Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Cinci » lun. 13 nov. 2017, 16:02

... et pourtant le rêve de l'innocence habite tout homme. Le goût d'un paradis nous poursuit où il n'y aurait ni désordre ni difficulté, mais harmonie et transparence, celui d'un univers innocent à l'image du cristal. Des êtres sans défauts, sans reprise. [...] ce serait le monde de la justice. Chacun y posséderait ce qu'il devrait avoir. Chacun n'aurait qu'à rester à sa place, au rang fixé. Personne n'aurait rien à demander. Ce serait l'univers glacé de l'équilibre où une fois son rang fixé, on pourrait ne plus se préoccupé de l'autre, on pourrait s'en débarrasser puisqu'il aurait ce qu'il lui faut, ce qui lui est dû, ce qui lui est requis. Ce serait peut-être le monde de l'innocence. Ce serait aussi le monde clos de la justice.

Pour nous transmettre la contagion de la foi, Dieu n'a pas choisi des êtres de cristal, mais des êtres de chair et de sang. Il aurait peut-être été plus séduisant, il pourrait peut-être paraître plus beau que la foi et le salut dépendent de l'innocence des chrétiens. Cette solution serait sans doute plus redoutable [...] Car elle ne sortirait pas du dilemme du tout ou rien. Ou bien des chrétiens, des "militants" parfaits ou bien personne qui puisse nous transmettre le salut.

En fait, Dieu a remis les clefs de son royaume aux mains de notre liberté, liberté de donner, liberté de recevoir, et non aux mains de notre innocence. Ce qui rend l'Église lointaine aux yeux de certains est justement ce qui nous sauve : à savoir que le baptême est toujours le baptême, le Credo toujours le Credo, la messe toujours la messe, et l'absolution toujours l'absolution, quel que soit l'état d'âme de celui qui célèbre et transmet.

Si le chrétien n'est pas toujours, ou forcément, en amitié avec Dieu, il est toujours libre de vouloir bien faire pour les autres. L'amour de Dieu n'a pas voulu que le salut puisse être compromis par la médiocrité des chrétiens. S'il y a pour nous une invitation à rendre grâce, c'est là qu'elle se trouve.

En effet, si quelqu'un avait le droit d'être jaloux de l'innocence, d'être puriste et de ne pas tolérer que sa vie soit "administrée" indignement, c'est Dieu. Et il ne l'aurait pas toléré, s'il avait préféré l'innocence ou ce qu'on appelle - très mal - sa Gloire avant de nous aimer, et si la Gloire de Dieu avait été celle de la pureté avant d'être celle de la miséricorde. Mais le triomphe de l'amour est précisément que le salut soit offert aux hommes, même indignement, plutôt que de ne pas l'être du tout.

C'est peut-être la seule nouveauté "dogmatique" du dernier concile. Il a remis la miséricorde au centre du Credo. La miséricorde, et non comme on l'a trop facilement dit le "retour au monde". Le concile a proposé beaucoup plus : une certaine folie chrétienne. La sainteté propre au Christ contient une double folie : des êtres de misère sont invités au partage de la Gloire. Première folie, le Concile n'a pas seulement ramené l'Église au monde : mais au monde tel qu'il est, c'est à dire un monde blessé. Deuxième folie : c'est ce monde-là que Jésus incarné invite à la sainteté. C'est bien une folie. Zachée et la pécheresse sont capables de tout. Et c'est pourquoi ils sont capables de sainteté. Celle-ci n'est plus à chercher du côté de l'innocence perdue, imaginée ou récupérée. Elle se trouve dans la confiance et la miséricorde : de Dieu pour nous, de Dieu pour nos frères, de nos frères pour nous, de nous pour nos frères, et ceci avant le temps de la Résurrection et après celui de l'innocence impossible.

Bernard Bro
Les portiers de l'aube, p.192

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Cinci » lun. 13 nov. 2017, 17:23

Bonjour Suliko,

Vous avez écrit :
Sulikko a écrit :
Je ne réduis pas l'Eglise à une institution hiérarchique...
et
Quand je suis à la messe ou que je lis mon missel et qu'on en vient à l'una cum, je me dis souvent : "Les mots ont-ils un sens ? Ces gens qui sont traditionalistes, et moi-même, pouvons-nous nous dire en communion avec François ? Avec l'évêque du lieu ? De toute évidence, une telle communion de foi n'existe pas, et ce n'est pas parce que je désapprouve la politique de François, ou son caractère (on peut tout à fait être en communion avec un pape ou un évêque dont on désapprouve la politique et/ou les mœurs), mais bien parce que doctrinalement, je pense qu'il se trompe sur de nombreux points importants pour le salut des âmes !".
Si vous êtes en mesure de passer outre le Vatican et de pouvoir ainsi juger de la qualité des enseignements doctrinaux du collège apostolique en place, alors il est évident que l'Église ne se réduirait pas pour vous à tous ces ministres que nous avons dans le moment et occupant des postes-clés à Rome ou dans les paroisses. Pour sûr! Parce que n'étant ni pape ni évêque, vous pourriez quand même nous indiquer un lieu où l'Église fidèle pourrait se trouver sans que ces autres y soient.

La hiérarchie? Mais vous venez de l'écarter du jeu, avec votre propos, non? Vous le feriez donc à votre profit. Vous écriviez que vous n'êtes pas en communion avec le pape et les évêques catholiques romains.

