Nature de la mission prophétique de l'Eglise au XXIème siècle

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Héraclius
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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Héraclius » mar. 13 sept. 2016, 0:16

Je vois celle-là : une personne dont le concubin serait non-catholique, et qui après une (re-)conversion, se trouverait face à un refus net de l'idée de "vivre en frère et soeur". On pourrait imaginer que pour un intérêt supérieur (l'éducation des enfants), elle consente, malgré elle, a demeurer dans l'état actuel des chose tout en vivant dans l'espoir de la chasteté explicite.
Je crois bien que l'Eglise ne saurait approuver un tel raisonnement. Il me semble que c'est n'est pas pour rien que vous n'avez pas exposé de textes pré-conciliaires allant dans votre sens. Je pense que de tels textes n'existent pas. Nous ne sommes pas chez les orthodoxes. Dura lex, sed lex.
Il s'agit d'une question de rationnalité. Les dogmes, c'est comme les math : vous ne ferez jamais faire que 3 + 3 = 7, mai si vous déclarez que 4 + 5 font 9, vous n'avez pas besoin d'autres preuves que la logique du calcul.

Mon exemple n'enfreint aucun des deux dogmes concernés, soi (1) le dogme du péché mortel et (2) le dogme des atteintes au mariage.

Démontrez-moi que on raisonnement est faux, c'est tout ce que je peux vous demander.
Ce n'est pas un argument. Ce n'est par exemple pas parce que les partisans de la Révolution russe étaient majoritairement issus de milieux orthodoxes que l'orthodoxie russe est coupable de la Révolution...
Votre contre-exemple est fascinant parce que je l'embrasse pleibement : l'orthodoxie Russe d'avant la révolution était malade, elle sonnait en creux, elle n'avait plus de feu intérieur. Lisez les écrits de Dostoïevsky et de Tolstoï. L'orthodoxie qu'ils montre est une orthodoxie en ruine.


Vous savez, le grand drame de la déchristianisation, en Russie comme en France, passe (entre autre) par un phénomène très simple : l'exode rural. Le paysan européen moyen vivait, dans tout les aspects de sa vie, d'une société profondément affectée par un chrisianisme sociétal. Le temps, l'espace, les étapes de la vie : tout était teinté de religion, et la conformité à la pratique naturelle de la foi.

Lorsque la nécessité économique poussa les paysans à fuir les zones rurales pour gagner les villes avec la naissance de l'industrie, le cadre religieux disparut, et la foi du même coup. En une ou deux génération, le paysan devenu ouvrier revint au paganisme, et constitua le terreau fertile où, la nature ayant horreur du vide, l'eschatologie maxiste prit racine.

Avant que vous me le reprochiez : je ne critique absolument pas ce cadre social dont jouissaient les paysans. La chrétienté, le règne social du Christ : voilà des mots que j'embrasse certainement.

Par contre, je critique le reste, c'est à dire que le christianisme de ces populations se limitait, à l'évidence, à leur cadre social. Une fois la structure otée, le reste s'avéra mou et s'effondra sur lui-même, comme un mollusque sans sa coquille. Et cela, c'est un scandale, parce que le christianisme, c'est d'abord et avant tout le feu intérieur d'une âme, son amour pour Dieu, la foi personnelle posée de façon radicalement libre dans la grâce. Le cadre chrétien, c'est bien, mais il n'est qu'un moyen vers ce feu intérieu allumé par l'Esprit, qui seul donne le salut.

Ce que je trouve absurde dans vos messages, c'est un attachement disproportionné à ces fameuses stuctures. Lorsqu'on enlève la structure et que tout s'effondre, je m'afflige de voir qu'il y a si peu de force derrière ce qui appaît n'avoir été qu'un conformisme social ; mais vous, vous vous languissez de la structure disparue. Cela ne m'empêche pas de moi-même avoir du respect pour la structure en en souhaiter le rétablissement sur une base plus solide, et je me doute que vous avez une foi plus profonde que vous ne le laissez voir et que la profondeur des choses vous importe. Mais le vocabulaire montre vos priorités : je comprend très bien l'étonnement de prodigal devant votre usage disproportionné du mot chrétienté, puisque ce dernier est la structure qui parachève l'avènement du règne du Christ sur les âmes, et non la fin ultime de la foi catholique.


Je vous recommande, si vous pouvez mettre la main dessus, de lire l'excellent Le Drame de l'Humanisme Athée du Cardinal de Lubac. Chaque chapitre est un monument, mais il y en a un en particulier, dans la parte réservée à Nietzsche, qui constitue une sorte de critique de certains aspects de la "Chrétienté" pré-concilaire et de ses potentielles évoltions (le nom du chapitre est il me semble le "combat spirituel"). Un passage en particulier m'a frappé : "Beaucoup d'entre nous ne font-ils pas aujourd'hui profession de catholicisme pour les mêmes raisons de confort intime et de conformisme social qui leur aurait fait repousser, il y a vingt siècles, l'inquiétante nouveauté de la Bonne Nouvelle ?".

Cette phrase est terrible et elle rappelle cette sorte de grande réalisation du christianisme à la fin du moyen-âge : la constatation qu'on avait beau avoir des cathédrales, des universités, la meilleure des philosophie et des croix dressé à tous les bouts de chemins, l'immense majorité de la population catholique ne l'était que de nom, un vernis loin de la vie sacramentelle et de la loi évangélique. La Contre-Réforme peut d'ailleurs se lire comme une tentative de lutte systématique contre cet état de fait : les missionaires y parlaient de bien des parties de l'europe comme "nos Indes", et l'effort missionaire cherche à apporter la conformité aux préceptes de la foi des Cités des Rois Très-Chrétiens aux villages les plus reculés. Et de compter soigneusement les statistiques d'attendance aux sacrements, d'imposer la censure aux idées mauvaises, de se comporter en soldats systématiques et disciplinés (La Compagnie de Jésus, de façon très littérale !), vêtus de leurs uniformes noirs, travaillant sans cesse à amener d'avantage de conformité.

Je ne critiquerait pas cette période : son effort est très beau, bien souvent touchant, et couverts de fleurs de saintetés. Mais cette "stratégie de la conformité" a échoué, sur le long terme ; en tout cas elle n'est plus d'actualité. On se souviendra des railleries pleines d'une angoisse sacrée de Kierkegaard, membre très critique de la très établie Eglise luthérienne du Danemark, pourtant alors à son apogée. Qu'était cette société de fous qui avaient "pour toute crainte de Dieu la consommation de la coupe de communion une fois par semaine" ? C'est-à-dire : qu'ele ce que ce conformisme qui se traversti en Christianisme ? Qu'est-ce que ces gens qui, parce qu'ils obéissent aux préceptes les plus simples de l'Eglise, dînent une fois par semaine avec le vicaire, donnent des cours de catéchisme et votent à la suite des évêques, croient être plus ou moins "en règle" avec Dieu ? Ne voient-ils pas le gouffre de l'absurdité de l'existence, ce seul pont qui est celui de la foi chrétienne, de l'abandon du pécheur dépravé face à un Dieu totalement saint avec crainte et tremblement ?


J'ai souvent l'envie de prendre vos épaules et de vous secouer comme un arbuste. Quelques lignes sèches sur un écran froid ne peuvent faire passer ce sentiment absolu de priorité pour la fontaine de feu, la splendeur radiante du Dieu d'Amour trois fois Saints qui brûle par sa simple idée nos conceptions peccamineuses. Réveillez-vous, bon sang ! Je crains que ces mêmes lignes ne soient teintés d'une certaine condescendance, mais ce n'est pas le cas. Décidemment l'écrit est un instrument frustant.



Héraclius -
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Suliko » mar. 13 sept. 2016, 14:11

Mon exemple n'enfreint aucun des deux dogmes concernés, soi (1) le dogme du péché mortel et (2) le dogme des atteintes au mariage.

Démontrez-moi que on raisonnement est faux, c'est tout ce que je peux vous demander.
Je pense que votre raisonnement est erroné, car il sous-entend que Dieu peut parfois nous demander de choisir entre deux péchés. De plus, je ne suis pas du tout certaine que le fait de se séparer d'un conjoint qui n'est pas notre époux devant Dieu en soit un, bien qu'évidemment, d'un point de vue humain, c'est une décision douloureuse, y compris et surtout pour les enfants. A mon sens, il y a deux solutions : soit se séparer (dans le cas très probable où le conjoint ne voudrait pas vivre chastement) et donc avoir le droit d'accéder à la communion, soit rester avec son conjoint, mais dans ce cas, s'abstenir de communier. Le problème, c'est que nous n'avons pas la même conception de ce qui est l'intérêt supérieur pour cette femme. Pour vous, c'est de ne pas briser son couple illégitime devant Dieu pour ne pas blesser les enfants (ce que je peux comprendre), tandis pour moi, ce serait plutôt de sortir du péché. Le fait que l'Eglise n'ait jamais suggéré que votre opinion était orthodoxe ne suffit-il pas à vous faire douter de votre raisonnement? Et pensez-vous vraiment qu'une femme ou un homme qui aime son conjoint illégitime puisse vivre avec lui dans un esprit de pénitence, dans le désir de cesser toute relation si ce dernier le permettait? C'est à mon sens très naïf que de le croire...

Je répondrai au reste de votre message plus tard. Permettez-mois juste de dire que ce n'est pas parce que je ne partage pas votre avis sur le dernier concile, sur les causes de la déchristianisation ou encore sur l'importance des "structures" qu'il faut en tirer des conclusions (ou des hypothèses) sur l'intensité de ma foi, son caractère personnel, etc... Sans compter que la messe et le catéchisme traditionnels sont évidemment loin d'être des structures sociales, et pourtant, ce sont à mon sens les choses les plus essentielles à rétablir actuellement.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Héraclius » mar. 13 sept. 2016, 14:19

Voyez le problème des mots : je n'ai pas voulu commenter votre foi personnelle - comment le pourrais-je ? -, mais vous l'avez lu.

C'est ce que je voulais dire en parlant de "mes propos peuvent êtres vu comme condescendant". Mais ils ne l'étaient pas. Je ne parlais pas de votre vie intérieur.

Quand au fait que la digne célébration de la messe et l'orthodoxie du catéchisme ne soient pas des structures sociales (en tout cas pas au sens que le mot peut avoir lorsqu'il désigne la société chrétienne, la "chrétienté"), c'est évident, et ce n'est d'ailleurs pas un point ou nous avons un désaccord, à deux trois nuances près. Particulièrement ce qui concerne la liturgie d'ailleurs, puisque le culte divin est une fin en soi avant d'être unn instrument d'évangélisation et d'édification.
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Suliko » mer. 14 sept. 2016, 19:50

