Deus universi, quia de tua largitate accepimus vinum, quod tibi offerimus, fructum vitis et operis manuum hominum, ex quo nobisfiet potus spiritalis.
Tu es béni, Dieu de l'univers, toi qui nous donnes ce vin, fruit de la vigne et du travail
des hommes; nous te le présentons: il deviendra le vin du Royaume éternel.

- L'invocation du Saint-Esprit: la prière "In spiritu humilitatis" et la prière "Veni Sanctificator".
Dans l'ancien rite de la messe, après l'offrande du vin se touvaient deux prières. La première était dite par le prêtre incliné en signe d'humilité:
In spiritu humilitatis et in animo contrite suscipiamur a te. Domine; et sic fiat sacrificium nostrum in conspectu tuo hodie, ut placeat tibi, Domine Deus.
Voyez l'humilité de nos ainés et le repentir de nos coeurs: accueillez-nous, Seigneur; et que notre sacrifice s'accomplisse devant vous de telle manière qu'il vous soit agréable, Seigneur Dieu.

La seconde prière, qui s'enchaîne, est une invocation au Saint-Esprit: Veni, Sanctificator, omnipotens aeterne Deu, et benedic hoc sacrificium tuo sancto nomini praeparatum.
Venez, Sanctificateur, Dieu éternel et tout-puissant, et bénissez ce sacrifice préparé pour votre saint Nom.

La première prière apparaît dans le rite d'offertoire au XIème siècle; elle est donc relativement tardive. Quant à la seconde prière -l'invocation au Saint-Esprit-, d'inspiration peut-être gallicane, on la trouve dès le IXème siècle dans le Missel de Stowe; mais elle ne sera introduite dans le Pontifical romain qu'au XIIIème siècle. Elle rappelle un passage du 2ème Livre des Macchabées (2, 10). On retrouve, ici encore, l'erreur relevée plus haut, à savoir celle qui consiste à confondre le rite d'offertoire avec le "sacrifice": en effet, la prière adressée au Saint-Esprit ne ressemble-t-elle pas à l'épiclèse (6) que l'on trouve dans la Prière eucharistique, c'est-à-dire à la formule invoquant l'intervention de l'Esprit-Saint pour réaliser la consécration du pain et du vin?
Toutes ces prières ont été introduites dans notre ancienne liturgie au Moyen-Age (vers le XIIème siècle), lorsque les fidèles ne se sont plus contentés d'un rite simple: la messe s'est alors surchargée d'un groupe de signes et d'oraisons qui, plus tard, seront considérés comme faisant partie du rite romain originel. Le Pape Innocent III (1198-1216) tentera bien de ramener les rites à leur simplicité primitive, mais en vain... Ce qui prouve qu'à cette époque déjà, l'obéissance en matière de liturgie n'était pas toujours de mise.
La restauration liturgique a remis les choses en ordre pour éviter toute confusion: elle a conservé la première prière (In spiritu humilitatis...) mais a supprimé la seconde (Veni, sanctificator...).

[6] Supplices ergo te. Domine, deprecamur, ut haec munera, quae tibi sacranda detulimus, eodem Spiritu sanctificare digneris, ut Corpus et Sanguis fiant Filii tui Domini nostri Iesu Christi. (Prière eucharistique III).

