Rite byzantin catholique

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Nebularis
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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Nebularis » ven. 17 avr. 2020, 12:34

Cher Altior,
Altior a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 11:55
1. La prosternation n'existe pas dans le rite byzantin catholique. Je suis bien catholique de rite byzantin et j'ai assisté à des centaines de Messes. Pas de prosternation. Avant, j'ai été orthodoxe, pratiquant le même rite byzantin. Pas de prosternation non plus. Êtes-vous sûre de ne pas confondre prosternation et métanie?
Pourtant, dans mon église russe, nous faisons une grande métanie lors de la liturgie dominicale, et même par deux fois : au point culminant du canon eucharistique et de toute la liturgie, donc lorsque les Saints Dons sont réalisés sur le Trône. Puis une deuxième fois, lors de l'enlèvement du Calice pour la communion des croyants. À ce moment-là, le prêtre à l'autel effectue lui aussi une grande métanie (= prosternation). Entre Pâques et la Pentecôte, en revanche, ces prosternations sont remplacées par des inclinaisons. L'idée étant, si je ne m'abuse, que la grande métanie ou prosternation est la supplication de l'homme esclave du péché, et demandant pardon à Dieu. Après la Résurrection, ce Pardon ayant été accordé, les prosternations n'ont plus lieu d'être.

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Suliko » ven. 17 avr. 2020, 13:31

Nebularis,
Ce n'est pas là toute ma pensée ; en fait, je tiens le rite et la théologie latines du Premier millénaire pour pleinement orthodoxes, malgré ces fameuses tendances qui, de mon point de vue, allaient plus tard conduire au schisme.
Alors pourquoi les orthodoxes de rite latin se sont empressés de remonter non pas au Xe siècle, mais au Ve pour établir leur liturgie ? Il y a bien cette idée que l'Eglise latine était déjà plus ou moins hétérodoxe avant même le schisme officiel et que pour y retrouver une pure orthodoxie de la foi et des pratiques, il faut presque remonter à saint Pierre... Mais cela n'est pas cohérent : si la latinité penchait déjà vers des hérésies ou avait un discours qui tendait à long terme à en faire naître, l'Orient aurait dû intervenir rapidement. Or, prenons le filioque : le fait est qu'il a existé dans certaines régions occidentales sans que l'Orient byzantin n'ait eu l'idée d'intervenir contre ce qu'il appellerait pourtant plus tard une monstrueuse hérésie. Idem pour le célibat des prêtres : à part le concile in Trullo, qui est déjà relativement tardif, je n'ai pas d'exemple en tête de conciles orientaux condamnant la pratique latine. C'est même l'inverse qui est vrai : à savoir des conciles, y compris orientaux, se prononçant pour le célibat.
Or, la rupture entre nos deux Églises est venue lorsque ces tendances ne se contentaient plus de s'exprimer à l'intérieur de l’Église romaine, mais ont commencé à déborder de façon autoritaire sur l'Orient.
Je ne sais pas de quoi vous voulez parler... Et d'ailleurs, il n'y a aucun débordement, puisque le pape possède la primauté dans l'Eglise (ce qui ne veut pas dire qu'il puisse tout faire, loin de là) et qu'il est intervenu plusieurs fois durant le premier millénaire pour résoudre certains problèmes en Orient ou en Afrique.
En fait, l'explication de tout ceci est fort simple. De la part d'un Turc ou d'un Perse, il n'est pas déraisonnable de s'attendre à des violences. Mais de la part de frères chrétiens, ou prétendus tels ? Tous ces griefs cités par les orthodoxes... peut-être un peu trop souvent, je vous l'accorde, mais ils sont cités parce qu'ils ont été vécu comme une trahison. Or il y a un fossé incommensurable entre un ennemi déclaré et un traître. Donc oui, le Latin a fait pire, de ce point de vue, que le Turc...
Votre interprétation n'explique pas la situation géorgienne que je prenais en exemple. De plus, les catholiques se sont parfois combattus bien durement entre eux durant diverses guerres ou conflits. Cela a pu engendrer des rancœurs durables, mais non rompre la communion de foi (sauf, bien évidemment, lorsque le dogme ou la morale étaient en jeu, ou que la communion était déjà rompue antérieurement). Et puis le fait est qu'à l'époque du sac de Constantinople, les catholiques et les orthodoxes n'étaient déjà plus en communion de foi et vous savez très bien que les haines et les préjugés peuvent être tout aussi tenaces envers des populations que l'on considère schismatiques ou hérétiques qu'envers des membres de religions non chrétiennes. En outre, ce sac malheureux n'a pas été commis par ordre du pape pour l'exaltation de la vraie foi.
Je ne vais pas recommencer tout le débat, mais convenez que lorsque les Teutoniques attaquent la Russie avec l'intention de convertir tout le monde de force au catholicisme, et que de l'autre côté, les Mongols promettent de garantir la liberté de culte (et de fait, ils ont tenu parole), le calcul est vite fait... non ? Qu'auriez-vous fait dans cette situation, si vous étiez orthodoxe, si vous étiez le prince Alexandre Nevski ?
Il a fait le choix diplomatique le plus judicieux eu égard à ses opinions religieuses, mais là n'est pas la question. On parle du fait de ressasser des actes certes pas toujours fameux des siècles plus tard. Mais vous oubliez une chose importante, lorsque vous dites que les catholiques ont commis bien plus d'exactions que les orthodoxes, que ce soit dans le contexte de la conversion des schismatiques ou plus généralement dans les missions évangélisatrices : les orthodoxes n'avaient tout simplement plus les moyens de mener de telles actions durant le second millénaire ! Ils étaient historiquement perdants, avec l'islamisation et l'enclavement. Donc, vous comparez ce qui ne saurait l'être en faisant passer pour de la vertu ce qui n'est lié qu'à des circonstances historiques nettement moins favorables. Et Charlemagne, d'ailleurs, est-il catholique ou orthodoxe ? Sa conversion des Saxons doit-elle être mise à charge de mon Eglise ou de la vôtre ? Dois-je m'en sentir responsable plus de mille ans après ? Si l'empire byzantin n'était pas tombé aux mains des Turcs et qu'il s'était maintenu, voire étendu, je suis à peu près sûre que le sac commis par les Latins n'aurait pas la place fondamentale qu'elle occupe encore aujourd'hui dans les esprits orthodoxes.
Mais comme je l'ai déjà écrit ci-dessus, toutes ces choses vont ensemble. L'histoire, la politique, la culture, la religion forment un bloc. On ne peut pas les dissocier ! C'est une illusion.
Non. Quant on discute de théologie, on doit être précis et ne pas tout mélanger. On peut certes parler de tout, y compris de ce qui ne met pas le dogme et la morale en danger, mais il est impératif de bien clarifier les objets de la discussion. Vous ne pouvez pas mettre dans le même sac une question dogmatique comme le filioque avec le port de la barbe. C'est ridicule, car ce serait mettre ses propres préférences esthétiques avant la rigueur de la réflexion théologique.
Cela dit, pour moi, parmi toutes les choses que vous citez, il est clair que ce sont le port de la barbe, l'usage du pain sans levain et la communion sous une seule espèce qui demeurent à l'heure actuelle, les obstacles les plus sérieux à la réunion de nos Églises. Surtout le port de la barbe, en fait. Pour l'absence d'épiclèse, on peut toujours s'arranger... :ciao:
J'espère que vous êtes ironique...
De toute façon, je ne crois pas qu'il y aura une réunion des Eglises. La formulation en elle-même est ambiguë, ce qui n'est déjà pas de très bon augure. En outre, il n'y a pas de pouvoir central en orthodoxie, ce qui fait qu'un tel retour au bercail est tout simplement impossible. Enfin, je n'ai pas d'exemple en tête de patriarche ou évêque orthodoxe vraiment philo-latin et tendant à l'orthodoxie doctrinale. Mon impression, c'est qu'il y a soit un clergé hostile à la latinité (la majorité), soit quelques clercs (minoritaires) plus ou moins marqués par un certain modernisme et considérant donc que l'Eglise catholique n'est pas fondamentalement dans l'erreur ou l'illégitimité, qu'on peut chercher à se réunir, etc... Ce serait un peu l'équivalent de la théorie des deux poumons de l'Europe. Je n'apprécie ni l'hostilité envers mon Eglise, ni le flou entretenu par certains (surtout des catholiques, en fait), qui porte à croire qu'il n'y a pas qu'une seule Eglise fondée par le Christ.