Lisez les écrits de Dostoïevsky et de Tolstoï. L'orthodoxie qu'ils montre est une orthodoxie en ruine.
J'avoue ne pas trop me souvenir que ces auteurs parlaient beaucoup de l'orthodoxie dans leurs écrits...Quant à Tolstoï, permettez-moi de considérer qu'un excommunié qui avait fini par rejeter tous les principaux dogmes chrétiens (la divinité du Christ, le rôle de l'Eglise et des sacrements, etc...) et qui regardait de haut sa femme, parce qu'elle demeurait attachée à l'orthodoxie et à ses rites, n'est pas le meilleur des exemples...Je ne nie pas que c'était un très grand écrivain, mais en ce qui concerne notre sujet, je garderai mes réserves.
Je n'ai par ailleurs jamais lu que l'orthodoxie russe de la fin du XIXème-début du XXème était particulièrement en crise et que cela avait favorisé la Révolution. On parle tout de même d'un monde encore majoritairement paysan et rural, très attaché à ses coutumes religieuses. (D'ailleurs, dans les villes aussi, l'attachement à la religion était encore grand. Beaucoup de marchands aisés étaient d'ailleurs des vieux-croyants. Ils étaient doués pour le commerce! ) De ce que j'ai pu retenir de mes modestes lectures, ce fut essentiellement une partie de l'intelligentsia, influencée par les idées occidentales à la mode, qui versa dans l'incroyance. Dostoïevski en parle assez, me semble-t-il, et ce pour le déplorer. On peut déplorer que l'orthodoxie n'ait pas pu retenir ces gens (qui formaient une partie de l'élite de la société), mais il faut aussi comprendre qu'à l'époque, les utopies socialisantes non chrétiennes avaient d'autant plus d'attrait que les innovations scientifiques allaient s'accélérant et que l'on n'avait pas encore vécu les tragédies du XXème siècle et donc pas eu l'occasion d'être désabusé de toutes ces idées à la mode.
(Désolée pour le gros HS :-D )
Vous savez, le grand drame de la déchristianisation, en Russie comme en France, passe (entre autre) par un phénomène très simple : l'exode rural. Le paysan européen moyen vivait, dans tout les aspects de sa vie, d'une société profondément affectée par un chrisianisme sociétal. Le temps, l'espace, les étapes de la vie : tout était teinté de religion, et la conformité à la pratique naturelle de la foi.
Cela peut expliquer en partie la déchristianisation, mais ce n'est à mon sens qu'un facteur explicatif secondaire en ce qui concerne l'apostasie massive qui a suivi le concile. Apostasie qui a concerné toutes les couches de la population, et pas seulement le monde paysan, qui était d'ailleurs également en train de disparaître (et sans doute ce déracinement n'a-t-il pas aidé à la conservation des coutumes religieuses. Néanmoins, comment auraient-elles pu être conservées avec un clergé "rupturiste"?)
Par contre, je critique le reste, c'est à dire que le christianisme de ces populations se limitait, à l'évidence, à leur cadre social. Une fois la structure otée, le reste s'avéra mou et s'effondra sur lui-même, comme un mollusque sans sa coquille.
Le problème, cher Héraclius, c'est que ce que vous percevez comme un cadre était en fait bien plus que cela, puisque la messe et le catéchisme traditionnels, ainsi que tous les sacrements, en étaient le cœur! Tout le reste (le respect de la loi naturelle, la fréquentation des sacrements, un certain ordre social et politique chrétiens), bref, ce que vous appelez des structures, était juste une conséquence de l'adhésion au catholicisme de la majorité de la population. Quant je déplore la disparition des "structures", c'est dans l'idée de souligner qu'au fond, c'est le signe que le cœur du christianisme - la foi - a été touchée. Une fois la messe et le catéchisme attaqués, le cadre disparaît logiquement peu à peu (et assez vite, d'ailleurs!) et comment voulez-vous que la foi se transmette? Les catholiques à la foi vacillante n'ont plus eu de matière solide à laquelle s'accrocher et ont fini par perdre rapidement la foi. Quant aux autres, qui avaient une foi plus ferme, qu'auraient-il pu faire? Ils n'ont pas forcément perdu la foi, du moins pas tout de suite, mais la confiance qu'ils avaient en l'Eglise s'est trouvée fortement ébranlée et beaucoup ont fini par cesser de pratiquer, ne reconnaissant plus la religion de leur enfance dans les paroisses "réformées" et se sentant profondément trahi par les clercs. Quant aux enfants, que dire, si ce n'est que le catéchisme façon "Pierres vivantes" ne fut d'aucune utilité, et pour cause! Il est facile de dire, comme on le fait souvent, que les fidèles auraient dû se révolter, que s'ils ne l'ont pas fait, c'est que leur foi devait être bien tiède, mais à l'époque, tout s'est fait si progressivement, d'une manière si sournoise, que la révolte ne fut pas un réflexe évident. En tout cas, c'est ce dont témoignent beaucoup de catholiques qui ont vécu ces années douloureuses. Vous pointez du doigt les manquements de l'anciennes société chrétienne (pré-conciliaire), mais ce n'est pas elle qui est responsable de ce qu'a fait de l'Eglise une poignée de réformateurs! L'Eglise pré-conciliaire avait sans doute ses torts, mais au moins, elle parvenait bien mieux qu'aujourd'hui à faire son travail essentiel : la préservation et la transmission de la foi. Ce qui a été ôté, dans la foulée du concile, ce ne sont pas les structures, c'est le noyau de la foi, c'est la messe, le catéchisme et tous les sacrements en général. Les structures et les lois chrétiennes sont parties parce que le cœur de la foi avait déjà été dévasté.
En somme, quand j'écris structure, vous pensez exclusivement "cadre", alors que je donne à ce mot une définition bien plus large.
Je vous recommande, si vous pouvez mettre la main dessus, de lire l'excellent Le Drame de l'Humanisme Athée du Cardinal de Lubac.
C'est déjà lu depuis longtemps. J'en avais même fait un résumé passablement détaillé, que je vais relire au plus vite. Je garde un très bon souvenir de cette lecture, mais étrangement, ce n'est pas le chapitre que vous évoquez qui m'est resté en mémoire. (Et réalité, ce n'est pas si étrange, puisque généralement, nous retenons d'une lecture ce que nous désirons - souvent inconsciemment - en retenir.)
Cette phrase est terrible et elle rappelle cette sorte de grande réalisation du christianisme à la fin du moyen-âge : la constatation qu'on avait beau avoir des cathédrales, des universités, la meilleure des philosophie et des croix dressé à tous les bouts de chemins, l'immense majorité de la population catholique ne l'était que de nom, un vernis loin de la vie sacramentelle et de la loi évangélique.
Je trouve votre jugement terrible! Déclarer que finalement, l'immense majorité des catholiques ne l'étaient pas vraiment! Je ne sais pas si vous percevez vraiment à quel point il est injuste de parler ainsi de nos ancêtres dans la foi. Ce n'est pas parce que tous n'étaient pas des saints que cela en faisaient des faux catholiques, des catholiques en réalité séparé de l'Eglise et de la grâce. Héraclius, si ce que vous désirez, c'est une Eglise dans laquelle la majorité des croyants seraient des sortes de saints-mystiques, vous pouvez attendre longtemps. En somme, vous me paraissez bien plus irréaliste que moi. Je regrette simplement un certain cadre social chrétien, tout en sachant pertinemment qu'il ne permet pas en soi de faire de tout le monde de bons catholiques, mais qu'il a au moins pour grand mérite de donner à la société la bonne direction en matière de religion et de morale.


Je ne sais pas si j'ai été très claire. Il me semble que mes propos sont un peu confus. Veuillez m'en excuser. (Et concernant mon opinion sur le cas de la communion des divorcés-remariés, y avez-vous trouvé une quelconque pertinence et orthodoxie?)
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Héraclius » mer. 14 sept. 2016, 23:34

J'avoue ne pas trop me souvenir que ces auteurs parlaient beaucoup de l'orthodoxie dans leurs écrits...Quant à Tolstoï, permettez-moi de considérer qu'un excommunié qui avait fini par rejeter tous les principaux dogmes chrétiens (la divinité du Christ, le rôle de l'Eglise et des sacrements, etc...) et qui regardait de haut sa femme, parce qu'elle demeurait attachée à l'orthodoxie et à ses rites, n'est pas le meilleur des exemples...Je ne nie pas que c'était un très grand écrivain, mais en ce qui concerne notre sujet, je garderai mes réserves.
C'est justemment parce que personne n'a pu lui offrir une croyance intelligente qu'il est tombé dans l'hérésie. Ce n'est certainement pas pour le dédouaner de sa faute, mais le fait est là. Lorsqu'il demande "N'est-il pas de la sorcellerie de croire qui si un homme juste meurt sur un chemin de campagne et décède sans les derniers sacrements, son salut est dans la balance, alors que si un homme moins bon meurt sur le même chemin mais qu'un prêtre venant à passer par-là prononce quelques phrases et fait quelques signes, son salut est presque assuré ?", personne ne lui offre une réponse intellectuelle et spirituelle profonde ; on invoque l'autorité de l'Eglise et on lui dit de se repentir d,avoir un instant remis en cause la Sainte Eglise.

Je n'ai par ailleurs jamais lu que l'orthodoxie russe de la fin du XIXème-début du XXème était particulièrement en crise et que cela avait favorisé la Révolution. On parle tout de même d'un monde encore majoritairement paysan et rural, très attaché à ses coutumes religieuses. (D'ailleurs, dans les villes aussi, l'attachement à la religion était encore grand. Beaucoup de marchands aisés étaient d'ailleurs des vieux-croyants. Ils étaient doués pour le commerce! ) De ce que j'ai pu retenir de mes modestes lectures, ce fut essentiellement une partie de l'intelligentsia, influencée par les idées occidentales à la mode, qui versa dans l'incroyance. Dostoïevski en parle assez, me semble-t-il, et ce pour le déplorer. On peut déplorer que l'orthodoxie n'ait pas pu retenir ces gens (qui formaient une partie de l'élite de la société), mais il faut aussi comprendre qu'à l'époque, les utopies socialisantes non chrétiennes avaient d'autant plus d'attrait que les innovations scientifiques allaient s'accélérant et que l'on n'avait pas encore vécu les tragédies du XXème siècle et donc pas eu l'occasion d'être désabusé de toutes ces idées à la mode.
(Désolée pour le gros HS :-D )
Le fait est que l'orthodoxie n'a pas sû conserver son influence sur les masses ouvières qui devaient constituer la base de la Révolution, et que la noblesse versait profondément dans l'incroyance (un peu comme l'aristocratie française d'avant la révolution). Le fait que l'Eglise n'ai pas sû rebondir sur la modernité pour raffermir la foi dans les changements du siècle : c,est ce que j'appelle maladie et déclin. Sans parler du conservatisme clérical aveugle du gouvernement russe qui ne donnait pas une très bonne image de la religon aux intellectuels.
Vous savez, le grand drame de la déchristianisation, en Russie comme en France, passe (entre autre) par un phénomène très simple : l'exode rural. Le paysan européen moyen vivait, dans tout les aspects de sa vie, d'une société profondément affectée par un chrisianisme sociétal. Le temps, l'espace, les étapes de la vie : tout était teinté de religion, et la conformité à la pratique naturelle de la foi.
Cela peut expliquer en partie la déchristianisation, mais ce n'est à mon sens qu'un facteur explicatif secondaire en ce qui concerne l'apostasie massive qui a suivi le concile. Apostasie qui a concerné toutes les couches de la population, et pas seulement le monde paysan, qui était d'ailleurs également en train de disparaître (et sans doute ce déracinement n'a-t-il pas aidé à la conservation des coutumes religieuses. Néanmoins, comment auraient-elles pu être conservées avec un clergé "rupturiste"?)
L'apostasie a été accelérée par l'ère post-conciliaire, mais même avant, on ne peut pas dire que lEglise se portait très bien. Un sentiment de déclin est omniprésent dans les écrits de l'époque.
Le problème, cher Héraclius, c'est que ce que vous percevez comme un cadre était en fait bien plus que cela, puisque la messe et le catéchisme traditionnels, ainsi que tous les sacrements, en étaient le cœur! Tout le reste (le respect de la loi naturelle, la fréquentation des sacrements, un certain ordre social et politique chrétiens), bref, ce que vous appelez des structures, était juste une conséquence de l'adhésion au catholicisme de la majorité de la population. Quant je déplore la disparition des "structures", c'est dans l'idée de souligner qu'au fond, c'est le signe que le cœur du christianisme - la foi - a été touchée. Une fois la messe et le catéchisme attaqués, le cadre disparaît logiquement peu à peu (et assez vite, d'ailleurs!) et comment voulez-vous que la foi se transmette? Les catholiques à la foi vacillante n'ont plus eu de matière solide à laquelle s'accrocher et ont fini par perdre rapidement la foi. Quant aux autres, qui avaient une foi plus ferme, qu'auraient-il pu faire? Ils n'ont pas forcément perdu la foi, du moins pas tout de suite, mais la confiance qu'ils avaient en l'Eglise s'est trouvée fortement ébranlée et beaucoup ont fini par cesser de pratiquer, ne reconnaissant plus la religion de leur enfance dans les paroisses "réformées" et se sentant profondément trahi par les clercs.