- Le rite du lavement des mains du célébrant.
A la messe solennelle, le lavement des mains fait suite à l'encensement de l'autel(7) ; à la messe "ordinaire", il se fait tout de suite après que le célébrant ait dit la prière "In spiritu humilitatis... ".
Le sens mystique du lavement des mains - ou plutôt des doigts- est souligné dès le IVème siècle. S. Cyrille de Jérusalem écrit: "Ce geste indique que nous devons être purs de tout péché. Ce sont nos mains qui agissent; laver nos mains n'est autre chose que purifier nos actions". Faisant allusion au geste de Pilate, un autre auteur écrit: "Prenons garde que chacun de nous puisse dire en toute vérité: je suis innocent du sang de Jésus-Christ".(8)
Dans le rite en usage avant le Concile, le prêtre se lavait les doigts en récitant le Psaume 25 à partir du verset qui commence par les mots "Lavabo inter innocentes manus meas " (Je me lave les mains comme ceux qui sont innocents) et qui ont donné à ce rite le nom de "Lavabo":
Lavabo inter innocentes manus meas: et circumdabo altare tuum. Domine: ut audiam vocem laudis, et ennarem universa mirabilia tua. Domine, dilexi decorem domus tuae. Ne perdas cum impiis, Deus, animam meam, et cum viris sanguinum vitam meam: in quorum manibus iniquitates sunt: dextera eorum repleta est muneribus. Ego autem in innocentia mea ingressus sum: redime me, et miserere mei. Pes meus stetit in directio: in Ecclesiis benedicam te, Domine. Gloria Patri et Filio et Spiritui Sancto; sicut erat inprincipio, et nunc et semper, et in saecula saeculorum. Amen.

Je me lave les mains comme ceux qui sont innocents, et je me tiens, Seigneur, devant ton autel pour faire entendre mon chant de louange et proclamer chacune de tes merveilles. Seigneur, j'aime la beauté de ta maison, et le lieu de gloire où tu habites. Mon Dieu, ne condamne pas mon âme avec celle des pécheurs; ne m'enlève pas la vie comme aux criminels. C'est de leurs mains encore tachées de crimes qu'ils viennent t'apporter leurs offrandes. Je me présente en toute innocence: sauve-moi, aie pitié de moi. Avec fermeté j'ai marché dans le droit chemin; devant toute l'Eglise je te bénirai, Seigneur. Gloire au Père, au Fils et au Saint-Esprit. Comme il était au commencement, maintenant et toujours, dans les siècles des siècles. Amen.

[7] Contrairement à ce que l'on croit parfois, l'encensement des dons mis sur l'autel n'est pas un rite vraiment "traditionnel" -au sens d'ancien- dans l'Eglise latine. Les anciens Ordines romani (ancêtres directs de notre missel romain) ignorent ce rite, même si Hincmar de Reims en fait déjà mention vers 850. Il faut attendre le Xlème siècle pour voir le rite d'encensement se généraliser presque partout, et il faut attendre le XIIème siècle pour le trouver à Rome. L'encensement actuel reprend à peu de choses près l'encensement codifié dans le Missel dit "de S. Pie V" qui, lui-même, reprend l'encensement en usage au Xlème siècle conservé par l’Ordo romanus XIV (du XVIème siècle).
[8] Catech. mysts., V, 2.

Ces paroles n'accompagnent le geste du lavement des mains que depuis le Xlème siècle. On remarquera que, si les premiers mots de la prière correspondent bien au rite effectué, le reste du psaume ne se rapporte guère à l'action liturgique. C'est pour cette raison que la restauration liturgique voulue par Vatican II a corrigé la prière. Une nouveauté de plus, rétorqueront certains? Pas si sûr: l'histoire de la liturgie nous enseigne que, primitivement, le célébrant ne disait que le verset "Lavabo" en se lavant les doigts, coutume que l'on retrouve dans la liturgie dominicaine, laquelle n'a conservé que les trois premiers versets du Psaume 25.
En d'autres endroits où l'on célébrait selon le rite romain, ce n'était pas le Psaume 25 qui était récité mais quelques versets du Psaume 50: "Amplius lava me ah iniquitate meae...". C'est donc ce Psaume 50, correspondant parfaitement à la tradition liturgique, qui a été repris à la suite de Vatican II.
Désormais, le célébrant récite une formule plus brève qui souligne mieux le geste liturgique:
Lava me. Domine, ab iniquitate mea, et a peccato meo munda me.
Lave-moi de mes fautes, Seigneur, et purifie-moi de mon péché.

