La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

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diviacus1
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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par diviacus1 » sam. 04 juin 2022, 19:20

Bonsoir Perlum Pinpum et Xavi,
Je vous remercie pour vos messages.
Perlum Pimpum, la 1ère partie de votre message concerne la foi et la raison.
Je suppose, d’après votre conclusion, que le mot « foi » doit être compris comme l’a expliqué Xavi : c’est « la foi » de l’Église selon son enseignement officiel constant fondé. Si cette supposition est exacte, vous savez évidemment que je ne partage pas cette « foi ».
Je suis donc évidemment d’accord avec votre conclusion, et vous avez ma réponse explicite.
Dans la suite de ce sujet, j’emploierai le mot « foi » en écriture italique, comme Xavi quand le mot correspond à la définition précitée, et le mot « foi » en écriture romaine pour qualifier toute autre forme de foi chrétienne (j’essaierai de ne pas me tromper).
La 2ème partie est constituée de 5 points.
1- En remplaçant « foi » par « foi », je suis évidemment d’accord avec ce 1er point.
2- Je suis évidemment d’accord avec le 2ème point.
3- Je suis d’accord avec la logique du 3ème point. Je vais expliquer plus loin que je ne crois pas à cette possibilité.

4- A l’occasion de ce 4ème point, je vais clarifier mon opinion.
Mon opinion concorde avec ce que je vais appeler l’Opinion majoritaire. J’appelle Opinion majoritaire l’opinion exprimée par écrit par les spécialistes de l’histoire de l’Ancien Israël, globalement relayée par exemple sur Wikipédia. Les auteurs de cette Opinion majoritaire sont des historiens, archéologues et exégètes, ayant un haut degré d’expérience et de connaissances sur l’Histoire de l’Ancien Israël. Leur foi n’est pas un critère d’appartenance puisque on trouve dans ces auteurs des personnes dont la foi est le moteur de leur vie jusqu’à des athées purs et durs. Par définition, aucun de ces auteurs n’a la foi.
Sur ce sujet, je n’ai aucune opinion, ni aucun argument, qui ne fasse pas partie du corpus d’opinions sur différents sujets de cette histoire par l’Opinion majoritaire. Je ne suis qu’un (piètre) relayeur de cette Opinion majoritaire.
Mon faible niveau de connaissances par rapport aux spécialistes fait que je comprends certains sujets, et que je n’en comprends pas d’autres (par exemple les études de textes qui présupposent une connaissance approfondie de l’Hébreu, voire d’autres langues sémitiques). Mais mon expérience d’historien me fait croire a priori à cette Opinion majoritaire, sachant que cet a priori ne pourrait évoluer en conviction qu’après avoir étudié une très grande partie de ces arguments.
J’ai déjà expliqué pourquoi je n’en ai pas la possibilité. Aucun historien ne s’est lancé dans l’examen de tous les indices jugés hautement vraisemblables et contraires aux textes de la Bible, et je suis persuadé qu’aucun ne le fera, car aucun n’aura un mobile assez puissant pour y passer toute une vie.

Comme je l’ai déjà dit, il y a une différence fondamentale entre l’histoire de l’Ancien Israël et celle des autres pays anciens du pourtour méditerranéen. Elle transparaît à 2 niveaux :

- L’approche globale

On peut lire dans La Bible – une histoire contemporaine, des textes écrits par 9 auteurs différents, auteurs de l’Opinion majoritaire, relatifs aux dates d’écriture de la Bible. J’en trouverais sans doute des dizaines d’autres dans d’autres documents, et certainement plus sur l’Exode (toutes dates av. J.-C.) :
F. Boyer (p.24) : La composition de la Bible s’étend sur près de 1000 ans, depuis le VIIIe siècle…
M. Liverani (p.36) : Puis il y a les traditionnalistes radicaux qui croient encore que le Pentateuque remonte à l’époque de Moïse…
I. Finkelstein (p.40) : …VIIe siècle, époque ou fut écrite l’histoire deutéronomiste…
P. Gibert (p.76) : Comment ces différents facteurs ont-ils conduit à imposer le retour d’exil pour l’élaboration des livres et des principales figures de l’Ancien Testament.
Y. Volokhine (p.89) : … lors de la conception, au Ier millénaire des textes bibliques.
J.-L. Fissolo (p.101) : … on ne peut que conclure à une première strate rédactionnelle de la geste biblique au VIIe ou au VIe siècle…
T. Römer (p.123) : Epoque monarchique (VIIIe – VIIe siècle) : Les plus anciens matériaux de la future Bible sont mis par écrit.
P. Abadie (p.131) : … quand sont mis par écrit les récits de la genèse, sous la domination perse, aux Ve-IVe siècles.