J'en doute un peu. Le profil que vous nous présentez-là est paradoxal : c'est une personne attachée à l'orthodoxe et l'orthopraxie, se languissant de "l'Eglise de son enfance", et qui aurait du coup apostasié, abandonné la pratique la plus élémentaire de la foi ? Allons donc.
Quant aux enfants, que dire, si ce n'est que le catéchisme façon "Pierres vivantes" ne fut d'aucune utilité, et pour cause! Il est facile de dire, comme on le fait souvent, que les fidèles auraient dû se révolter, que s'ils ne l'ont pas fait, c'est que leur foi devait être bien tiède, mais à l'époque, tout s'est fait si progressivement, d'une manière si sournoise, que la révolte ne fut pas un réflexe évident. En tout cas, c'est ce dont témoignent beaucoup de catholiques qui ont vécu ces années douloureuses. Vous pointez du doigt les manquements de l'anciennes société chrétienne (pré-conciliaire), mais ce n'est pas elle qui est responsable de ce qu'a fait de l'Eglise une poignée de réformateurs! L'Eglise pré-conciliaire avait sans doute ses torts, mais au moins, elle parvenait bien mieux qu'aujourd'hui à faire son travail essentiel : la préservation et la transmission de la foi. Ce qui a été ôté, dans la foulée du concile, ce ne sont pas les structures, c'est le noyau de la foi, c'est la messe, le catéchisme et tous les sacrements en général. Les structures et les lois chrétiennes sont parties parce que le cœur de la foi avait déjà été dévasté.
En somme, quand j'écris structure, vous pensez exclusivement "cadre", alors que je donne à ce mot une définition bien plus large.
Il ne s'agit pas de dire que la période pré-conciliaire est directemment responsable de ce qui est venu après. Mon constat est d'avantage assimilable à une critique de la Chrétienté de la fin du moyen-âge dans la perspective de la Réforme ; ce n'est pas nier la faute de Luther que de critiquer l'état de l'Eglise à son époque et sa responsabilité dans le drame de la révolte protestante.

Pas la peine du reste de m'expliquer que la période post-conciliaire constitue un certain affablissement pastoral par rapport au passé ; vous savez bien que je suis d'accord avec vous.
Je vous recommande, si vous pouvez mettre la main dessus, de lire l'excellent Le Drame de l'Humanisme Athée du Cardinal de Lubac.
C'est déjà lu depuis longtemps. J'en avais même fait un résumé passablement détaillé, que je vais relire au plus vite. Je garde un très bon souvenir de cette lecture, mais étrangement, ce n'est pas le chapitre que vous évoquez qui m'est resté en mémoire. (Et réalité, ce n'est pas si étrange, puisque généralement, nous retenons d'une lecture ce que nous désirons - souvent inconsciemment - en retenir.)
Je suis heureux de partager cette référence avec vous. Je dirais que chaque ligne de cet ouvrage est remarquable, mais celle que je citais illustrait mon point. :)
Cette phrase est terrible et elle rappelle cette sorte de grande réalisation du christianisme à la fin du moyen-âge : la constatation qu'on avait beau avoir des cathédrales, des universités, la meilleure des philosophie et des croix dressé à tous les bouts de chemins, l'immense majorité de la population catholique ne l'était que de nom, un vernis loin de la vie sacramentelle et de la loi évangélique.
Je trouve votre jugement terrible! Déclarer que finalement, l'immense majorité des catholiques ne l'étaient pas vraiment! Je ne sais pas si vous percevez vraiment à quel point il est injuste de parler ainsi de nos ancêtres dans la foi. Ce n'est pas parce que tous n'étaient pas des saints que cela en faisaient des faux catholiques, des catholiques en réalité séparé de l'Eglise et de la grâce. Héraclius, si ce que vous désirez, c'est une Eglise dans laquelle la majorité des croyants seraient des sortes de saints-mystiques, vous pouvez attendre longtemps. En somme, vous me paraissez bien plus irréaliste que moi. Je regrette simplement un certain cadre social chrétien, tout en sachant pertinemment qu'il ne permet pas en soi de faire de tout le monde de bons catholiques, mais qu'il a au moins pour grand mérite de donner à la société la bonne direction en matière de religion et de morale.
Le paysan moyen du moyenâge était vraisemblablement un demi-païen. N'oubliez pas qu'à l'époque, il n'y avait virtuellement pas de catéchisme, que les prêtres étaient très peu formés, que les gens ne comprennaient pas les paroles de la messe et n'avaient pas accès à l'écriture, même aux lectures, et que le taux de pratique religieuse était vraisemblament assez faible (la grande majorité des catholiques médiévaux n'allaient probablement pas à la messe le dimanche). Ajoutez à cela les superstitions, la survivance de pratiques païennes, certaines déviances du catholicisme populaire...

La majorité des catholiques, même pratiquants et engagés, n'avaient de toute façon qu'une seule confession et une seule communion par an.

Je ne dit pas que je veux une Eglise de saints mystiques, mais de catholiques orthopraxes et orthodoxes, vivant de la vie sacramentelle (soit demeurant en état de grâce la majorité du temps, ce qui est quand même le minimum à demander) et ayant une connaissance basique de la foi.
Je pense que votre raisonnement est erroné, car il sous-entend que Dieu peut parfois nous demander de choisir entre deux péchés.


La problématique qu je pose n'a rien d'extraordinaire. A moins que vous pensiez que la providence agit de façon à empêcher cette sorte de situation d'arriver, elle doivent bel et bien se produire.

Il arrive d'avoir choisir le moindre mal entre deux situation. Prenez l'éléction présidentielle en France, que vous aurez la joie de ne pas avoir à vivre : voter catholiquement ne peut se faire qu'en référence au moindre mal, parce qu'aucun candidat n'est catholiquement acceptable. Si il y avait des candidats fidèles à la doctrine morale et sociale de l'Eglise, voter pour un des candidats actuel serait un péché. Mais là, on a pas le choix : il faut choisir le moindre mal (lequel reste difficile à discerner, du reste).
De plus, je ne suis pas du tout certaine que le fait de se séparer d'un conjoint qui n'est pas notre époux devant Dieu en soit un, bien qu'évidemment, d'un point de vue humain, c'est une décision douloureuse, y compris et surtout pour les enfants. A mon sens, il y a deux solutions : soit se séparer (dans le cas très probable où le conjoint ne voudrait pas vivre chastement) et donc avoir le droit d'accéder à la communion, soit rester avec son conjoint, mais dans ce cas, s'abstenir de communier. Le problème, c'est que nous n'avons pas la même conception de ce qui est l'intérêt supérieur pour cette femme. Pour vous, c'est de ne pas briser son couple illégitime devant Dieu pour ne pas blesser les enfants (ce que je peux comprendre), tandis pour moi, ce serait plutôt de sortir du péché. Le fait que l'Eglise n'ait jamais suggéré que votre opinion était orthodoxe ne suffit-il pas à vous faire douter de votre raisonnement?
Je pense surtout que l'Eglise veut (ou voulait) éviter de jouer au casuiste de cette façon parce que ce genre de cas est difficile à discerner et susceptible d'être utilisé comme un levier pour briser la doctrine de l'Eglise sur ce moment (en employant l'exception de façon absusive, c'est à dire en laissant celle-ci devenir aussi "exceptionnelle" qu'"extraordnaires" sont les ministres laïcs de la communion).

D'autant qu'il a, j'en suis certain, autant de mérite dans celui qui s'abandonne à l'obéissance et au désir franc et saint de la communion que dans celui qui communie sacramentellement.
Et pensez-vous vraiment qu'une femme ou un homme qui aime son conjoint illégitime puisse vivre avec lui dans un esprit de pénitence, dans le désir de cesser toute relation si ce dernier le permettait? C'est à mon sens très naïf que de le croire...
Un "saint mystique" le pourrait, non ? :p

Il faut croire que je suis naïf.
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Suliko » jeu. 15 sept. 2016, 14:05

C'est justemment parce que personne n'a pu lui offrir une croyance intelligente qu'il est tombé dans l'hérésie. Ce n'est certainement pas pour le dédouaner de sa faute, mais le fait est là. Lorsqu'il demande "N'est-il pas de la sorcellerie de croire qui si un homme juste meurt sur un chemin de campagne et décède sans les derniers sacrements, son salut est dans la balance, alors que si un homme moins bon meurt sur le même chemin mais qu'un prêtre venant à passer par-là prononce quelques phrases et fait quelques signes, son salut est presque assuré ?", personne ne lui offre une réponse intellectuelle et spirituelle profonde ; on invoque l'autorité de l'Eglise et on lui dit de se repentir d,avoir un instant remis en cause la Sainte Eglise.
Je suis désolée, mais c'est un peu trop facile comme raisonnement...Tolstoï était un homme très intelligent, qui apprenait très vite, maîtrisait plusieurs langues européennes. S'il avait voulu trouver une réponse à sa question dans la Tradition de l'Eglise, cela ne lui aurait pas été très difficile...Si moi, étant pourtant bien moins douée que lui, suis capable de répondre à sa question sans même consulter de textes religieux, il n'y a aucune raison de penser qu'il n'aurait pu le faire. Encore faut-il vouloir humblement trouver des réponses dans l'Eglise...
Le fait est que l'orthodoxie n'a pas sû conserver son influence sur les masses ouvières qui devaient constituer la base de la Révolution, et que la noblesse versait profondément dans l'incroyance (un peu comme l'aristocratie française d'avant la révolution).
Il faudrait vraiment que vous nuanciez vos propos. Il s'agit seulement d'une partie du monde ouvrier et de la noblesse qui s'était éloignée de l'Eglise.
L'apostasie a été accelérée par l'ère post-conciliaire, mais même avant, on ne peut pas dire que lEglise se portait très bien. Un sentiment de déclin est omniprésent dans les écrits de l'époque.
Désolée, mais il y a clairement une apostasie massive dans la foulée du concile, càd dans les années 65-70. On ne peut pas comparer cet abandon massif de la pratique religieuse et de la foi avec la situation pré-conciliaire. Clairement, ce qui se voulait un remède fut un poison!
J'en doute un peu. Le profil que vous nous présentez-là est paradoxal : c'est une personne attachée à l'orthodoxe et l'orthopraxie, se languissant de "l'Eglise de son enfance", et qui aurait du coup apostasié, abandonné la pratique la plus élémentaire de la foi ? Allons donc.
En quoi est-ce paradoxal? Je ne dis pas qu'une telle personne aurait immédiatement apostasié, mais que peu à peu, trahie par les clercs, elle aurait fini par ne plus pratiquer et se trouver totalement isolée, pour bien souvent perdre la foi. Comment voulez-vous que des personnes attachées à la messe et aux sacrements pratiquent sereinement leur foi dans les années 60-70? Cela vous étonne donc-t-il que tant de croyants aient fini par ne plus pratiquer, se sentant totalement perdus et déstabilisés par les réformes brutales dans l'Eglise? Moi, cela ne m'étonne pas.
N'oubliez pas qu'à l'époque, il n'y avait virtuellement pas de catéchisme, que les prêtres étaient très peu formés, que les gens ne comprennaient pas les paroles de la messe et n'avaient pas accès à l'écriture, même aux lectures, et que le taux de pratique religieuse était vraisemblament assez faible (la grande majorité des catholiques médiévaux n'allaient probablement pas à la messe le dimanche). Ajoutez à cela les superstitions, la survivance de pratiques païennes, certaines déviances du catholicisme populaire...

