L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Trinité » jeu. 12 janv. 2017, 23:39

Voila la version des orthodoxes sur l'enfer!

L’enfer n’est pas éternel, il est un état de purification progressive où l’on séjourne temporairement. Les non-chrétiens peuvent recevoir la lumière du Christ même après leur mort et c’est la signification de la « Descente aux enfers », l’Evangile éternel y était prêché et il y résonne toujours. L’éternité de l’enfer signifierait l’échec de Dieu

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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Didyme » ven. 13 janv. 2017, 20:19

Héraclius a écrit :
lun. 09 janv. 2017, 17:42
> Sur le Manichéisme : Je ne crois pas que définir le choix du mal comme 'authentique' revient à défendre une version altérée du manichéisme. D'ailleurs, la forme de votre argument anti-manichéen, soit le rejet de l'essentialité du mal (le mal 'n'est' pas, il consiste en une privation du bien) est largement hérité de la tradition... augustinienne (et remonte en fait à Plotin, puisque le néo-platonisme a servi à Augustin de 'pont' entre le manichéisme et l'Eglise). Et comme vous le remarquez, la vision augustinienne de l'enfer s'oppose à la vôtre (ce qui n'est pas en soi un problème, ce n'est pas ce que je veux dire).
Oui c'est ce que je disais. Augustin a effectivement combattu le manichéisme et nous avons pourtant une approche différente de l'enfer. Mais malgré son combat contre le manichéisme, j'émettais la possibilité que sa vision de l'enfer (qui m'apparaît sur certains points manichéenne) ait été influencée (inconsciemment) par son passif manichéen. Nous sommes tous influencés par notre vécu et notre approche des choses en est forcément imprégné un minimum, qu'on en ait conscience ou pas.

Héraclius a écrit :Le Mal est une privation de bien et n'existe pas en tant que tel : oui, vous avez tout à fait raison. Mais cela ne veut pas dire que le rejet du bien induit par le péché n'est pas réel. Le mal n'est pas un étant, mais cela ne veut pas dire qu'il n'existe pas, un peu comme un pli dans une serviette en papier : seule la serviette est un 'étant', le pli n'étant qu'une forme de l'étant serviette, mais le pli existe bien pour autant.

Mon argument ne se situe pas vraiment au niveau de l'être du bien et du mal , mais plus de la définition du bien moral - de l'Amour, Caritas - comme étant un choix constitué en état plutôt qu'un état amené par un choix. Ce que je veux dire, c'est que l'Amour est par essence un choix, que le choix du Dieu-qui-est-Amour est l'Amour. Or, pour qu'un choix soit un choix, il faut qu'il existe une alternative entre au minimum deux option. En l'occurence, le choix divin consiste en une alternative dans lequel l'homme peut (a) aimer (b) ne pas aimer.

Or, pour que l'Amour soit totalement et pleinement lui-même, il faut que son rejet soit une réalité - au grand minimum balthasarien, une réalité potentielle.
J'ai dû pas mal cogiter sur la question, au point que parfois j'en perds le fil et la clarté.
Que dire ?

Je n'ai pas de problème avec le fait de dire que le mal (non-amour), le rejet de Dieu soit une possibilité, j'ai du mal avec le fait de les placer sur le même plan, de les rendre égaux.

Le mal n'existe pas en lui-même, il ne tire son existence que de l'amour. Mais l'amour existe en lui-même, il ne tire pas son existence ni du mal ni d'autre chose. Il se suffit à lui-même pour ne pas dépendre d'une nécessité contraire.
Dire que l'amour aurait besoin, ne serait-ce que de la possibilité, du mal c'est comme placé une dépendance à l'amour et de rendre le mal co éternel. Car il faudrait que le mal puisse exister de toute éternité pour authentifier l'amour de toute éternité ?! (D'ailleurs, c'est un peu amusant car il y a quelques années j'avais ouvert ce fil-ci avec le même genre de remarque. Il est intéressant de voir ce qui m'avait été répondu, en particulier de Raistlin (qui m'avait convaincu de l'erreur). On y trouve aussi l'exemple intéressant de la réponse d'Einstein sur le mal)

Mais votre remarque sur la nécessité de choisir entre 2 options m'a fait cogiter car ça paraît correct mais à bien y regarder, est-il si inévitable d'avoir 2 options ?
Car le seul choix qui se pose en réalité est celui d'aimer. Je peux choisir d'aimer mais si je ne choisis pas d'aimer, quelles conséquences sinon que je n'aime pas ? Ainsi, ne pas aimer ne consiste pas en un choix mais est la conséquence de ne pas choisir d'aimer. Ce n'est pas "je choisis de ne pas aimer" mais "je ne choisis pas d'aimer" et donc tout revient à l'amour.
L'amour est l'harmonie, l'ordre, la joie, la justice, la liberté. Dès lors qu'on ne choisit pas l'amour en découle le chaos, le désordre, la souffrance, l'injustice, l'esclavage.
Disons qu'ici les choses sont placées ainsi :
Amour <------|pas d'amour (mal)
Où tout se réfère à l'amour, en découle.

Et vous, vous semblez me présenter les choses ainsi :
Amour <---|---> pas d'amour (mal)
Où le mal se présente comme une entité, comme une voie indépendante de l'amour, une option.