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Cinci » lun. 13 nov. 2017, 18:51

Suliko a écrit :
Le monde catholique est extrêmement morcelé, on y trouve tant de divergences profondes, et pas que sur des questions de détails, que je me demande souvent à quoi rime encore cette communion dans la foi que presque tous revendiquent pourtant. Légalement, il est vrai que la très grande majorité des évêques, des prêtres et des laïques sont en règle (considérés comme catholiques, non excommuniés, etc...), mais tout cela est devenu bien superficiel...
Vous tiendrez le même discours que gérardh à la fin.

Voyez que pour moi ce que vous écrivez : c'est à peu près une même sorte de discours en substance que celui que j'ai déjà pu rencontré provenant de la bouche ou de la plume de protestants évangéliques cf. "L'Église est en ruine, la forme est dissoute, le moule cassé ... frontière floue ... alors l'autorité en place n'est plus l'autorité ... "

[...]

"Abstraction, irréalité, rien qui soit senti ... n'arrive pas à voir ..."

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Socrate d'Aquin » mer. 15 nov. 2017, 18:10

Encore un point sur la question de la « Pastoralité » de Vatican II.

Ainsi que je l'avais précédemment affirmé, Vatican II est un concile à la fois doctrinal et pastoral. Pastoral quant à sa destination (sa « cause finale »), doctrinal quant à son contenu (ses causes « matérielles » et « formelles »).* Il ne saurait donc être question d'un statut « facultatif » pour ce Concile.

Il n'en demeure pas moins exact qu'aucun texte de Vatican II n'a défini quoi que ce soit dans les termes qu'employa par exemple Pie IX dans Pastor Aeternus. Alors on pourrait se dire : « Chouette ! Donc on peut refuser Vatican II puisqu'il n'est rien défini infailliblement ! ».

On peut apporter à cet argument une réponse de type purement philosophique, basé sur la confiance.
Je m'explique : comme je l'avais écrit sur mon blogue à l'occasion de la déclaration de Mgr Schneider, Vatican II, ce sont des textes. Ces textes, ils ont été écrit (attention, révélation du siècle) par des gens. Qui étaient-ils ? Des évêques, des théologiens, des philosophes... tout ce que le XXe siècle comptait d'intelligence de la foi et de compréhension de cette foi. Des géants. Des gens comme Ratzinger, Bouyer, Congar, Lubac, Daniélou, Journet, Wojtila... et je ne parle que des plus connus. Les plus grands penseurs de la Catholicité à cette époque. Sans parler de centaines et de centaines d'évêques, riches d'une expérience pastorale certaine.

De là, on peut se dire la chose suivante : quand des personnes comme celles-ci se mettent au travail pour rédiger des textes, on peut s'attendre à des écrits de qualité. Un peu comme si les physiciens du monde entier s'assemblaient pour confronter leurs théories et leurs idées : on peut s'attendre à du lourd.

Alors pourquoi chercher à les contester ? Bien sur, ils ne sont pas infaillibles au plus haut degré. Mais dans le même temps, on peut donner à ces textes un degré d'autorité très important, de par leur origine. Lorsque vous rencontrez un médecin très réputé, et que vous assistez à une de ses conférences... vous le croyez ! Pourquoi ? Parce que vous reconnaissez qu'il est plus savant que vous sur cette question.

En fait, cela procède d'une distinction essentielle chez Aristote (et plus tard chez Thomas d'Aquin) entre la science et l'opinion. La science est certaine (dans la mesure du possible) là où l'opinion est probable ; mais même dans l'opinion, il y a des degrés de probabilité. Et lorsqu'une idée ou un texte est soutenu par la plupart des spécialistes de ce dont il est question dedans, même si l'on n'est pas certain que ce texte soit vrai, on lui accorde un très haut degré de probabilité. Tout simplement parce qu'on sait que pour le contredire, et pour contredire tant de sages, il faudra se lever tôt...

Pour cette raison, il me semble difficilement concevable de rejeter Vatican II parce qu'il ne serait qu'un vulgaire concile « pastoral ».

* Comment ça je suis thomiste ?
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Héraclius » mer. 15 nov. 2017, 18:32

Entièrement d'accord. Plus prosaïquement, le magistère ordinaire commande l'assentiment religieux. Et quand 2500 évêques unanimes parlent avec le Pape à leur tête, on écoute, au-delà de leur expertise, la totalité de ce qui fait autorité dans l'Eglise exposer la foi. S'opposer à cela sur la base de sa réflexion humaine limitée est plus que le rejet d'une opinion très sûre ; c'est d'un orgeuil spirituel démesuré.
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Kerniou » jeu. 16 nov. 2017, 18:15

D'accord avec vous deux !
" Celui qui n'aime pas n'a pas connu Dieu , car Dieu est Amour " I Jean 4,7.

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Cinci » ven. 17 nov. 2017, 16:50

C'est peut-être la seule nouveauté "dogmatique" du dernier concile. Il a remis la miséricorde au centre du Credo. La miséricorde, et non comme on l'a trop facilement dit le "retour au monde". Le concile a proposé beaucoup plus : une certaine folie chrétienne. La sainteté propre au Christ contient une double folie : des êtres de misère sont invités au partage de la Gloire. Première folie, le Concile n'a pas seulement ramené l'Église au monde : mais au monde tel qu'il est, c'est à dire un monde blessé. Deuxième folie : c'est ce monde-là que Jésus incarné invite à la sainteté. (Bernard Bro)
Je m'aperçois que ce passage de Bernard Bro cité par moi plus haut est repris tel quel dans le petit livre d'André Daigneault, dans Au coeur de la misère. La miséricorde. Surprise!

On ne s'étonne plus que le pape François aura voulu consacrer une année à la miséricorde.

:)


"Un ami c'est quelqu'un qui connaît tout de moi, dit saint Augustin, et qui m'aime quand même." Dieu m'aime! Le Père Faber ose écrire : Dieu a plus d'amour pour chacun d'entre nous que tous les anges et tous les saints en ont pour lui."