La majorité des catholiques, même pratiquants et engagés, n'avaient de toute façon qu'une seule confession et une seule communion par an.
Alors là! Je ne sais pas où vous allez chercher tout cela! Que des pratiques païennes pas totalement christianisées aient survécu, c'est vrai. D'ailleurs, dans certaines régions montagneuses, c'est toujours le cas aujourd'hui. Par contre, en quoi le fait de ne pas comprendre le latin, et donc de ne pas saisir toutes les paroles de la messe est-il si grave? L'important, c'est de comprendre ce qu'est la messe et de s'y sanctifier. Aujourd'hui, nombre de fidèles comprennent toutes les paroles, puisqu'elles sont en vernaculaire, mais ne savent même pas ce qu'est la messe! Ils pensent que c'est une réunion de croyants pendant laquelle on partage le pain et le vin! Exit la notion de Saint Sacrifice et de respect dû au Saint Sacrement...Quant à l'accès aux Saintes Ecritures, il n'y a pas qu'une manière de voir les choses. Un illettré qui aurait écouté de nombreux sermons commentant la Bible n'est-il pas instruit à sa manière? Peut-on vraiment le qualifier d'ignorant en matière religieuse? Je ne pense pas. Les prières de base ainsi que les points essentiels de notre foi lui étaient connus. N'est-ce pas l'essentiel?
Et comment pouvez-vous dire que la grande majorité des catholiques n'allaient pas à la messe le dimanche? A votre avis, à quoi servaient donc toutes ces églises et chapelles, même dans les plus petits villages de montagne ou de campagne, si ce n'est à célébrer la messe, et plus généralement à accéder aux sacrements (mariages, confessions, baptêmes...)?
Il ne faut pas non plus lier confession et communion, comme on le fait généralement aujourd'hui. Autrefois, il est vrai que l'on communiait peu souvent, mais cela ne signifiait évidemment pas que l'on ne se confessait pas plus ou moins régulièrement. Les croyants ne voyaient pas la confession avant tout comme le moyen de pouvoir communier et je ne vois pas en quoi leur opinion était hétérodoxe. Donc, ce n'est pas parce que nombre de catholiques ne communiaient qu'une ou deux fois par an qu'ils ne se confessaient pas un peu plus souvent. (Et personnellement, je dois bien avouer que je ne suis pas convaincue par la nécessité de pratiquer la communion fréquente, voire quotidienne. Les grâce reçues par la communion ne me semblent pas directement liées au nombre de fois que l'on approche de ce sacrement, d'autant plus que plus on communie souvent, moins on peut s'y préparer avec soin.)
Je ne dit pas que je veux une Eglise de saints mystiques, mais de catholiques orthopraxes et orthodoxes, vivant de la vie sacramentelle (soit demeurant en état de grâce la majorité du temps, ce qui est quand même le minimum à demander) et ayant une connaissance basique de la foi.
Moi aussi! Mais je crois que c'était bien plus le cas dans les années 1930-40 ou même 50 qu'aujourd'hui! C'est pour cela que je persiste à ne pas comprendre pourquoi vous êtes si critique envers ce passé, alors même que vous avez tout à fait conscience que la situation depuis le concile est infiniment pire...
Il arrive d'avoir choisir le moindre mal entre deux situation. Prenez l'éléction présidentielle en France, que vous aurez la joie de ne pas avoir à vivre : voter catholiquement ne peut se faire qu'en référence au moindre mal, parce qu'aucun candidat n'est catholiquement acceptable.
Vous oubliez évidemment qu'il y a une autre solution : ne pas voter! Notre religion ne nous oblige pas à voter dans un tel contexte. Et je le répète, Dieu ne veut jamais que nous choisissions entre deux péchés. Il ne veut que ce qui est saint pour nous. Et dans votre exemple, ce qui est conforme à l'enseignement de l'Eglise, c'est de cesser de vivre dans une relation adultère. Et si cette femme ne s'en sent pas le courage, elle ne peut pas communier, car elle n'est pas en état de grâce. Par contre, elle peut et doit évidemment prier pour que Dieu l'aide à sortir de cette situation très difficile. On pourrait prendre un autre exemple : si un homme musulman ou animiste vivant dans la polygamie se convertit au catholicisme, il ne peut plus rester dans cette situation et doit se séparer d'une de ses femmes, tout en l'aidant financièrement si nécessaire. Pourtant là aussi, on est face à un cas douloureux pour la femme répudiée et ses enfants...Je ne crois pourtant pas me tromper en disant qu'aux yeux de beaucoup de catholiques, cet homme sera vu avec bien moins de compassion que la femme que vous évoquez et il me paraît évident que c'est lié au fait que la polygamie n'est pas la norme dans notre société et demeure très mal vue, alors que le divorce et le remariage sont à présent totalement banalisés et acceptés, alors même qu'il s'agit aussi en quelque sorte de polygamie. Cependant, à force de côtoyer des divorcés-remariés, ou même des gens vivant en union libre, il nous devient difficile de considérer ces cas comme l'Eglise les a toujours considérés, c'est-à-dire comme des péchés graves qui minent la société et la famille.
Je pense surtout que l'Eglise veut (ou voulait) éviter de jouer au casuiste de cette façon parce que ce genre de cas est difficile à discerner et susceptible d'être utilisé comme un levier pour briser la doctrine de l'Eglise sur ce moment (en employant l'exception de façon absusive, c'est à dire en laissant celle-ci devenir aussi "exceptionnelle" qu'"extraordnaires" sont les ministres laïcs de la communion).
C'est exactement ce qui est en train de se passer. Le pape, par ses propos hétérodoxes, est en train de briser la théologie morale traditionnelle de l'Eglise, qui ne permet en aucune façon à un adultère de communier...
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Héraclius » jeu. 15 sept. 2016, 18:11

Je suis désolée, mais c'est un peu trop facile comme raisonnement...Tolstoï était un homme très intelligent, qui apprenait très vite, maîtrisait plusieurs langues européennes. S'il avait voulu trouver une réponse à sa question dans la Tradition de l'Eglise, cela ne lui aurait pas été très difficile...Si moi, étant pourtant bien moins douée que lui, suis capable de répondre à sa question sans même consulter de textes religieux, il n'y a aucune raison de penser qu'il n'aurait pu le faire. Encore faut-il vouloir humblement trouver des réponses dans l'Eglise...
J'ai bien précisé que ma réfléxion n'avait pas pour fonction d'excuser Tolstoi. Simplement de faire état de la pauvreté intellectuelle d'un système fondé sur l'obéissance pour l'obéissance.

C'était un hérétique ; mais encore une fois, blâmer Luther pour son hérésie n'empêche pas de regretter l'état de l'Eglise de son temps.
Le fait est que l'orthodoxie n'a pas sû conserver son influence sur les masses ouvières qui devaient constituer la base de la Révolution, et que la noblesse versait profondément dans l'incroyance (un peu comme l'aristocratie française d'avant la révolution).
Il faudrait vraiment que vous nuanciez vos propos. Il s'agit seulement d'une partie du monde ouvrier et de la noblesse qui s'était éloignée de l'Eglise.
Mais des parties significatives et suffisantes... Comparez la France du 17ème et du 18ème sur le plan spirituel. Qui n'y verrait pas un déclin profond ? Ben c'est un peu pareil
L'apostasie a été accelérée par l'ère post-conciliaire, mais même avant, on ne peut pas dire que lEglise se portait très bien. Un sentiment de déclin est omniprésent dans les écrits de l'époque.
Désolée, mais il y a clairement une apostasie massive dans la foulée du concile, càd dans les années 65-70. On ne peut pas comparer cet abandon massif de la pratique religieuse et de la foi avec la situation pré-conciliaire. Clairement, ce qui se voulait un remède fut un poison!
Oui, mais de même que la contre-réforme dans les pays protestants s'est basée, non sur un idéal restaurationniste, mais sur un profond renouvellement des formes de pité, de la discipline et de la théologie, de même il nous faut prendre garde à prendre du recu sur la période pré-conciliaire.
J'en doute un peu. Le profil que vous nous présentez-là est paradoxal : c'est une personne attachée à l'orthodoxe et l'orthopraxie, se languissant de "l'Eglise de son enfance", et qui aurait du coup apostasié, abandonné la pratique la plus élémentaire de la foi ? Allons donc.
En quoi est-ce paradoxal? Je ne dis pas qu'une telle personne aurait immédiatement apostasié, mais que peu à peu, trahie par les clercs, elle aurait fini par ne plus pratiquer et se trouver totalement isolée, pour bien souvent perdre la foi. Comment voulez-vous que des personnes attachées à la messe et aux sacrements pratiquent sereinement leur foi dans les années 60-70? Cela vous étonne donc-t-il que tant de croyants aient fini par ne plus pratiquer, se sentant totalement perdus et déstabilisés par les réformes brutales dans l'Eglise? Moi, cela ne m'étonne pas.
Je n'ai jamais rencontré de gens répondant à ce profil, et je doute qu'il constitue même une forte minorité des cas "d'apostasie".

Alors là! Je ne sais pas où vous allez chercher tout cela!
Dans des livres d'histoire du Christianisme. Vous voulez des références précises ?
Que des pratiques païennes pas totalement christianisées aient survécu, c'est vrai. D'ailleurs, dans certaines régions montagneuses, c'est toujours le cas aujourd'hui. Par contre, en quoi le fait de ne pas comprendre le latin, et donc de ne pas saisir toutes les paroles de la messe est-il si grave? L'important, c'est de comprendre ce qu'est la messe et de s'y sanctifier. Aujourd'hui, nombre de fidèles comprennent toutes les paroles, puisqu'elles sont en vernaculaire, mais ne savent même pas ce qu'est la messe! Ils pensent que c'est une réunion de croyants pendant laquelle on partage le pain et le vin! Exit la notion de Saint Sacrifice et de respect dû au Saint Sacrement...Quant à l'accès aux Saintes Ecritures, il n'y a pas qu'une manière de voir les choses. Un illettré qui aurait écouté de nombreux sermons commentant la Bible n'est-il pas instruit à sa manière? Peut-on vraiment le qualifier d'ignorant en matière religieuse? Je ne pense pas. Les prières de base ainsi que les points essentiels de notre foi lui étaient connus. N'est-ce pas l'essentiel?
Je connais très bien cet argumentaire et j'y souscrit, en tout cas pour chaque point pris un par un. Pas la peine de précher un converti.

La messe en latin, c'est très bien, mais le problème c'est que la messe seule instruit peu les gens, en dehors du sermon, lorsqu'elle est dans une langue incompréhensible. Hors il faut bien comprendre qu'en dehors de la messe, le paysan médiéval moyen n'a pas d'accès à un contenu religieux. Le catéchisme systématique par les prêtres dans tout les villages est une invention très tardive, qui ne s'est imposée qu'à l'époque moderne. Si vous ajouter à cela que le manque de formation des prêtres (à qui on demandait d'être des hommes de rituel et non des prédicateurs) fait qu'avant la création des séminaires, les sermons ne devaient pas être de très grande qualité.

Enfin, je pense, avis plus personnel, que l'idée de Dieu comme un Dieu d'Amour qui s'abaisse au niveau de l'homme était peu répandue, et que l'on présentait Dieu sous des traits assez vétéro-testamentaire, comme le Dieu souverain inaccessible des jugements. Idée qui n'est pas mauvaise en soi un, mais gravement incomplète.
Et comment pouvez-vous dire que la grande majorité des catholiques n'allaient pas à la messe le dimanche? A votre avis, à quoi servaient donc toutes ces églises et chapelles, même dans les plus petits villages de montagne ou de campagne, si ce n'est à célébrer la messe, et plus généralement à accéder aux sacrements (mariages, confessions, baptêmes...)?
Il ne suffit pas que la messe soit dite dans un village pour que toute la population y assiste, malheuresement.

On a aussi des indicateurs de pratique religieuse comme l'âge des baptêmes, qui souvent montre que les gens baptisaient leur enfants très tart dans des pans entiers de la chrétienté. Que les parents ne se préoccupe que peu de religion ou qu'il soit difficile de constituer la cérémonie... Je sais pas.