Le mal est une conséquence, pas un principe. Il découle de l'absence mais n'est pas une substance. Il n'a en réalité aucune légitimité pour être respecté.
Ce que vous faites dans votre approche, selon ce qu'il m'en semble, c'est légitimer le péché, rendre l'amour dépendant de la haine, Dieu dépendant du mal.
Dans la "déchéance", on " déchoit " de l'amour, la source, on ne se dirige pas vers le mal comme étant une autre source. On ne "déchoit" pas du mal.
Si on formulait les choses autrement en considérant la Vérité. On peut dire que l'erreur est possible mais l'erreur est-elle une nécessité ? La Vérité aurait donc besoin de l'erreur pour être vraiment la Vérité ?! Non, la Vérité est la Vérité, l'erreur en découle mais elle n'est pas nécessaire. Je pense qu'on confond ici une possibilité avec une nécessité.

Et puis à la base, de ce que l'on en sait, les péchés originaux (chute de Lucifer, chute de l'homme) ne sont pas un choix de rejeter Dieu mais plus un regard porté sur soi plutôt que sur Dieu. Lucifer ne s'est pas dit (à ce que je sache) "tiens, j'ai envie de rejeter Dieu aujourd'hui", non il a été pris d'orgueil et son " rejet" a suivi. De même, l'homme ne s'est pas dit dans sa désobéissance "je vais manger cette pomme pour enquiquiner Dieu", non il a écouté son envie. Je ne sais pas si on peut parler de choix à proprement dit plus que d'une inclination.

Un choix, c'est aussi prendre une décision, émettre un acte, un mouvement de volonté, un acquiescement. Ce n'est pas nécessairement choisir entre quelque chose et son contraire.

Car que dire du royaume des cieux, de la communion des saints, de la trinité ?
N'aime-t-on alors plus, étant privé de ce que vous appelez un choix du mal ? Étant privé de la réalité du mal ? Moi il me semble qu'ils ne peuvent plus "tourner vers le mal", ou plutôt déchoir, car ils sont arrivés à accomplissement, ils sont réalisés. Si Dieu a voulu vaincre le péché, c'est que c'était davantage une erreur, une faiblesse de la créature qu'un choix pur et indépendant, une liberté pleine. Car on pourrait alors penser que Dieu ne respecte pas vraiment la liberté humaine en la privant à un moment donné de la possibilité du mal ?!

Héraclius a écrit :L'interdiction est une privation de liberté légale/morale ; elle n'est pas une coerticion. La distinction entre les deux est capitale. Adam et Eve ne peuvent, en un sens, aimer Dieu sans la possibilité du mal (sinon leur Amour ne serait pas libre et donc ne serait pas Amour). Dieu laisse la libre-arbitre, la liberté-pouvoir, de Le rejeter. Mais, en temps que Divin Législateur, il place une interdiction morale sur le fruit. Or c'est l'interdiction morale elle-même qui constitue le fruit, si je puis dire. Dieu place un interdit librement franchissable parce que c'est nécessaire à l'obéissance, avec l'inconvénient de créer la possibilité de la désobéissance. Le but pour Dieu n'est pas de donner la liberté pour elle-même (Il ne les invite pas à "choisir", comme vous dites, comme un père qui ne voudrait pas baptiser son fils pour qu'il "fasse un jour son choix") mais de la donner pour que l'interdit soit un véritable interdit (l'interdit n,a de sens que si il peut être transgressé, sinon il n'est pas un interdit) et le 'véritable interdit' est néssécaire à l'obéissance/amour.
Oui, je suis d'accord avec l'idée que c'est l'interdiction morale elle-même qui constitue le fruit, mais plus avec une idée d'éprouver à mon avis que d'une nécessité de l'amour.
Héraclius a écrit :Justemment, le choix de l'Amour peut s'incrire comme un absolu, puisque qu'il ne dépend pas d'autres facteurs que de lui-même (le bien moral n'est pas conditionné par des variables comme le savoir ou la puissance). Et puis plus simplement, à la 'Fin des Temps' il n'y aura plus de temps, donc le choix constitué par notre existence temporelle sera - si je puis dire - figé dans l'éternité, et 'constituera' le Ciel ou l'Enfer. Du moins c'est ce que je pense.
Là je me pose la question de savoir qui de l'œuf ou de la poule est venu le premier.
N'y a-t-il plus de choix à la fin des temps parce qu'il n'y a plus de temps ou y a-t-il la fin des temps parce qu'il n'y a plus de choix, de choix à corriger justement, tout étant accompli ?
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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Didyme » ven. 13 janv. 2017, 22:27

Cinci a écrit :Là-dessus, il te faudrait « quand même » avouer que tel est pourtant bien l’affirmation de la théologie catholique, soit qu’une personne est capable de se projeter entièrement dans ce « non » total et définitif. Je parle de Satan, à l’instar de n’importe quel esprit déchu. Les anges sont des personnes. Il est impossible de balancer ou d’hésiter avec cette partie de la doctrine catholique.
Les spéculations intellectuelles sur l’être ou le non-être ou la nature du mal seront toujours que des spéculations assez gratuites et quand bien même on les trouveraient logiques, alors que la théologie de l’Eglise ne peut se construire qu’à partir des éléments révélés. Le Christ présente Satan comme un être personnel. C’est bel et bien l’enseignement de l’Eglise. Nul ne dira jamais non plus que Satan pourrait être sauvé. Pas l’Eglise en tout cas.
Oui c’est vrai, c’est bien le hic, ce qui m’est incompréhensible.