Il nous faut accepter d'être aimés tels que nous sommes. Nous devons accepter jusqu'à accepter notre incapacité de correspondre à l'amour de Dieu. Nous avons de la difficulté à aimer Dieu parce que nous ne sommes pas assez enfants; notre coeur est encore trop dur. Notre suffisance et notre amour-propre se trouvent mortifiés de cette difficulté à aimer Dieu.

On nous a bien souvent parlé de l'importance d'aimer Dieu, mais si peu de celle de nous laisser aimer.

"En ceci consiste l'amour : ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c'est lui qui nous a aimés" (1 Jn 4,10) La base de notre foi, c'est l'amour que Dieu a pour nous. Le Credo, symbole de notre foi, n'est qu'une déclaration douze fois répétée de la foi en cet amour même que Dieu a pour nous.

Amour miséricordieux! Miséricorde! Qu'est-ce donc que la miséricorde?

Celui que l'on a appelé "le docteur de la miséricorde" écrivait : "La miséricorde divine est le fondement de toutes les oeuvres de Dieu, car en chacune d'elles apparaît, comme en sa première racine, la miséricorde." (saint Thomas d'Aquin, Somme Théologique, I, qu. 21, art. 3 et 4).

LE RENONCEMENT À SOI-MÊME

Thérèse de l'Enfant-Jésus a beaucoup contribué à faire redécouvrir aux chrétiens de notre époque que la première chose - et en un sens la seule - que Dieu demande de nous, c'est de croire en son Amour miséricordieux en nous laissant transformer par Lui. Rien ne plaît à Dieu comme de répandre sur nous les torrents de sa tendresse infinie. Thérèse parlait de la grâce comme d'une fontaine intarissable. Elle nous a redonné le coeur de l'Évangile, qui est la miséricorde. L'amour miséricordieux nous sort du jansénisme et du puritanisme pour nous plonger au coeur de la Bonne Nouvelle.

La voie de l'enfance spirituelle de Thérèse de l'Enfant-Jésus est la voie de l'homme moderne, puisque loin de prendre le chemin d'une régression vers les nostalgies du premier âge de la vie, cette voie conduit au contraire à l,acceptation de la réalité. Il s'agit de jeter le masque de sa suffisance et d'accepter ses limites et sa pauvreté.

La voie de sainte Thérèse est la forme la plus difficile de renoncement à soi-même. Il est facile aux personnalités fortes de renoncer aux biens extérieurs et même aux satisfactions sensibles, mais elles peuvent le faire pour mettre leur satisfaction en elles-mêmes et en tirer de l'orgueil : on voit parfois des hommes et des femmes parvenus à un haut degré d'ascétisme ou à une vertu humaine héroïque devenir de véritables démons parce que tout en eux est orgueil; ils peuvent vivre de l'admiration de leur haute moralité ("Je ne suis pas comme le reste de l'humanité") et non de l'amour de Dieu.

La voie d'enfance, c'est le mystère de la faiblesse transfigurée. Cet appel des petits et des pauvres à la plénitude de la vie spirituelle est révolutionnaire. La mission de Thérèse marque une date dans l'histoire de la spiritualité. La petite voie s'attaque à tout pharisaïsme, à toute complaisance en ses vertus.

A. Daigneault, Au coeur de la misère. La miséricorde, p. 32



Les critiques accusent toujours le concile Vatican II d'être une sorte d'émanation du modernisme honni, en arrachant à l'Église sa première place d'honneur pour en faire un pauvre machin sur lequel s'essuyer les pieds, avec ce nivellement qui ambitionne de placer les catholiques sur le même pieds que les hérétiques, en faisant disparaître le sens du péché ("On ne vient plus au tribunal de la pénitence!"), etc, etcc ... Mais ... dans le fond ... et je n'y avais jamais pensé (et c'est pourquoi je cite Daigneault au-dessus) : il est bien possible que la spiritualité de Thérèse de Lisieux soit comme la carte cachée de ce dernier concile. Quand j'y pense un peu, c'est vrai que Vatican II est comme la liquidation complète des derniers vestiges du jansénisme. C'est pas mal certain que Thérèse de Lisieux aura exercée un gros impact sur ces bonshommes qui auront fait le concile.

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Cinci » ven. 17 nov. 2017, 17:28

Il continue :

Thérèse de Lisieux est la sainte du réel, lequel, dans sa dimension la plus douloureuse, est transfiguré par l'amour. Tout - la petitesse, la maladie, les blessures psychologiques, la souffrance, la mort - est assumé dans la profondeur du mystère de Dieu miséricordieux. Dieu choisit ce qui est faible pour confondre la force.

Trop souvent nous recevons l'Évangile comme une mauvaise nouvelle. La Bonne Nouvelle est centrée sur l'amour de Dieu et tout ce qu'il fait pour moi; la mauvaise nouvelle est centrée sur mes efforts et toutes les choses que je dois faire pour plaire à Dieu. Résumons cela dans un schéma :


La Bonne Nouvelle/ la mauvaise nouvelle

La réalité ultime est l'amour de Dieu pour moi et pour mon prochain/La chose qui importe est mon amour pour Dieu et mon prochain
Parce que Dieu est bon, je suis conduit à la bonté/ C'est en étant bon que je serai agréable à Dieu
Dieu est le fondement le plus profond de mon être et il n'y a que ce que je lui donne qui m'appartient au final/Dieu est une menace à ma liberté, il me demande surtout des sacrifices. Ce qu'il gagne, moi, je le perds.
Le péché, c'est le refus de l'amour de Dieu, la tentation de conquérir le bonheur par moi-même au lieu de le recevoir de Dieu/C'est une transgression des lois de façon volontaire qui entraîne une diminution de l'amour de Dieu.
Un examen de conscience est une action de grâce à Dieu pour les signes de sa fidélité envers moi, et, appuyé sur ce fond de scène, un regret de mes infidélités/ Un examen de conscience est une recherche de mes imperfections.
La confession est centrée sur la pure joie qu'éprouve le Père de mon retour à la maison après un égarement et alors un accroissement de mon intimité avec Lui/La confession est centrée d'abord sur mes péchés que je dois énumérer pour obtenir du soulagement.

p. 36


Je veux juste illustrer un peu comme le déplacement tendanciel du centre de gravité de la pastorale, si on veut. Un petit déplacement du curseur sur la balance.

