La révolution bolchévique a 100 ans

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La révolution bolchévique a 100 ans

Message non lu par Cinci » jeu. 26 oct. 2017, 4:01

25 octobre 1917 ...

Dans les archives de la télévision suisse
https://www.rts.ch/archives/tv/culture/ ... tie-1.html

(portait de Lénine par le prof Guiilemin)

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Re: La révolution bolchévique a 100 ans

Message non lu par Cinci » jeu. 26 oct. 2017, 5:23

Juillet 1937-novembre 1938

La grande terreur fait 1600 morts par jour

Les faits : le 30 juillet 1937, l'ordre opérationnel 00447 du NKVD, la police politique soviétique qui a englobé la Guépéou en 1934, demande la liquidation des "ennemis du pouvoir soviétique". C'est le début de la période la plus sanglante de la violence de Staline contre son peuple. Elle va durer quinze mois, jusqu'à l'automne 1938, faisant 725 000 morts dans l'arbitraire le plus total. Les suspects sont arrêtés sans raison, souvent sur une simple dénonciation et leurs procès sont une parodie de justice. Leur peine - le plus souvent l'exécution par balles - ne leur est pas signifiée, pas plus qu'à leur famille. En 2013, à l'occasion de la parution d'un livre sur cette période, la correspondante du Monde à Moscou raconte le martyre d'une de ces victimes innocentes de la folie stalinienne, Gavril Bogdonov.

Un ordre secret

L'homme au crâne rasé qui fait face à l'objectif, le regard intense, un rien défiant, ignore qu'il lui reste huit jours à vivre. Arrêté le 8 août 1937 par le NKVD dans son village d'Aminevo, à l'ouest de Moscou, Gavril Bogdonov, 49 ans, paysan à l'origine, devenu ouvrier et père de trois enfants, ne pouvait pas savoir qu'il figurait dans la catégorie des personnes à fusiller en priorité. Comment l'aurait-il su? L'ordre opérationnel du 30 juillet qui ordonnait la liquidation des ennemis du pouvoir soviétique et marquait le lancement des répressions de masse était secret. Tout comme les condamnations à mort, les tribunaux d'exception ne devaient en aucun cas annoncer le vedict.

Tout était fait pour facilité le travail ultime du bourreau . Pas question de laisser le moindre grain de sable - une révolte malvenue, des cris, des pleurs - lui compliquer la tâche.

Le 8 août 1937, le père de famille est embarqué. Sa femme et ses enfants ne le reverront plus jamais. Reconnu coupable de propagande contre-révolutionnaire et de calomnie du régime soviétique, il est jugé par une troïka (trois représentants de l'État : police, sécurité, Parti communiste), le 19 août 1937. Le verdict tient en un mot tapé à la machine en grosses lettres sur un formulaire sommaire :"FUSILLER". Le lendemain, 20 août, Gavril Bogdanov, qui n'a fait aucun aveu, est exécuté par balles sur le polygone (la zone de mise à mort) de Boutovo, près de Moscou, en même temps que 134 condamnés. La machine de la Grande Terreur est lancée. En quinze mois, 725 000 personnes seront exécutées, soit 1600 par jour.

Sur tout le territoire de l'URSS, de l'Ukraine à Vladivostok, de la Carélie à Kolyma, les fosses communes ne suffisent plus à contenir les corps. Rien qu'à Moscou, 500 tonnes de cadavres sont incinérées en quinze mois au cimetière du monastère Donksoï. En général, les exécutions ont lieu la nuit dans des cellules spéciales arrosées au jet et saupoudrées de sciure pour absorber le sang des morts. D'autres sont éliminés d'une balle dans la nuque au bord d'une fosse en pleine nature.

A Moscou, on innove en asphyxiant des prisonniers entassés dan une camionnette dont les gaz d'échappement sont libérés à l'Intérieur de l'habitacle. A Belozersk (région de Vologda), en décembre 1937, on achève 55 condamnés à la hache. A la même époque, à Krasnoîarsk (Sibérie) et à Sakhaline, on tue à coups de pierres afin d'économiser les balles.

