Bonjour Joseph-Diego,
Pour avoir parcouru ces dernières années un chemin de discernement vers une vocation, et ce pour encore quelques années, je vous conseille d'écouter ce que dit Foxy concernant le discernement d'une vocation et le suivi spirituel.
Je pense également que le diacre que vous rencontrez a déjà œuvré en ce sens. Mais le suivi spirituel est quelque chose de tout à fait officiel et dans un but précis : celui de dépasser nos craintes, nos à priori, nos certitudes en passant par un discernement extérieur à nous même et par quelqu'un de compétent. Ce n'est pas une simple causerie, c'est un chemin et souvent un chemin pour les deux.
Passons maintenant à votre demande première.
Joseph-Diego a écrit : ↑mer. 20 nov. 2019, 18:13
Comment se sentir utile dans sa vocation contemplative ?
Il y a des actifs mais aussi des contemplatifs. Leur utilité n'est pas forcément visible et là vous avez raison concernant l'esprit du monde. Car cet esprit veut des résultats, des preuves de notre efficacité etc... hors ce n'est pas nous qui agissons mais nous ne sommes que des relais qui permettent à l'Esprit de Dieu d'agir. Aussi l'important n'est pas qu'est ce que je peux faire POUR Dieu, mais AVEC Dieu.
La vie contemplative aux yeux de ce monde peut paraître inutile, mais c'est tout le contraire. Elle est comme l'oxygène dans l'air : invisible mais essentielle au monde. Car si vous pratiquez la Liturgie des heures vous savez bien qu'on ne prie pas pour soi-même mais pour l'Eglise et le monde. Hors quoi de plus utile que de prier pour ceux qui n'en ont pas ou plus la force, pour ceux qui ne prient pas, pour offrir nos prières comme un sacrifice pour ceux qui en ont le plus besoin ?
Je lis avec émerveillement tous ces livres, ces témoignages de chrétiens fondant des écoles, aidant les malades, vouant leur vie à aider leur prochain . J'essaie parfois de faire des projets moi aussi, je cherche dans quelle association je pourrai m'engager par exemple, mais très vite je reviens à la même conclusion ; ceci n'est pas mon appel.
Et vous avez raison, à chacun son appel.
Certains sont voués à un héroïsme extraordinaire comme les grands saints et d'autres, que je nommerai maladroitement les petits saints, à un héroïsme ordinaire dans le quotidien de leur vie.
Il ne s'agit pas de vouloir être extraordinaire, ce qui nous ramènerait à nous-même, mais à répondre à la vocation que Dieu souhaite pour nous, car sachant mieux que nous ce qui est bon pour nous.
J'ai un besoin de solitude bien au delà de la norme, les interactions sociales même positives, m'épuisent à grande vitesse...
Ma vocation se trouve dans la prière et la contemplation, c'est une évidence depuis bien longtemps, avant même de me convertir.
J'ai fait des choix de vies pour pouvoir la réaliser, je suis volontairement célibataire, vivant reculé du monde, et je vis autant que possible au rythme de la liturgie des heures suivant l'Office monastique.
Si vous aviez une vocation monastique elle est à discerner.
Il existe en effet auprès des diocèses un service des vocations, vous pouvez demander à rencontrer quelqu'un, mais avant tout en avez vous parlé à votre Curé ? Celui-ci peut dans un premier temps désigner une personne qui vous suivra spirituellement (laïque ou clerc) mais dans son discernement la mieux adaptée à cette mission, et qui pourrait ne pas être celle que vous escomptiez.
Cette personne peut même être désignée par le diocèse, ou on peut même (comme pour moi en son temps) vous demander à faire une retraite spirituelle de discernement selon les exercices de St Ignace. Retraite en silence de 10 jours (qui devrait vous convenir) par des pros en la matière : les Jésuites (par exemple à Clamart près de Paris ou à Francheville près de Lyon - Le Châtelard -, mais il existe d'autres centres).
Il existe aussi des communautés de spiritualité Ignacienne (Puits de Jacob, CVX France ...) plus proche de chez vous qui propose ce type de retraite.
