par Xavi » mar. 06 mars 2018, 12:39
Oui, c’est étonnant cette insistance d’Abraham à vouloir acheter une propriété.
Comme Abraham a 10 ans de plus que Sarah (Gn 17, 17), il est déjà âgé de 137 ans lorsqu’elle meurt à 127 ans, et il y a déjà 52 ans qu’il est venu habiter dans le pays lorsqu’il avait 75 ans (Gn 12, 4-6). Même en considérant qu’il s’agit d’années dédoublées (cf. le sujet « L’histoire sainte d’Abraham à Salomon »), Abraham est dans le pays depuis de nombreuses années, mais il y reste un étranger, un résident temporaire : « Je ne suis qu’un immigré, un hôte, parmi vous ; accordez-moi d’acquérir chez vous une propriété (en hébreu : « achuzzah ») » (Gn 23, 4).
Abraham n’oublie pas la promesse de Dieu qui n’a pas encore commencé à être réalisée : « À toi et à ta descendance après toi je donnerai (en hébreu : « nawthan ») le pays où tu résides, tout le pays de Canaan en propriété (en hébreu : « achuzzah ») perpétuelle » (Gn 17, 8).
Les gens du pays reçoivent sa demande avec bienveillance et considèrent comme évident qu’Abraham peut enterrer sa femme avec tous les honneurs dans le pays où elle est décédée. Mais, ils confirment les propos d’Abraham : il est resté et il est encore un étranger, un résident temporaire dans le pays de Canaan.
En effet, ils n’entendent pas sa demande de devenir propriétaire et ils proposent seulement à Abraham d’enterrer sa femme Sarah « chez eux ». Ta femme peut être inhumée « chez nous » : « Écoute, mon seigneur. Tu es, au milieu de nous, un prince de Dieu. Ensevelis ta morte dans le meilleur de nos tombeaux. Aucun d’entre nous ne te refusera son tombeau pour y ensevelir ta morte. » (Gn 23, 6).
Mais, ce qu’Abraham veut, c’est la réalisation de la promesse de Dieu et acquérir une propriété (achuzzah) perpétuelle. Un droit de propriété. Il demande qu’on lui cède la grotte de Macpéla « comme une propriété (en hébreu : achuzzah) » (Gn 23, 9).
Devant son insistance, les gens du pays persistent cependant à ne lui offrir que de la générosité et de l’accueil, mais la nuance n’apparaît guère dans la version française qui présente leur offre comme une donation : « Non, mon seigneur ! Écoute-moi ! Le champ, je te le donne (en hébreu : « nawthan »); et la caverne qui s’y trouve, je te la donne ; aux yeux des fils de mon peuple, je te la donne : ensevelis ta morte ! ».
Mais, en réalité, le verbe hébreu « nawthan » est ambigu. Il ne signifie pas clairement l’octroi d’un « droit » de propriété (comme le suggère le mot « donner » en français), car le mot hébreu « nawthan » a aussi le sens de permettre, d’accorder, de prêter. La promesse de Dieu était de « donner » (nawthan) une terre nouvelle en « propriété » (achuzzah).
Ce n’est qu’à la troisième demande qu’Abraham obtient ce qu’il souhaite : il devient propriétaire dans le pays de Canaan, il cesse d’en être seulement un résident temporaire.
Ainsi commence la réalisation de la promesse.
Mais, l’objet même de cette acquisition est étonnant. Au lieu de commencer par acquérir simplement une propriété pour y habiter, Abraham veut commencer la réalisation de la promesse par l’acquisition d’un tombeau, d’un lieu pour y enterrer un mort.
La promesse divine d’acquérir une terre nouvelle commence par l’acquisition d’un tombeau.
Et l’acquisition de ce terrain fait l’objet de deux précisions : Abraham devient propriétaire d’un terrain qui « se trouve à Macpéla, en face de Mambré, le champ et la caverne, avec tous les arbres qui y poussent » (Gn 23, 17).
Il est situé « en face de Mambré » là où Abraham, le sumérien, a manifesté sa foi en Dieu un et pluriel. Un Dieu qui n’est pas un être solitaire mais dont la vie donnée aux hommes est amour de toute éternité. Puisque Dieu est amour et qu’il nous a donné sa vie, Abraham croit que la mort ne peut triompher.