Altior,

Merci pour votre éclairage. Cependant, j'ai lu d'un catholique fiable que les catholiques byzantins se prosternaient ou s'inclinaient (je ne sais pas) avant l'épiclèse et les orthodoxes après. C'est cela que je voulais mettre en avant. Je sais aussi que la grande majorité des coptes ne sont pas orthodoxes, mais cela ne change rien à ma remarque, à savoir que l'Eglise a exigé des Coptes revenant à l'unité de foi qu'ils ne pratiquent plus le baptême dans sa forme longue, car il était jugé invalide. Pareil pour Addaï et Mari (le changement d'avis récent de l'Eglise m'important assez peu). Certains aspects de la liturgie ont parfois dû être changés pour de très graves raisons doctrinales. Toutes les églises orientales n'ont malheureusement pas préservé de manière irréprochable leurs sacrements une fois désunis à Rome (même si ce n'est pas le cas de Byzance, il faut le dire).
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Socrate d'Aquin » ven. 17 avr. 2020, 13:35

Cher Nebularis,
Tout à fait, il peut y avoir plusieurs liturgies. D'ailleurs nous avons en Orthodoxie non pas une, mais trois liturgies, à côté de la Liturgie de saint Jean Chrysostome, à savoir la Liturgie de saint Basile et la Liturgie de saint Jacques Frère-de-Dieu. Et puis, encore une fois, les rites latins du Premier millénaire me semblent pleinement compatibles avec la théologie orthodoxe, même s'ils expriment une sensibilité propre, distincte de celle de l'Orient.
Vous conviendrez cependant que l'usage de la liturgie de saint Jacques est très minoritaire (et très éclaté, l'ordo grec étant, par exemple, très différent de l'ordo slavon).
Je comprends cette idée, et j'apprécie l'humilité qui lui préside. Néanmoins, reconnaître que l'on ne détient qu'une parcelle de la Vérité (le Seigneur Dieu ne l'ayant pas révélée tout entière) n'implique pas que toutes les croyances et religions se valent et aient reçu des « parcelles de vérité » d'égale valeur. Ici, nous avons le risque du relativisme, comme je vous l'ai déjà fait remarquer à une autre occasion, mon cher Cmoi.
Je crois qu'il nous faut distinguer la doctrine de la théologie. Toutes les liturgies catholiques expriment la même foi, la même doctrine ; mais chacune le fait à sa manière, avec des accents propres (en soulignant davantage tel aspect de la foi par exemple, sans omettre le reste).
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Socrate d'Aquin » ven. 17 avr. 2020, 13:55

Chère Suliko,
Merci pour votre éclairage. Cependant, j'ai lu d'un catholique fiable que les catholiques byzantins se prosternaient ou s'inclinaient (je ne sais pas) avant l'épiclèse et les orthodoxes après. C'est cela que je voulais mettre en avant. Je sais aussi que la grande majorité des coptes ne sont pas orthodoxes, mais cela ne change rien à ma remarque, à savoir que l'Eglise a exigé des Coptes revenant à l'unité de foi qu'ils ne pratiquent plus le baptême dans sa forme longue, car il était jugé invalide. Pareil pour Addaï et Mari (le changement d'avis récent de l'Eglise m'important assez peu). Certains aspects de la liturgie ont parfois dû être changés pour de très graves raisons doctrinales. Toutes les églises orientales n'ont malheureusement pas préservé de manière irréprochable leurs sacrements une fois désunis à Rome (même si ce n'est pas le cas de Byzance, il faut le dire).
Pour ma part, il me semble que la règle, dans le rite byzantin, est la suivante (de l'expérience que j'ai de ce rite dans ma paroisse) :
- l'on fait une grande métanie après la consécration du pain, puis du vin en chantant "Amen".
- l'on fait de même pour le vin.
- à l'épiclèse, le clergé se prosterne (les fidèles, normalement, n'entendent pas l'épiclèse, celle-ci étant couverte par le chant du chœur).
- le dimanche, l'on ne se prosterne pas (pas plus que pendant le temps de la Pentecôte, c'est-à-dire le temps pascal), mais la prosternation est remplacée par une triple métanie.