Dans la jargon des bourreaux, les exécutions sont appelés "noces". Il faut dire que les commandos de la mort y sont, à la noce, autorisés à consommer tout l'alcool qu'ils veulent et à s'emparer des vêtements, bijoux, argent, montres de leurs victimes. Pendant la Grande Terreur, on ouvrit même des magasins spéciaux pour privilégiés, dans lesquels on distribuait les objets dérobés, rapport Thomas Kizny.

Nikita Kroutchev, le successeur du tsar Rouge, condamna le "culte de la personnalité de Staline" et les "errements du système", mais il ne s'appesantit guère sur le sort des millions d'Innocents broyés par la machine à tuer. Et pour cause, lui-même avait les mains tachées de sang. En tant que responsable du Parti pour la ville de Moscou, il était membre d'une troïka et signait à l,envie les arrêts de mort. Sa signature figure d'ailleurs en bonne place sur le jugement de Gavril Bogdanov, le koulak trop bavard, fusillé au dessus de la fomme commune de Boutovo le 20 août 1937.

Sous Kroutchev, 450 000 prisonniers furent libérés mais les réhabilitations eurent lieu en catimini et uniquement sur le papier. Pas question d'indemnités ou de réhabilitations sociales, et pour les morts, aucune sépulture.

Il fallut attendre l'arrivée au pouvoir de Mikhail Gorbatchev em 1985, pour que le système de la Terreur et la condamnation de Staline reviennent à la surface. Les archives s'ouvrirent, les journaux se mirent à publier des pages entières de photos des victimes des purges staliniennes.

Cinquante-neuf ans après ...

En 1990, Alexandra Bognanov, qui avait vu son père Gavril emmené une nuit d'août 1937 et était resté sans nouvelle depuis, osa demander des éclaircissements. A défaut d'en avoir beaucoup, elle réussit à obtenir du FSB, le successeur du NKVD, la date et le lieu de l'exécution. En 1996, elle fut enfin autorisée à prendre connaissance du dossier. On lui remit alors la petite photo prise par l'identité judiciaire huit jours avant la mort du condamné. Elle avait 72 ans. C'était le seul indice en sa possession pour imaginer ce qu'avait pu être les derniers instants de son père.

Le goulag, élément central de la terreur stalinienne

Le goulag (terme formé à partir de l'acronyme russe d'administration principale des camps) fut l'organisme qui supervisait le système concentrationnaire. Il est institué en 1930. Il gère, à la mort de Staline (1953), 476 camps, où les conditions de vie vont du terrible à l'effroyable. Selon les estimations, entre 10 et 18 millions de prisonniers sont passés par les camps entre 1929 et 1953.

Source : Marie Jégo, "Le martyre de Gavril Bogdanov", Le Monde, 6 mars 2013

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Re: La révolution bolchévique a 100 ans

Message non lu par Relief » jeu. 26 oct. 2017, 15:28

100 ans de communisme pour 100 millions de morts. Le procès du nazisme a eu lieu, celui du communisme toujours pas.

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Re: La révolution bolchévique a 100 ans

Message non lu par Cinci » jeu. 26 oct. 2017, 16:37

Staline

Une jeunesse de gangster bien différente de l'histoire officielle

La jeunesse de Staline a longtemps été une énigme. Des documents existaient, mais ils avaient été enfouis dans des archives interdites. Il n'existait que des biographies officielles qui mentaient jusque sur sa date de naissance. Après la perestroïka puis la disparition de l'URSS, le britannique Simon Sebag Montefiore a pu mener une enquête sur le terrain et accéder à des documents [...] le futur maître de l'URSS fut un gangster à la vie digne d'un western dans les premières années du XXe siècle, et que c'est sa capacité à procurer illégalement de l'argent au Parti qui séduisit Lénine.

L'image qu'en donne Montefiore est celle d'une petite frappe qui, après une enfance à la Dickens - père cordonnier et alcoolique au surnom évocateur : "Besso le dingue" - devint en quelques années un vrai personnage de western.