L'oraison "Suscipe sancta Trinitas".
Dans le rite en usage avant le Concile, sitôt que le célébrant avait fini de se laver les doigts, il revenait au centre de l'autel où, les mains jointes et un peu incliné, il disait une dernière grande oraison:
Suscipe, sancta Trinitas, hanc oblationem, quam tibi offerimus ob memoriam passionis, resurrectionis et ascensionis lesu Christi Domini nostri, et in honorem beatae Mariae semper Virginis, et beati lohannis Baptistae, et sanctorum Apostolorum Petri et Pauli, et istorum, et omnium Sanctorum; ut illis proficiat ad honorem, nobis autem ad salutem; et illi pro nobis intercedere dignentur in caelis, quorum memoriam agimus in terris. Per eumdem Christum Dominum nostrum. Amen.
Recevez, Trinité sainte, cette offrande (ou "oblation") que nous vous présentons en
mémoire de la Passion, de la Résurrection et de l'Ascension de Jésus-Christ notre Seigneur, en l'honneur également de la bienheureuse Marie toujours Vierge, de saint Jean-Baptiste, des saints Apôtres Pierre et Paul, des saints dont les reliques sont ici, et de tous les saints. Qu'elle soit pour eux une source d'honneur et pour nous une cause de salut; et qu'ils daignent intercéder pour nous au ciel, eux dont nous célébrons la mémoire sur cette terre. Par le Christ notre Seigneur. Amen.

Cette prière s'adresse à la Trinité: on la retrouve, sous des formes semblables, dans certaines liturgies orientales, mais pas dans le rite romain; elle est plutôt d'inspiration gallicane. Une fois encore, on attribue à la simple offrande du pain et du vin le pouvoir de nous garantir le salut; ne subsiste-t-il pas alors le risque d'amoindrir la portée de la Consécration par laquelle le Corps et le Sang du Christ deviennent les seuls moyens véritables du salut?
Cette oraison n'existe pas dans la liturgie des Chartreux, ce qui prouve qu'au XIème siècle, elle ne fait pas encore partie des différentes formes prises par la liturgie romaine. Par contre, la liturgie dominicaine connaît cette prière à quelques variantes près. Comme on sait que les Dominicains ont conservé des rites en usage au XIIIème siècle dans la majorité des églises de France, on peut penser que l'oraison "Suscipe sancta Trinitas" a été introduite dans la liturgie au Moyen-Age

Dans son "Micrologus", Bemold de Constance - qui, soit dit en passant, s'indigne contre les excès dont il est témoin dans la liturgie- indique qu'au Xlème siècle, l'oraison en question ne fait pas partie de la liturgie; si elle est récitée par certains, ce n'est qu'en vertu d'une coutume.
Comme on peut le remarquer, l'oraison Suscipe sancta Trinitas anticipe la Prière eucharistique. Comme la prière Unde et memores et comme le Communicantes du "Canon romain", elle évoque les grands mystères du salut et fait appel à l'intercession des saints.
Il est nécessaire, pour mieux comprendre le sens de cette oraison qui achève le rite d'offertoire, de dire ici un mot au sujet des ''dyptiques".
Dans une lettre datée de 416, Innocent Ier reproche à l'évêque Decentius de Gubbio de faire lire les noms des offrants avant que les offrandes ne soient recommandées à Dieu par le célébrant. Il s'agit ici d'une allusion à la coutume non romaine de donner, en lien avec l’Oratio fidelium (Prières universelles rétablies par Vatican II), les noms de ceux qu'on voulait rappeler: les saints locaux, mais aussi les vivants et les défunts. Des listes de personnes figuraient ainsi sur des "dyptiques". A cette coutume en usage dans les Gaules, Innocent Ier oppose l'usage romain qui fait lire les noms uniquement au cours du Canon de la messe. Lorsque la liturgie romaine va s'implanter en Gaule tout en faisant sienne des usages gallicans (VIIIème- IXème siècle), la lecture des "dyptiques" avant le Canon est encore en usage. C'est Charlemagne qui, par une ordonnance, va supprimer cet usage en 789.
Or, vers le IXème siècle apparaissent, dans les livres servant à la célébration de l'Eucharistie, des séries de prières commençant toutes par les mots "Suscipe sancta Trinitas... ". II n'est pas interdit de penser que ces séries d'oraisons constituent une suppléance de la vieille habitude gallicane de citer des noms à la messe, en dehors du Canon.
Par la suite, cette prière finira par s'imposer: à Rome, au XIIIème siècle, on adopte une formule de Suscipe qui était employée à Amiens et à Biasca et qui s'était répandue un peu partout.
Enfin, s'appuyant sur les travaux du Concile de Trente, S. Pie V finira par insérer le Suscipe sancta Trinitas dans le Missel romain imprimé. C'est ainsi qu'en liturgie, du "non romain" peut finir par devenir du "romain" et passer ainsi pour "vraiment traditionnel".
La réforme liturgique faite à la suite de Vatican II a purement et simplement supprimé cette oraison qui ne faisait pas vraiment partie du rite d'offertoire, qui avait été introduite assez tardivement dans la liturgie romaine, et qui avait fini par embarrasser bien des historiens et des théologiens.