Ce que je veux mettre en avant, est le fait que ces auteurs se dispensent de précautions oratoires ou au moins d’un résumé des principales raisons qui leur permettent d’écrire ces affirmations (au-delà de certaines divergences de dates que certains ne manqueront pas de relever ;)). Ces auteurs s’en dispensent car ils sont persuadés que les faisceaux d’indices hautement vraisemblables expliqués dans des documents antérieurs sont suffisants pour ne même pas prendre des précautions de langage.

Par ailleurs, on trouve sans doute des milliers de documents dans lesquels il est écrit que Moïse a écrit le Deutéronome, sans précautions de langage, puisque c’est l’enseignement constant de l’Église, et, éventuellement avec comme raisons complémentaire ou supplémentaire que les faisceaux d’indices précités ne sont pas jugés suffisamment vraisemblables.
Ma question est : existe-t-il un autre pays dont un élément fondamental de l’histoire ancienne peut être raconté de façon aussi contradictoire ? Ma réponse est non, mais je suis preneur d’autres exemples.
(j’aimerais une réaction sur ce point)

Nous sommes donc, sur ce sujet, dans l’un de ces deux mondes parallèles. [Il existe (malheureusement) un troisième monde, très largement majoritaire, qui n’en a rien à faire ou qui n’a pas le niveau de connaissances suffisant pour avoir le moindre avis sur l’une au l’autre de ces affirmations]

- L’approche détaillée

L’approche détaillée consiste à examiner les faisceaux d’indices. Cette méthode fonctionne très bien dans tous les domaines de l’histoire, sauf dans l’histoire de l’Ancien Israël. J’ai expliqué globalement pourquoi dans mon message précédent. Prenons l’exemple des chameaux mentionnés dans la Genèse évoqué par Xavi.

L. Grabbe (2007, p.53) classe cet indice dans les indices anachroniques et donne les avis suivants :
- W. Albright (maximaliste) considérait que c’était effectivement un anachronisme et que Abraham devait utiliser des ânes.
- Gordon et d’autres conservateurs considéraient que la domestication des chameaux était antérieure.
- Les plus récentes preuves montreraient que le chameau n’a pas été domestiqué avant l’Âge du Fer (1200 av. J.-C.) :
Finkelstein (2001) considère cet indice comme un anachronisme révélateur : « L’histoire des patriarches est pleine de chameaux, par troupeaux entiers. Quand ses frères vendent Joseph en esclavage, ce sont des chameaux qui transportent les marchandises de la caravane. Or l’archéologie révèle que le dromadaire ne fut pas domestiqué avant la fin du IIe millénaire et s’il ne commença à être couramment employé comme bête de somme au Proche-Orient que bien après l’an 1000. L’histoire de Joseph contient d’ailleurs un détail des plus révélateurs : la caravane de chameaux transporte de la gomme adragante, du baume et du ladanum. Cette description correspond, de façon évidente, au commerce de ces mêmes produits, entrepris par les marchands arabes sous la surveillance de l’Empire assyrien, aux VIIIe et VIIe siècles. »
Wapnish (1997), Zarins (1978), et Na’aman (1994) retiennent eux aussi cet anachronisme.

Depuis l’ouvrage de L. Grabbe, il y a eu notamment 2 archéologues israéliens qui soutiennent que des chameaux domestiqués ne sont par arrivés au Levant avant le Xe siècle. Voir https://www.francetvinfo.fr/decouverte/ ... 27029.html.

Un site biblique (probibliste) donne la référence de plus de 20 ouvrages traitant au moins partiellement de la question.

Un article de M.Heide (2010) conclut (temporairement ;) ) que la domestication du chameau de Bactriane aurait eu lieu autour du IIe millénaire, que la domestication des dromadaires aurait eu lieu au cours du IIe millénaire mais que son usage important pour le transport ne se serait développé que plus tard. La dernière phrase est « Après tout, seules des découvertes archéologiques additionnelles et des inscriptions permettront d’avoir une meilleure idée du rôle du chameau au Proche-Orient avant le 1er millénaire ». Sa bibliographie contient plus de 200 entrées.
Ma recherche a duré une petite heure. Si les Patriarches, par exemple, étaient mon sujet de recherche, au vu de cette petite enquête j’y passerai sans doute au moins une centaine d’heures.