Voilà, me semble-t-il, l'usage byzantin, commun aux catholiques et aux orthodoxes.

PS : quel est votre avis sur le "changement d'avis" de l'Eglise sur l'anaphore d'Adaï et Mari ?
PPS : parler "d'union des Eglises" a un sens orthodoxe : il peut s'agir de l'union de l'Eglise romaine avec les Eglises byzantines. De même, cela avait un sens avant 1453 (je suis en effet d'avis que le schisme n'a été véritablement consommé qu'après le Concile de Florence).
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par cmoi » ven. 17 avr. 2020, 14:04

Nebularis a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 12:16
Je comprends cette idée, et j'apprécie l'humilité qui lui préside. Néanmoins, reconnaître que l'on ne détient qu'une parcelle de la Vérité (le Seigneur Dieu ne l'ayant pas révélée tout entière) n'implique pas que toutes les croyances et religions se valent et aient reçu des « parcelles de vérité » d'égale valeur. Ici, nous avons le risque du relativisme, comme je vous l'ai déjà fait remarquer à une autre occasion, mon cher Cmoi.
En effet cela me rappelle quelque chose. Par cette remarque vous êtes en accord avec le catholicisme.
Mais... Je crois savoir que des pays de l'Est, dans des temps anciens, sont devenus orthodoxe après un choix qui ressemblait à un concours ou un appel d'offre, par comparaison. Idem pour un pays d'Afrique plus récemment (sauf que cela ne passa pas par son gouvernement et resta plus modeste. Je suppose que dans ce cas,... non je ne suppose rien.. Faut-il alors le condamner tant que cela ce relativisme, car il était bien présent là aussi, non ? Ou y voyez-vous une différence simplement lorsque l'appartenance chrétienne est déjà acquise ?
Ce qui serait très paradoxal...
N'y a(-il pas un vrai relativisme à avoir, justement N'y a-t-il pas à l'opposé le risque de fanatisme ?
Je vais développer cela en reprenant un autre échange ayant eu lieu :
AdoramusTe a écrit :
jeu. 16 avr. 2020, 21:58
Suliko a écrit :
jeu. 16 avr. 2020, 21:07

Et pour finir, l'Eglise a toujours été indivise, les schismatiques et les hérétiques qui s'en séparent n'en faisant plus partie, ils n'ont aucune incidence sur l'unité de la véritable Eglise du Christ.
Merci Suliko de ces propos qui nous aident à relever la tête. Cette défense qu catholicisme fait plaisir à lire.
Je ne reprends pas tout le propos de Suliko que AdoramusTe a repris car j’ai déjà répondu à ce qui manque ici dans le fait qu’il ne faut pas le prendre comme relevant d’une discussion religieuse, mais du choc avec une culture différente.

Pour ce qu’il en reste ici et qui me semble le mieux susciter votre réaction qui est la même, je la comprends. Néanmoins je ne peux m’en satisfaire et ce que je vais maintenant écrire n’est qu’une réflexion, il ne m’appartient pas de donner des leçons et votre réaction est humaine, je porte en moi la même.
Soit je m’engage dans une discussion et j’oublie que l’autre est schismatique, hérétique et j’en passe (condamné selon la doctrine que j’applique à l’enfer, et à cause de la sienne, car c’est bien çà !) et dans ce cas je ne peux reprendre pied de cette façon, car c’est nier l’intérêt de la discussion et sa finalité profonde ou en faire quelque chose de peccamineux, m’exposer inutilement à la tentation, soit je m’abstiens de discuter.
Source : « Quiconque a mis la main à la charrue et regarde en arrière… »

Car une telle façon de voir aboutit à ce qu’il y ait une multitude de chapelles, chacune prétendant avoir raison. Elle nie toute évolution possible au nom de la tradition, ce que Altior a sur ce forum clairement exposé comme souhaitable, et c’est un principe de précaution recevable sauf qu’il s’appuie sur l’idée d’une fermeture et pose la question de sa raison et de son moment.
En se disant en guise d’ouverture que Dieu reconnaîtra les siens, mais qu’ici bas cela nous est impossible et que nous devons nous en tenir là. N’est-ce pas insatisfaisant ?

Ce n’est certes pas nécessairement belliqueux, mais cela y invite et peut très vite y tomber. En tout cas, cela nie le message universel de paix et d’amour du Christ, notre capacité à discerner le bien et le vrai (on abolit toute nouveauté vu qu’il faudrait l’y rechercher, on applique strictement l’enseignement qui par la passé a été défini) sa volonté de nous vouloir nous comporter en frères.
Vous ne retenez alors que la parole qui dit qu’il est venu pour apporter le glaive, or je ne pense pas qu’il faille même l’interpréter comme cela. Des désaccords de doctrine sont faits pour être résolus, dans la mouvance de l’assistance promise du St Esprit. Ils expriment notre imperfection foncière, et devraient aussi exprimer notre désir de nous améliorer en cherchant l’entente, jusqu’à progresser vers mieux par de nouveaux débats plus pointus.
Discuter pour seulement rester sur sa position par devoir de respect, si ce n’est pas hypocrite, c’est mesquin. Et le Christ nous invite à mieux.

Si nous reconnaissons qu’un païen puisse se sauver à certaines conditions qu’a souvent rappelé Kerygme, alors « schismatique » et « hérétique » ne sont plus que des définitions qualifiant un fait, pas des motifs de sanction valant excommunication – surtout si l‘on pense que Dieu pourrait bien ne pas l’avaliser ni surtout les avaliser. Il faut être honnête et cohérent avec sa propre modestie ! Quid du relativisme là-dedans ?
On ne peut pas jouer avec son cœur sur plusieurs tableaux à la fois qui se contredisent.