L'Orate fratres.
Cette formule d'invitation à la prière, qui a été conservée intacte dans la liturgie restaurée après Vatican II, se rencontre surtout à partir du XIème siècle; elle ne trouve pas son origine dans le rite romain, mais dans un rite franc. C'est probablement une des plus anciennes prières non romaine à avoir été incorporée dans le rite romain.
Remarquons que la formule dite par le prêtre n'engageait, à l'origine, aucune réponse de l'assemblée. Quand, par la suite, le peuple a été invité à répondre au célébrant, il n'y a pas eu de formule fixe; en certains endroits, on récitait, par exemple, quelques versets du psaume 19.
Dans le rite romain pré-conciliaire, le prêtre disait à haute voix, en se tournant vers l'assistance, les paroles:
Orate, fratres,
Puis il continuait à voix basse: ut meum ac vestrum sacrificium acceptabile fiat apud Deum Patrem omnipotentem.

Les fidèles répondaient:
Suscipiat Dominas sacrificium de manibus tuis, ad laudem et gloriam nominis sui, ad utilitatem quoque nostram, totiusque Ecclesiae suae sanctae.
Le prêtre ajoutait:
Amen.
Priez, frères, pour que mon sacrifice, qui est aussi le vôtre, puisse être agréé par Dieu le Père tout-puissant.
Que le Seigneur reçoive de vos mains le sacrifice, à la louange et à la gloire de son Nom, ainsi que pour notre bien et celui de toute sa sainte Eglise.
Dans le rite romain actuel, seul l’Amen du prêtre a disparu.

Notons que l’Orate fratres est une belle formule théologique. Elle affirme que c'est bien un sacrifice qui va être offert, et elle insiste sur le sacerdoce ministériel exercé par le célébrant: c'est lui qui offre le sacrifice, offrande à laquelle s'associent tous les fidèles en vertu du sacerdoce qu'ils exercent depuis le baptême qu'ils ont reçu. En outre, la formule précise quelle est la raison d'être première du sacrifice eucharistique: la gloire de Dieu.
Cependant, il faut oser le dire: la traduction française de cette formule est désastreuse.
Le prêtre: Prions au moment d'offrir le sacrifice de toute l'Eglise.
L'assemblée: Pour la gloire de Dieu et le salut du monde.
Comme on le voit, le rôle spécifique du prêtre est gommé et l'Eglise bénéficiaire de l'Eucharistie n'est plus mentionnée. Le "salut du monde" semble ici une formule bien floue et sans réelle consistance ni spirituelle ni théologique. Nous sommes d'autant plus à l'aise pour critiquer la formulation française, que les autres missels que nous avons pu consulter sont restés, eux, fidèles au texte original latin.