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Suliko » sam. 25 nov. 2017, 22:51

De là, on peut se dire la chose suivante : quand des personnes comme celles-ci se mettent au travail pour rédiger des textes, on peut s'attendre à des écrits de qualité. Un peu comme si les physiciens du monde entier s'assemblaient pour confronter leurs théories et leurs idées : on peut s'attendre à du lourd.

Alors pourquoi chercher à les contester ? Bien sur, ils ne sont pas infaillibles au plus haut degré. Mais dans le même temps, on peut donner à ces textes un degré d'autorité très important, de par leur origine. Lorsque vous rencontrez un médecin très réputé, et que vous assistez à une de ses conférences... vous le croyez ! Pourquoi ? Parce que vous reconnaissez qu'il est plus savant que vous sur cette question.
Bonjour Socrate d'Aquin,

Pourquoi ne pas appliquer le même raisonnement à la mise en oeuvre du concile, étant donné que ce sont grosso modo les mêmes personnes qui rédigèrent les textes conciliaires et les appliquèrent sur le terrain... Vous voyez bien que quelque chose ne colle pas dans votre raisonnement. Ce n'est pas parce que quelqu'un est intelligent et cultivé qu'il ne peut pas se fourvoyer, et vous faites un peu comme si tous les évêques ayant participé au concile avaient eu le même poids dans la réflexion et la rédaction des textes, ce qui n'est évidemment pas le cas ! D'une manière plus générale, ce n'est pas parce que vous avez 100 personnes réunies que le résultat de leur travail sera le reflet plus ou moins exact de la pensée de chacun : certains hommes forts parviendront à imposer leurs idées à une masse de participants plus passifs et hésitants...
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Socrate d'Aquin » dim. 26 nov. 2017, 0:19

Bonjour Socrate d'Aquin,
Bonsoir Suliko,
Pourquoi ne pas appliquer le même raisonnement à la mise en oeuvre du concile, étant donné que ce sont grosso modo les mêmes personnes qui rédigèrent les textes conciliaires et les appliquèrent sur le terrain... Vous voyez bien que quelque chose ne colle pas dans votre raisonnement. Ce n'est pas parce que quelqu'un est intelligent et cultivé qu'il ne peut pas se fourvoyer, et vous faites un peu comme si tous les évêques ayant participé au concile avaient eu le même poids dans la réflexion et la rédaction des textes, ce qui n'est évidemment pas le cas ! D'une manière plus générale, ce n'est pas parce que vous avez 100 personnes réunies que le résultat de leur travail sera le reflet plus ou moins exact de la pensée de chacun : certains hommes forts parviendront à imposer leurs idées à une masse de participants plus passifs et hésitants...
Je ne dis pas que tous les textes du Concile sont infaillibles, ni même qu'ils ne sont pas perfectibles. Seulement que pour contester des textes composés par les meilleurs théologiens de cette époque, il vaut mieux se lever de bonne heure.

Imaginons que vous vous rendiez à un congrès d'astrophysique, rassemblant tous les chercheurs en ce domaine, y compris la crème de la crème; imaginons également que vous-même soyez novice en la matière, ou du moins peu expérimentée. Votre premier réflexe sera-t-il de contredire ces astrophysiciens, ou les actes du congrès ? Non. Tout simplement parce que vous savez que ces chercheurs sont plus compétents que vous. Bien sur vous pouvez contester ! C'est votre droit; et après tout, seule l'Eglise est infaillible (en certaines circonstances). Mais quelle légitimité avez-vous pour cela en comparaison de ces géants ?
Eh bien c'est la même chose pour le Concile...

Et n'oublions pas qu'un concile est assisté par le Saint-Esprit (à l'inverse de ces applications). Alexandre VI était le pire pape au monde, il n'en a pas moins promulgué des textes parfaitement orthodoxes. Il en va de même pour Vatican II. Quelque soit la sainteté des évêques et des participants, ils n'en sont pas moins assistés par le Saint-Esprit.
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par archi » dim. 26 nov. 2017, 8:52

Suliko a écrit :
sam. 25 nov. 2017, 22:51
Pourquoi ne pas appliquer le même raisonnement à la mise en oeuvre du concile, étant donné que ce sont grosso modo les mêmes personnes qui rédigèrent les textes conciliaires et les appliquèrent sur le terrain...
Je ne suis pas sûr. Les textes conciliaires ont été rédigés par un petit groupe d'évêques après discussions, et formellement approuvés par la grande majorité d'entre eux.