Vous me direz que c’est ce que fait l’Eglise et que vous (c’est une tournure impersonnelle) ne faites qu’appliquer sa doctrine. Je vous dirai que c’est encore peut-être vrai théoriquement, quoique alors s’y soit introduites bien des contradictions, mais non pratiquement, et que la pratique précède en cela toujours la théorie.
Ce qui est heureux, car notre cœur est plus vif que notre esprit à saisir la vérité, sauf quand il est mauvais.

Choisissez (mon propos reste anonyme) la théorie et dans ce cas abstenez-vous non seulement de discuter mais de suivre de telles discussions qui ne vous feront que du mal, soit choisissez la pratique mais alors c’est que vous admettez que la théorie peut, doit et va évoluer en conséquence, que c’est un processus irréversible qui est encore comme cela en raison de notre faiblesse et difficulté à reconnaître nos torts tant qu’on n’a pas trouvé mieux que la vérité déjà trouvée et reconnue. Sauf qu’à ne progresser qu’en petit comité, on va moins vite qu’à profiter de l’intelligence et de la foi de plus (et en disant cela, je n’exclus pas qu’en dépit de ce que professa Altior, il puisse y avoir une évolution « interne »).
Or choisir la pratique, c’est aussi pardonner et oublier tous les écarts de conduite qui ont été motivés par ce désaccord, et ils sont nombreux, s’en souvenir néanmoins mais seulement pour éviter qu’ils ne se reproduisent.
C’est considérer que le problème est résolu (en Dieu) et qu’il ne reste qu’à appliquer une solution.
Quel que soit celui qui les a perpétrés, la cause en était commune et la responsabilité partagée.
Pour fragile que cela soit, la paix qui en résultera sera plus sûre que celle résultant d’un « chacun chez soi et les vaches seront bien gardées », comme s’il n’y avait pas de querelles aussi domestiques et que l’avis d’un tiers n’aidait pas à les résoudre.
Et puis il y aura toujours un petit jeune malin pour les lâcher dans le près d’à côté, des enfants qui voudront convoler, etc.

La vie ne cesse de provoquer des remises en question, ce n’est pas en s’y refusant qu’on s’assainit, s’enrichit, mais en les résolvant dans un rapport « gagnant/gagnant ».
La situation actuelle est telle que nous ne devrions pas avoir de plus haute priorité spirituelle, vu les conséquences que cela aurait et qui en résoudraient par le fait beaucoup des autres.
Mais je comprends que certains préfèrent se tenir à côté. Dans ce cas le mieux serait qu’ils se rendent disponibles, accroissent leur capacité de jugement et d’écoute, sans interférer sinon pour empêcher les querelles de dégénérer, au nom d’un bon sens commun.
Cette approche n’a pas pour but de réunir dans un effort commun des frères en désaccord (intégristes/progressistes, etc.) sinon de leur donner un exemple et qu’ils puisent y participer (travaux pratique…) ni de cacher des plaies qu’il convient de soigner autrement (pédophilie des prêtres, etc.) ou de servir d’exutoire à des échecs.

Pour en revenir au premier post sur ce fil, nous avons AdoramusTe et moi le même ressenti : il y a dans la liturgie byzantine, et donc sa doctrine, des perles que le catholicisme romain n’a pas approfondi. Ce n’est pas une critique de ce dernier, son histoire est différente et il a ses propres qualités. Mais quand on en est issu, il y a un moment où chercher son inspiration dans ceux qui ont approfondi autrement les vérités du dogme (à peu de choses près le même et nous pouvons nous abstenir d’en creuser la différence, la laisser intacte) est une aspiration naturelle et saine. D’autant qu’au lieu de s’enfermer dans des querelles internes provisoirement insolubles, on apportera à ceux qui nous en apporteront (des perles, pas des querelles, quoique ! ) un regard neuf et qui contiendra aussi pour eux ses pépites – à condition de faire preuve d’humilité et de savoir comment le poser et l’exprimer, avec subtilité et délicatesse.
Il ne s’agit pas là d’une recherche d’efficacité, ni de paresse, d'un relativisme, mais d’une quête de renouvellement et d’émerveillement tout à fait légitime à mon sens. D’une émulation réciproque, d’un cercle vertueux.
Obligatoirement, là où pourtant il n’y a pas de désaccord officiel, nous rencontrerons des points de vue différents, des sensibilités différentes, etc. qui nous éclaireront mieux les désaccords officiels et nous aideront à les comprendre et sans doute résoudre, qui nous feront anticiper des désaccords futurs qui pourraient en provenir s’ils s’exacerbaient ou se prolongeaient de circonstances extérieures à la foi.
En tout cas, se proposer de satisfaire notre souhait, c’est inévitablement s’engager dans quelque chose qui va plus loin qu’un simple goût liturgique, comme vous pouvez le constater ici. Peut-être est-ce répondre à un appel qu’il nous reste à reconnaître ?

Il est clair pour tout le monde que la réunification ne se fera pas, là où il y a des différences, par l’adoption par l’une de ces Eglises, du dogme de l’autre. Il y aura mise en commun, réflexion commune, et gageons que le résultat obtenu sera meilleur que ce qu’il était pour l’une comme pour l’autre, si tant est que chacune se considère être et former l'unité de la véritable Eglise du Christ, - tel(le) que l’a formulé Suliko.
Par conséquent l’une et l’autre devront revoir ensemble, au risque de se déjuger et d’être de mauvaise foi, leur concept d’ex-communion par rapport à ce qu’est un schisme ou une hérésie. C’est déjà commencé… (Je ne crois pas comme le dit Altior que le cas des chrétiens d’Orient puisse servir d’exemple, car sinon cela aurait été réalisé depuis longtemps.)

Ce qui devrait être anathématisé, c’est précisément de revendiquer ce concept d’ex-communion (et même si non d’excommunication). Cela seul est sûr !