Et même chez les mystiques que je porte particulièrement en estime, il y a cette affirmation que le diable est inconvertissable.

J’avoue que je ne parviens pas à comprendre comment il peut être possible d’une façon ou d’une autre un « non » total et définitif.

Par contre, tout être personnel qu’ils soient on ne peut pas se référer à notre expérience de l’homme pour les traduire. Ils ne sont simplement pas l’homme. S’ils étaient tels que nous dans ce qui constitue leur personne, dans leur « fonctionnement », ils feraient partis de la rédemption. S’il était question de les sauver comme nous ou d’une chute semblable à nous, je pense que Dieu se serait aussi incarné en ange. Mais ils sont différents, ils n’ont pas de corps à ce que je sache et je ne sais pas tout ce que ça implique.

Après dans ces fameuses spéculations intellectuelles :-D , on pourrait se demander si, du fait que Dieu a créé à partir du chaos originel, il ne pourrait pas de nouveau créer à partir de ce nouveau chaos que représente le péché, le non-définitif. Et donc recréer les anges déchus.

Une autre hypothèse que je m’étais déjà posé, c’est de savoir si les anges déchus n’auraient pas déchus par servitudes paradoxalement ?!

Toi qui me cite dans le post suivant les données de l’Ecriture et de la Tradition, en parcourant le catéchisme, je tombe sur
« 329 S Augustin dit à leur sujet : « ‘Ange’ désigne la fonction, non pas la nature. Tu demandes comment s’appelle cette nature ? – Esprit. Tu demandes la fonction ? – Ange ; d’après ce qu’il est, c’est un esprit, d’après ce qu’il fait, c’est un ange » (Psal. 103, 1, 15). De tout leur être, les anges sont serviteurs et messagers de Dieu. Parce qu’ils contemplent « constamment la face de mon Père qui est aux cieux » (Mt 18, 10), ils sont « les ouvriers de sa parole, attentifs au son de sa parole » (Ps 103, 20).

Par conséquent, comment un être qui de tout son être (pas que d’une partie) est serviteur de Dieu peut-il ne plus servir ? D’où viendrait cette rébellion puisqu’il n’y a pas de place pour elle dans un être totalement tourné dans le service à Dieu ?
Le fait est qu’aussi bien les anges « fidèles » que les anges « déchus » font la volonté de Dieu. On nous dit bien qu’il n’y a pas de mal qui ne soit pas permis par Dieu. Je pense aussi au livre de Job.
Et ce mal permis par Dieu sert à quoi ? Entre autre, à éprouver la créature, à l’enseigner, à l’humilié (dans le bon sens du terme), à en tirer un bien plus grand, etc.

On a l’impression que le mal a une utilité dans le parcours de l’homme, aussi choquant que cela puisse paraître. Il est comme un outil, non créé par Dieu parce que Dieu est tout-amour mais qu’il aurait permis pour en tirer un bien plus grand. Mais Dieu ne peut pas faire le mal (Dieu merci), il ne peut rien avoir à faire avec celui-ci. Seules les créatures peuvent le faire émerger. Aussi aberrant que cela puisse paraître, ne peut-on pas penser qu’il y a une forme de servitude des anges dans leur déchéance pour fournir ce mal qui permet ce travail ?

Angèle de Foligno dit dans le livre des visions et instructions (en rapport à ce que peut être ce travail) « La situation étant changée, je comprends que l’âme, broyée entre l’humilité mauvaise et l’orgueil, subit une immense purgation, par laquelle j’ai acquis l’humilité vraie sans laquelle le salut n’est pas. Et plus grande est l’humilité, plus grande la purgation de l’âme. Entre l’humilité et l’orgueil, mon âme passe par le martyre et passe par le feu. Par la connaissance de ses vides et de ses fautes (64) qu’elle acquiert par cette humilité, l’âme est purgée de l’orgueil et purgée des démons. Plus l’âme est affligée, dépouillée et humiliée profondément, plus elle conquiert, avec la pureté, l’aptitude des hauteurs.

L’élévation dont elle devient capable se mesure à la profondeur de l’abîme où elle a ses racines et ses fondations. (65) »


Il est dit dans le catéchisme :

« 312 Ainsi, avec le temps, on peut découvrir que Dieu, dans sa providence toute-puissante, peut tirer un bien des conséquences d’un mal, même moral, causé par ses créatures : «  Ce n’est pas vous, dit Joseph à ses frères, qui m’avez envoyé ici, c’est Dieu ; (…) le mal que vous aviez dessein de me faire, le dessein de Dieu l’a tourné en bien afin de (…) sauver la vie d’un peuple nombreux » (Gn 45, 8 ; 50, 20 ; cf. Tb 2, 12-18 vulg.). Du mal moral le plus grand qui ait jamais été commis, le rejet et le meurtre du Fils de Dieu, causé par les péchés de tous les hommes, Dieu, par la surabondance de sa grâce (cf. Rm 5, 20), a tiré le plus grand des biens : la glorification du Christ et notre Rédemption.. Le mal n’en devient pas pour autant un bien.