Qu’en conclure :
- L’indice des chameaux est retenu comme un indice important et vraisemblable par les auteurs de l’Opinion majoritaire, au moins jusqu’à 2007 (je considère L. Grabbe, très modéré, comme un représentant majeur et fiable de cette école).
- Des conservateurs considèrent cet indice comme faux.
- Il y a donc une opposition nette entre les auteurs de l’Opinion majoritaire et les conservateurs (même si Albright, mais plus ancien, va dans le sens de l’opinion majoritaire).
- Depuis 2007, deux études montreraient que l’usage important de chameaux du temps des patriarches est peu vraisemblable, mais l’étude de 2010 considère que cette conclusion n’est que temporaire.
- Un avis plus affirmé nécessiterait des centaines d’heures.
- J’ai le sentiment qu’un consensus serait obtenu si ce sujet n’interférait pas avec la Bible. Mes lectures plus anciennes, , ou les chiens) sur les domestications d’autres animaux (par exemple sur les chevaux ou les chiens) ne me donnent pas du tout l’impression d’une opposition entre 2 écoles.
- Je suis incapable d’avoir une position très tranchée, mais en fonction de ces quelques petits résultats, je fais confiance à l’Opinion majoritaire.
- Xavi a exprimé son opinion et envisagé la piste d’une mauvaise traduction ou interprétation.

Pour des raisons différentes, Xavi et Albright arrivent à des conclusions voisines : ce ne sont pas des chameaux (Albright, convaincu que c’était un anachronisme) mais des ânes; ce sont peut-être tout simplement des bêtes de somme et la traduction en chameaux résulte peut-être d’une réécriture ultérieure. (Xavi, je n’ai vu cette hypothèse nulle part. Est-elle de vous ou reprenez-vous une idée déjà exprimée ? – juste par curiosité).

En tant que chercheur sur le sujet des Patriarches, ma première idée serait évidemment d’y passer suffisamment de temps pour avoir les idées plus claires. En tant que chercheur, Albright a trouvé un moyen de résoudre la difficulté de l’anachronisme en imaginant tout simplement qu’il ne s’agissait pas de chameaux mais d’ânes (à l’époque où il a écrit, il n’avait pas à sa disposition les études sur les chameaux dont on dispose aujourd’hui). Xavi a trouvé un moyen de résoudre la difficulté en imaginant une mauvaise traduction (je ne peux évidemment pas vous en vouloir de ne pas avoir passé 100 heures sur le sujet).
Une information, anecdotique mais révélatrice : Gordon, l’un des conservateurs qui considéraient que la domestication du chameau était antérieure aux Patriarches, a expliqué en 1986 que si Albright avait remplacé les chameaux par des ânes parce qu’il détestait les chameaux et adorait les ânes (véridique !). Gordon a donc voulu annihiler l’opinion d’un autre conservateur (traître à son école !!!) en trouvant une autre explication.

Albright, Xavi et Gordon auraient-ils été chercher leurs explications s’ils n’avaient pas été conservateurs voulant protéger le texte de la Bible sans utiliser l’argument final de l’opposition à l’enseignement permanent de l’Église ? Je ne le pense pas.
C’est une illustration, pas une démonstration, de l’impossibilité de consensus sur un sujet touchant à la Bible.

Mon exposé n’est évidemment qu’une ébauche au bout d’une recherche très limitée sur un sujet que je n’ai pas choisi.
Mais ce que je veux illustrer, c’est que pour chacun des centaines d’indices à étudier, il est possible, sans aller jusqu’à l’argument final, de trouver des voies de contester la haute vraisemblance d’un indice : ce n’est pas impossible, c’est une mauvaise traduction, l’identification du site archéologique n’est pas suffisamment attestée…
Ces arguments n’apparaissent pas, en tous cas pas de façon permanente, dans les discussions des histoires des autres pays méditerranéens.

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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par Perlum Pimpum » sam. 04 juin 2022, 21:03

Bonsoir Div,

Au vu de ce que vous venez d'écrire, quelques remarques.