Après son renvoi du séminaire - sans doute pour frasques sexuelles et non pour propagande marxiste, comme l'affirmèrent les biographies officielles - Staline trouva un emploi de météorologue à l'observatoire de Tbilissi. Simple couverture, qui cachait une vie proche de celle d'un "parrain de la mafia". Ses spécialités? Hold-up, racket, contrefaçon, enlèvements. Il avait pour cela un homme de main : l'incontrôlable Kamo, qui n'hésitait pas à tuer si nécessaire ...

[...]

Staline était doué. Il savait comme personne semer les limiers les plus aguerris. Grâce à ses identités multiples - il avait une quarantaine de pseudonymes -, grâce aussi à ses talents en matière de travestissement. Plus d'une fois, Staline dut son salut à une robe ou à une perruque ...

De telles qualités ne pouvaient pas laisser indifférents les professionnels de la révolution. Lénine qui le rencontra en 1905 lors d'une réunion du Parti bolchévique,comprit très vite ce qu'il pourrait attendre de cet "as de la conspiration". Le Parti avait besoin d'argent et ses chefs n'étaient pas regardant sur les méthodes. Or Staline n'avait pas son pareil pour braquer une banque ou une diligence. L'un de ses coups les plus fameux fut l'attaque de la Banque d'État à Tbilissi en juin 1907. Un casse meurtrier mais lucratif, qui rapporta l'équivalent de 3 millions d'euros. La presse étrangère s'en fit l'écho. "Catastrophe", titra le quotidien français Le Temps, sans se douter que l'homme de 28 ans responsable de cette "catastrophe" régnerait pendant trente ans sur le plus grand empire du monde. On comprend mieux pourquoi Staline répugnait à parler de sa jeunesse.

Source : Thomas Wieder, "Staline en gangster caucasien" dans Le monde des livres, septembre 2008 cf Simon Sebag Montefiore, Jeune Staline, [année ?]

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Re: La révolution bolchévique a 100 ans

Message non lu par Cinci » jeu. 26 oct. 2017, 17:57

Petit lexique, mot-clé, personnalité ou principe :

Guerre civile : conséquence directe de la prise du pouvoir de Lénine et de ses bolchéviks à Saint-Petersbourg en octobre 1917, une guerre civile va ravager la Russie jusqu'en 1923. Elle oppose les révolutionnaires regroupés au sein de l'Armée rouge, dirigée par Léon Trotski, et les défenseurs de la monarchie, les Blancs, soutenus par des forces militaires anglaises et françaises. Les menchéviks, les socialistes révolutionnaires, les anarchistes ainsi que des "armées vertes" de paysans prennent également les armes contre les bolchéviks.

Dictature du prolétariat : établi par Karl Marx en 1850, ce concept définit l'exercice du pouvoir par la classe ouvrière dans son ensemble et dans son propre intérêt, afin de mettre un terme au capitalisme et de permettre l'émergence de la société "communiste" sans classe sociale. Lénine le reprend à son compte et, à partir de 1917, "dictature du prolétariat" rime avec pouvoir des bolchéviks.

bolchéviks : au sens strict, membres de la faction majoritaire du Parti ouvrier social-démocrate de Russie fondée en 1903 et dirigé par Lénine, avant de se constituer en Parti indépendant en 1912. Au-delà, synonyme d communiste russe ou, à l'étranger, léniniste.

Komsomol : organisation de jeunesse du Parti communiste.

Kolkhoze : coopérative agricole soviétique où les outils et le bétail étaient mi en commun, tandis que la production était en partie prélevée par l'État sous forme d'impôts.

Stakhanivisme : du nom d'Alexei Grigorievitch Stakhanov (1905-1977), un mineur soviétique qui le 31 août 1935 aurait dépassé quatorze fois la norme d'extraction du charbon et a ensuite été donné en modèle. Le stakhanovisme visait a augmenter la production par émulation entre travailleurs.

Loubianka : grand bâtiment situé à Moscou, sur la place du même nom, qui abrite une prison et le siège du KGB, devenu FSB après la dissolution de l'URSS.