313 « Tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu » (Rm 8, 28). Le témoignage des saints ne cessent de confirmer cette vérité :

Ainsi, S. Catherine de Sienne dit à « ceux qui se scandalisent et se révoltent de ce qui leur arrive » : «  Tout procède de l’amour, tout est ordonné au salut de l’homme, Dieu ne fait rien que dans ce but » (dial. 4, 138).

Et S. Thomas More, peu avant son martyre, console sa fille : « Rien ne peut arriver que Dieu ne l’ait voulu. Or, tout ce qu’il veut, si mauvais que cela puisse nous paraître, est cependant ce qu’il y a de meilleur pour nous » (Margarita Roper, Epistula ad Aliciam Alington (mense augusti 1534).

Et Lady Julian of Norwich : « J’appris donc, par la grâce de Dieu, qu’il fallait fermement m’en tenir à la foi, et croire avec non moins de fermeté que toutes choses seront bonnes… Et tu verras que toutes choses seront bonnes ». « Thou shalt see thyself that all MANNER of thing shall be well » (rev. 13, 32)

314 Nous croyons fermement que Dieu est le Maître du monde et de l’histoire. Mais les chemins de sa providence nous sont souvent inconnus. Ce n’est qu’au terme, lorsque prendra fin notre connaissance partielle, lorsque nous verrons Dieu « face à face » (1 Co 13, 12), que les voies nous seront pleinement connues, par lesquelles, même à travers les drames du mal et du péché, Dieu aura conduit sa création jusqu’au repos de ce Sabbat (cf. Gn 2, 2) définitif, en vue duquel il a créé le ciel et la terre.



Si rien ne peut se faire sans la volonté de Dieu, c’est bien que la chute des anges était dans le plan divin…

Un passage du livre de Julienne de Norwich
«  Car ces choses que Dieu, en sa sagesse, a prévues de toute éternité et qu’il conduit sans cesse parfaitement et glorieusement jusqu’à leur fin la meilleure, si elles surviennent à l’improviste, nous disons dans notre aveuglement ou avec notre courte vue qu’il y a là hasard ou accident. Je compris par cette révélation qu’il n’en est pas ainsi aux yeux de Notre-Seigneur. Nous devons reconnaître que tout ce qui est fait est bien fait, puisque c’est Dieu qui fait tout. »

Et « C’est pourquoi la très sainte Trinité est à jamais pleinement satisfaite de ses œuvres. Il me le montra avec grande béatitude : « Vois ! Je suis Dieu. Vois ! Je suis en toute chose. Vois ! Je fais toute chose ! Vois ! Je ne retire jamais ma main de mes œuvres, et jamais je ne la retirerai dans les siècles des siècles. Vois ! Je conduis toute chose à la fin que je lui ai assignée de toute éternité, avec la même puissance, la même sagesse, le même amour que lorsque je l’ai créée. Comment pourrait-il se faire qu’aucune soit mauvaise ? »

Et un autre d’Angèle de Foligno « Et quand je reviens de cet amour, je suis dans une joie immense ; je suis angélique et j’aime jusqu’aux démons (Ces paroles demandent à être entendues dans le sens mystique où elles sont prononcées. L’horreur du péché, l’horreur du démon est l’élément fondamental et essentiel de toute vérité, de toute sainteté par conséquent; mais dans un état d’âme qu’on pourrait appeler transcendant, le sentiment de la justice accomplie réconcilie l’âme divinisée non pas avec le mal, avec le péché, avec le démon, mais avec l’ordre absolu, qui, par le moyen de l’enfer éternel, les a fait rentrer dans son sein immense. L’âme déiforme, ne voyant plus dans l’enfer, comme dans le ciel, que la vérité, la justice et l’ordre, adore autant Dieu peur avoir creusé l’abîme que pour avoir élevé les cieux. C’est ce que j’ai voulu expliquer au cinquième chapitre de l’ouvrage intitulé : M. Renan, l’Allemagne et l’athéisme au XIXe siècle.)

En cet état le péché me plaît, quand je le vois commis par d’autres, parce que je sens que Dieu le permet justement. En cet état, si un chien me mordait, je n’y ferais aucune attention, et je ne sentirais pas la douleur. En cet état, la Passion de Jésus-Christ ne me laisse ni souvenir, ni douleur. En cet état, je n’ai plus de larmes. »
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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Didyme » ven. 13 janv. 2017, 22:32

Cinci a écrit :Les données de l’Ecriture et de la Tradition
J’ai l’impression d’être ici dans la même condition que dans la physique avec la relativité générale et la physique quantique. Chaque théorie marche dans son domaine mais elles n’arrivent pas à se rejoindre, il manque un maillon pour les unifier.
Là c’est pareil, que ce soit dans la Bible, dans le catéchisme ou dans la Tradition, tu trouveras toujours des affirmations qui vont dans un sens et d’autres qui vont dans l’autre et on n’arrive pas à les joindre.