1. Vous dites n'avoir pas les compétences d'un historien, et vouloir vous conformer à l'opinion majoritaire de ceux qui sont historiens. Bref, vous excipez de la preuve testimoniale, qui suppose l'autorité du témoin (critère de science et critère de véracité). La pluralité des témoins jointe à leur niveau de compétence est certes à même de fonder la certitude morale, c'est à dire de tenir comme objectivement certain le fait énoncé, ce à raison de l'autorité des témoins : le fait est extrinsèquement évident car les témoins probes et compétents, ici les historiens de métier, témoignent (enseignent) le fait sans qu'il y ait lieu de douter de leur science.

2. Sauf que... Comme vous l'avez vous-même exprimé, il ne s'agit que d'une opinion majoritaire, de sorte qu'existe une opinion minoritaire, relevant du jugement d'autres historiens compétents, qui contredit la première. Le consensus des savants n'existe donc pas, ce qui suffit à considérer que le faisceau des indices qu'ils réunissent n'est pas probant.
[+] Texte masqué

Vous avez cherché à contourner la difficulté en affirmant que 95% des historiens partageraient l'avis majoritaire. Mais interrogé ensuite sur ce point,vous avez loyalement admis que le chiffre sortait de votre chapeau ; ce qui de soi devrait vous alerter sur ce qui suit. Vous croyez en la thèse majoritaire, non parce qu'elle est unanimement défendue (elle ne l'est pas), non parce qu'elle serait incontestable (elle est contestée par l'opinion minoritaire), mais parce que vous voulez y croire.

Et avant d'aller plus loin, permettez moi cette question : d'où tenez-vous que l'opinion que vous qualifiez de majoritaire parmi les spécialistes soit réellement majoritaire ? Si votre source d'information est le Wiki, vous permettrez qu'on doute de son contenu (il est notoire qu'en nombre d'articles, l'incompétence et le parti-pris foisonnent). Bref, à vous lire, j'ai l'impression de lire une profession de foi : « je crois en l’inexistence historique d’Abraham ». Soit.

Somme toute, tout acte de foi (avec ou sans italiques) est un acte d'assentiment intellectuel commandé par la volonté ; aussi, même à ce que les motifs de crédibilité (l'opinion supposée majoritaire) soient suffisants pour éviter que votre foi (sans italique) en l'inexistence d'Abraham ne soit déraisonnable, cela ne suffit pas à en faire un fait scientifiquement démontré.
3. Reste donc à se pencher sur les quelques indices que vous nous exposez. Votre argument s'appuie sur l'anachronisme des chameaux. Mais d'une, cet anachronisme est douteux au regard de l'opposition, mentionnée par vous, des spécialistes sur ce sujet. De deux, même à supposer qu'existerait un véritable consensus scientifique solidement étayé, ou par des indices hautement vraisemblables, ou mieux encore par des démonstrations prouvant l'absence de chameaux en cette région à l'époque supposée d'Abraham, on aurait la preuve de l'anachronisme, nullement celle de l'inexistence d'Abraham. Bref, que le rédacteur biblique, écrivant plusieurs siècle après l'existence réelle ou supposée d'Abraham, ait introduit un anachronisme - à supposer l'anachronisme - en le faisant voyager à chameaux, n'est pas à même de prouver l'inexistence d'Abraham, mais seulement l'inexistence du chameau, ce qui n'est pas la même chose.

:rire:

4. Qu'un faisceau s'appuyant sur de tels indices ne puisse démontrer l'inexistence d'Abraham, tous peuvent donc l'aisément comprendre.

;)
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par diviacus1 » sam. 04 juin 2022, 21:13

Bonsoir Perlum Pimpum,

J'ai lu rapidement votre message.
Ou je me suis très mal exprimé, ou vous avez répondu trop rapidement, mais les 4 points de votre message ne correspondent pas du tout à ce que j'ai voulu exprimer. Je ne répondrai évidemment pas ce soir.
Bonne soirée.

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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par Xavi » sam. 04 juin 2022, 21:29

Bonsoir Diviacus,

Je n’aperçois pas ce qui pourrait encore être dit d’utile sans répétition en ce qui concerne la première partie de votre courrier, mais votre approche détaillée de la question des chameaux est intéressante.

Nous avions déjà échangé des réflexions à ce sujet en janvier 2016 dans un fil sur la généalogie de Jésus :
viewtopic.php?f=91&t=40381&p=340574&hil ... ux#p340574

diviacus1 a écrit :
sam. 04 juin 2022, 19:20
- L’approche détaillée

Prenons l’exemple des chameaux mentionnés dans la Genèse évoqué par Xavi.