Pour en revenir à la liturgie, il me semble qu’il y a paradoxalement moins de difficulté pour un catholique à « assimiler » une liturgie orthodoxe de rite occidental, qu’une liturgie catholique de rite oriental. Ce qui montre bien que la part de dogme dans la liturgie est à pondérer à la baisse, au regard du peu qui diffère essentiellement, et c’est pourquoi ceux qui n’y croient pas conspuent cette liturgie orthodoxe, des 2 côtés, sans véritable argument ni même y avoir assisté.
On assimile trop au dogme des choses qui relèvent de la sensibilité – tout comme dans la guerre des messes au sein du catholicisme, qui en est encore plus ou moins à prôner et croire pour idéal une messe univoque comme signe d’unité, les signes du contraire étant des concessions – j’ai lu cela exprimé sur ce forum il y a pas très longtemps, Altior*, peut-être bien ou sinon approuvé par Socrate d’Aquin.
Il faut savoir lire ceux qui sont les signes des temps, autrement dit du St Esprit et non du « modernisme » ou de je ne sais quelle figure diabolique.
Ce mécanisme de résistance psychologique au changement est bien connu des Entreprises et a des remèdes.

Il faut tout faire pour qu'il y ait communion. quand cela ne se ferait pas, en tirer les conclusions : est-ce que Dieu voudrait qu'il y ait plusieurs Eglises, afin de permettre à ceux qui seraient victimes de l'une (prêtres pédophiles, pour exemple, mais pas seulement) de se réfugier dans l'autre.... ?
Est-ce là encore du relativisme ? si cela l'est, alors prenez garde : les fautes d'Eglises sont impardonnables, elles relèvent du péché contre l'Esprit !

Il reste la voie de ceux qui faisaient des miracles en son nom, et qu'il obligea ses apôtres à respecter.

* ajouté après pour éviter toute ambiguité : je sais que ce n'est pas vous Altior, comme votre post ici le confirme : c'était juste une façon de vous interpeller en citant une opposition...

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par cmoi » ven. 17 avr. 2020, 15:04

Socrate d'Aquin a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 13:35
Je crois qu'il nous faut distinguer la doctrine de la théologie. Toutes les liturgies catholiques expriment la même foi, la même doctrine ; mais chacune le fait à sa manière, avec des accents propres (en soulignant davantage tel aspect de la foi par exemple, sans omettre le reste).
Je ne comprends pas cette distinction que vous faites.
Où situez-vous le désaccord entre Rome et ..disons Constantinople, catholiques et orthodoxes, en dehors de la question du pape et du filioque qui à mon sens serait aujourd'hui vite résolue (le Saint Esprit procède "du père et par le fils")?
En dehors des questions disons disciplinaires (annulation/divorce, mariage des prêtres, etc.) concerneraient-elles le rite (communion combien d'espèces, et quand, confirmation quand, baptême comment, calendrier liturgique, etc.)

Quand vous dites "liturgies catholiques" est-ce au sens large qui inclut les orthodoxes, ou étroit ?
Cela voudrait-il dire que pour vous la doctrine est la même, mais pas la théologie ? N'en est-elle pas le résultat pourtant ?

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Nebularis » ven. 17 avr. 2020, 16:14

Avé Suliko,
Suliko a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 13:31
Alors pourquoi les orthodoxes de rite latin se sont empressés de remonter non pas au Xe siècle, mais au Ve pour établir leur liturgie ?
Mais ce n'est pas moi qui ai établi cette liturgie. En ce qui me concerne, le Xe siècle aurait amplement suffi.
Il y a bien cette idée que l'Eglise latine était déjà plus ou moins hétérodoxe avant même le schisme officiel et que pour y retrouver une pure orthodoxie de la foi et des pratiques, il faut presque remonter à saint Pierre...
Non, ce n'est pas ce que je crois. Comme je l'ai écrit plus haut, l'hétérodoxie de l’Église romaine n'était présente au Premier millénaire qu'à l'état de potentialité. Le schisme n'était pas inéluctable. On aurait très bien pu continuer encore pendant mille ans, malgré des tendances, usages et préférences parfois très différentes !