Tiens, d'ailleurs on cite souvent le catéchisme pour l'enfer, mais on peut trouver un passage comme celui-là à caractère universel :) :

605 Cet amour est sans exclusion Jésus l’a rappelé en conclusion de la parabole de la brebis perdues : « Ainsi on ne veut pas, chez votre Père qui est aux cieux, qu’un seul de ses petits ne se perde » (Mt 18, 14). Il affirme « donner sa vie en rançon pour la multitude » (Mt 20, 28) ; ce dernier terme n’est pas restrictif : il oppose l’ensemble de l’humanité à l’unique personne du Rédempteur qui se livre pour la sauver (cf. Rm 5, 18-19). L’Eglise, à la suite des apôtres (cf. 2 Co 5, 15 1 Jn 2, 2), enseigne que le Christ est mort pour tous les hommes sans exception : « Il n’y a eu et il n’y aura aucun homme pour qui le Christ n’ait pas souffert » (Cc. Quiercy en 853 : DS 624).
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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Cinci » sam. 14 janv. 2017, 1:42

Didyme,
Par conséquent, comment un être qui de tout son être (pas que d’une partie) est serviteur de Dieu peut-il ne plus servir ? D’où viendrait cette rébellion puisqu’il n’y a pas de place pour elle dans un être totalement tourné dans le service à Dieu ?
Probablement qu'Augustin voulait parler des "saints anges" en écrivant le mot ange. Les esprits impurs ne sont pas des anges en réalité, pas si on emploie le terme pour signifier la fonction de "messager de Dieu" comme il le fait. C'est ce que j'avais déjà dit en suivant une certaine leçon portant sur la vie intérieure.

Pour mémoire :

Si tu veux, le premier temps est celui de la création des purs esprits, le second correspond au départage entre les esprits qui vont accepter de se soumettre à Dieu et ceux qui refusent. Ces purs esprits n'ont jamais vu Dieu. Pas encore. Ils ont un saut dans la foi à réaliser. Ceux qui réussiront l'épreuve vont devenir les saints anges. C'est après l'épreuve que la vision de Dieu intervient, la vision béatifique, etc. Donc, les seuls qui servent Dieu, qui sont tournés de tout leur être mais ce sont les saints anges bien entendu. Satan n'a jamais servi Dieu, il n'a jamais vu Dieu. C'est sa souffrance justement. La vision de Dieu c'est la récompense des justes. N'importe quel de nos saints de l'Église catholique, alors même qu'ils étaient encore sur terre, avaient déjà une meilleure connaissance de Dieu que le diable en personne! Comme tu as pu le faire remarquer : les esprits déchus sont ceux qui préfèrent se tourner vers eux-mêmes plutôt que de s'ouvrir à Dieu.

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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Cinci » sam. 14 janv. 2017, 2:12

Ensuite :
On a l’impression que le mal a une utilité dans le parcours de l’homme, aussi choquant que cela puisse paraître. Il est comme un outil, non créé par Dieu parce que Dieu est tout-amour mais qu’il aurait permis pour en tirer un bien plus grand. Mais Dieu ne peut pas faire le mal (Dieu merci), il ne peut rien avoir à faire avec celui-ci. Seules les créatures peuvent le faire émerger. Aussi aberrant que cela puisse paraître, ne peut-on pas penser qu’il y a une forme de servitude des anges dans leur déchéance pour fournir ce mal qui permet ce travail ?
On pourrait peut-être l'intuitionner en pensant que Dieu crée, sachant que certains esprits vont déchoir, sachant aussi qu'il y aura la rédemption de l'homme. Les esprits déchus peuvent faire le mal, s'établir comme obstacles. Ces esprits restent comme des esclaves qui paraîtront avoir fait le jeu de Dieu quand même (à l'Insu de leur plein gré) parce que Dieu les domine, que Dieu peut faire du encore meilleur à partir des agissements et des troubles provoqués par ceux-là. Ce n'est pas que les mauvais esprits sont au service de Dieu pour faire du mal, comme c'est Dieu qui peut récupérer le mal commis par les uns, pour donner une autre issue à l'affaire. C'est comme dans l'histoire de Joseph vendu par ses frères à des esclavagistes, ensuite amené de force en Égypte. Les frères animés de mauvaises intentions ne sont pas au service de Dieu en faisant ce qu'ils font. Il n'empêche ... C'est comme si Dieu récupérait leur mauvais dessein pour le subvertir et faire aboutir le tout comme Lui l'aura voulu.

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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Didyme » sam. 14 janv. 2017, 18:20

Cinci a écrit :
sam. 14 janv. 2017, 1:42
Pour mémoire :

Si tu veux, le premier temps est celui de la création des purs esprits, le second correspond au départage entre les esprits qui vont accepter de se soumettre à Dieu et ceux qui refusent. Ces purs esprits n'ont jamais vu Dieu. Pas encore. Ils ont un saut dans la foi à réaliser. Ceux qui réussiront l'épreuve vont devenir les saints anges. C'est après l'épreuve que la vision de Dieu intervient, la vision béatifique, etc. Donc, les seuls qui servent Dieu, qui sont tournés de tout leur être mais ce sont les saints anges bien entendu. Satan n'a jamais servi Dieu, il n'a jamais vu Dieu. C'est sa souffrance justement. La vision de Dieu c'est la récompense des justes. N'importe quel de nos saints de l'Église catholique, alors même qu'ils étaient encore sur terre, avaient déjà une meilleure connaissance de Dieu que le diable en personne! Comme tu as pu le faire remarquer : les esprits déchus sont ceux qui préfèrent se tourner vers eux-mêmes plutôt que de s'ouvrir à Dieu.
J'avais déjà entendu un truc comme ça, mais ça vient d'où cette idée ?