- Xavi a exprimé son opinion et envisagé la piste [que] la traduction en chameaux résulte peut-être d’une réécriture ultérieure. (Xavi, je n’ai vu cette hypothèse nulle part. Est-elle de vous ou reprenez-vous une idée déjà exprimée ? – juste par curiosité).
Sur ce détail particulier, je ne pourrais pas vous répondre avec certitude.

Mon habitude de fréquenter souvent le texte hébreu et les multiples sens différents d’un même mot, autant que mes lectures et réflexions sur l’écriture et son évolution nourrissent mes recherches depuis longtemps et il est parfois très difficile de retrouver les sources dans mes notes anciennes.

Il est possible que mon explication concernant l’argument des chameaux soit personnelle. Vous m’apprenez l’opinion d’Albright que je ne connaissais pas mais qui rejoint ce que je pense.

diviacus1 a écrit :
sam. 04 juin 2022, 19:20
- Xavi a exprimé son opinion et envisagé la piste d’une mauvaise traduction ou interprétation.
… Xavi a trouvé un moyen de résoudre la difficulté en imaginant une mauvaise traduction
Non, je n’ai pas exprimé cela, car rien ne me semble permettre d’affirmer que la traduction par le mot « chameau » du mot hébreu du texte massorétique serait une « mauvaise » traduction ou interprétation.

Une traduction est bonne lorsqu’elle fait comprendre le sens du texte original à celui qui le lit dans une autre langue.

Beaucoup de lectures fondamentalistes oublient d’en tenir compte.

Si, par exemple, au deuxième siècle avant Jésus-Christ, les bêtes de somme connues étaient des chameaux et que l’on ignorait ce qu’étaient les bêtes de somme mille ans plus tôt, le mot « chameau » pouvait être correct dans un récit datant de mille ans.

Le vocabulaire s’est affiné au fil du temps et la traduction a dû tenir compte du sens moins précis des écrits plus anciens, a fortiori pour des textes écrits avec des consonnes sans les voyelles.

Il me semble que cela risque quasiment de dévaloriser tout argumentaire qui serait basé uniquement sur des discussions d’un mot commun ou d’un nom propre.

La traduction peut nous tromper lorsque nous attribuons à un mot un sens trop précis. Le cas des chameaux en est un bon exemple. Le but du traducteur pouvait être de se faire comprendre en utilisant les images et les faits connus de son époque.

Tout l’intérêt de mes recherches actuelles dans le contexte de Ur au début du deuxième millénaire c’est, notamment, de retrouver le sens concret que les réalités pouvaient avoir dans le contexte de l’époque à partir des mots du texte hébreu actuel. Essayer de retrouver ce qu’ont pu être des récits primitifs en tenant compte du contexte réel que l’archéologie permet de découvrir de mieux en mieux.

diviacus1 a écrit :
sam. 04 juin 2022, 19:20
Albright, Xavi et Gordon auraient-ils été chercher leurs explications s’ils n’avaient pas été conservateurs voulant protéger le texte de la Bible sans utiliser l’argument final de l’opposition à l’enseignement permanent de l’Église ? Je ne le pense pas.
C’est bien vrai. Sans le moteur de la foi dans l’enseignement de l’Église, qui s’intéresserait à retrouver les récits primitifs et leur sens réel.

Lorsque vous me dites que, selon les historiens, il n’y avait pas de chameaux, je me plonge dans le texte hébreu et dans le sens que le mot pouvait avoir. Je découvre son imprécision et, en cherchant à comprendre, je pense au travail difficile des traducteurs interprètes.

Voyez, par exemple, les Hébreux en Égypte. Si vous donnez à ce mot son sens postérieur, vous ne pouvez comprendre comment Abraham pouvait être un hébreu avant l’existence d’Israël, et vous ne pouvez comprendre l’usage évolutif du même mot (qui vient de l’akkadien apirou) Hyksos, apirous, shosous et hébreux, les liens sont subtils entre ces mêmes mots liés entre eux de diverses manières et avec des précisions variables.

On part du simple nomade (l’apirou ou l’hébreu primitif), on le confond ou on le distingue avec le nomade égyptien (le shosou), on le confond ou on le distingue avec les migrants venus d’Asie en Égypte (hyksos).

diviacus1 a écrit :
sam. 04 juin 2022, 19:20
C’est une illustration, pas une démonstration, de l’impossibilité de consensus sur un sujet touchant à la Bible.
Mais, non !

