cmoi a écrit : ↑ven. 23 avr. 2021, 16:41
Nicolas,
Il me semble que votre contribution tombe un peu à côté du sujet tel que Stéphane l’aborde, et qui certes reprend un argument que j’avais quant aux conséquences d’une certaine contraception.
Cette conséquence, due à l’emploi d’un médicament qui peut avoir un rôle médical en cas par exemple de règles trop douloureuses, quand il est fait à titre seulement de contraceptif, n’a plus de connotation « médicale » et rien n’excuse ni ne justifie les effets indésirables qu’il produit et qui relèvent d’un acte en soi peccamineux de ce fait.
Je vais néanmoins vous répondre sur le fond, car cela permet aussi d’avancer dans la suite de ma contribution précédente qui posait un cadre à ne pas oublier.
Pour reprendre ma comparaison avec les jeux d’argents : s‘en remettre au hasard pour gagner de l’argent n’est pas un péché (à une époque on disait que si ! Le CEC ne le dit clairement plus...) mais reste philosophiquement immoral. Néanmoins si cela permet un profit qui sera utilisé pour « sauver » un enfant de je ne sais quoi... qu’y redire !
nicolas-p a écrit : ↑ven. 23 avr. 2021, 9:46
L'église s'oppose à toute contraception car elle ferme toute possibilité de don à la vie.
C’est en effet le discours tenu officiel mais il n’est pas 100 % objectif et ne traite pas le sujet exhaustivement, c’est un raccourci qui « présente bien » mais qui occulte une réalité bien plus subtile et nuancée.
Car il se trouve que l’Eglise aussi reconnaît que pendant certaines périodes de l’existence, il peut être légitimement souhaitable de ne pas avoir d’enfant (peu importe au fond la raison : ressources insuffisantes, déjà assez d’enfants à élever, etc) et que durant cette même période, il est légitime et souhaitable que le couple ait des moments d’intimité conjugale allant jusqu’au rapport sexuel.
Ce qui pose la question de comment concilier les 2... sans contraception ! Car l’échec serait... un échec (y compris de sa doctrine), et aurait de lourdes conséquences.
Ce à quoi l’Eglise propose une réponse à travers la proposition d’employer les méthodes dites naturelles, sachant que dans certaines situations de vie (dérèglement du cycle d’ovulation, début de ménopause, retour de couches, etc.) ces méthodes ne sont pas sûres et suffisantes, et qu’alors la solution proposée se complète par... l’absence de rapport, ce qui est exclu par la question posée et qui fixe une limite que certains jugent à tort ou à raison inadmissible.
Il y a une sorte d’échec partiel de la doctrine...
Or la contraception en tant que telle ne ferme toute possibilité de don de la vie qu’à un instant T et non définitivement, et ce peut être pour correspondre à cette période. Il serait abusif de considérer qu’y recourir relève d’une volonté qui aille au-delà de ce que l’Eglise elle-même reconnaît comme opportun, car la méthode par elle-même est neutre une fois son but atteint, elle ne relève pas d’une volonté qui outrepasse les circonstances et le motif de son emploi (dans un cadre idéal, car ce n’est pas le cas de toute contraception, mais vu la position actuelle de l’Eglise, elle n’a pas besoin de rentrer dans ce détail...).
Déjà, que l’Eglise propose une réponse montre qu’elle est en accord avec la nécessité d’en ouvrir la possibilité vivante.
Refuser donc une autre façon que ces méthodes sous le prétexte invoqué a quelque chose de contradictoire qui saute à la conscience.
A cela vient s’ajouter d’autres considérations, car nous sommes là dans un schéma idéal, d’un couple marié et stable.
Dans le cadre d’un péché (où la volonté ne s’engage pas toujours à 100%, vu la force de la « concupiscence »), l’emploi de ce que préconise l’Eglise est impossible, puisque par nature, celui qui en vient à pécher, et qui peut ne pas vouloir provoquer plus de dommages que déjà celui auquel il consent contre son gré, n’est de par son sort peu enviable spirituellement pas en état d’employer la dite méthode préconisée qui justement suppose de savoir contrôler sa concupiscence.
Alors, que doit-il faire ? Parier sur la chance pour éviter à un enfant un sort peu enviable et dont il ne peut pas prendre correctement la responsabilité, ou prendre celle de ne pas davantage « jouer » avec les autres, quitte à ajouter à sa faute ce que l’Eglise considère comme une faute de plus mais qui épargnera à d’autres bien des malheurs ?
Pour « parfaite’ » qu’elle soit en théorie, la position actuelle de l’Eglise, prise telle quelle, manquera pour beaucoup d’à propos et conduira à des impasses, ou à des conséquences qui peuvent être plus désastreuses que le mal qu’elle veut éviter et qui n’est souvent, dans les faits, pas si absolu qu’elle le prétend et tend à le présenter (refus du don de la vie).