Ça m'interpelle juste sur la question de savoir si ce choix fait dans ces conditions est par conséquent un choix en pleine conscience ?
Et d'où a donc pu venir le péché pour des êtres vierges, c'est-à-dire tel que sorti d'entre les mains de Dieu et où le péché n'avait pas encore émergé comme pour entraîner une réaction en chaîne ni rien d'extérieur pour les tenter ?!
Comment des êtres vierges, création de Dieu, dans un environnement plus que favorable, à priori, ont pu chuter ?

Parce que tu dis que le verset d'Augustin concerne seulement ceux qui n'ont pas chuter. Pourtant, à la base on dit bien de Satan qu'il était un ange. Par conséquent, avant sa chute ce que dit Augustin des anges doit donc aussi le concerner.
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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Didyme » sam. 14 janv. 2017, 18:26

Cinci a écrit :
sam. 14 janv. 2017, 2:12
On pourrait peut-être l'intuitionner en pensant que Dieu crée, sachant que certains esprits vont déchoir, sachant aussi qu'il y aura la rédemption de l'homme. Les esprits déchus peuvent faire le mal, s'établir comme obstacles. Ces esprits restent comme des esclaves qui paraîtront avoir fait le jeu de Dieu quand même (à l'Insu de leur plein gré) parce que Dieu les domine, que Dieu peut faire du encore meilleur à partir des agissements et des troubles provoqués par ceux-là. Ce n'est pas que les mauvais esprits sont au service de Dieu pour faire du mal, comme c'est Dieu qui peut récupérer le mal commis par les uns, pour donner une autre issue à l'affaire. C'est comme dans l'histoire de Joseph vendu par ses frères à des esclavagistes, ensuite amené de force en Égypte. Les frères animés de mauvaises intentions ne sont pas au service de Dieu en faisant ce qu'ils font. Il n'empêche ... C'est comme si Dieu récupérait leur mauvais dessein pour le subvertir et faire aboutir le tout comme Lui l'aura voulu.
Oui tu as raison là-dessus.
De toute façon, je pense que cette hypothèse est farfelue car elle pose bon nombre de problèmes. Et si leur déchéance était un acte de servitude, ils ne seraient pas autant condamnés ni méprisés dans les écritures.
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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par TREBLA » sam. 14 janv. 2017, 21:34

Cher Cinci,
Cinci a écrit : Satan n'a jamais servi Dieu, il n'a jamais vu Dieu.
Selon vous, Satan n'a jamais vu Dieu.
Selon la Bible, Satan a déjà vu Dieu.

Veuillez voir: Job 1, 6 Or, un jour, les anges de Dieu se rendirent au conseil de l'Eternel. Satan (l'Accusateur) vint aussi parmi eux. :!:

Que le Seigneur vous bénisse!

Cinci
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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Cinci » lun. 16 janv. 2017, 17:05

Bonjour Trebla,

Pas "selon moi" mais selon les enseignements que j'ai à la maison et provenant d'un père rédemptoriste aujourd'hui défunt, fondateur de l'école de la vie intérieure (obj : aider les fidèles à assimiler les enseignements ou la pratique de saint Thérèse d'Avila, etc.), qui aura été formé aussi, en France, en contact avec l'auteur de "Je veux voir Dieu", le manuel, aujourd'hui un classique.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Je_veux_voir_Dieu

Le "dire" au sujet de Satan provient des Thomas d'Aquin. Personnellement, je trouve l'idée tout à fait juste.

Il y a voir et voir. On peut voir Dieu comme Moïse mais ce ne sera pas la vraie vision de Dieu, la vision complète, la vision béatifique. En disant que Satan n'a jamais vu Dieu c'est dire qu'il n'a jamais pu bénéficier de la vision béatifique. Satan n'a jamais eu la vision de Dieu qui serait celle de l'archange saint MIchel. Parce que selon les bons pères de la scholastique, nos théologiens catholiques du Moyen Age : la vision béatifique nous "nécessiterait". En français, quand on a pu voir Dieu réellement (comme Jésus en parle), il est impossible ensuite de se séparer de Dieu, de pécher et de re-pécher encore. La vision béatifique c'est la récompense des justes, comme dit dans le sermon sur la montagne.

- Heureux les coeurs purs car ils verront Dieu!

Ainsi, prétendre que Satan aurait été bénéficiaire de cette vision de Dieu et pour ensuite chuter, c'est comme ne rien comprendre à la nature de cette vision, qui n'est pas du tout comme le fait d'apercevoir un arbre le long de la route.

Bonne journée

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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par TREBLA » lun. 16 janv. 2017, 19:02

Cher Cinci,

Merci pour vos explications.
Cinci a écrit : En disant que Satan n'a jamais vu Dieu c'est dire qu'il n'a jamais pu bénéficier de la vision béatifique. Satan n'a jamais eu la vision de Dieu qui serait celle de l'archange saint MIchel.
Vous dites que Satan "n'a jamais pu bénéficier de la vision béatifique." Moi, je dirais que Satan n'a jamais voulu voir ce qu'a vu l'archange. C'est la même chose pour tous les incrédules.