(Ces dernières statistiques contraste évidemment des périodes plus tardive où l'on charchait à tout pris à baptiser l'enfant avant que la mortalité infantile ne se répande avec la convition que si l'enfant meurt sans baptème, il risquait l'enfer).
Il ne faut pas non plus lier confession et communion, comme on le fait généralement aujourd'hui. Autrefois, il est vrai que l'on communiait peu souvent, mais cela ne signifiait évidemment pas que l'on ne se confessait pas plus ou moins régulièrement.
Ce n'est pas ce qu'il m'a été de lire. Il semblerait que l'on se confessait, la plupart du temps, seulement à Pâques. Evidemment, pour la noblesse et les abitants des villes, les chiffres montaient souvent.
Les croyants ne voyaient pas la confession avant tout comme le moyen de pouvoir communier et je ne vois pas en quoi leur opinion était hétérodoxe.


C'est vrai.
(Et personnellement, je dois bien avouer que je ne suis pas convaincue par la nécessité de pratiquer la communion fréquente, voire quotidienne. Les grâce reçues par la communion ne me semblent pas directement liées au nombre de fois que l'on approche de ce sacrement, d'autant plus que plus on communie souvent, moins on peut s'y préparer avec soin.)
Janséniste, va. :p

Je crois que l'on peut éviter à la fois de voir l'eucharistie comme une "dose de grâce" qu'il faudrait augmenter sans cesse tout en supprimant le problème des scrupules. L'Imitation a quelques belles paroles en faveur de la communion fréquente.
Je ne dit pas que je veux une Eglise de saints mystiques, mais de catholiques orthopraxes et orthodoxes, vivant de la vie sacramentelle (soit demeurant en état de grâce la majorité du temps, ce qui est quand même le minimum à demander) et ayant une connaissance basique de la foi.
Moi aussi! Mais je crois que c'était bien plus le cas dans les années 1930-40 ou même 50 qu'aujourd'hui! C'est pour cela que je persiste à ne pas comprendre pourquoi vous êtes si critique envers ce passé, alors même que vous avez tout à fait conscience que la situation depuis le concile est infiniment pire...
Parce qu'à l'instant T je parle avec vous et que vous n'avez pas besoin que je vous confirme à quel point la période post-conciliaire pose problème. Rien n'est plus exaspérant que de s'enfermer dans une critique commune de ce que l'on rejette. Cela n'apporte rien, et cela tend à l'auto-persuasion et l'auto-congratulation (holala, qu'ils ont tort les autres...). Donc quand je parle avec vous je parle uniquement de nos divergences et non des points sur lesquels nous sommes en accord.
Il arrive d'avoir choisir le moindre mal entre deux situation. Prenez l'éléction présidentielle en France, que vous aurez la joie de ne pas avoir à vivre : voter catholiquement ne peut se faire qu'en référence au moindre mal, parce qu'aucun candidat n'est catholiquement acceptable.
Vous oubliez évidemment qu'il y a une autre solution : ne pas voter!


Vous m'excuserez de penser que si un élécteur communiste athée militant se retrouvait contre Francois Hollande au second tour, je devrait voter Francois Hollande (bon, l'hypothèse est peu probable vu l,état actuel de l,extrême gauche, mais bon. xD ).
Notre religion ne nous oblige pas à voter dans un tel contexte. Et je le répète, Dieu ne veut jamais que nous choisissions entre deux péchés. Il ne veut que ce qui est saint pour nous. Et dans votre exemple, ce qui est conforme à l'enseignement de l'Eglise, c'est de cesser de vivre dans une relation adultère. Et si cette femme ne s'en sent pas le courage, elle ne peut pas communier, car elle n'est pas en état de grâce. Par contre, elle peut et doit évidemment prier pour que Dieu l'aide à sortir de cette situation très difficile. On pourrait prendre un autre exemple : si un homme musulman ou animiste vivant dans la polygamie se convertit au catholicisme, il ne peut plus rester dans cette situation et doit se séparer d'une de ses femmes, tout en l'aidant financièrement si nécessaire. Pourtant là aussi, on est face à un cas douloureux pour la femme répudiée et ses enfants...Je ne crois pourtant pas me tromper en disant qu'aux yeux de beaucoup de catholiques, cet homme sera vu avec bien moins de compassion que la femme que vous évoquez et il me paraît évident que c'est lié au fait que la polygamie n'est pas la norme dans notre société et demeure très mal vue, alors que le divorce et le remariage sont à présent totalement banalisés et acceptés, alors même qu'il s'agit aussi en quelque sorte de polygamie. Cependant, à force de côtoyer des divorcés-remariés, ou même des gens vivant en union libre, il nous devient difficile de considérer ces cas comme l'Eglise les a toujours considérés, c'est-à-dire comme des péchés graves qui minent la société et la famille.
Le contre-argument porte moins si l'on considère que la femme polygamme ainsi répudiée pourrait très bien retrouver un mari et donner un père à ses enfants.
Je pense surtout que l'Eglise veut (ou voulait) éviter de jouer au casuiste de cette façon parce que ce genre de cas est difficile à discerner et susceptible d'être utilisé comme un levier pour briser la doctrine de l'Eglise sur ce moment (en employant l'exception de façon absusive, c'est à dire en laissant celle-ci devenir aussi "exceptionnelle" qu'"extraordnaires" sont les ministres laïcs de la communion).
C'est exactement ce qui est en train de se passer. Le pape, par ses propos hétérodoxes, est en train de briser la théologie morale traditionnelle de l'Eglise, qui ne permet en aucune façon à un adultère de communier...
Spero in Deo...


Héraclius -
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Suliko » jeu. 15 sept. 2016, 20:05

Je n'ai jamais rencontré de gens répondant à ce profil, et je doute qu'il constitue même une forte minorité des cas "d'apostasie".
Héraclius, les gens dont je parle ont au minimum 60-65 ans. En lisant des témoignages sur cette époque troublée, comme par exemple celui de Julien Green, il ne me semble pas que ces cas étaient si rares. Des gens qui, lentement, ont délaissé toute pratique parce qu'ils ne reconnaissaient plus l'Eglise dans toutes ces innovations hétérodoxes, il y en a eu! Il y avait sérieusement matière à être ébranlé dans sa foi et à se sentir trahi par l'Eglise. Je ne vois pas ce qui vous paraît si étrange ou peu convaincant dans mes propos.
Dans des livres d'histoire du Christianisme. Vous voulez des références précises ?
Ce serait sympathique, oui, et notamment sur les questions de l'assistance à la messe du dimanche, de la confession et du baptême des nouveaux-nés. Sur ce dernier point, avez-vous bien fait attention de vérifier que les parents n'avaient pas simplement pratiqué l'ondoiement avant le baptême à proprement parler? Car j'ai souvent lu qu'autrefois, le baptême avait lieu au plus tard trois jours après la naissance et j'en avais déduit que c'était une pratique très ancienne et généralisée dans le catholicisme.
Hors il faut bien comprendre qu'en dehors de la messe, le paysan médiéval moyen n'a pas d'accès à un contenu religieux.
Oui, mais bon, toute sa vie est marquée par la religion, de son baptême à ses funérailles, en passant par le mariage.
Il ne suffit pas que la messe soit dite dans un village pour que toute la population y assiste, malheuresement.
Mais pourquoi alors aurait-on dépensé de l'argent précieux pour construire une petite église dans un patelin de montagne comprenant 100 ou 200 habitants si la majorité des gens n'allaient pas à l'église le dimanche!
Je crois que l'on peut éviter à la fois de voir l'eucharistie comme une "dose de grâce" qu'il faudrait augmenter sans cesse tout en supprimant le problème des scrupules. L'Imitation a quelques belles paroles en faveur de la communion fréquente.
Je pense qu l'on peut ne pas être convaincu de la nécessité de communier fréquemment pour d'autres raisons que les scrupules. A mon avis, si saint Louis communiait seulement quelques fois par an, ce n'était pas par scrupules.
Parce qu'à l'instant T je parle avec vous et que vous n'avez pas besoin que je vous confirme à quel point la période post-conciliaire pose problème. Rien n'est plus exaspérant que de s'enfermer dans une critique commune de ce que l'on rejette. Cela n'apporte rien, et cela tend à l'auto-persuasion et l'auto-congratulation (holala, qu'ils ont tort les autres...). Donc quand je parle avec vous je parle uniquement de nos divergences et non des points sur lesquels nous sommes en accord.
Oui, mais il nous faudrait faire attention à ne pas chercher la petite bête pour le plaisir de ne pas être d'accord!
Le contre-argument porte moins si l'on considère que la femme polygamme ainsi répudiée pourrait très bien retrouver un mari et donner un père à ses enfants.
Oui, mais d'une part, il est souvent très difficile pour une femme avec enfants de trouver un nouveau mari et d'autre part, le père légitime est de toute façon privé de certains de ses enfants.
Pour en revenir à votre exemple de la femme remariée, je trouve qu'on justifie trop de choses contraires à la morale catholique au nom de l'amour et du bonheur terrestres. Et surtout - c'est ce qui est particulièrement grave - les cas particuliers risquent d'être très vite être généralisés à tous les divorcés-remariés, puis aux concubins, etc...
Spero in Deo...
Oui, moi aussi! Par contre, je commence vraiment à ne plus supporter du tout ce pape. Parfois, j'aurais presque envie que les sédévacantistes aient raison et qu'il ne soit pas pape, tellement il me semble indigne de sa fonction...Pardonnez-moi si je vous choque en disant ce que je pense! Je sais que je ne suis pas la seule à être absolument lassée de ce pontificat. On est déjà tombé bien bas depuis le concile et on aurait pu espérer que la situation allait enfin commencer par se redresser, mais là, c'est tout le contraire qui est en train de se passer...
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Héraclius » dim. 18 sept. 2016, 18:10

Sur les problèmes de la piété médiévale et réformatrice, voir R. P-C. Hsia, The World of Catholic Renewal, (Cambridge UP, 2005) particulièrement le dernier chapitre.

Hsia représente globalement le consensus moderne sur le problème de la "Réforme Catholique". Il articule une vision modérée des thèses de J. Delumeau (Le Catholicisme entre Luther et Voltaire, La Peur en Occident), lesquelles considèrent l'histoire de la (Contre-)Réforme catholique comme un choc continue entre une élite spirituelle et ecclésiastique (le catholicisme urbain des confréries et des dévots, le clergé réformateur, soutenus par la papauté) et le bas-peuple et sa religion diliuée et supersitieuse issue du moyen-âge.

Selon cette vision des choses, le christianisme, étant une religion dont "la faiblesse était, en fait, sa propre supériorité, dont l'originalité n'était comprise que par une élite" (P. Veyne, Quand notre monde est devenu chrétien, 2007, p. 72), il a toujours recontré une difficulté à s'intégrer dans les cadres ruraux les moins éduqués, surtout à grande échelle. Le tournant du 16ème siècle a marqué une prise de conscience de cette réalité au sein du clergé et a marqué un grand retour d'un esprit missionnaire "interne", marqué par le sentiment de catastrophe lié à la réforme protestante et, secondairement mais de plus en plus fortemment, à la sécularisation des monarchies européennes. Ce sentiment se retrouve chez Sainte Thérèse, qui parlant des ravages de la Réforme, disait "Tout mon désir était, et est encore, que puisque [Dieu] a tant d'ennemi et si peu d'amis, que ceux-ci du moins lui fussent dévoués" (Le Chemin de Perfection, ch. 1).

D'ailleurs, il faut noter que Hsia considère que cet effort obtint des succès certes certain, mais que ces derniers restèrent aussi indubitablement limités.