La dernière prière du rite d'offertoire.
On l'appelait "Secrète" dans l'ancien missel romain; on l'appelle "Oratio super oblata" (prière sur les dons) dans le missel romain restauré; c'est du reste de cette façon qu'on désignait cette prière dans les plus anciens livres. Cette oraison, qui change en fonction de la fête célébrée, est la seule prière de l'offertoire qui soit véritablement romaine.
Pourquoi l'appelait-on "secrète" autrefois? Parce que selon un usage tardif qui s'est vraisemblablement imposé à Rome (pour quelles raisons?) on a pris l'habitude de faire dire cette prière à voix basse par le célébrant. Et puisqu'on disait cette oraison à voix basse jusqu'au moment du Concile, on a pris l'habitude de ne plus faire dire l'invitation traditionnelle "Oremus" par le prêtre: ce n'était plus la peine...
Dans les anciens missels romains, on lit cette curieuse rubrique qui se trouve après la prière silencieuse du prêtre: "Pour donner son adhésion, l'assemblée se lève et dit Amen".
Or, la "Secrète" est une oraison composée comme une "collecte" (prière d'ouverture) ou comme une "postcommunion" (prière de conclusion après la communion), et il ne vient à l'idée de personne de s'asseoir pendant que le célébrant chante l'une ou l'autre de ces deux oraisons. Alors, pourquoi, avant le Concile Vatican II restait-on assis pendant la "Secrète"? Et pourquoi demandait-on à l'assemblée de répondre "Amen" à une prière dont elle n'avait pas saisi la moindre parole? Perte d'un certain sens liturgique ?
Ce dont on est certain, c'est que les "Collectes" (Oratio super oblata) avaient été composées, comme toutes les autres oraisons de la messe, pour être chantées, comme l'atteste le rythme particulier (les cursi des phrases) des phrases latines.
Se référant à la tradition, Vatican II a demandé que, dans la liturgie romaine actuelle, les "oraisons sur les offrandes" soient à nouveau chantées, ou du moins dites à haute voix.

c) Pourquoi l'Eglise a-t-elle décidé de faire des changements?
Pour répondre à cette question, il faut voir de quelle façon a été réalisé le missel romain qui était en usage jusqu 'à Vatican II. Cet ancien missel était le fruit des travaux menés au Concile de Trente, au XVIème siècle. Or, à l'époque, la question qui se posait était la suivante: comment faire un missel unique qui puisse tenir compte des diverses formes prises au cours des siècles par le rite romain et dont les missels manuscrits témoignent?
On sait que cette question avait divisé les évêques et les cardinaux chargés de travailler sur le projet, et que trois groupes s'étaient constitués:
- un groupe d'"humanistes" estimant que le principal défaut de la liturgie se trouvait dans l'emploi d'un latin de mauvaise qualité: une sorte de latin "barbare" qu'il convenait de remplacer par le grec... On imagine le patrimoine qu'il aurait fallu jeter par-dessus bord si les tenants de cette théorie avaient pu "remporter le morceau" !
- un groupe de "radicaux" qui pensaient que la liturgie léguée par la tradition était tellement embrouillée et corrompue qu'il était inutile de songer à sauver quoi que ce soit de valable et qu'il valait mieux composer une nouvelle liturgie "romaine";
- un groupe de "modérés" qui estime que la liturgie, avec ses multiples variantes, a des qualités et des défauts et qu'il vaut mieux conserver le plus possible en valorisant les qualités et en apprenant aux prêtres à bien utiliser les livres qui paraîtront.
C'est, fort heureusement, le groupe des "modérés" qui l'emportera. Mais l'on voit bien en quoi consistera son travail: ne rien rejeter a priori, même quand ce n'est pas vraiment "romain", mais tâcher d'agencer les rites et les prières pour que l'ensemble puisse donner l'image d'une certaine cohérence.
C'est ainsi que dans l'offertoire de la messe "romaine" se sont retrouvées des prières privées, des prières plutôt romaines, des prières plutôt gallicanes, des rites plutôt romains, des rites plutôt gallicans, des oraisons dites à la 1ère personne du singulier et des oraisons dites à la 1ère personne du pluriel... et des prières où il était déjà question de ''sacrifice" parce que, pour des raisons diverses, on les avait calquées sur les prières contenues dans le Canon romain.
Vatican II a voulu mettre un peu d'ordre dans cet héritage certes précieux mais quelque peu hétéroclite: il fallait revenir à une claire notion de l'offrande, telle qu'elle s'était exprimée durant plusieurs siècles dans le rite romain, quitte à supprimer des prières dont le contenu théologique était bon... à condition de ne pas figurer dans le contexte d'un rite d'offertoire.

d) Et la Tradition dans tout cela?
"Bonne question", comme disent certains. Pour y répondre, ne faut-il pas voir d'abord ce que nous enseigne l'histoire au sujet de l'offertoire dans la liturgie romaine?