Matthieu 13:14 - Vous entendrez de vos oreilles, et vous ne comprendrez point; Vous regarderez de vos yeux, et vous ne verrez point.
2 Corinthiens 4:3-4 - Si notre Evangile est encore voilé, il est voilé pour ceux qui périssent, pour les incrédules dont le dieu de ce siècle a aveuglé l’intelligence, afin qu’ils ne voient pas briller la splendeur de l’Evangile de la gloire de Christ, qui est l’image de Dieu.

Que le Seigneur vous bénisse.

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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Cinci » mer. 18 janv. 2017, 3:12

Trebla :
Vous dites que Satan "n'a jamais pu bénéficier de la vision béatifique." Moi, je dirais que Satan n'a jamais voulu voir ce qu'a vu l'archange. C'est la même chose pour tous les incrédules.
Oui, si vous préférez. On pourrait l'exprimer de cette façon.



Tiens, ce matin je suis tombé sur un passage où Charles Journet parlait de cette question de la "vision de Dieu" justement. C'est très beau. Je vous le partage.

Ici :

"La vision, c'est l'acte par lequel les anges et les âmes des élus, étant confortés par la "lumière de la gloire" - c'est un terme technique qui désigne la force qui vient rendre l'intelligence et la volonté des élus capables de s'affronter avec Dieu -, voient Dieu face à face. [...] il arrivera un moment où la foi fera place à la lumière de la gloire. Vision immédiate de Dieu - c'est précisé par les définitions de la foi -, et non par la médiation d'aucune créature extérieure. Je verrai, bien sûr, l'univers illuminé , mais ce n'est pas par là que je commencerai. Je verrai la sainte humanité du Christ, mais ce n'est pas par là que je commencerai. La vision, c'est d'être jeté immédiatement sur la Trinité tout entière, sans même l'intermédiaire d'idées que nous fabriquerions nous-même. La forme de l'intelligence des bienheureux, c'est Dieu lui-même, en sorte que dans sa lumière nous verrons sa lumière. Mais, au lieu de "verrons", c'est "boirons" qu'il faudrait dire. Ils ont - dit Bossuet - ils ont (les bienheureux) la bouche à la Source. "Boire" indique le contact immédiat. Les élus boiront la divinité. Rien ne peut être plus grand, plus beau, que cette connaissance immédiate.

Ici-bas, Dieu s'est révélé à nous par des paroles : "Au commencement était le Verbe, le Verbe était Dieu ..." C'est à des propositions que j'adhère; il y a un sujet, un verbe, un complément ... et j'accepte ces choses-là. Mais vous voyez que j'ai besoin d'idées, de propositions à travers lesquelles, et par la foi, j'atteins obscurément la réalité. Et alors il arrive que, sur la route ouverte par la foi, l'amour va plus loin que la foi. En suivant cette route, et comme par un pressentiment, l'amour trouve l'Informulable, l'Absolu. Il a un bandeau sur les yeux, puisque ce n'est pas encore le temps de la vision, mais il devine à travers le bandeau, qu'il est des choses encore plus hautes, plus vraies, que ce que la foi peut en dire.

Et c'est pourquoi saint Thomas a cette grande parole : Ici-bas, il est meilleur d'aimer Dieu que de le connaître. Au ciel, ce sera renversé : il sera meilleur de connaître Dieu que de l'aimer, puisque Dieu se glissera dans l'âme pour être la forme de l'intelligence des bienheureux. Cela va transformer le régime de vie.

1.Le premier effet de la vision sera de purifier l'âme

Elle purifiera toute l'Église du ciel. [...]

2. L'amour béatifique transformera les âmes

De telle sorte que la Trinité tout entière habitera dans les bienheureux. Comment comprendre une telle chose? L'Église des anges et des élus sera devenue tellement transparente qu'elle pourra accueillir la Trinité, mais elle la recevra comme débordée par elle, de même qu'un lac de montagne, la nuit, reçoit tout le firmament dans son sein, le reflète tout entier, bien qu'il en soit débordé.

Mais prenez garde : les anges et les élus, bien qu'habités, débordés par la Trinité, resteront des créatures, à la manière dont le lac, recevant en lui toutes les étoiles du ciel, reste distinct du ciel. C'est là qu'on peut citer une parole de Jacques Maritain :"Dieu éternellement disant à la créature : ne me touche pas - il y a une infinité entre Dieu et la créature - et lui disant aussi : tu es ma soeur, mon épouse. Être aimé par quelqu'un qui se trouve sur le même plan que nous, c'est déjà bien bon; mais se sentir aimé par quelqu'un dont on n'oserait même pas s'approcher à cause de la distance entre lui et nous, c'est bouleversant! Cette grande tendresse qui vient de lui à notre rencontre, on ne peut pas exprimer tout ce que c'est. Mais alors! Nous serons aimés par Quelqu'un de tellement distant de nous, et aimés de telle manière, que nos coeurs en seront comme liquéfiés ...

(C. Journet, Entretien sur les fins dernières, p. 168 )

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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par TREBLA » jeu. 19 janv. 2017, 17:39

Cher Cinci,

Merci pour votre réponse.
Charles Journet:

C'est à des propositions que j'adhère; il y a un sujet, un verbe, un complément ... et j'accepte ces choses-là. Mais vous voyez que j'ai besoin d'idées, de propositions à travers lesquelles, et par la foi, j'atteins obscurément la réalité. Et alors il arrive que, sur la route ouverte par la foi, l'amour va plus loin que la foi.
St. Paul nous parle au sujet de l'amour et de la foi. Il met tout en perspective.