Je suis désolé de ne pas parvenir à vous convaincre du contraire. Votre réflexion sur les chameaux montre que nous pouvons parfaitement avancer ensemble lorsque nous réfléchissons à un détail précis.

Pourquoi, sur la question des chameaux, ne pourrions-nous arriver à des consensus ?

Il me semble que ce sont souvent les sceptiques qui ont peur de tels consensus qui risquent à leurs yeux d’augmenter la crédibilité de la Bible.

Vous connaissez mon opinion sur le mot hébreu « shaneh » utilisé dans le Pentateuque que nous traduisons par « années ». C’est le sens que nous donnons à cette mesure du temps qui crée des problèmes insolubles. Sur ce point mon raisonnement est similaire à celui concernant les chameaux.

Si vous lisez que Sarah est âgée de 90 ans (Gn 18, 17) lorsqu’Abraham se rend en Egypte (Gn 20, 1-4), comment comprendre qu’Abimélec était amoureux d’elle au point qu’Abraham l’ai fait passer pour sa sœur parce qu’il avait peur d’être tué ?

En années sumériennes (d’une durée de 182 jours entre les équinoxes), cela fait 45 années de 365 jours.

Si vous lisez dans les nombres que les soldats avaient 20 ans au moins, comment comprendre cette dispense des jeunes gens de 18 et 19 ans ?

En années sumériennes de 182 jours, ils étaient soldats à partir de 10 années de 365 jours, probablement dès leur puberté (Nb. 1, 20).

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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par diviacus1 » sam. 04 juin 2022, 22:03

Juste un complément sur le sujet des chameaux.
J'ai oublié de consulter ce qu'en disait Kitchen. Je viens de le faire. Il en parle pp. 338-339 de son livre. Il livre quelques exemples d'os de chameaux retrouvés dans différentes circonstances, donne 3 références de textes de la Bible où les chameaux sont mentionnées en tant qu'animaux utilisés pour le transport... et ne dit pas un mot ni de la domestication du chameau ni de son utilisation en tant qu'animal de transport. Il conclut que les exemples donnés indiquent que le chameau a été pendant longtemps un animal marginal dans l'histoire du Proche Orient ancien (Egypte incluse), mais qu'il n'était pas totalement inconnu ou anachronique.
Il ne répond donc pas du tout à la question.
Ce qui est jugé anachronique par l'Opinion majoritaire n'est pas l'existence du chameau, c'est sa domestication et bien plus encore son utilisation en tant qu'animal de transport.
Par rapport aux 3 argumentation de fondamentaux que j'ai citées, il faut donc ajouter celle-ci qui est en fait encore différente : c'est l'oubli, volontaire ou involontaire de traiter le sujet. Très décevant de sa part.

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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par diviacus1 » dim. 05 juin 2022, 7:06

FR, 05/06/2022

Chers Xavi et Perlum Pinpum,

Cette discussion me "prend le chou" et je pense que vous avez la même sensation. Nous n'avançons pas, je n'ai pas encore d'accord implicite sur le 1er point de l'explication de la règle n°1 (mais quand même un accord implicite de Xavi dans son dernier message) et je n'ai pas répondu à de très nombreuses observations que vous m'avez faites. J'ai passé beaucoup plus de temps que le temps que je m'étais alloué pour discuter de ce sujet, sans avancée significative. Je vais devoir dès demain arrêter d'y passer autant de temps, et si les conditions sont réunies, continuer cette discussion mais à un rythme beaucoup plus lent.
Je suis certainement responsable en partie de cet état de fait. Je pense que le seul moyen qui nous permettrait d'avancer, lentement mais sûrement, serait de n'aborder qu'un sujet à la fois et de ne passer au suivant qu'une fois que nos positions sont très claires, à défaut d'accord.

En préambule, je vous donne le lien suivant. Il est fait pour illustrer le fait qu'il est parfaitement possible d'avoir une discussion sereine sur un sujet hautement polémique. Il concerne une discussion sur le forum Passion Histoire, sur un sujet d'archéologie très hautement polémique dans l'opinion publique : l'dentification du site d'Alésia : http://www.passion-histoire.net/viewtop ... l%C3%A9sia

Le premier message rappelle que c’est un sujet hautement polémique.
L’essentiel du sujet est ensuite rappelé.
Je propose (message du 17/11/2020 19h02) de ne citer que des commentaires d’archéologues diplômés (une variante de la règle n°2). Cette règle est acceptée et presque complètement appliquée.
La discussion se termine très vite puisque personne n’est capable de fournir une référence d’un professionnel contredisant l’Opinion majoritaire, en dehors du livre de Danielle Porte que j’ai gentiment proposé de mettre dans les références d’archéologues diplômes alors que ce n’est pas le cas, mais qui est rejeté à juste titre par Batiste.
La règle n°1 est ici hors sujet et la règle n°3 est bien appliquée.

