L'enseignement de l'Eglise est très bien exprimé dans l'allocution de Pie XII aux sages-femmes, qui date du 29 octobre 1951 et dont je vous conseille la lecture intégrale (que vous pouvez trouver ici :
http://salve-regina.com/index.php?title ... e_conjugal). C'est moi qui souligne quelques points importants.
Notre Prédécesseur Pie XI, dans son encyclique Casti Connubii, du 31 décembre 1930, proclama de nouveau solennellement la loi fondamentale de l’acte et des rapports conjugaux, à savoir que tout attentat des époux dans l’accomplissement de l’acte conjugal ou dans le développement de ses conséquences naturelles, attentat ayant pour but de le priver de l’énergie qui lui est inhérente et d’empêcher la procréation d’une nouvelle existence, est immoral, et qu’aucune « indication »ou nécessité ne peut transformer une action intrinsèquement immorale en un acte moral et licite.
Cette prescription est en pleine vigueur aujourd’hui comme hier, et elle sera encore telle demain et toujours parce qu’elle n’est pas un simple précepte de droit humain, mais l’expression d’une loi naturelle et divine.
Que Nos paroles soient une règle sûre pour tous les cas dans lesquels votre profession et votre apostolat exigent de vous une décision claire et ferme.
D’autre part, si cette limitation de l’acte aux jours de stérilité naturelle se rapporte non au droit lui-même mais à l’usage du droit, la validité du mariage reste hors de discussion ; cependant, la licéité morale d’une telle conduite des époux serait à affirmer ou à nier, selon que, l’intention d’observer constamment ces périodes est basée ou non sur des motifs moraux suffisants et sûrs. Le seul fait que les époux ne violent pas la nature de l’acte et sont même prêts à accepter et à élever l’enfant qui, malgré leurs précautions, viendrait au monde, ne suffirait pas à soi seul à garantir la rectitude des intentions et la moralité indiscutable de ces mêmes motifs.
[...]
On peut être dispensé de cette prestation positive obligatoire, même pour longtemps, voire pour la durée entière du mariage, par des motifs sérieux, comme ceux qu’il n’est pas rare de trouver dans ce qu’on appelle « l’indication » médicale, eugénique, économique et sociale. D’où il suit que l’observance des époques infécondes peut être licite sous l’aspect moral ; et, dans les conditions indiquées, elle l’est réellement. Cependant, s’il n’y a pas, d’après un jugement raisonnable et juste de semblables graves raisons, soit personnelles, soit découlant des circonstances extérieures, la volonté chez les époux d’éviter habituellement la fécondité de leur union, tout en continuant à satisfaire pleinement leur sensualité, ne peut venir que d’une fausse appréciation de la vie et de motifs étrangers aux règles de la saine morale.
Cependant, vous insisterez peut-être maintenant observant que dans l’exercice de votre profession vous vous trouvez parfois en face de cas très délicats, ceux dans lesquels on ne peut exiger que soit couru le risque de la maternité et où même cette dernière doit être absolument évitée, et où, d’autre part, l’observance des périodes agénésiques ou bien ne procure pas de sécurité suffisante ou encore doit être écartée pour d’autres motifs. Et alors vous demandez comment on peut encore parler d’un apostolat au service de la maternité.
Si, selon votre jugement sûr et expérimenté, les conditions requièrent absolument un « non « , c’est à-dire l’exclusion de la maternité, ce serait une erreur et un tort d’imposer ou de conseiller un « oui « . Il s’agit, on effet, ici, de faits concrets et, par conséquent, d’une question, non de théologie, mais de médecine ; elle est donc de votre compétence. Cependant, dans ces cas, les époux n’attendent pas de vous une réponse médicale, nécessairement négative, mais l’approbation d’une « technique »de l’activité conjugale les assurant contre le risque de la maternité. Et c’est ainsi que vous êtes de nouveau appelées à exercer votre apostolat, en ne laissant subsister aucun doute que, même dans ces cas extrêmes, toute manœuvre préventive et tout attentat direct à la vie et au développement du germe sont défendus en conscience et exclus ; et qu’une seule voie reste ouverte, qui est celle de l’abstention de toute activité complète de la faculté naturelle. Là votre apostolat vous oblige à avoir un jugement clair et sûr et une calme fermeté.
Mais on objectera qu’une telle abstention est impossible, qu’un pareil héroïsme n’est pas réalisable. Cette objection, vous l’entendrez aujourd’hui, vous la lirez partout, même de la part de ceux qui, par devoir ou du fait de leur compétence, devraient être capables de juger bien autrement. Et on apporte pour le prouver le raisonnement suivant : Personne n’est obligé à l’impossible et aucun législateur raisonnable ne peut être présumé vouloir obliger par sa loi même à l’impossible. Mais, pour les époux, la continence du longue durée est impossible. Donc, ils ne sont pas, obligés à la continence ; la loi divine ne peut avoir ce sens.
Ainsi, de prémisses partiellement vraies, on tire une conséquence fausse. Pour s’en convaincre, il suffit d’intervertir les termes du raisonnement : Dieu n’oblige pas à l’impossible. Mais Dieu oblige les époux à la continence si leur union ne peut s’accomplir selon les règles de la nature. Donc, en ces cas, la continence est possible. Nous avons comme confirmation de ce raisonnement la doctrine du concile de Trente, lequel, dans le chapitre sur l’observance nécessaire et possible des commandements, enseigne ceci, en se rapportant à un passage de saint Augustin – « Dieu ne commande pas de choses impossibles, mais en commandant, il exhorte, et à faire ce que tu peux et à demander ce que tu ne peux pas, et il t’aide afin que tu puisses le faire »[17].
Par conséquent, ne vous laissez pas troubler dans la pratique de votre profession et dans votre apostolat par ce grand mot d’impossibilité, ni en ce qui regarde votre jugement intime, ni en ce qui se rapporte à votre conduite extérieure. Ne vous prêtez jamais à quoi que ce soit de contraire à la loi de Dieu et à votre conscience chrétienne ! C’est faire tort aux hommes et aux femmes de notre temps que de les estimer incapables d’un héroïsme continu. Aujourd’hui, pour bien des motifs peut-être sous l’étreinte de la dure nécessité ou même quelquefois au service de l’injustice – l’héroïsme s’exerce à un degré et avec une mesure que dans les temps passés on aurait cru impossibles. Pourquoi donc cet héroïsme, si vraiment les circonstances l’exigent, devrait-il s’arrêter aux limites marquées par les passions et les inclinations de la nature ? C’est bien clair : celui qui ne veut pas se dominer lui-même ne le pourra pas, et qui croit pouvoir se dominer, en comptant seulement sur ses propres forces, sans chercher sincèrement et avec persévérance le secours divin, sera misérablement déçu.
Voilà ce qui regarde votre apostolat auprès des époux pour les gagner au service de la maternité, non dans le sens d’une aveugle servitude sous les impulsions de la nature, mais dans celui d’un exercice des droits et des devoirs conjugaux réglés par les principes de la raison et de la foi.