La révolution sur le terrain n'a pas été initiée par les évêques, mais pour ce que j'en sais par un certain nombre de prêtres (comme toujours, il y a les agitateurs, et la majorité qui suit le mouvement), et notamment dans les séminaires. Le Novus Ordo, quant à lui, a été préparé par une commission spécialement formée, le Consilium (avec le but de court-circuiter les pesanteurs de la Sacrée Congrégation des Rites) dirigée par Mgr Bugnini qui, d'après bien des témoignages, était un grand manipulateur qui avançait ses propres idées (très novatrices) auprès de Paul VI en les faisant passer pour celles de tout son groupe, pour dire ensuite à celui-ci que c'était la volonté du Pape... :siffle:

Un point important, c'est que la "Messe normative" proposée par le Consilium au Synode des Evêques de 1967 (déjà 5 ans plus tard) n'a pas été chaudement acceptée, après les protestations de certains prélats et un vote final très partagé...

Enfin, il ne faut pas oublier qu'entre 1962 et 1969, l'épiscopat a été renouvelé, et ce d'autant plus qu'en 1966 (motu proprio "Ecclesiae Sanctae") Paul VI a imposé la règle nouvelle de la démission à 75 ans, qui a logiquement provoqué le départ immédiat de pas mal de monde, et le remplacement par des évêques nouvellement désignés. :/

(Il est dommage qu'on ne trouve pas d'études sur le renouvellement de l'épiscopat par Paul VI et l'impact de cette règle des 75 ans).

Bref, mon impression globale est que beaucoup d'évêques de l'époque ont surtout assisté au mouvement sans pouvoir faire grand-chose. N'oublions pas que le très résistant Mgr Lefebvre lui-même a fini par démissionner de son poste de Supérieur de la Congrégation du Saint Esprit après avoir constaté qu'il ne pouvait rien faire face à l'agitation interne.

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Altior » dim. 26 nov. 2017, 8:52

Socrate d'Aquin a écrit :
dim. 26 nov. 2017, 0:19
il vaut mieux se lever de bonne heure.
Bonjour, Socrate!

Voilà, je me suis levé de bonne heure. Il est Dimanche, avant 7 h et je suis déjà à ma deuxième tasse de café.
Imaginons que vous vous rendiez à un congrès d'astrophysique, rassemblant tous les chercheurs en ce domaine, y compris la crème de la crème; imaginons également que vous-même soyez novice en la matière, ou du moins peu expérimentée. Votre premier réflexe sera-t-il de contredire ces astrophysiciens, ou les actes du congrès ? Non.
Il y a quelque différences entre ce congrès d'astrophysique et le congrès des évêques catholiques et protestants de Vatican II.
Primo: le diable se cache dans le mot «contester». Dans le premier cas, votre astrophysicien novice ferait une vraie contestation lorsqu'il oppose une théorie personnelle, garnie d'une mauvaise humeur aux œuvres du congrès. Dans le second, il s'agit d'un constat de non-continuité entre ce que le 21-ème congrès des astrophysiciens experts ont écrit en marbre et les 20 congrès qui l'ont précédé, où des astrophysiciens tout aussi experts ont écrit dans d'autres pièces de marbre. Je ne dirais pas que lorsqu'on constate que ce que le congrès dernier cri promeut ne colle pas avec ce que les congrès des 1950 ans d'avant ont promu cela s'appelle «contestation». À cela s'ajoute le fait que, dans les années 60, les saints astrophysiciens ne se sont pas rassemblés pour un débat et une clarification sur une question capable de faire des clivages, mais simplement pour une mise à jour. Il en a résulté pas seulement un autre statut de la Société d'Astrophysique, mais une autre manière de rendre culte aux étoiles qui ne s'appelle plus Ordo Missae, mais Novus Ordo Missae et même une autre Carte du Ciel qui ne s'appelle plus Vulgata, mais Nova Vulgata. Autre uniforme des savants en exercice. Autre Rituel d'entrée dans la Société et de dépannage pour ceux déjà membres, autre Pontifical pour les interventions des Grands de la Société, autres manuels pour élever les petits, autre façon pour qu'un feu membre accède dans le Panthéon des Astrophysiciens. Une volonté de tout changer est évidente. Alors, je vous pose la question: qui sont les vrais contestateurs ?
Secundo: Clarification fut-elle ? Car clarifier une controverse a été depuis toujours la raison d'être de tout les grands rassemblement des grands des astrophysiciens. On a vu qu'il n'y avait aucune controverse. Mais clarification non plus. Car les documents du congrès dernier cri sont très pléthoriques par rapport aux précédents, mais beaucoup moins claires. De manière que des uns pensent une chose, des autres une autre chose en s'appuyant sur les même textes.
Tertio: finalement, un congrès d'astrophysique est évalué par l'histoire. Seuls ses fruits, ses résultats dans le temps peuvent témoigner. Voilà, après 50 ans je pense que nous avons la perspective nécessaire. Ce congrès des années 60 est déjà histoire. Quels sont les résultats, quels sont les fruits ? Le triomphalisme des vieux participants est à mourir de rire quand il est confronté à a réalité du terrain. Là, sur le terrain, on constate une Société délabrée. Ses filiales sont appauvries tant en nombre d'adhérents qu'en assiduité et participation. Les bâtiments des filiales sont délabrés aussi, quand pas encore abandonnés. Et je n'insiste plus sur le pitoyable état de la Société à 50 ans depuis son dernier congrès. Pareil, on a la perspective nécessaire pour évaluer l'autre grande contestation des années 60. La révolution culturelle et pas seulement, expression du 21-ème Congrès des Astrophysiciens dans la vie étudiante.