La précision que le terrain est acheté « avec tous ses arbres » paraît a priori superflue. N’est-il pas évident que la propriété d’un terrain comprend celle des arbres qui s’y trouvent ?
N’est-ce pas pour évoquer symboliquement un autre endroit où la mort a été présente parmi des arbres ?
N’est-ce pas, pour Abraham, un acte de foi qui le conduit du jardin d’Eden au tombeau du Christ ?
Au milieu des arbres du jardin d’Eden, le péché a fait entrer la mort dans le monde. Sur la terre nouvelle que Dieu promet à Abraham, après la destruction de l’adamah lors du déluge, la mort sera vaincue dans un autre jardin.
Ce n’est pas seulement, ni d’abord, pour une meilleure vie terrestre que Dieu promet une terre nouvelle. Abraham comprend et croit que c’est la victoire sur la mort, sur les effets dévastateurs du péché originel, que Dieu lui promet.
Il croit que Dieu, qui a créé les humains à son image, leur a donné une vie qui ne cesse pas lorsque le corps meurt. C’est déjà une foi en la résurrection qu’Abraham manifeste en voulant pour le corps défunt de son épouse bien-aimée non seulement un lieu provisoire mais une propriété perpétuelle.
Sur cette terre nouvelle de Canaan, la mort sera vaincue.
Sans victoire sur la mort, que vaudrait une terre nouvelle ?
C’est par une victoire sur la mort que Dieu promet une terre nouvelle. C’est donc d’abord par un tombeau dans un jardin qu’Abraham commence la prise de possession de la terre nouvelle promise par Dieu.
Le tombeau qu’il acquiert préfigure le tombeau du Christ par lequel Dieu recommence tout, efface la mort entrée par le péché dans le jardin d’Eden.
Oui, c’est étonnant cette insistance d’Abraham à vouloir acheter une propriété.
Comme Abraham a 10 ans de plus que Sarah (Gn 17, 17), il est déjà âgé de 137 ans lorsqu’elle meurt à 127 ans, et il y a déjà 52 ans qu’il est venu habiter dans le pays lorsqu’il avait 75 ans (Gn 12, 4-6). Même en considérant qu’il s’agit d’années dédoublées (cf. le sujet « [i]L’histoire sainte d’Abraham à Salomon[/i] »), Abraham est dans le pays depuis de nombreuses années, mais il y reste un étranger, un résident temporaire : «[i] Je ne suis qu’un immigré, un hôte, parmi vous ; accordez-moi d’acquérir chez vous une [b]propriété[/b][/i] (en hébreu : « [b][i]achuzzah[/i][/b] ») » (Gn 23, 4).
Abraham n’oublie pas la promesse de Dieu qui n’a pas encore commencé à être réalisée : « [i]À toi et à ta descendance après toi je [b]donnerai [/b][/i](en hébreu : « [i][b]nawthan[/b][/i] »)[i] le pays où tu résides, tout le pays de Canaan en [b]propriété[/b][/i] (en hébreu : « [i][b]achuzzah[/b][/i] ») perpétuelle » (Gn 17, 8).
Les gens du pays reçoivent sa demande avec bienveillance et considèrent comme évident qu’Abraham peut enterrer sa femme avec tous les honneurs dans le pays où elle est décédée. Mais, ils confirment les propos d’Abraham : il est resté et il est encore un étranger, un résident temporaire dans le pays de Canaan.
En effet, ils n’entendent pas sa demande de devenir propriétaire et ils proposent seulement à Abraham d’enterrer sa femme Sarah « c[i]hez eux[/i] ». Ta femme peut être inhumée « [i]chez nous[/i] » : «[i] Écoute, mon seigneur. Tu es, [b]au milieu de nous[/b], un prince de Dieu. Ensevelis ta morte dans le meilleur de [b]nos[/b] tombeaux. Aucun d’entre nous ne te refusera [b]son[/b] tombeau pour y ensevelir ta morte[/i]. » (Gn 23, 6).
Mais, ce qu’Abraham veut, c’est la réalisation de la promesse de Dieu et acquérir une propriété ([i][b]achuzzah[/b][/i]) perpétuelle. Un droit de propriété. Il demande qu’on lui cède la grotte de Macpéla « [i]comme une [b]propriété[/b][/i] (en hébreu : [b][i]achuzzah[/i][/b]) » (Gn 23, 9).