Qu'est-ce que l'offertoire dans la messe?
L'offertoire, ce n'est ni plus ni moins que la préparation de la matière (pain et vin) du sacrifice eucharistique; c'est la mise à part des choses profanes que nous voulons réserver à Dieu pour reconnaître notre dépendance vis-à-vis de Lui et reconnaître notre nature de créatures. L'offertoire, c'est l'esquisse d'une offrande que l'homme ne peut pas achever, réaliser totalement; que seul le Christ peut saisir pour en faire "son" offrande, le sacrifice parfait de lui-même dans lequel il associe toute l'humanité.
Les rites et les prières de l'offertoire ne doivent donc pas détourner l'attention des fidèles de ce qui est essentiel: la consécration. Ce n'est donc pas à l'offertoire qu'il faut faire des prières privées à la 1ère personne du singulier, ou encore parler de "sacrifice", mais au coeur de la Prière eucharistique (anaphore).
Or, nous savons que les liturgies les plus "traditionnelles" ont toujours strictement veillé au caractère particulièrement sobre du rite d'offertoire. Parmi les meilleurs témoins de ces liturgies "traditionnelles", citons les Ordines romani et plus précisément l’Ordo romanus l qui date du VIIIème siècle: il nous donne l'exemple d'une liturgie magnifique, vivante, mais dont la sobriété est à l'opposé aussi bien de l'offertoire de l'ancien missel romain "tridentin" que des offertoires avec rondes, farandoles, témoignages et guirlandes dont nous gratifient certains célébrants rêvant probablement d'être des champions de l'animation liturgique.
Que dit l’Ordo romanus I ? Le peuple remet ses offrandes aux diacres qui les portent sur l'autel. Le Pape prend ses propres offrandes (pain et vin) et les dépose lui-même sur l'autel.
Point final.
Il n'y a ni geste spécial, ni prière spéciale.
Mais alors, il n'y a pas vraiment d'offertoire? Si, l'offertoire existe vraiment: le geste de déposer les offrandes sur l'autel, de les mettre "à part" pour Dieu, suffit amplement, avec l’Oratio super oblata dont il a été question plus haut.
Pendant huit siècles, l'Eglise romaine s'est contentée de ce rite: pendant huit siècles, cette forme rituelle de l'offertoire a été considérée à juste titre comme la forme "traditionnelle" de la liturgie romaine.