Oui, Socrate, je suis d'accord qu'on est face à un besoin criant de renouvellement. Mais ce renouvellement ne peut pas être qu'une «reforme de la réforme» comme disait le Pape Benoît. Ou Omnia restaurare in Christo comme disent, paraphrasant la formule de Saint Pie X, les traditionalistes. Personne n'a parlé d'un homme nouveau comme Jésus Christ a parlé. Mais cet homme nouveau dont notre Seigneur parle n'est pas l'homme nouveau dont les vrais contestateurs des années 60 ont parlé. L'homme nouveau dont notre Seigneur parle est l'homme revenu à ses racines, à ses fondamentaux. Le fils prodige revenu chez soi. C'est pourquoi, dans la prière, nous demandons que cet homme nouveau soit «comme il était au commencement».

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par archi » dim. 26 nov. 2017, 10:42

Bonjour Socrate,
Socrate d'Aquin a écrit :
dim. 26 nov. 2017, 0:19
Imaginons que vous vous rendiez à un congrès d'astrophysique, rassemblant tous les chercheurs en ce domaine, y compris la crème de la crème; imaginons également que vous-même soyez novice en la matière, ou du moins peu expérimentée. Votre premier réflexe sera-t-il de contredire ces astrophysiciens, ou les actes du congrès ? Non. Tout simplement parce que vous savez que ces chercheurs sont plus compétents que vous. Bien sur vous pouvez contester ! C'est votre droit; et après tout, seule l'Eglise est infaillible (en certaines circonstances). Mais quelle légitimité avez-vous pour cela en comparaison de ces géants ?
Eh bien c'est la même chose pour le Concile...
Très mauvais argument à mon avis. A vrai dire, on entend le même disque dès que les décisions des "spécialistes" sont apparemment contestables: "vous êtes trop bête pour comprendre, seuls les spécialistes diplômés savent". On pourrait comparer ça à ce qu'entendent, par exemple, ceux qui émettent des doutes quant aux traitements médicaux encouragés voire imposés par les autorités...

Mais ce que ça montre, c'est justement non seulement l'écart, mais l'opposition entre ce qui était voulu au Concile, et ce qu'on a eu.
Le Concile a mis en avant, avec raison, la notion de Peuple de Dieu, celle de Sacerdoce Royal, et le mot d'ordre de l'époque était bien de combattre le cléricalisme. Pourtant, dès qu'on entend des critiques sur ce qui a été fait dans la foulée, le cléricalisme revient en force, le fidèle est jugé inapte à émettre le moindre jugement sur ce qu'on lui prêche. Il est censé participer activement à la prière liturgique commune plutôt que d'y assister passivement, mais dès qu'il a une opinion divergente, il est prié de se taire. Bref, on fait tout le contraire de ce qu'on dit.

(Exemple de ce qui est dit dans Lumen Gentium 12:
La collectivité des fidèles, ayant l’onction qui vient du Saint (cf. 1 Jn 2, 20.27), ne peut se tromper dans la foi ; ce don particulier qu’elle possède, elle le manifeste moyennant le sens surnaturel de foi qui est celui du peuple tout entier, lorsque, « des évêques jusqu’aux derniers des fidèles laïcs [22] », elle apporte aux vérités concernant la foi et les mœurs un consentement universel.
)

Idem pour les évêques: le Concile a mis en avant leur autorité, leur collégialité et les théologiens conciliaires ont certainement voulu battre en brèche une vision et une pratique un peu trop papo-centrée de l'épiscopat, surtout depuis la centaine d'années précédente d'ailleurs. Pourtant, à la suite du Concile, on n'a fait qu'en rajouter une couche dans l'autoritarisme papal (démission forcée à 75 ans, déposition d'évêques sans motif, imposition de rites nouveaux par une commission pontificale...).

Idem pour la participation active à la liturgie, dans la suite du mouvement liturgique qui exaltait le rite romain et souhaitait mieux faire partager sa profondeur, sa beauté intrinsèque, aux fidèles - au lieu de quoi, on s'est permis de leur supprimer le rite romain en question pour le remplacer par un rite largement nouveau, et surtout fait "participer" à des chants médiocres voire carrément débiles et des discours fleuves et assommants (ce qui est la réalité de la liturgie vécue dans la plupart des paroisses).

Il serait bien qu'on applique vraiment le Concile.

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Socrate d'Aquin » lun. 27 nov. 2017, 18:23

Bonjour Altior !
Il y a quelque différences entre ce congrès d'astrophysique et le congrès des évêques catholiques et protestants de Vatican II.
Primo: le diable se cache dans le mot «contester». Dans le premier cas, votre astrophysicien novice ferait une vraie contestation lorsqu'il oppose une théorie personnelle, garnie d'une mauvaise humeur aux œuvres du congrès. Dans le second, il s'agit d'un constat de non-continuité entre ce que le 21-ème congrès des astrophysiciens experts ont écrit en marbre et les 20 congrès qui l'ont précédé, où des astrophysiciens tout aussi experts ont écrit dans d'autres pièces de marbre. Je ne dirais pas que lorsqu'on constate que ce que le congrès dernier cri promeut ne colle pas avec ce que les congrès des 1950 ans d'avant ont promu cela s'appelle «contestation». À cela s'ajoute le fait que, dans les années 60, les saints astrophysiciens ne se sont pas rassemblés pour un débat et une clarification sur une question capable de faire des clivages, mais simplement pour une mise à jour. Il en a résulté pas seulement un autre statut de la Société d'Astrophysique, mais une autre manière de rendre culte aux étoiles qui ne s'appelle plus Ordo Missae, mais Novus Ordo Missae et même une autre Carte du Ciel qui ne s'appelle plus Vulgata, mais Nova Vulgata. Autre uniforme des savants en exercice. Autre Rituel d'entrée dans la Société et de dépannage pour ceux déjà membres, autre Pontifical pour les interventions des Grands de la Société, autres manuels pour élever les petits, autre façon pour qu'un feu membre accède dans le Panthéon des Astrophysiciens. Une volonté de tout changer est évidente. Alors, je vous pose la question: qui sont les vrais contestateurs ?
Bon, pour commencer, Vatican II n'est pas un congrès d'évêques protestants, sans quoi nous ne serions pas présentement en train de le discuter.