Pourtant - et c'est sûrement notre société actuelle qui me fait penser ça -, j'ai l'impression de vivre ainsi une vie égoïste, en plénitude avec Dieu, tandis que tant de personnes ont besoin d'aide et d'actions concrètes.
Alors j'ai trouvé une chose pour calmer mes pensées, je distribue des évangiles partout où je peux : églises, boîtes à livres, boîtes aux lettres etc.
J'aide financièrement quand je peux également, mais je veux toujours faire plus...
Attention, un acte généreux doit être discerné également car tout n'est pas inspiré par l'Esprit Saint, même dans la générosité.
Comme tomber dans ce qu'on nomme le syndrome du sauveur et qui peut aboutir à des injustices, envers vous-même pour commencer.
Mon problème est que j'ai bô connaître l'importance des vocations contemplatives pour le monde, mon esprit humain préfère les preuves concrètes d'aide qu'apporte la vocation apostolique.
Quand nous participons à l'éducation d'enfants, lorsqu'ils deviennent grands et indépendants, et qu'ils sortent de la pauvreté, la réussite de notre mission se voit physiquement parlant.
Il est alors facile d'être encouragé à continuer, d'avoir l'impression d'être utile.
Ceci est dû à l'esprit du monde, car le résultat ne nous appartient pas. De plus il ne sera pas forcément celui que nous souhaitons.
Vouloir un résultat, de préférence le nôtre, reste du "je" et donc du "pour" Dieu et non "avec" Dieu.
Je ne veux surtout pas vous décourager mais vous aider à vous rendre compte de la subtilité de ce piège.
Je vous invite à lire "
Gaudete et Exultate" sur l'appel à la Sainteté dans le monde actuel.
Ainsi que le chapitre 2 de "
Evangelii Gaudium"sur les tentations des agents pastoraux.
Vous y trouverez des pistes, et qui sait des réponses, des plus intéressantes.
En revanche, pour ce qui est de quelqu'un dont la mission est de prier chaque jour pour le monde, pour les âmes perdues etc, la réussite ou non de sa mission ne lui sera révélée qu'après la résurrection...
Quelle difficulté que de prier sans cesse sans jamais savoir si nos œuvres portent des fruits !
Aucune prière n'est inutile, soyez en convaincu et vous ne chercherez plus à avoir des signes de l'efficacité de la prière.
Rien pour flatter l'égo, pour motiver le cœur... Je suis comme un bâtisseur d'église au Moyen-Âge, qui mourrait avant de savoir si les pierres qu'il avait posé toute sa vie allaient tenir le coup une fois l'édifice terminé ou si tout allait s'effondrer avant.
Quand on travaillait sur un chantier s'étalant sur plus de 20, 30, 40 ans, on prenait le risque de passer sa vie à travailler pour quelque chose dont on ne verra jamais l'aboutissement.
Eh oui, que le lâcher prise est difficile. Conséquence de cette société de l'immédiateté.
C'est beau je trouve, surtout si c'est un travail pour Dieu, mais mon esprit humain est faible face à ça, face à ce manque d'encouragement que produit la satisfaction de savoir qu'on a réussi.
La vocation de vie contemplative, c'est marcher vers Dieu les yeux fermés, c'est accepter de renoncer au plaisir de savoir à l'avance si nos graines semées porteront du fruit.
Comment malgré tout, rester constamment dans son appel, avec la même ardeur, celui de vouloir, en s'éloignant du monde, s'en approché encore plus au point de vouloir en aimer et sauver chaque âme, ces âmes inconnues qui jamais ne pourront nous dire si nos prières ont été utiles ou non ... ?
C'est pourquoi je vous propose de lire Evangelii Gaudium, je ne résiste pas à l'envie d'en publier une très courte phrase : "
Ne nous laissons pas voler l’enthousiasme missionnaire !"
Merci de m'avoir lu
Ce fût avec grand plaisir. Je vais vous faire une confidence, publique dommage, mais dans votre parcours je retrouve grandement celui que j'ai traversé. Peut être le fais-je maladroitement, mais mes réflexions n'ont pour seul but que de partager une expérience similaire. Même si chaque chemin est unique, il arrive que des épreuves se ressemblent.
Bien fraternellement.