Après ce préambule, je pose les questions suivantes :
1- Êtes-vous d’accord pour appliquer cette démarche lente (un seul sujet à la fois, et on passe au sujet suivant quand nos positions sont claires et bien comprises) ?
1.1 – Si vous en êtes d’accord, on peut alors passer au sujet suivant qui est : Êtes-vous d’accord que la communauté des historiens se met la plupart d’accord sur l’essentiel de l’histoire ancienne des pays du pourtour méditerranéen ?
1.2 – Sinon, avez-vous une autre démarche à appliquer ?

Tous vos commentaires sont bienvenus.

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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par diviacus1 » dim. 05 juin 2022, 7:49

Précision importante : j'ai évoqué le sujet du lien en préambule pour montrer qu'une discussion sereine était possible même sur un sujet polémique.
Je reprendrai cet exemple dans le cadre du point suivant si nous franchissons la première étape, et les questions relatives à cet exemple, s'il y en a, pourront être alors discutées.

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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par Xavi » dim. 05 juin 2022, 18:30

Cher Diviacus,

diviacus1 a écrit :
dim. 05 juin 2022, 7:06
Cette discussion me "prend le chou" et je pense que vous avez la même sensation.
Non, pas du tout. Les difficultés me semblent normales compte tenu de la difficulté et de la sensibilité du sujet. Mais, j'ai beaucoup apprécié vos apports et ceux d'autres dont Perlum Pimpum sur le sujet en cause qui me semble d'un grand intérêt.

diviacus1 a écrit :
dim. 05 juin 2022, 7:06
il est parfaitement possible d'avoir une discussion sereine sur un sujet hautement polémique.
Oui, en effet.

Pour le surplus, vous êtes le bienvenu dans ce fil de réflexion quand vous le voulez, au rythme que vous voulez et aux conditions que vous voulez.

Je vous ai exprimé mes approches personnelles par rapport aux conditions qui vous tiennent à cœur, mais vous comprendrez qu’il ne vous appartient pas d’imposer vos conditions à d’autres que vous-même.

Dans les limites normales de ce forum, chacun est libre d’intervenir comme il le souhaite et de la manière qu’il souhaite.

Rien ne vous oblige à venir répondre, ni a fortiori à bref délai, à l’une des diverses questions ouvertes ici. Le cas échéant, je me réjouirai de lire vos contributions lorsque vous les jugerez opportunes selon votre libre appréciation.

Et chacun restera libre des suites à donner à ce fil.

Quoi qu’il en soit, merci déjà pour les nombreux échanges constructifs que vous avez permis et alimentés dans ce forum depuis des années.


NB : L’ensemble de mes réflexions concernant l’historicité d’Adam et Ève et du livre de la Genèse a été développé dans une synthèse réactualisée ce 24 mai 2023, sous le titre « Un jardin dans l’Eden », disponible en pdf dans la section Théologie de ce forum sous l’intitulé « Évolution, création, incarnation : un livre à télécharger » :
https://www.cite-catholique.org/viewtop ... 92&t=20369

diviacus1
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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par diviacus1 » dim. 05 juin 2022, 22:12

Bonsoir Xavi,
Je vous remercie pour votre gentil message.
Après réflexion, je pense qu’il est préférable que je n’intervienne plus dans ce fil, ce qui aura l’avantage de vous permettre de discuter sereinement de l’Abraham biblique.
Je reprendrai les idées que je voulais développer, un jour, peut-être, dans un fil plus adapté.

Trinité
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Re: La réalité historique d'Abraham à Ur, en Chaldée

Message non lu par Trinité » lun. 06 juin 2022, 0:41

Bonsoir diviacus 1

Je n'ai pas participé à ce fil, mais je ne peux m'empêcher à la suite de cette réflexion, de louer votre gentillesse et votre charité cher diviacus !
Quel exemple! :clap:
Merci.

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