Ensuite... il me semble que vous exagérez un peu. Oui, il y a eu des changements, c'est évident. Mais ne confondons pas tout: il est ici question du Concile Vatican II et de lui seul. Si vous voulez débattre des changements qui ont suivis, on peut le faire sur un autre fil ou par message privé. Je répondrais seulement que de tous temps l'Eglise a cru bon de mettre à jour sa liturgie ou sa traduction de la Bible.
Secundo: Clarification fut-elle ? Car clarifier une controverse a été depuis toujours la raison d'être de tout les grands rassemblement des grands des astrophysiciens. On a vu qu'il n'y avait aucune controverse. Mais clarification non plus. Car les documents du congrès dernier cri sont très pléthoriques par rapport aux précédents, mais beaucoup moins claires. De manière que des uns pensent une chose, des autres une autre chose en s'appuyant sur les même textes.
Dès lors prévaut l'autorité du Magistère, qui est l'interprète final de ses propres textes.
Tertio: finalement, un congrès d'astrophysique est évalué par l'histoire. Seuls ses fruits, ses résultats dans le temps peuvent témoigner. Voilà, après 50 ans je pense que nous avons la perspective nécessaire. Ce congrès des années 60 est déjà histoire. Quels sont les résultats, quels sont les fruits ? Le triomphalisme des vieux participants est à mourir de rire quand il est confronté à a réalité du terrain. Là, sur le terrain, on constate une Société délabrée. Ses filiales sont appauvries tant en nombre d'adhérents qu'en assiduité et participation. Les bâtiments des filiales sont délabrés aussi, quand pas encore abandonnés. Et je n'insiste plus sur le pitoyable état de la Société à 50 ans depuis son dernier congrès. Pareil, on a la perspective nécessaire pour évaluer l'autre grande contestation des années 60. La révolution culturelle et pas seulement, expression du 21-ème Congrès des Astrophysiciens dans la vie étudiante.
On ne peut pas juger un Concile cinquante ans après. Il faudrait attendre plusieurs siècles au moins. Sinon on aurait du rejeter le Concile de Nicée, duquel sortit florissante l'hérésie arienne.
De plus, savez-vous que le nombre de chrétiens augmente dans le monde ? Il baisse en Europe me direz-vous, et vous auriez raison. Mais est-ce la faute du Concile ? Comme vous l'avez remarqué, Vatican II tombe en plein dans une crise majeure et extrêmement grave de l'autorité.
Oui, Socrate, je suis d'accord qu'on est face à un besoin criant de renouvellement. Mais ce renouvellement ne peut pas être qu'une «reforme de la réforme» comme disait le Pape Benoît. Ou Omnia restaurare in Christo comme disent, paraphrasant la formule de Saint Pie X, les traditionalistes. Personne n'a parlé d'un homme nouveau comme Jésus Christ a parlé. Mais cet homme nouveau dont notre Seigneur parle n'est pas l'homme nouveau dont les vrais contestateurs des années 60 ont parlé. L'homme nouveau dont notre Seigneur parle est l'homme revenu à ses racines, à ses fondamentaux. Le fils prodige revenu chez soi. C'est pourquoi, dans la prière, nous demandons que cet homme nouveau soit «comme il était au commencement».

Fraternaliter in Christo,
A.
Je suis bien d'accord avec vous ! Mais enfin on peut penser qu'on est fidèle à ses racines en étant fidèle au Concile. Mieux: telle est l'interprétation du Magistère.

Il ne faut pas confondre le désir de changer pour le changement (analyse plutôt marxiste de la société) avec le désir de renouveau qui est précisément celui du concile. Un renouveau dans la continuité, un retour aux sources en quelque sorte. Et en même temps, une mise à jour, un aggiornamento.

Après, il est certain que le Concile a été mal appliqué; que certains clercs en soient responsables, cela me parait évident. Mais ce n'est pas une raison pour remettre en cause l'intégralité des textes conciliaires. Encore une fois, soit le concile œcuménique est assisté par le Saint-Esprit, soit il ne l'est pas. S'il ne l'est pas, le Saint-Esprit a abandonné l'Eglise. Pourquoi donc continuer à se dire catholique ?
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: Vatican II serait « pastoral » et donc non dogmatique ?

Message non lu par Socrate d'Aquin » lun. 27 nov. 2017, 18:46

Bonjour archi,
Très mauvais argument à mon avis. A vrai dire, on entend le même disque dès que les décisions des "spécialistes" sont apparemment contestables: "vous êtes trop bête pour comprendre, seuls les spécialistes diplômés savent". On pourrait comparer ça à ce qu'entendent, par exemple, ceux qui émettent des doutes quant aux traitements médicaux encouragés voire imposés par les autorités...