Vatican II a voulu deux choses:
- éliminer certaines strates de prières conservées par Trente alors qu'elles étaient peu "traditionnelles";
- tenir compte d'un certain développement liturgique en prenant en compte l'évolution des
mentalités.
La restauration liturgique est donc revenue à une forme sobre de l'offertoire tout en introduisant une formule d'offrande du pain et du vin on ne peut plus "traditionnelle" puisque c'est, à quelques mots près, celle qui fut employée par Jésus lui-même lors de la dernière Cène. Elle est inspirée des bénédictions juives (Berakôt), d'où est issue la forme primitive de notre Prière eucharistique:
"Au temps de Jésus, des repas liturgiques, sur le modèle du repas pascal, se célébraient la veille du sabbat et de chaque grande fête parmi les communautés pieuses (les habouroth). La façon dont se déroulaient ces repas permet de comprendre aussi le déroulement de la Cène du Jeudi saint. Avant le repas, on servait des sortes de hors-d'oeuvre -ce qu'on appelle aujourd'hui en Orient, le mêzé - et l'on faisait circuler des coupes de vin qui, toutes, étaient bénies. La "première coupe", à la Cène, dont parle S. Luc (22, 17), était l'une d'elles. Puis les convives se lavaient les mains avec de l'eau parfumée et le repas proprement dit commençait. Il s'ouvrait avec la solennelle fraction du pain par le chef de famille ou le chef de communauté, qui prononçait cette formule d'action de grâce:
"Béni sois-Tu, Seigneur, qui a fait produire le pain à la terre".
C'est sans doute à ce moment que le Christ a consacré le pain. On apportait ensuite les différents plats, que l'on bénissait, et les coupes de vin, chacun bénissant sa propre coupe. A la fin du repas, la dernière coupe était bénie solennellement par le chef de communauté: "Béni sois-Tu, Seigneur... qui a crée le fruit de la vigne".
Ce rite était précédé par celui des lampes, qu'on apportait, et le rite de l'encens, et un deuxième lavement des mains. Ici, Jésus le remplaça par le lavement des pieds des Apôtres. Le rite solennel de la dernière coupe, dans laquelle on mêlait de l'eau au vin, s'accompagnait d'une grande action de grâces (eucharistia), dans laquelle le chef de communauté rappelait les bienfaits de Dieu, matériels et spirituels, depuis la sortie d'Egypte. C'est ici que Jésus a consacré le vin scellant la Nouvelle Alliance.
A sa suite, dans les premières communautés chrétiennes, on pratiqua ce type de célébration constituée par le kerygma, l'annonce de la Parole de Jésus convoquant le peuple de Dieu, les louanges de l'assemblée invoquant cette Parole faite chair, par des prières héritées de la synagogue et, enfin, le sacrifice, "fraction du pain", proclamation de la mort et de la Résurrection du Sauveur scellant définitivement à travers le temps la Nouvelle Alliance, "jusqu'à ce qu'Il revienne" (...)".

Comme l'aura montré cette étude basée sur l'histoire et le sens théologique des rites de l'offertoire, la restauration liturgique faite à la suite de Vatican II n'a, dans ce domaine, rien innové: le Concile a fait en sorte que le sens de l'offertoire soit redécouvert et que sa forme soit pleinement respectueuse de la tradition de la liturgie romaine.
Encore faut-il, pour que chaque fidèle puisse être le bénéficiaire de cette liturgie restaurée, que les rites d'offertoire soient tous convenablement accomplis et non pas soit tronqués soit forcés, comme cela arrive parfois encore.

(Merci à FX de m'avoir fourni la matière)
UdP,
Boris

jean_droit
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Message non lu par jean_droit » jeu. 12 oct. 2006, 12:39

Bonjour à tous,
Dans La croix et dans Le Figaro on parlait ce matin des intentions de notre Pape sur la réforme de la liturgie.
Il s'agit de "l'officialisation" de la messe en latin.
Je pense qu'il y a beaucoup à dire sur le sujet.
Bien sûr l'article de La Croix est tendancieux ..... comment pourrait-il en être autrement avec un journal qui a long passé de "progressisme" .... heureusement largement édulcoré.
On voit bien que tous les lobbies sont en train de faire assaut autour de Benoît XVI.
Sans doute la même pression que celle qui a été faite autour de Paul VI pour que soit "totalement" abandonnée la messe "en latin".
Il était bien évident que l'objectif de faire revenir la FSSPX dans le giron de l'Eglise allait poser plus fortement encore le problème de la messe en latin.
On connait bien l'attachement de Benoit XVI pour la messe en latin. Il ne l'a jamais caché.
Si je me permets d'aller un peu plus loin c'est un certain désaveu des "résultats" de Vatican II.
Il faut bien dire qu'il faut solder cette période qui a été notre propre contribution, nous catholiques, au déclin de l'Eglise.
Qui osera maintenant prétendre que Vatical II est le signal du "renouveau de l'Eglise" ?
Mais il faut que chacun de nous fasse très attention à maintenir l'unité de l'Eglise.
Benoît XVI, en continuatiuon de Jean Paul II, recentre l'Eglise.
Il faudrait seulement faire attention à ne pas aller d'un extrème à l'autre.

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Christophe
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Message non lu par Christophe » jeu. 12 oct. 2006, 12:44

Bonjour Jean

Si je puis me permettre, je vous rappelle que dans les textes de Vatican II, le latin reste la langue liturgique...


Bien à vous
Christophe
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