1 Corinthiens 13:2 - Et quand j’aurais le don de prophétie, la science de tous les mystères et toute la connaissance, quand j’aurais même toute la foi jusqu’à transporter des montagnes, si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien.
1 Corinthiens 13:12 - Aujourd’hui nous voyons au moyen d’un miroir, d’une manière obscure, mais alors nous verrons face à face; aujourd’hui je connais en partie, mais alors je connaîtrai comme j’ai été connu.
1 Corinthiens 13:13 - Maintenant donc ces trois choses demeurent: la foi, l’espérance, l’amour; mais la plus grande de ces choses, c’est l’amour.

Que le Seigneur vous bénisse.

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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Cinci » jeu. 19 janv. 2017, 21:48

Merci!

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Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu

Message non lu par Didyme » dim. 22 janv. 2017, 16:58

Une petite réflexion qui m’est venue.

Je me pose la question de savoir si l’inclination des êtres créés vers le péché ne serait pas dû au fait de son caractère fini résultant de sa condition d’être créé. En effet, comment ce qui est finie pourrait tendre vers l’infinie (propre à la vie divine) ? Il ne peut pas de façon naturelle, il se retrouve comme face à une impossibilité, à une limite qui le fait buter et le rend inconstant dans la sainteté, ne pouvant s’y élever du fait de ses limites. On voudrait s’y diriger mais notre condition nous rattrape, nous sommes incapables de la saisir et nous retombons. Le créé ne peut pas s’unir à l’incréé, la finitude est bloquée par elle-même, le fini ne peut être l’infini, les limites qui l’entoure lui bloque le passage vers Dieu. Et il y a ici comme un parallèle de notre condition de finitude avec le péché qui justement est fini. Le péché n’est pas l’infini, la plénitude mais il a un caractère limité, propre au créé. D’ailleurs, le péché n’a aucun lien avec l’incréé, il ne « l’atteint » pas.

C’est comme si la finitude souffrait de cette impossibilité qui la faisait buter contre Dieu pour la faire revenir vers elle, ne pouvant saisir Dieu, elle retombe en elle-même et quand on retombe en soi et non vers Dieu, alors nous sommes dans le péché. Comme l’expression d’une fracture entre le créé et l’incréé. Ce qui est créé ne saurait avoir les propriétés de l’incréé. A l’incréé la sainteté, au créé le péché, expression de ses manques face à l’incréé, de ses faiblesses, de ses limites.

Alors on pourrait s’en scandaliser, se dire qu’il serait choquant de créer des êtres pour leur perte, et donc qu’une telle hypothèse n’a pas de sens. En effet, si on oubli la passion.

C’est comme s’il y avait à bien y regarder une certaine logique en fait dans tout ça. C’est-à-dire qu’il fallait bien que Dieu nous créé pour que nous existions. Mais la condition première d’un être créé et la finitude et une inclination pour le péché. Qu’a fait Dieu pour répondre à cette condition ? Il s’est incarné, est mort dans notre humanité pour ressusciter celle-ci. Il a partagé la condition humaine pour lui faire partager par la résurrection la condition divine. Il a ainsi déifié l’homme, le fait participé à la divinité, condition sans laquelle il est tenu par le péché. Mais en ressuscitant en Christ, l’homme peut désormais, par participation, se diriger vers Dieu et ne plus subir ce blocage originel.

Cela semble être l’ordre logique des choses en fait car le créé ne peut pas passer outre l’étape de la création, et il fallait (je suppose) que Dieu intègre en lui ce créé en l’épousant par l’incarnation. C’est ce que semble dire 1 Corinthiens 15 ; 42-47 « Ainsi en est-il de la résurrection des morts. Le corps est semé corruptible ; il ressuscite incorruptible ; il est semé méprisable, il ressuscite glorieux ; il est semé infirme, il ressuscite plein de force ; il est semé corps naturel, il ressuscite corps spirituel. S’il y a un corps naturel, il y a aussi un corps spirituel. C’est pourquoi il est écrit : Le premier homme, Adam, devint une âme vivante. Le dernier Adam est devenu un esprit vivifiant. Mais ce qui est spirituel n’est pas le premier, c’est ce qui est naturel ; ce qui est spirituel vient ensuite. Le premier homme, tiré de la terre, est terrestre ; le second homme est du ciel. ».

Penser que nous pouvons être saints, bons et cela sans failles, parfaitement, c’est penser que nous sommes Dieu. Il faudrait que la bonté, la sainteté nous appartiennent, que nous les ayons en substance. Or, notre condition de créature, finie, fait que nous les avons de façon accidentelle, donc sans y être infaillible. La seule façon que l’on puisse s’y tenir est par grâce divine ou par participation à la divinité par la résurrection.

On me dira que certains saints parviennent à ne plus pécher, que Marie était sans péché, mais cela leur vient d’une grâce divine, non pas de leur disposition naturelle. Et naturellement, plus une personne est tournée vers Dieu plus elle peut se détourner du péché et limiter l’erreur.

Je ne sais pas ce que vaut véritablement cette réflexion mais il m’a semblé y voir quelque chose de pas complètement aberrant.
L'autre est un semblable.

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