Mais ce que ça montre, c'est justement non seulement l'écart, mais l'opposition entre ce qui était voulu au Concile, et ce qu'on a eu.
Le Concile a mis en avant, avec raison, la notion de Peuple de Dieu, celle de Sacerdoce Royal, et le mot d'ordre de l'époque était bien de combattre le cléricalisme. Pourtant, dès qu'on entend des critiques sur ce qui a été fait dans la foulée, le cléricalisme revient en force, le fidèle est jugé inapte à émettre le moindre jugement sur ce qu'on lui prêche. Il est censé participer activement à la prière liturgique commune plutôt que d'y assister passivement, mais dès qu'il a une opinion divergente, il est prié de se taire. Bref, on fait tout le contraire de ce qu'on dit.
En fait, je pense que cet argument n'est pas si mauvais que cela. Vous serez tout de même d'accord avec moi pour admettre que l'opinion d'un grand théologien a plus de poids que celle d'un simple fidèle sur telle ou telle question portant sur la foi. C'est une des bases de ce qu'Aristote appelle la "dialectique": si on prend en compte les opinions sur un sujet donné, plus elles seront soutenues par des spécialistes dudit sujet, plus elles auront de poids.
Il est donc normal d'approuver deux mille évêques et experts réunis en concile plutôt que quelques théologiens et fidèles contestataires, qu'ils se nomment Michel-Louis Guérard des Lauriers ou Hans Kung.
Il est évident qu'un tel argument a des limites, ce n'est pas parce qu'un grand médecin vous dit quelque chose sur tel sujet de médecine qu'il a forcément raison ! Mais son opinion (en tant qu'opinion) a plus de valeur que la mienne ou la vôtre (car je suppose que vous n'êtes pas un grand médecin; en quoi je me trompe peut-être...).
Pour simplifier, pour la question des vaccins, si j'avais à choisir entre l'avis d'un médecin de grande renommée et celle d'un théoricien de l'existence des assiettes de Chine volantes auxquelles le monde serait soumis, le choix est vite fait. Même s'il est possible que le théoricien ait raison; mais lorsqu'on commence à examiner son opinion, on sort du champ de la dialectique pour entrer dans celui de la science. Or mon argument n'est rien d'autre qu'un principe de la dialectique...

Après, il est tout à fait exact qu'il y a eu un cléricalisme post-conciliaire pas vraiment préférable à celui qu'il remplaçait. De même, as-t-on stigmatisé le "triomphalisme" anté-conciliaire, sans jamais voir celui qui a suivi, et qui voyait Vatican II comme l'arrivée de la lumière dans les ténèbres.
Idem pour les évêques: le Concile a mis en avant leur autorité, leur collégialité et les théologiens conciliaires ont certainement voulu battre en brèche une vision et une pratique un peu trop papo-centrée de l'épiscopat, surtout depuis la centaine d'années précédente d'ailleurs. Pourtant, à la suite du Concile, on n'a fait qu'en rajouter une couche dans l'autoritarisme papal (démission forcée à 75 ans, déposition d'évêques sans motif, imposition de rites nouveaux par une commission pontificale...).
Alors là, objection: le pouvoir suprême demeure tout de même dans les mains du Pape. Ce même concile rappelle que le Pape peut exercer son pouvoir sans le collège des évêques (Lumen Gentium, 22) et que certaines dispositions lui appartiennent en propre, notamment en matière liturgique :
Le droit de régler l’organisation de la liturgie dépend uniquement de l’autorité de l’Église ; il appartient au Siège apostolique et, selon les règles du droit, à l’évêque.

En vertu du pouvoir donné par le droit, l’organisation de la liturgie, appartient aussi, dans les limites fixées, aux diverses assemblées d’évêques légitimement constituées, compétentes sur un territoire donné.

C’est pourquoi absolument personne d’autre, même prêtre, ne peut, de son propre chef, ajouter, enlever ou changer quoi que ce soit dans la liturgie.

(Sacrosanctum Concilium, 22)
Idem pour la participation active à la liturgie, dans la suite du mouvement liturgique qui exaltait le rite romain et souhaitait mieux faire partager sa profondeur, sa beauté intrinsèque, aux fidèles - au lieu de quoi, on s'est permis de leur supprimer le rite romain en question pour le remplacer par un rite largement nouveau, et surtout fait "participer" à des chants médiocres voire carrément débiles et des discours fleuves et assommants (ce qui est la réalité de la liturgie vécue dans la plupart des paroisses).
On pourrait discuter sur le "nouveau rite". Pour ma part, j'estime comme S. Jean-Paul II que "la réforme liturgique est strictement traditionnelle ad normam Sanctorum Patrum". Mais comme je le disais plus haut, c'est un autre sujet. Il est ici question de Vatican II, non pas de son application.
Pour rappel, voici ce que disait le Concilium par rapport aux cantiques douteux qui ont peu à peu remplacés les chants du propre:
Cette règle [permettant l’usage de chants en langue vernaculaire] est désormais caduque. Ce qui doit être chanté, c’est la messe (son Ordinaire et son Propre), et pas « quelque chose », quelque soit sa qualité, qui se surajouterait à la messe. Parce que le service liturgique est un, il n’a qu’un seul contenu, un seul visage, une seule voix : la voix de l’Église. Continuer de remplacer les textes de la messe devant être célébrée par des chants même pieux et recueillis, au lieu d’utiliser ceux de la messe du jour est la source d’une ambiguïté inacceptable : c’est tromper les gens. Le chant liturgique n’est pas constitué d’une mélodie seule, mais de mots, de textes, de pensées et de sentiments que la poésie et la musique renferment. De tels textes doivent être ceux de la messe et nul autres. « Chanter » signifie chanter la messe et pas seulement chanter pendant la messe.
(Cette réponse a été publiée en italien dans le journal officiel du Consilium : Notitiae 5 [1969] p. 406.)
Comme quoi...
Sans parler de la "légende noire" de Bugnini qui est ce qu'elle est. C'est-à-dire une légende. Fondée en partie (comme l'avais dit le P. Bouyer, encore que son témoignage me semble un peu trop agressif pour être sain), mais reposant tout de même sur beaucoup d'inventions (comme sa franc-maçonnerie par exemple).
Il serait bien qu'on applique vraiment le Concile.
Je suis entièrement d'accord avec vous !
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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