Devant son insistance, les gens du pays persistent cependant à ne lui offrir que de la générosité et de l’accueil, mais la nuance n’apparaît guère dans la version française qui présente leur offre comme une donation : « [i]Non, mon seigneur ! Écoute-moi ! Le champ, je te le [b]donne[/b][/i] (en hébreu : « [i][b]nawthan[/b][/i] »)[i]; et la caverne qui s’y trouve, je te la [b]donne[/b] ; aux yeux des fils de mon peuple, je te la [b]donne[/b] : ensevelis ta morte ![/i] ».
Mais, en réalité, le verbe hébreu « [i][b]nawthan[/b][/i] » est ambigu. Il ne signifie pas clairement l’octroi d’un « [i]droit [/i]» de propriété (comme le suggère le mot «[i] donner[/i] » en français), car le mot hébreu « [i][b]nawthan [/b][/i]» a aussi le sens de permettre, d’accorder, de prêter. La promesse de Dieu était de « [i][b]donner[/b][/i] » [i][b](nawthan[/b][/i]) une terre nouvelle en « [i][b]propriété[/b][/i] » ([i][b]achuzzah[/b][/i]).
Ce n’est qu’à la troisième demande qu’Abraham obtient ce qu’il souhaite : il devient propriétaire dans le pays de Canaan, il cesse d’en être seulement un résident temporaire.
Ainsi commence la réalisation de la promesse.
Mais, l’objet même de cette acquisition est étonnant. Au lieu de commencer par acquérir simplement une propriété pour y habiter, Abraham veut commencer la réalisation de la promesse par l’acquisition d’un tombeau, d’un lieu pour y enterrer un mort.
La promesse divine d’acquérir une terre nouvelle commence par l’acquisition d’un tombeau.
Et l’acquisition de ce terrain fait l’objet de deux précisions : Abraham devient propriétaire d’un terrain qui « [i]se trouve à Macpéla, [b]en face de Mambré[/b], le champ et la caverne, [b]avec tous les arbres qui y poussen[/b]t [/i]» (Gn 23, 17).
Il est situé « [i]en face de Mambré [/i]» là où Abraham, le sumérien, a manifesté sa foi en Dieu un et pluriel. Un Dieu qui n’est pas un être solitaire mais dont la vie donnée aux hommes est amour de toute éternité. Puisque Dieu est amour et qu’il nous a donné sa vie, Abraham croit que la mort ne peut triompher.
La précision que le terrain est acheté «[i] avec tous ses arbres[/i] » paraît a priori superflue. N’est-il pas évident que la propriété d’un terrain comprend celle des arbres qui s’y trouvent ?
N’est-ce pas pour évoquer symboliquement un autre endroit où la mort a été présente parmi des arbres ?
N’est-ce pas, pour Abraham, un acte de foi qui le conduit du jardin d’Eden au tombeau du Christ ?
Au milieu des arbres du jardin d’Eden, le péché a fait entrer la mort dans le monde. Sur la terre nouvelle que Dieu promet à Abraham, après la destruction de l’adamah lors du déluge, la mort sera vaincue dans un autre jardin.
Ce n’est pas seulement, ni d’abord, pour une meilleure vie terrestre que Dieu promet une terre nouvelle. Abraham comprend et croit que c’est la victoire sur la mort, sur les effets dévastateurs du péché originel, que Dieu lui promet.
Il croit que Dieu, qui a créé les humains à son image, leur a donné une vie qui ne cesse pas lorsque le corps meurt. C’est déjà une foi en la résurrection qu’Abraham manifeste en voulant pour le corps défunt de son épouse bien-aimée non seulement un lieu provisoire mais une propriété perpétuelle.
Sur cette terre nouvelle de Canaan, la mort sera vaincue.
Sans victoire sur la mort, que vaudrait une terre nouvelle ?
C’est par une victoire sur la mort que Dieu promet une terre nouvelle. C’est donc d’abord par un tombeau dans un jardin qu’Abraham commence la prise de possession de la terre nouvelle promise par Dieu.
Le tombeau qu’il acquiert préfigure le tombeau du Christ par lequel Dieu recommence tout, efface la mort entrée par le péché dans le jardin d’Eden.