Or ce sont des facteurs politiques, et non religieux, qui ont conduit au schisme. Le filioque ne peut en aucun cas à lui seul expliquer le schisme ! C'est évident. Le facteur politique décisif, c'est l'ambition des papes de s'émanciper de Byzance et de s'arroger une suzeraineté spirituelle (et accessoirement, une souveraineté temporelle...) en jouant la royauté franque contre Constantinople : raison première du couronnement de Charlemagne. C'est le même calcul qui a conduit ensuite à l’affirmation autoritaire d'une suzeraineté de Rome sur toutes les autres Églises, idée qui n'a jamais été énoncée de façon claire avant le IXe siècle.
Les événements de 1054 sont une pure formalité, et la rupture définitive intervient en 1204.
Mais cela n'est pas cohérent : si la latinité penchait déjà vers des hérésies ou avait un discours qui tendait à long terme à en faire naître, l'Orient aurait dû intervenir rapidement. Or, prenons le filioque : le fait est qu'il a existé dans certaines régions occidentales sans que l'Orient byzantin n'ait eu l'idée d'intervenir contre ce qu'il appellerait pourtant plus tard une monstrueuse hérésie.
Mais enfin, les papes eux-mêmes ont refusé l'usage officiel du filioque. Tout simplement parce qu'ils n'avaient pas l'autorité pour l'accepter dans le Credo : seul un concile aurait eu ce pouvoir. Le filioque n'a été ajouté au Credo qu'en 1014, et cela a d'ailleurs été perçu par les Byzantins comme une manifestation inacceptable des tendances autoritaires de Rome. À partir de là, les relations étaient tellement détériorées que le schisme, quarante ans plus tard, était devenu, pour le coup, inévitable.
Votre interprétation n'explique pas la situation géorgienne que je prenais en exemple.
Mais si. Il existe une forte conscience panorthodoxe, un sentiment d'appartenance au-delà des particularismes ethniques. C'est pour cela, soit dit en passant, que le reproche du phylétisme adressé aux orthodoxes, et qui revient systématiquement dans la bouche des Latins, ne suscite chez moi qu'un haussement d'épaules : c'est tout simplement méconnaître la réalité orthodoxe...
Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que les Géorgiens, comme les Russes et comme tous les orthodoxes, s'identifient fortement à l'Empire byzantin et à son histoire, et ressentent le sac de Constantinople presque aussi douloureusement que les Grecs.
De plus, les catholiques se sont parfois combattus bien durement entre eux durant diverses guerres ou conflits. Cela a pu engendrer des rancœurs durables, mais non rompre la communion de foi (sauf, bien évidemment, lorsque le dogme ou la morale étaient en jeu, ou que la communion était déjà rompue antérieurement).
D'accord, mais la situation est différente dans le sens où il s'agit en quelques sorte de « guerres civiles ». Les frictions, conflits et rivalités sont inévitables dans n'importe quel groupe humain, mais elles ne remettent pas en cause le sentiment d'appartenance à ce groupe.
Voyez donc plutôt les orthodoxes non pas comme des habitants du même pays que les catholiques, mais comme un pays très proche, un pays allié, avec lequel on commerce depuis longtemps et avec lequel les relations sont censées être amicales. Là, vous aurez peut-être une idée de ce qu'a pu représenter la prise de Constantinople.
Et puis le fait est qu'à l'époque du sac de Constantinople, les catholiques et les orthodoxes n'étaient déjà plus en communion de foi
Encore une fois, les choses sont plus compliquées que cela. En réalité, il nous faut accepter les contradictions, les volte-face, et reconnaître que l'essence-même de la vie, qui est mouvement, qui est dynamique, autorise les retours en arrière, les reniements, les conversions, soit une progression en spirales plutôt que linéaire.
Ainsi vous avez l'air de penser qu'après 1054, le divorce étant consommé, les deux parties ont immédiatement commencé à se considérer comme des ennemis mortels au même titre que les Turcs ou les Arabes. Ce n'est évidemment pas le cas : il y a eu de nombreuses tentatives de réconciliation, même après 1204 d'ailleurs, parce que les Byzantins avaient besoin d'aide contre les Turcs. Et non, cela n'enlève rien au caractère monstrueux du sac de Sainte-Sophie : que des chrétiens pillent le lieu le plus sacré de l'Orthodoxie, le vandalisent et y commettent des blasphèmes, ne pouvait pas être oublié, et c'est avant tout le péril mortel de l'avancée turque qui explique les concessions faites à Rome durant les derniers siècles de l'Empire.
et vous savez très bien que les haines et les préjugés peuvent être tout aussi tenaces envers des populations que l'on considère schismatiques ou hérétiques qu'envers des membres de religions non chrétiennes. En outre, ce sac malheureux n'a pas été commis par ordre du pape pour l'exaltation de la vraie foi.
Non, je suis navré, mais on ne peut pas mettre sur le même plan un sacrilège commis par un musulman et un sacrilège commis par un chrétien, surtout lorsque l'on considère la très grande proximité doctrinale et sacramentelle entre catholiques et orthodoxes.
D'autant plus que, encore une fois, jamais les Turcs n'ont vandalisé la Hagia Sophia comme l'ont fait les croisés... vous dites qu'ils l'ont transformée en mosquée. Mais enfin, c'est dans l'ordre des choses ! Mais que des chrétiens, des croisés qui plus est, saccagent une église, brisent des icônes, ne voyez-vous pas que c'est insupportable, que c'est absolument incomparable avec tout ce que des Turcs ou des Mongols pourraient faire ? Croisés, qui, je le rappelle, étaient précisément censés combattre pour l'exaltation de la vraie foi ! Quelle sinistre farce, quelle ignominie, en vérité.
On parle du fait de ressasser des actes certes pas toujours fameux des siècles plus tard.
Je vais vous faire la même remarque qu'à AdoramusTe. Le christianisme est une religion de la Mémoire, de la réactualisation permanente du Passé. Or nous commémorons la Passion de Notre Seigneur, la vie des saints, mais aussi les événements du monde qui les accompagnent et le contexte historique, qui sont je le répète inséparables des réalités de la foi. Les saints et le Christ ont vécu dans le monde, nous vivons tous dans le monde. La Crucifixion est elle-même un événement historique, qui s'est déroulé aux alentours de l'an 30, il y a près de deux mille ans ! Les chrétiens ne font rien d'autre que ressasser le passé, en vérité.

C'est ce passé qui a fait de nous ce que nous sommes. Allez dire à un Grec de passer l'éponge, d'oublier 1204, d'oublier l'occupation ottomane ! C'est insensé, enfin.