Bund : fondée en 1897, l'Union générale des ouvriers juifs de Lithuanie, Pologne et Russie est un mouvement socialiste yiddish qui, tout en luttant contre les pogroms, refuse le sionisme et la création d'un État juif en Palestine. En 1903, il prend ses distances avec le Parti ouvrier social-démocrate russe (futut Parti bolchévik), qu'il juge trop centraliste, puis s'oppose à la révolution d'octobre 1917. Le Bund ne survécut pas à la Shoah.

Nikolaï Boukharine (1888-1938) : membre du Parti communiste, ce journaliste sera cité, puis écarté par Lénine comme l'un de ses potentiels héritiers. D'abord soutien de Staline, il s'oppose ensuite à ses dérives.

Alexei Ivanovitch Rykov (1881-1938) : bolchévik de la première heure, il succède à Lénine en 1924 à la présidence du Conseil des commissaires du peuple. Représentant l'aile droite du Parti, il soutient d'abord Staline qui, après avoir éliminé Trotski et l'opposition de gauche, le désavoue en 1929. Il est l'une des principales victimes des procès de Moscou (1937-1938), qui lancent une longue ère de purges staliniennes.

Lavrenti Pavlovitch Beria (1899- 1953) : originaire comme Staline de Georgie, Beria devient, après les grandes purges de 1937-1938, chef du NKVD (ancêtre du KGB), puis membre du bureau politique du PC. A la mort de Staline, il est l'un de ses successeurs. Soupçonné par ses collègues de vouloir utiliser la déstabilisation pour assurer son pouvoir, il est arrêté le 26 juin 1953 et exécuté.

Andreï Vychinski (1883-1954) : juriste de formation, collaborateur étroit de Staline. Il fut le procureur en chef des procès de Moscou, puis, à partit de 1940, fera partie des hauts dignitaires de la diplomatie soviétique.

Kliment Vorochilov (1881-1969) : haut gradé de l'Armée rouge et membre du Comité central du PC, il fut commissaire du peuple pour la défense (1925-1940), puis Présidium du Soviet suprême (1953-1960)

Lazare Kaganovitch (1893-1991) : exécutant zélé de toutes les décisions de Staline, notamment de la politique de collectivisation de l'agriculture en Ukraine qui aboutit à la famine de 1932. Il fait aussi partie des signataires de l'ordre d'élimination par le NKVD des officiers polonais à Katyn.

Alexandre Soljenitsyne (1918-2008) : condamné à huit ans de camp de travail en 1945 pour avoir critiqué Staline. Réhabilité en 1956, l'écrivain, prix Nobel de littérature en 1970, décrit son expérience et la nature du régime totalitaire dans L'Archipel du Goulag, qui paraît à Paris en 1973. Cette publication lui vaut d'être expulsé d'URSS où il ne reviendra qu'en 1994.

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Re: La révolution bolchévique a 100 ans

Message non lu par Cinci » jeu. 26 oct. 2017, 18:19

Une différence entre Lénine et Staline :
Staline fut à l'origine de la conception de l'ennemi du peuple. Ce terme rendait automatiquement inutile d'établir la preuve des erreurs idéologiques de l'homme ou des hommes engagés dans une controverse; ce concept éliminait la possibilité de faire connaître son point de vue.

La sagesse de Lénine dans ses rapports avec les gens était évidente dans son travail avec les cadres. Staline se caractérisait par des rapports tout différents avec les gens. Les traits de Lénine - le travail patient avec les gens, l'entêtement et le soin apporté à faire leur éducation, sa faculté d'amener les gens à lui obéir sans user de contrainte, mais bien plutôt par l'influence idéologique qu'il exerçait sur eux - était absolument étrangers à Staline. Il avait renoncé à la méthode léniniste consistant à convaincre et à éduquer; il avait abandonné la méthode de la lutte idéologique pour celle de la violence administrative, des répressions massives et de la terreur. Il agissait sur une échelle toujours plus grande et d'une manière toujours plus inflexible, par le truchement d'organismes punitifs, violant souvent en même temps toutes les normes existantes de la moralité et de la législation soviétique.

tiré de :
"Rapport Krouchtchev", paru dans Le Monde, les mardi 12, jeudi 14 et mardi 19 juin 1956

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