Petite revue du dernier Chapitre :

217-219 : description de la vision d'eux-même entretenu par les clercs tridentins autour de l'analogie de Saint Charles Borromée (Les clercs sont "les fibres, les artères, les nerfs du corps de la Sainte Eglise [...] si ils sont mal-disposés, les auteurs membres demeurent alanguis") et des systèmes des confréries.
219-221 : description du catholicisme populaire, et notamment de son attitude au culte des saints, avant tout tenus pour les thaumaturges, des soutiens pour la vie pratique. Analyse du culte des saints de la Contre-Réforme, ostensiblement mis en avant pour leurs qualités spirituelles, héroïques et "individualiste" et de leur rejet en faveur des saints anciens ou leur transformation en culte de saints soignants, comme le culte de Saint Ignace dans l'Est de la France et son cortèges de pratiques douteuses (comme la bénédiction d'une "eau de Sainte Ignace" pour lutter contre les crampes des femmes enceintes).
221-223 : analyse du problème de la conformité aux sacrements, et notamment de l'usage du confessionnal. Hsia déclare qu'une réussite du catholicisme tridentin est l'imposition systématique de la communion et l'absolution de Pâques ; cependant, cette réussite est obtenue au travers d'un travail administratif fait de certificats de confession, de listes de confesseurs approuvés, et de registres gardant les chiffres de ceux qui ne s'étaient pas présenté à cette exercice de conformité annuel. "Ces succès du catholicisme tridentin étaient acquis par les nombres plus que par la ferveur". "En réalité, la confession régulière et la communion fréquente étaient réservés à une petite élite". Le conflit entre Janséniste et Jésuite est vue comme une division interne à l'élite sur l'attitude à adopter par rapport au "problème des masses" ; la casuistique Jésuite est considérée comme un compromis pastoral sur les standards tridentins.
223-225 : analyse des missions européennes. Le problème des campagnes ; la cas de Saint Vincent de Paul, dont les études ont été financée par la famille noble des Gondi pour obenir un prêtre sur leurs terres "Grâce à la miséricorde de Dieu les villes ont leur lot de bon ministres et de religieuz zélés, mais les pauvres gens de campagne semble privés de tout soutient spirituel". Dans de nombreuses régions européennes, le catéchisme est assuré par des missionnaires itinérants. "Le Catholicisme tridentin acquis un certain succès sur le long terme, non en supprimant les supersititions, mais en introduisant l'orthodoxie dans la piété populaire".
225-228 : Analyse des nouvelles formes de confraternité et de leurs succès dans les élites urbaines ; constat d'une division croissante entre les classes au niveau religieux comme aux niveau social et économique.
228-232 : Analyse de la perte de vitesse du catholicisme au 18ème, et notamment de l'abandon des élites vis-à-vis de la pratique religieuse, la dissoluton grandissante des églises nationales dans l'appareil d'état etc...

Bon, en bonus, parce qu'en passant devant à la Bibliothèque, Le Catholicisme entre Luther et Voltaire (PUF, 1971)m'a (re-)fait de l'oeil, quelques remarques sur la dernière partie de l'ouvrage "La Légende du Moyen-âge chrétien" :

p. 227-237 : "Les Insuffisance du corps pastoral pré-tridentin". Delumeau y décrit un clergé en piètre état ; alors que le concubinage semble une pratique courante, symptôme de la moralité du presbytérat, deux grands fléaux compromettent profondément son efficité pastorale : la non-résidence (quelques chiffres cités : 23% des cures du diocèse d'Angers en 1413, 50 à 60% des prêtres de celui de Sens en 1495, 30 à 40% à Aix-en provence au début du XVème, 58% à Narbonne à la même période, etc...), une partie considérable du clergé préférant vivre en ville aux frais des bénéfices paroissiaux ruraux sans faire leur devoir sacerdotal, et le manque de formation des pasteurs. Delumeau cite les circonstance de la vocation de St Vincet de Paul, qui se sentit appellé en découvrant que son curé ne connaissait pas les paroles de l'absolution ! "Dogmes et sacrements ne tiennent qu'une place accessoire dans les sermons du temps qui nous sont conservés". Delumeau cite abondamment les travaux de J. Touassert, qui montre que les sommaires examens à passer pour le sacerdoce était essentiellement tournée vers le droit canon et un peu de théologie morale, avec un manque énorme au niveau dogmatique et spirituel. On souligne "cet aspect squelletique d'une présentation de la religion et d'une connaissance orientée vers une pratique purement morale, légale et extérieure, sans charpente dogmatique, sans lumère pour approfondir la fréquentation des sacrements, sans spiritualisation [...]. Sur quoi fondaient-ils leur vie religieuse ?".

p. 237-243 "L'Univers du Magisme". Delumeau analyse l'omniprésence d'un paganisme plus ou moins (moins que plus) couvert de vernis chrétien. Etude des vies de prêtres, missionaires et saints, qui mettent en lumière une population profondément superstitieuse ; analyse des pratiques magiques comme l'offrande de blé noir au Diable (puisque c'est sans doute le diable qui a créé le blé noir, doc on se sent obligé par rapport à lui) ; le culte de la Lune ; le culte des fontaines (avec des sacrifices de beurre) ; le fait de menacer les saintes images du fouet si elles n'intercédaient pas auprès de Dieu... Pratiques qui font dire au prêtre biogrape du missionnaire Julien Maunoir que la foi pénétra en Bretagne au XVIIème "comme au commencement de l'Eglise". Analyse de la croyance vitaliste dans le fait que les objets matériels possèdent une essence spirituelle, se concluant par "L'européen moyen au début du XVIIème siècle restait largement pénétré de mentalité animiste. Comment sa religion ne s'en serait-elle pas ressentie ?".

p. 243-248 : "La folklorisation du christianisme" : Analyse de multiples pratiques pagano-magiques associées aux fêtes et mystères chrétiens. Pouvoir magiques des sacrements et des exorcismes, lesquels servaient autant à lutter contre le démon quà protéger les récoltes des vers, des insectes et des rongeurs. Forme de rennaisance du manichéisme à travers la surestimation de la figure de Satan, dotée de pouvoirs quasi-identiques à ceux de Dieu. Le culte des saints guérisseurs avec chacun leur domaine d'application.

Suit le chapitre sur la Christianisation, qui montre tout les efforts tridentins d'éradications de ces pratiques.


Héraclius, les gens dont je parle ont au minimum 60-65 ans. En lisant des témoignages sur cette époque troublée, comme par exemple celui de Julien Green, il ne me semble pas que ces cas étaient si rares. Des gens qui, lentement, ont délaissé toute pratique parce qu'ils ne reconnaissaient plus l'Eglise dans toutes ces innovations hétérodoxes, il y en a eu! Il y avait sérieusement matière à être ébranlé dans sa foi et à se sentir trahi par l'Eglise. Je ne vois pas ce qui vous paraît si étrange ou peu convaincant dans mes propos.
Cela revient à abandonner l'orthodoxie à cause de l'orthodoxie ; d'abandonner le Christ à cause de So enseignement. Oui, c'est absurde et contradictoire.
Je crois que l'on peut éviter à la fois de voir l'eucharistie comme une "dose de grâce" qu'il faudrait augmenter sans cesse tout en supprimant le problème des scrupules. L'Imitation a quelques belles paroles en faveur de la communion fréquente.
Je pense qu l'on peut ne pas être convaincu de la nécessité de communier fréquemment pour d'autres raisons que les scrupules. A mon avis, si saint Louis communiait seulement quelques fois par an, ce n'était pas par scrupules.
Peut-être, mais il faut avoir à l'esprit que (1) on est jamais digne de communier et (2) nous avons un besoin vital du pain de vie, de la grâce.
Oui, mais il nous faudrait faire attention à ne pas chercher la petite bête pour le plaisir de ne pas être d'accord!
Cette phrase est très intéréssante parce qu'elle met en lumière une partie du problème : certes nous sommes, au niveau théorique, d'accord à 95 pourcent, mais au niveau pratique nous avons de graves divergences, dans la façon dont nous voyons le catholicisme. Vous ne comprennez pas mon éloge occasionnel du progressisme ; je suis incapable de comprendre votre demi-sympathie pour le sédévacantisme. Je suis optmiste au sujet de l'avenir de l'Eglise, vous êtes pessimiste. Vous allez à la FSSPX alors que je crois sincèrement qu'il s'agit sur le plan doctrinal d'un mouvement schismatique ou semi-schismatique et sur le plan moral, spirituel et intellectuel, d'une demi-secte, au sens moderne et péjoratif du terme. Etc...
Le contre-argument porte moins si l'on considère que la femme polygamme ainsi répudiée pourrait très bien retrouver un mari et donner un père à ses enfants.
Oui, mais d'une part, il est souvent très difficile pour une femme avec enfants de trouver un nouveau mari et d'autre part, le père légitime est de toute façon privé de certains de ses enfants.
Pour en revenir à votre exemple de la femme remariée, je trouve qu'on justifie trop de choses contraires à la morale catholique au nom de l'amour et du bonheur terrestres. Et surtout - c'est ce qui est particulièrement grave - les cas particuliers risquent d'être très vite être généralisés à tous les divorcés-remariés, puis aux concubins, etc...
L'éducation des enfants n'a rien à voir avec le bonheur terrestre, surtout dans la perspective ou l'enfant est le prochain, est autrui.

Vous savez que je suis d'accord sur le problème des cas particuliers.
Oui, moi aussi! Par contre, je commence vraiment à ne plus supporter du tout ce pape. Parfois, j'aurais presque envie que les sédévacantistes aient raison et qu'il ne soit pas pape, tellement il me semble indigne de sa fonction...Pardonnez-moi si je vous choque en disant ce que je pense! Je sais que je ne suis pas la seule à être absolument lassée de ce pontificat. On est déjà tombé bien bas depuis le concile et on aurait pu espérer que la situation allait enfin commencer par se redresser, mais là, c'est tout le contraire qui est en train de se passer...
:roule:


Héraclius -
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par axou » dim. 18 sept. 2016, 21:12

Héraclius a écrit :Nous avons déjà discutés de cas particuliers, mais pas rarissimes, qui justifieraient la communion de divorcés-remariés (c'est à dire, qui justiferaient de leur accorder l'absolution) dans un cadre orthodoxe (dans des cas ou une exigence morale impose à la personne de demeurer dans son faux mariage, par exemple pour assurer un semblant de foyer à ses enfants adultères, tout en vivant dans la repentance et l'espoir de pouvoir convaincre le conjoint actuel de la nécessécité ( :p ) de vivre en frère et soeur).
Suliko a écrit : J'avoue être assez étonnée. En quoi le conservatisme est-il près de la victoire? Pour gagner, il faut une influence politique. Or, force est de constater que depuis quelques décennies, ce sont les progressistes, la gauche, qui vont de victoires en victoires. Un certain conservatisme pourrait bien être vu de plus en plus favorablement par une partie du peuple, cela ne lui assurerait pas pour autant de se voir refléter par des lois. Dans la majorité des pays occidentaux, les conservateurs n'ont absolument pas pu ou pas su empêcher le mouvement de sécularisation grandissant et toutes les lois progressistes récemment adoptées.
Héraclius a écrit : Je parle des affaires internes de l'Eglise, pas du monde. Si vous ne voyez pas que le "conservatisme" (mot que je n'aime pas beaucoup, du reste) gagne de l'infuence dans les coeurs là où le progressisme en perd petit à petit, vous êtes aveugles. Un exemple simpliste : dans les années 90, porter le col romain était extrêment mal vu (le grand retour du spectre noir du cléricalisme, baaaaaah). Aujourd'hui, les prêtres diocésains sortent de plus en plus en soutane, sans qu'on leur jette (trop) de tomates.

C'est anecdotique, mais décisif. Les jeunes prêtres aujourd'hui sont considérablement plus traditonnels que leurs aînés, c'est pafaitement évident.
[/quote]

Bonsoir à tous,

concernant l'accès à la communion pour les divorcés remariés, il ne faut pas omettre l'importance que l'Eglise donne à la conscience personnelle à ce sujet. Le curé de ma paroisse, dans le cadre d'un accompagnement spirituel que j'ai commencé avec lui m'a expliqué les choses :
il n'a pas le droit de refuser la communion à un divorcé remarié qui vient la recevoir pendant la messe et ce même s'il a lui-même informée que l'Eglise demande à ces personnes de ne pas communier.