En appelant à arrêter de « ressasser le passé », comme vous dites, vous allez à l'encontre de tout l'esprit du christianisme et de sa Tradition.
Mais vous oubliez une chose importante, lorsque vous dites que les catholiques ont commis bien plus d'exactions que les orthodoxes, que ce soit dans le contexte de la conversion des schismatiques ou plus généralement dans les missions évangélisatrices : les orthodoxes n'avaient tout simplement plus les moyens de mener de telles actions durant le second millénaire ! Ils étaient historiquement perdants, avec l'islamisation et l'enclavement. Donc, vous comparez ce qui ne saurait l'être en faisant passer pour de la vertu ce qui n'est lié qu'à des circonstances historiques nettement moins favorables.
C'est faux, puisque la Russie n'a jamais connu ni islamisation ni enclavement, et qu'elle s'est au contraire étendue à quasiment la moitié de l'Asie, notamment dès le XIVe siècle dans le Grand Nord, à l'Est de la Scandinavie, où vivent des peuples finnois. Ces derniers ont été évangélisés de manière pacifique, par l'exemple qu'offrait la vie des moines présents sur le territoire. Quant à la Sibérie, nous savons que s'il y a eu des tentatives de conversion forcée des peuples sibériens par les armées cosaques, elles n'ont jamais eu le caractère systématique qu'elles avaient chez les catholiques. Fondamentalement, on peut dire que l'activité missionnaire n'est pas envisagée de la même manière que chez les catholiques, d'où la vigoureuse condamnation du prosélytisme uniatiste, encore récemment (2016) par le patriarche Cyrille de Moscou.
Et Charlemagne, d'ailleurs, est-il catholique ou orthodoxe ? Sa conversion des Saxons doit-elle être mise à charge de mon Eglise ou de la vôtre ? Dois-je m'en sentir responsable plus de mille ans après ?
Eh bien, j'aurais tendance à dire que si on prend en compte les événements de cette époque et notamment son couronnement illégal par le pape, il appartient entièrement à l’Église romaine de se remémorer les crimes commis sous son règne. Encore une fois, les catholiques ne sont pas responsables en tant qu'individus, ce n'est pas du tout la question. Il s'agit de garder le souvenir de ces événements, non pas pour s'abaisser, se lamenter, s'humilier ou se mortifier jusqu'au Jour du Jugement, mais pour en tirer un enseignement.
Non. Quant on discute de théologie, on doit être précis et ne pas tout mélanger. On peut certes parler de tout, y compris de ce qui ne met pas le dogme et la morale en danger, mais il est impératif de bien clarifier les objets de la discussion. Vous ne pouvez pas mettre dans le même sac une question dogmatique comme le filioque avec le port de la barbe. C'est ridicule, car ce serait mettre ses propres préférences esthétiques avant la rigueur de la réflexion théologique.
Laissons-là le port de la barbe. Ce n'est pas le sujet. En revanche, la querelle du filioque, les différends dogmatiques et moraux sont en relation tout à fait évidente avec les événements politiques, tels que le couronnement de Charlemagne ou le sac de Constantinople. Comment ne le voyez-vous pas ? Et c'est pareil en sens inverse : la culture grecque et l'histoire byzantine de l'Orient et celles, romaine et latine, de l'Occident, ont naturellement contribué à la divergence des courants théologiques ! Enfin, c'est d'une limpidité absolument cristalline.
De toute façon, je ne crois pas qu'il y aura une réunion des Eglises.
Rien n'est impossible à Dieu, mais il est vrai que les obstacles me semblent actuellement insurmontables...

En Christ, chère sœur,

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Nebularis » ven. 17 avr. 2020, 16:18

Cher Socrate d'Aquin,
Socrate d'Aquin a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 13:35
Vous conviendrez cependant que l'usage de la liturgie de saint Jacques est très minoritaire (et très éclaté, l'ordo grec étant, par exemple, très différent de l'ordo slavon).
Sans aucun doute ! Mais justement, ce pluralisme ne va-t-il pas à l'encontre de l'idée d'un impérialisme liturgique purement constantinopolitain, que vous semblez défendre ? :p

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par AdoramusTe » ven. 17 avr. 2020, 16:40

En appelant à arrêter de « ressasser le passé », comme vous dites, vous allez à l'encontre de tout l'esprit du christianisme et de sa Tradition.
Ressasser le passé veut dire précisément se servir de l'Histoire pour entretenir un ressentiment avec une attitude victimaire.

Je crois que je comprends. Comme tous ceux qui se gargarisent avec le mot "Tradition", ce n'est pas la Tradition que vous décrivez mais du conservatisme, c.à.d. quelque chose de congelé que l'on ressort du congélateur. C'est tout sauf la Tradition, qui est par définition est un organisme vivant.

Mais vous ne m'avez toujours pas dit dans quel but vous et vos coreligionnaires du XXIè siècle ont besoin de balancer à la figure des catholiques cette histoire de sac de Constantinople. D'ailleurs, je ne connais aucun catholique qui se glorifie de cette histoire et qui l'approuve. Alors pourquoi chercher des noises ?
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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Socrate d'Aquin » ven. 17 avr. 2020, 17:45

Nebularis a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 16:18
Cher Socrate d'Aquin,
Socrate d'Aquin a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 13:35
Vous conviendrez cependant que l'usage de la liturgie de saint Jacques est très minoritaire (et très éclaté, l'ordo grec étant, par exemple, très différent de l'ordo slavon).
Sans aucun doute ! Mais justement, ce pluralisme ne va-t-il pas à l'encontre de l'idée d'un impérialisme liturgique purement constantinopolitain, que vous semblez défendre ? :p
Cher Nebularis,

Je ne suis pas seul à déplorer ce pluralisme (ou plutôt cette anarchie) pour ce qui est de la liturgie de saint Jacques. Il en est un autre, un certain Jean-Claude Larchet, qui pense pareillement :
Il est à noter qu’une édition critique a été réalisée par Dom B.-Ch. Mercier et publiée dans le tome 26 de la Patrologia orientalis en 1950. Bien qu’inutilisable pour la pratique, cette édition savante devrait normalement pouvoir servir de référence pour l’élaboration d’une édition commune unifiée et fiable si les orthodoxes qui s’intéressent à ce sujet avaient le désir de collaborer et d’harmoniser leurs pratiques… Malheureusement, ici comme ailleurs, chacun fait sa « petite cuisine » dans son coin, sans indiquer clairement ce qu’il a aménagé, ce qui aboutit finalement à jeter le doute sur les différentes versions
Source : https://orthodoxie.com/recension-divine ... -francais/
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Nebularis » ven. 17 avr. 2020, 17:56

AdoramusTe a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 16:40
Je crois que je comprends.
Et moi, je crois que vous n'avez pas compris. S'il-vous-plaît, AdoramusTe, si vous voulez dialoguer avec moi, je vous invite à prendre en considération ce que je dis, et à ne pas parler à côté. Car ce que vous dites est à côté de la plaque.

Je l'ai dit et répété, il ne s'agit pas de se victimiser (ce n'est pas la question, les orthodoxes ont aussi massacré des Latins à d'autres occasions, inversant ainsi les rôles) ou d'attiser le ressentiment. Il s'agit de donner aux catholiques une idée de la manière dont certains événements historiques sont perçus, encore aujourd'hui. Avec une attitude comme la vôtre, la réconciliation est impensable, car vous réagissez de manière outrée et vous vous scandalisez que l'on puisse encore se souvenir d'événements aussi anciens. Pourtant ces événements ont eu un retentissement immense et sont indissociables de l'identité orthodoxe moderne. Lisez je vous en prie, ce que j'ai écrit ci-dessus à Suliko à propos de Constantinople, à propos de la perception de ce pillage par les orthodoxes, surtout si l'on compare cela à l'attitude des musulmans, pourtant ennemis déclarés de Byzance.