Ce n’est clairement pas cela qui est refusé, « le pécheur a plus de valeur que son péché », même si les raisons s’en trouvent dans une faiblesse qui ne devrait pas être et qui porte sur d’autres considérations dont certaines relèvent d’un besoin légitime (d’amour, de reconnaissance, d’affection, etc.) et quand bien même la satisfaction de ce besoin serait inappropriée et servirait de palliatif.
Raison de plus pour ne pas compliquer davantage les choses et ajouter une énorme difficulté à une vie qui en connaît déjà une petite qu’elle n’a pas pu résoudre...
Si l’on prend l’exemple du SIDA, celui qui en est atteint et qui serait conduit par sa concupiscence à pécher (ce peut être aussi dans le cadre d’un rapport conjugal, après tout !) doit-il en plus contaminer son partenaire ?
La fin n’est pas celle de refuser le don de la vie, mais d’en protéger une !
Je crois que l’Eglise actuellement se garde de répondre à de tels cas concrets, car elle craint des généralisations ou des accusations notamment d’incohérence, et qu’elle a tort !
Elle doit y répondre car ce sont ceux qui se posent. Ou alors ne donner aucun avis...
Pour le moment elle s’est enfermée elle-même dans une impasse : on dirait qu’elle aurait bien aimé n’en donner aucun mais qu’elle n’a pas pu faire autrement. Parfois, il n’y a pas d’autre façon de trouver la vérité que de prendre le risque de se tromper, mais d’avancer...
Qu’il soit clair que je ne suis pas en train de dire que « sa doctrine est erronée » mais qu’elle a encore besoin d’être complétée et ajustée.
Ainsi, recourir à la contraception ce n’est pas s’opposer au don de la vie, mais s’opposer à ce qu’un acte ait une conséquence dramatique qui dépasse la responsabilité de celui qui l’a posé.
Cela ne veut pas dire que se servir de la contraception pour s’autoriser à ce que cet acte ne soit pas ce qu’il doit être, à savoir un temps fort de partage et d’échange d’amour, ne soit pas un péché !
Il y a toutefois différents niveaux de conscience à évaluer, une grande différence entre ceux qui n’y cherchent qu’un plaisir effréné, ceux qui en ont besoin pour « se soulager », ceux pour qui c’est un moyen d’exprimer tout ce qu’une contrainte extérieure insupportable leur a fait refouler, etc. et ceux pour qui c’est le seul mode de communication approprié pour la tendresse qu’ils veulent se donner et qu’ils partagent depuis plusieurs années.
Considérer que le seul refus de la possibilité procréative (qui n’est encore qu’une possibilité) de l’acte suffit à condamner la contraception, c’est choisir le motif le plus fin, le plus insignifiant de tous*, et qui condamnera même le couple parfait en dehors de cela. Et qui, en quelque sorte, aura le moins besoin de cette contraception car il assumerait l’enfant s’il s’en présentait quand même un.
Dans tous les autres cas qui sont pires, alors qu’il serait presque souhaitable qu’il y ait contraception, elle sera (son mal) aggravée par ce qu’elle permet alors que ce devrait être paradoxalement le contraire : cela ne vous titille pas ?
Il me paraît évident que certaines considérations morales et philosophiques ont été laissées de côté et oubliées, par facilité et pour ne pas se coltiner un problème jugé trop difficile à résoudre, tant qu’on n’en a pas encore toutes les clés ...
Il y a à cela une explication possible : le manque de foi et de détermination, de courage et de compétence.
*Mais qui présenté comme il l’est devient énorme et absolu... Il ne s’agit pas là de le minimiser, mais de le mettre en rapport avec la réalité d’une union qui a d’autres finalités nécessaires et suffisantes.
Il y a un débat de fond à revoir et auquel apporter d’autres conclusions, et qui porte sur la finalité première du mariage qui serait seulement la procréation.
(C’est là le pilier inamovible de cette doctrine et qui en porte d’autres qui en quelque sorte aussi le soutiennent car il faudrait sinon revoir leur assise).
Dès lors que l’amour suffit à motiver l’acte et qu’il lui est même nécessaire et premier (pas seulement chronologiquement)...
N’y a-t-il pas sinon un risque presque d‘idolâtrie à l’égard du pouvoir de nos seules semences et au détriment de quoi ?
En quoi la procréation, quand elle n’est encore que potentielle et conditionnelle, ce qui déjà en dévoie l’affirmation si nous n’en tenons pas compte, devrait-elle passer avant l’amour et la fidélité, l’engagement réciproque, pour décider de la légitimité de l’acte et de son cadre ?
Il est évident qu’en décider évite de statuer sur les unions qui sont basées sur de mauvaises raisons (attrait sexuel, intérêts financiers, etc.) et sur les différentes méthodes contraceptives. Ce « pilier » a été bien utile par le passé pour résoudre des difficultés, mais à présent il en pose une lui-même....