En effet, le prêtre ne peut refuser physiquement la communion pendant la messe que dans 3 cas : si la personne n'est pas baptisée, si elle n'a pas fait sa première communion et si cette personne est divorcée remariée mais est une personne connue du grand public (un personnage politique par exemple) (occasion de scandale publique)

l'Eglise estime que si une personne divorcée remariée(lambda) vient communier alors qu'on lui a déjà dit qu'elle ne devait pas le faire, ce que lui dicte sa conscience personnelle prime sur la loi d e l'Eglise (contrairement au cas de l'absence de baptème)/

Le Curé m'a dit que, comme un grand nombre de prêtres, il demandait à ceux qui disent vouloir communier malgré leur situation d'aller voir l'évêque.
Dans le cas de mon diocèse, l'évêque autorise en général à ces personnes de communier lors des grandes fêtes religieuses ou pour ceux qui veulent communier régulièrement, de le faire dans une paroisse autre que la leur.

Le prêtre m'a expliqué aussi qu'Amoris laetitia apportait une nouveauté; Le Pape ne se contente plus de renvoyer le cas échéant les personnes à leur conscience mais propose un cheminement à deux : la personne divorcée remariée relie sa vie accompagnée par le prêtre et en fonction de cette relecture, la décision est prise ensemble concernant l'accès à la communion. Cela est nouveau. Comme cela soulève de nombreuses questions dans l'Eglise, tant au niveau des fidèles que des prêtres, mon curé m'a dit que très bientôt, chaque évêque de France allait écrire un document donnant un éclairage d'Amoris laetitia sur ce point.
On va voir.
Dans AL, le souci du Pape, en ne donnant pas de consigne claire mais en invitant au cheminement, est de sortir de la logique du permis-défendu concernant la sainte Eucharistie et de promouvoir la relation au Christ, qui dépasse la notion de "y avoir droit ou pas".

une autre chose interessante concernant l'accès à la communion. Normalement ceux qui vivent maritalement sans être mariés n'ont pas le droit de communier. Mais ceux qui sont fiancés ont le droit de le faire même s'il vivent ensemble (ou ont des relations physiques) car l'Eglise pense qu'ils reçoivent les grâces du mariage par anticipation en se préparant au sacrement du mariage. Sachant que la très grande majorité des fiancés vivent ainsi, c'est aussi une manière de les accompagner tels qu'ils sont.
Il parait qu'un nombre très restreint de prêtres refusent de préparer au mariage ceux qui vivent ensemble mais dans ce cas cela crée une grande tension avec les autres prêtres qui se retrouvent débordés car c'est eux qui doivent préparer ces jeunes couples qui ne sont pas de leur paroisse... :roule:

Mon curé est d'accord avec vous Héraclius : il dit que les jeunes prêtres frais émoulus du séminaire sont nettement plus conservateurs que leurs ainés et que bien que demeurant dans l'obéissance au Saint-Père, ils ont du mal à le suivre. Ensuite, la réalité du terrain les "forme".


Bien à vous,

Axou

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Héraclius » dim. 18 sept. 2016, 22:45

Bonjour axou. Content de vous revoir. :)

concernant l'accès à la communion pour les divorcés remariés, il ne faut pas omettre l'importance que l'Eglise donne à la conscience personnelle à ce sujet. Le curé de ma paroisse, dans le cadre d'un accompagnement spirituel que j'ai commencé avec lui m'a expliqué les choses :
il n'a pas le droit de refuser la communion à un divorcé remarié qui vient la recevoir pendant la messe et ce même s'il a lui-même informée que l'Eglise demande à ces personnes de ne pas communier.

En effet, le prêtre ne peut refuser physiquement la communion pendant la messe que dans 3 cas : si la personne n'est pas baptisée, si elle n'a pas fait sa première communion et si cette personne est divorcée remariée mais est une personne connue du grand public (un personnage politique par exemple) (occasion de scandale publique)

l'Eglise estime que si une personne divorcée remariée(lambda) vient communier alors qu'on lui a déjà dit qu'elle ne devait pas le faire, ce que lui dicte sa conscience personnelle prime sur la loi d e l'Eglise (contrairement au cas de l'absence de baptème)/
Peut-être, je ne connais pas ces détails, mais cela n'empêche pas la personne de potentiellement commettre un sacrilège, de manger et de boire sa propre condamnation. Le problème moral et sacramentel va au-delà du cadre légal.
Dans le cas de mon diocèse, l'évêque autorise en général à ces personnes de communier lors des grandes fêtes religieuses ou pour ceux qui veulent communier régulièrement, de le faire dans une paroisse autre que la leur.
C'est doctrinalement incohérent.
Le prêtre m'a expliqué aussi qu'Amoris laetitia apportait une nouveauté; Le Pape ne se contente plus de renvoyer le cas échéant les personnes à leur conscience mais propose un cheminement à deux : la personne divorcée remariée relie sa vie accompagnée par le prêtre et en fonction de cette relecture, la décision est prise ensemble concernant l'accès à la communion. Cela est nouveau. Comme cela soulève de nombreuses questions dans l'Eglise, tant au niveau des fidèles que des prêtres, mon curé m'a dit que très bientôt, chaque évêque de France allait écrire un document donnant un éclairage d'Amoris laetitia sur ce point.
On va voir.
Dans AL, le souci du Pape, en ne donnant pas de consigne claire mais en invitant au cheminement, est de sortir de la logique du permis-défendu concernant la sainte Eucharistie et de promouvoir la relation au Christ, qui dépasse la notion de "y avoir droit ou pas".
Je pense que le pape laisse surtout délibérément une ambiguité en laissant l'inflexibilité de la doctrine et du droit canon aux conservateurs tout en étant suffisament vague pour laisser les libéraux faire ce qu'ils veulent. En gros, il aménage une Eglise à deux vitesses. Le journaliste Ross Douthat, qui n'est pas le dernier des allummés, a écrit un truc intéréssant là dessus : http://www.seattletimes.com/opinion/pop ... d-divorce/

On en vient à une Eglise qui enseigne une pratique et une théorie sans harmonie. La doctrine, c'est bien, mais à condition qu'elle n'est aucun impact sur la pastorale, qui va quand-même un peu au-delà de ces histoires médiévales de sexe avant le mariage et d'indissolubilité.
une autre chose interessante concernant l'accès à la communion. Normalement ceux qui vivent maritalement sans être mariés n'ont pas le droit de communier. Mais ceux qui sont fiancés ont le droit de le faire même s'il vivent ensemble (ou ont des relations physiques) car l'Eglise pense qu'ils reçoivent les grâces du mariage par anticipation en se préparant au sacrement du mariage. Sachant que la très grande majorité des fiancés vivent ainsi, c'est aussi une manière de les accompagner tels qu'ils sont.
Le problème c'est que c'est aux gens de s'adapter à l'Eglise et pas l'inverse. L'Eglise a vocation à illuminer les gens, et non l'inverse. Le problème aujourd'hui, c'est que la grande majorité des gens qui se disent catholiques ne le sont pas, en tout cas pleinement. Ils pensent qu'ils sont plus sages et plus fins que cette grosse Eglise lourdaude qui ne comprend rien au monde moderne.

Et de facto, beaucoup de jeunes couples se présentent à la préparation au mariage alors qu'ils s'en contrefoutent et ne veulent qu'une jolie cérémonie qui fait plaisir aux parents. Le Pape en avait parlé lorsqu'il a dit que pour lui la majorité des mariages catholiques étaient invalides.
Mon curé est d'accord avec vous Héraclius : il dit que les jeunes prêtres frais émoulus du séminaire sont nettement plus conservateurs que leurs ainés et que bien que demeurant dans l'obéissance au Saint-Père, ils ont du mal à le suivre. Ensuite, la réalité du terrain les "forme".
C'est beaucoup plus profond et complexe que juste une histoire de maturité naturelle. De même que leurs aînés étaient déjà très progressistes au séminaire, les jeunes prêtres d'aujourd'hui sont conservateurs dès le séminaire pour des raisons considérablement plus complexes qu'une vague affaire de psychologie de la jeunesse. Que certain manquent de souplesse et s'adaptent par la suite, sans doute ; mais le fait est que le catholicisme français va vraisemblablement se métamorphoser en profondeur dans les années à venir. Regardez comme les jeunes des JMJ sont de plus en plus orthodoxes et "intolérants" d'années en années. Regardez comment les soutanes reviennent. J'ai récemment discuté avec une poignée de jeunes séminaristes pourtant très différents ; tous avaient un avis très conservateurs sur la liturgie (latin, "dos au peuple", etc...). Le séminaire qui fonctionne le plus, c'est celui de la communauté Saint Martin, ceux qui fonctionnent le moins, généralement les diocèses les plus progressistes. C'est une vague de fond, qui aura sans doute un impact très profond dans les années à venir (et pas qu'en bien, d'où mes préoccupations constantes sur le problème de l'identitarisme, etc...).


Dieu vous garde.


Héraclius -
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Mac » dim. 18 sept. 2016, 22:55

Bonjour Héraclius :)
Héraclius a écrit :Peut-être, je ne connais pas ces détails, mais cela n'empêche pas la personne de potentiellement commettre un sacrilège, de manger et de boire sa propre condamnation. Le problème moral et sacramentel va au-delà du cadre légal.
Mais tout cela ne doit-il pas être aborder en le mettant en relation avec la prophétie du Pape Léon XIII, la salette, Fatima?

Dieu vous bénisse.

Fraternellement. :coeur:

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par axou » lun. 19 sept. 2016, 1:04

Héraclius a écrit : Peut-être, je ne connais pas ces détails, mais cela n'empêche pas la personne de potentiellement commettre un sacrilège, de manger et de boire sa propre condamnation. Le problème moral et sacramentel va au-delà du cadre légal.
Non, dans ce cas précis ce n'est pas une communion sacrilège d'office. A partir du moment ou on se remet à la conscience personnelle de la personne, l'Eglise renonce à savoir ce qui est bon ou pas pour cette personne. C'est à dire qu'elle ne sait pas si c'est sacrilège ou pas, c'est une manière de s'effacer devant la conscience de la personne. C'est bien pour cela que le prêtre n'a pas le droit de lui refuser la communion pendant la messe.

Héraclius a écrit : Dans le cas de mon diocèse, l'évêque autorise en général à ces personnes de communier lors des grandes fêtes religieuses ou pour ceux qui veulent communier régulièrement, de le faire dans une paroisse autre que la leur.

C'est doctrinalement incohérent.
Tout dépend de la manière dont on envisage l'Eucharistie. A priori tous ce évêques et ces prêtres adeptes du cas par cas ont leurs raisons...
Héraclius a écrit : Je pense que le pape laisse surtout délibérément une ambiguité en laissant l'inflexibilité de la doctrine et du droit canon aux conservateurs tout en étant suffisament vague pour laisser les libéraux faire ce qu'ils veulent. En gros, il aménage une Eglise à deux vitesses. Le journaliste Ross Douthat, qui n'est pas le dernier des allummés, a écrit un truc intéréssant là dessus : http://www.seattletimes.com/opinion/pop ... d-divorce/
Si j'ai bien compris, nos évêques vont s'exprimer à ce sujet pour ne pas laisser les personnes dans une ambiguité.
Héraclius a écrit : Le problème c'est que c'est aux gens de s'adapter à l'Eglise et pas l'inverse. L'Eglise a vocation à illuminer les gens, et non l'inverse. Le problème aujourd'hui, c'est que la grande majorité des gens qui se disent catholiques ne le sont pas, en tout cas pleinement. Ils pensent qu'ils sont plus sages et plus fins que cette grosse Eglise lourdaude qui ne comprend rien au monde moderne.