Si des orthodoxes avaient pillé Rome et s'étaient livré à des blasphèmes dans la basilique Saint-Pierre, serait-ce aussi un événement sans la moindre importance pour vous, quelque chose de congelé dont il ne faut pas tenir compte ?

Comment pouvez-vous dire que l'Histoire est quelque chose de congelé, de mort ? C'est vraiment manifester une profonde méconnaissance des dynamiques historiques. L'Histoire vit en chacun de nous, dans notre langue, nos villes, nos paysages, nos littératures : accepter cela n'a strictement rien à voir avec votre congélateur, objet d'ailleurs fort utile et qui ne mérite pas votre mépris.

Si je suis votre logique, il ne faudrait pas non plus se rappeler de la bataille de Poitiers ou du siège de Vienne de 1683, qui ont arrêté la progression de l'islam en Europe. Après tout, c'est de l'histoire ancienne, n'est-ce pas ? Et pourtant, si ces deux batailles avaient été perdues, vous seriez peut-être aujourd'hui musulman au lieu d'être catholique.

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Socrate d'Aquin » ven. 17 avr. 2020, 18:04

cmoi a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 15:04
Socrate d'Aquin a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 13:35
Je crois qu'il nous faut distinguer la doctrine de la théologie. Toutes les liturgies catholiques expriment la même foi, la même doctrine ; mais chacune le fait à sa manière, avec des accents propres (en soulignant davantage tel aspect de la foi par exemple, sans omettre le reste).
Je ne comprends pas cette distinction que vous faites.
Où situez-vous le désaccord entre Rome et ..disons Constantinople, catholiques et orthodoxes, en dehors de la question du pape et du filioque qui à mon sens serait aujourd'hui vite résolue (le Saint Esprit procède "du père et par le fils")?
En dehors des questions disons disciplinaires (annulation/divorce, mariage des prêtres, etc.) concerneraient-elles le rite (communion combien d'espèces, et quand, confirmation quand, baptême comment, calendrier liturgique, etc.)

Quand vous dites "liturgies catholiques" est-ce au sens large qui inclut les orthodoxes, ou étroit ?
Cela voudrait-il dire que pour vous la doctrine est la même, mais pas la théologie ? N'en est-elle pas le résultat pourtant ?
Je dis que chaque liturgie chrétienne exprime différemment le mystère chrétien. Par exemple, le rite romain aime condenser dans quelques formules précises (les oraisons) un contenu doctrinal très dense. Le rite byzantin au contraire est très prolixe.
Quand je parle des "liturgies catholiques", j'entends par là toute liturgie d'origine apostolique pratiquée (ou ayant été pratiquée) dans l'Eglise catholique jusqu'à aujourd'hui. Y compris la liturgie byzantine (qui est fondamentalement une liturgie catholique... ce que certains orthodoxes me contesteront peut-être, mais tant pis).
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Nebularis » ven. 17 avr. 2020, 18:18

Socrate d'Aquin a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 18:04
Quand je parle des "liturgies catholiques", j'entends par là toute liturgie d'origine apostolique pratiquée (ou ayant été pratiquée) dans l'Eglise catholique jusqu'à aujourd'hui. Y compris la liturgie byzantine (qui est fondamentalement une liturgie catholique... ce que certains orthodoxes me contesteront peut-être, mais tant pis).
Hum ! Pourriez-vous préciser ce dernier point, je vous prie ? :hypocrite:

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par Socrate d'Aquin » ven. 17 avr. 2020, 18:22

Nebularis a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 18:18
Socrate d'Aquin a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 18:04
Quand je parle des "liturgies catholiques", j'entends par là toute liturgie d'origine apostolique pratiquée (ou ayant été pratiquée) dans l'Eglise catholique jusqu'à aujourd'hui. Y compris la liturgie byzantine (qui est fondamentalement une liturgie catholique... ce que certains orthodoxes me contesteront peut-être, mais tant pis).
Hum ! Pourriez-vous préciser ce dernier point, je vous prie ? :hypocrite:
D'un point de vue orthodoxe (ou en tous cas de certains orthodoxes), le rite byzantin n'est pas "catholique" au sens courant du terme. C'est au contraire le rite romain qui était jadis un rite "orthodoxe" (mais certains orthodoxes ne semblent même pas partager cette opinion).

C'est pour cela que lorsque des chrétiens orthodoxes deviennent catholiques, on ne leur demande pas de modifier leur rite de quelque manière que ce soit. Au contraire, on leur demande de le préserver (sauf peut-être dans quelques détails du sanctoral).
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: Rite byzantin catholique

Message non lu par AdoramusTe » ven. 17 avr. 2020, 18:38

Nebularis a écrit :
ven. 17 avr. 2020, 17:56
Et moi, je crois que vous n'avez pas compris. S'il-vous-plaît, AdoramusTe, si vous voulez dialoguer avec moi, je vous invite à prendre en considération ce que je dis, et à ne pas parler à côté. Car ce que vous dites est à côté de la plaque.
Dites, vous êtes sur un forum catholique, donc c'est à vous en premier lieu de respecter les catholiques.
Je serai sur un forum orthodoxe, je serais certainement pas aussi bien accueilli que vous l'êtes ici.
Si je suis votre logique, il ne faudrait pas non plus se rappeler de la bataille de Poitiers ou du siège de Vienne de 1683, qui ont arrêté la progression de l'islam en Europe. Après tout, c'est de l'histoire ancienne, n'est-ce pas ? Et pourtant, si ces deux batailles avaient été perdues, vous seriez peut-être aujourd'hui musulman au lieu d'être catholique.
La différence est que lorsque je parle à un musulman, je n'ai pas le réflexe du lui rappeler la bataille de Poitiers.
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