Et de facto, beaucoup de jeunes couples se présentent à la préparation au mariage alors qu'ils s'en contrefoutent et ne veulent qu'une jolie cérémonie qui fait plaisir aux parents. Le Pape en avait parlé lorsqu'il a dit que pour lui la majorité des mariages catholiques étaient invalides. .
Certes ces couples là amateurs de belles cérémonies et de volumineuses robes en meringue existent. Mais ne soyez pas injustes pour tous ceux qui ont une foi profonde et qui se marient devant Dieu avec ferveur tout en n'attendant pas le mariage, ce qui arrive dans la plupart des cas.(je parle des Catholiques pratiquants). Je ne connaissais pas ce concept de "grâces du sacrement par anticipation"...
Héraclius a écrit : C'est beaucoup plus profond et complexe que juste une histoire de maturité naturelle. De même que leurs aînés étaient déjà très progressistes au séminaire, les jeunes prêtres d'aujourd'hui sont conservateurs dès le séminaire pour des raisons considérablement plus complexes qu'une vague affaire de psychologie de la jeunesse. Que certain manquent de souplesse et s'adaptent par la suite, sans doute ; mais le fait est que le catholicisme français va vraisemblablement se métamorphoser en profondeur dans les années à venir. Regardez comme les jeunes des JMJ sont de plus en plus orthodoxes et "intolérants" d'années en années. Regardez comment les soutanes reviennent. J'ai récemment discuté avec une poignée de jeunes séminaristes pourtant très différents ; tous avaient un avis très conservateurs sur la liturgie (latin, "dos au peuple", etc...). Le séminaire qui fonctionne le plus, c'est celui de la communauté Saint Martin, ceux qui fonctionnent le moins, généralement les diocèses les plus progressistes. C'est une vague de fond, qui aura sans doute un impact très profond dans les années à venir (et pas qu'en bien, d'où mes préoccupations constantes sur le problème de l'identitarisme, etc...).
.
C'est bien possible, on va voir. j'ai les mêmes préoccupations que vous sur les risques de repli identitaire et du complexe de "la citadelle assiégée".
Peut-être que les temps apocalyptiques qui nous sont annoncés (bouleversements environnementaux majeurs, explosions de nations, crises financières à répétition, afflux de réfugiés....) va imposer à L'Eglise un fonctionnement "d'urgence" qui lui imposera des choix et un fonctionnement inédits.

Bien à vous,

Axou

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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Suliko » lun. 19 sept. 2016, 13:35

Bonjour Héraclius,

Merci pour vos sources!
Cela revient à abandonner l'orthodoxie à cause de l'orthodoxie ; d'abandonner le Christ à cause de So enseignement. Oui, c'est absurde et contradictoire.
Mais enfin Héraclius, comment ces gens dont je parle auraient-ils donc dû faire pour pratiquer sereinement leur foi? Vous rendez-vous compte que tous les repères traditionnels auxquels ils étaient attachés étaient en train d'être démolis? Moi, je peux tout à fait comprendre le découragement de nombre de catholiques et leur abandon de toute pratique et bien souvent, hélas, leur perte de foi.
Je suis optmiste au sujet de l'avenir de l'Eglise, vous êtes pessimiste.
Oui, je crois que vous soulignez là notre principale divergence. Je sais, car c'est de foi, qu'il y aura toujours des catholiques fidèles, jusqu'à la fin des temps, mais par contre, je ne peux que constater une apostasie massive et, me semble-t-il, difficilement réversible, du moins en Occident. Il est vrai que je me lamente peut-être trop sur tout ce qui a été perdu depuis le concile, mais c'est parce que je sais que ce trésor ne pourra jamais être restauré. Il est impossible de reconstruire ce qui a été détruit.
De plus, et c'est sans doute un autre point de divergence entre nous, si j'ai tout à fait conscience qu'un Vietnamien, un Indien ou un Gabonais peuvent faire leur salut aussi bien qu'un Italien ou un Français, bref qu'ils peuvent être d'aussi bons catholiques que ces derniers, sous l'angle civilisationnel, je vois difficilement comment on pourrait comparer des vieux pays de Chrétienté (France,Italie, Irlande, etc...) avec des pays christianisé récemment et partiellement. D'un point de vue émotionnel, je ne peux pas me dire que l'apostasie en Occident puisse être totalement compensée par des conversions éparses en Asie ou en Afrique.

Bonjour axou,

VIvement notre fil sur les deux "points de vue" sur la morale!
l'Eglise estime que si une personne divorcée remariée(lambda) vient communier alors qu'on lui a déjà dit qu'elle ne devait pas le faire, ce que lui dicte sa conscience personnelle prime sur la loi d e l'Eglise (contrairement au cas de l'absence de baptème)/
Non, ce n'est pas du tout ce qu'enseigne l'Eglise. L'enseignement traditionnel, c'est que les catholiques doivent se soumettre à ce qui a toujours été enseigné par l'Eglise en matière de foi et de morale. De plus, il faut rappeler que:
1) Il est peccamineux d'agir contre sa conscience
2) Il est peccamineux d'agir selon sa conscience erronée.
Le point 2 vise à rappeler que la conscience n'est pas la Lumière en soi, qu'elle peut donc se fourvoyer et nous faire juger bons ou neutres des actes en réalité gravement peccamineux. Le fait d'agir selon sa conscience erronée ne fait pas de notre acte un acte non peccamineux, un acte juste. Cet acte demeure objectivement peccamineux. Et lorsqu'en plus un tel acte a toujours été condamné par l'Eglise, comme en ce qui concerne la communion des divorcés-remariés, un catholique a le devoir d'obéir et de se soumettre au Magistère.
Normalement ceux qui vivent maritalement sans être mariés n'ont pas le droit de communier. Mais ceux qui sont fiancés ont le droit de le faire même s'il vivent ensemble (ou ont des relations physiques) car l'Eglise pense qu'ils reçoivent les grâces du mariage par anticipation en se préparant au sacrement du mariage. Sachant que la très grande majorité des fiancés vivent ainsi, c'est aussi une manière de les accompagner tels qu'ils sont.
Non, là encore, ce n'est pas ce que dit l'Eglise! Les fiancés ne reçoivent pas de telles grâces, car c'est contraire à tout ce qui a toujours été enseigné dans notre religion. Pour deux baptisés catholiques, il y a deux possibilités : soit ils sont mariés devant Dieu (mariage sacramentel), soit ils ne le sont pas. Les fiançailles, même officielle et célébrées à l'église, ne donne pas droit à ce qui n'est permis qu'en mariage.
En réalité, soyons clairs, cela fait des décennies que les prêtres n'enseignent plus que les relations pré-maritales sont gravement peccamineuses. Du coup, même les catholiques pratiquants sont nombreux à anticiper le mariage en vivant en concubinage et, par peur de faire fuir les derniers jeunes catholiques qui fréquentent encore l'église, les clercs relativisent l'enseignement constant de l'Eglise et sous-entendent qu'il n'y a là aucun péché, ou alors très très véniel, ce qui est faux. Par conséquent, ils éloignent ces jeunes de la vraie doctrine catholique et les privent d'un repentir salutaire.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Héraclius
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Re: Voyage du Saint Père pour l'anniversaire de la Réforme

Message non lu par Héraclius » lun. 19 sept. 2016, 18:06

Non, dans ce cas précis ce n'est pas une communion sacrilège d'office. A partir du moment ou on se remet à la conscience personnelle de la personne, l'Eglise renonce à savoir ce qui est bon ou pas pour cette personne. C'est à dire qu'elle ne sait pas si c'est sacrilège ou pas, c'est une manière de s'effacer devant la conscience de la personne. C'est bien pour cela que le prêtre n'a pas le droit de lui refuser la communion pendant la messe.
Je me doute, Mais il faut bien comprendre que c'est parce que la personne se trompe sur elle-même qu'elle pourrait communier en conscience ; la seule conscience qui peut défier l'Eglise est la conscience erronée, mais la conscience erronée est TOUJOURS erronée. Ce n'est pas un magistère paralèlle. Donc si un divorcé-remarrié communie sans sacrilège, c'est parce qu'il se trompe sur la nature de son péché et qu'il n'en est donc pas conscient, pas que sa conscience s'élève au-dessus de l'enseignement de l'Eglise et découvre une vérité sur elle-même que l'Eglise ne voyait pas.
Tout dépend de la manière dont on envisage l'Eucharistie. A priori tous ce évêques et ces prêtres adeptes du cas par cas ont leurs raisons...
Il n'y a pas quinze mille manière de voir les sacrements. Pour faire communier un divorcé-remarrié, il faut poser une de ces 3 négations :

- Une personne peut communier sans être en état de grâce, c'est à dire sans vivre de la grâce baptismale et de l'absolution sacrementelle accordée face au sincère repentir des péchés mortels.

- Une personne peut recevoir l'absolution sans se repentir d'un péché grave.

- La vie adultère de la personne n'est pas un péché mortel.

Comme c'est généralement sur le dernier point que l'ont débat, vous noterez que le maintient en place des deux autres implique par défaut la notion de permis/défendu.
Si j'ai bien compris, nos évêques vont s'exprimer à ce sujet pour ne pas laisser les personnes dans une ambiguité.
Ils peuvent bien dire ce qu'ils veulent ; tant que la doctrine et le droit canon restent sans altération, il ne feront que contredire ce que dit l'Eglise.
Héraclius a écrit :Le problème c'est que c'est aux gens de s'adapter à l'Eglise et pas l'inverse. L'Eglise a vocation à illuminer les gens, et non l'inverse. Le problème aujourd'hui, c'est que la grande majorité des gens qui se disent catholiques ne le sont pas, en tout cas pleinement. Ils pensent qu'ils sont plus sages et plus fins que cette grosse Eglise lourdaude qui ne comprend rien au monde moderne.

Et de facto, beaucoup de jeunes couples se présentent à la préparation au mariage alors qu'ils s'en contrefoutent et ne veulent qu'une jolie cérémonie qui fait plaisir aux parents. Le Pape en avait parlé lorsqu'il a dit que pour lui la majorité des mariages catholiques étaient invalides. .
Certes ces couples là amateurs de belles cérémonies et de volumineuses robes en meringue existent. Mais ne soyez pas injustes pour tous ceux qui ont une foi profonde et qui se marient devant Dieu avec ferveur tout en n'attendant pas le mariage, ce qui arrive dans la plupart des cas.(je parle des Catholiques pratiquants).
J'ai dit "beaucoup de couples", pas "tous" ; du reste je suis d'accord avec vous, ils peuvent très bien être sincèement persuadé qu'ils ne font rien de mal et s'avancer à l'autel avec ferveur. Cependant, je crois qu'ils retireraient un grand bénéfice à apprendre que leur comportement est peccamineux et à se comporter de façon profondément contre-culturelle en rejetant la morale du monde pour embrasser la morale de Dieu, par amour de Dieu et de leur futur conjoint.

C'est largement une affaire de mentalité ; chez les évangéliques que je connaît, "pas avant le mariage" vient comme une évidence : c'est une question de respect de l'autre, de soumission à la loi divine ; bref, d'amour. Le problème du catholicisme en France est en partie liée à sa trop grande dilution dans le monde issue de son histoire. Les catholiques pratiquants de base sont ignorants d'une bonne partie des tenants de leur religion, leur pratique religieuse se limite souvent à la messe du dimanche, la confession est très exceptionnelle, et la religion y est généralement vue comme une dimension assez secondaire de la vie. C'est dans un milieu comme cela que j'ai grandi, je connais plein de gens comme cela, et je ne les juge pas. Je sais bien qu'ils ont une vraie sincérité. Mais leur idéal moral correspond avant tout à celui de la société française de 2016, pas vraiment celui du magistère catholique. En matière de sexualité, mais pas que. C'est tout une vision du monde radicalement différente que propose le catholicisme, pas juste une liste de règles dans le cadre de la vie moderne. Cette vie moderne elle-même est largement, sinon totalement étrangère à la notion de péché, de don sacrificiel, de repentance, de rejet des choses de ce monde, etc... Plus les années passent, moins nous avons de base commune pour dialoguer avec cette société. Il faut continuer, sans le moindre doute, à broder sur cette base commune... Mais pas non plus se faire d'illusion sur le fait que dans 20-30 ans, un catholique voulant vivre selon la morale traditionnelle sera vu comme un amish masoschiste. C'est déjà largement le cas aujourd'hui.

Je ne connaissais pas ce concept de "grâces du sacrement par anticipation"...
Je crois que la doctrine et le droit canon ne la connaissent pas non plus, alors rassurez-vous, vous n'êtes pas seule. :p



Dieu vous garde en Son étreinte d'Amour !


Héraclius -
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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