Théodore a écrit :Ce que dit le Seigneur est sujet à interprétations multiples.
Si vous voulez mon avis, c'est trop facile. Il y a des règles d'interprétations, on n'interprète pas selon notre idéologie personnelle. Lorsque le Seigneur dit quelque chose qui ne porte AUCUNE ambiguïté, on y donne l'assentiment de la foi, et on ne commence pas à essayer de tordre les choses pour que ça colle à nos préférences théologiques. Voilà mon point de vue.
Vous savez, on peut faire dire tout et n’importe quoi à un texte. Si la parole de Dieu est aussi malléable, selon les préférences des uns et des autres, elle ne sert à rien. Alors, bien sûr, il y a parfois des interprétations à faire. Mais qui alors a l’autorité pour le faire, Théodore ? Le Seigneur n’a-t-il pas promis son Esprit pour guider l’Église vers la vérité tout entière ? A en croire les protestants, nul n’est infaillible, ce qui revient à dire que personne ne connaît la vérité et donc que l’erreur est partout. Comment faire confiance à Dieu dans ce cas ?
De nos jours, chacun se croit la norme et la mesure de la vérité et limite la parole de Dieu à ce que ses faibles capacités humaines lui permettent de comprendre. Je ne peux pas adhérer à cette vision des choses, j’aime trop la vérité pour cela.
Théodore a écrit :Il me semble qu'ici, le Seigneur utilise une image, comme il le fit souvent.
Je pense que vous devriez relire ce passage dans son ensemble. Si le Seigneur utilise une image, pourquoi enfonce-t-il le clou avec les juifs qui prennent cette image au pied de la lettre, au lieu de leur expliquer qu'ils ont mal compris ? Pourquoi ne rappelle-t-il pas ceux qui le quittent à cause de cette parole trop "dure" à entendre, en leur disant qu'elle n'est pas à prendre littéralement ?
Théodore a écrit :Allons-nous prendre au premier degré ce que dit Jésus quand il affirme : "celui qui mange de ce pain vivra éternellement." ? Je ne crois pas.
C’est pourtant ce qu’ont fait les premiers chrétiens et ce que fait l’Église depuis 2000 ans.
Voici par exemple ce que dit saint Ignace d'Antioche (qui écrit vers la fin du Ier siècle) :
Ayez donc soin de ne participer qu'à une seule eucharistie; car il n'y a qu'une seule chair de notre Seigneur Jésus-Christ, et un seul calice pour nous unir en son sang, un seul autel, comme un seul évêque avec le presbyterium et les diacres, mes compagnons de service: ainsi, tout ce que vous ferez, vous le ferez selon Dieu. (aux Philadelphiens, IV)
C'est bien vivant que je vous écris, désirant de mourir. Mon désir terrestre a été crucifié, et il n'y a plus en moi de feu pour aimer la matière, mais en moi une eau vive qui murmure et qui dit au-dedans de moi : Viens vers le Père. Je ne me plais plus à une nourriture de corruption ni aux plaisirs de cette vie ; c'est le pain de Dieu que je veux, qui est la chair de Jésus-Christ, de la race de David ; et pour boisson je veux son sang, qui est l'amour incorruptible. (aux Romains, VII)
Ils s'abstiennent de l'eucharistie et de la prière, parce qu'ils ne confessent pas que l'eucharistie est la chair de notre Sauveur Jésus-Christ, chair qui a souffert pour nos péchés, et que dans sa bonté le Père a ressuscitée. Ainsi ceux qui refusent le don de Dieu meurent dans leurs disputes. Il leur serait utile de pratiquer la charité pour ressusciter eux aussi. Il convient de vous tenir à l'écart de ces gens-là, et de ne parler d'eux ni en privé ni en public, mais de vous attacher aux prophètes, et spécialement à l'Évangile, dans lequel la passion nous est montrée et la résurrection accomplie. Et les divisions, fuyez-les comme le principe de tous les maux.
Et voici ce que dit Justin Martyr (mort vers 165) :
Nous appelons cet aliment Eucharistie, et personne ne peut y prendre part, s'il ne croit la vérité de notre doctrine, s'il n'a reçu l'ablution pour la rémission de ses péchés et sa régénération, et s'il ne vit selon les enseignements du Christ. Car nous ne prenons pas cet aliment comme un pain ordinaire et une boisson commune. Mais de même que, par la parole de Dieu, Jésus-Christ, notre Sauveur, ayant été fait chair, a pris sang et chair pour notre salut; de même aussi cet aliment, qui par l'assimilation doit nourrir nos chairs et notre sang, est devenu, par la vertu de l'action de grâces, contenant les paroles de Jésus-Christ lui-même, le propre sang et la propre chair de Jésus incarné: telle est notre foi. Les apôtres, dans leurs écrits, que l'on nomme Évangiles, nous ont appris que Jésus-Christ leur avait recommandé d'en agir de la sorte, lorsque ayant pris du pain, il dit: "Faites ceci en mémoire de moi: ceci est mon corps; "et semblablement ayant pris le calice, et ayant rendu grâces: "Ceci est mon sang, "ajouta-t- il; et il le leur distribua à eux seuls. Les démons n'ont pas manqué d'imiter cette institution dans les mystères de Mithra; car on apporte à l'initié du pain et du vin, sur lesquels on prononce certaines paroles que vous savez, ou que vous êtes à même de savoir. (1ère Apologie LXVI)
La croyance en la présence réelle est conforme à ce que croyaient les premiers chrétiens. Il y a une théorie chez les protestants qui voudrait que l’évolution de l’Église catholique (de fait, l’Église catholique actuelle n’a pas la même structure qu’aux premiers siècles) serait une trahison de ce que vivaient les premiers chrétiens. Les textes historiques prouvent exactement le contraire.
Alors, faut-il conclure, comme le font les protestants, que les chrétiens se sont trompés pendant 1500 ans, jusqu’à ce que la Réforme pointe le bout de son nez ? Ce serait une position dure à défendre car on en revient au problème de la vérité : pourquoi faudrait-il croire que les thèses protestantes valent mieux que celle de l’Église de toujours ? Au nom de quelle « inspiration » qui, de toute façon, a toujours fait défaut aux chrétiens si l’on suit la logique protestante ? Intenable.
Théodore a écrit :Ce serait attacher le Seigneur aux choses physiques.
En même temps, le Seigneur fut attaché à une croix. Si Dieu avait le dégoût des choses physiques, Il ne se serait pas incarné.
Théodore a écrit :Ainsi, un incroyant qui prendrait la communion aurait la vie éternelle ? Ce serait contradictoire avec nos croyances.
Mais ce n’est pas de la magie. Le fait que la sainte Eucharistie soit vraie communion au corps et au sang du Christ ne viole pas notre liberté : celui qui communierait indignement – comme le dit saint Paul (1Co 11, 27-29) – n’en retirerait aucun bénéfice et provoquerait même sa propre condamnation.
Théodore a écrit :Il ne l'aurait pas, alors ? Mais ce serait renier la promesse que Jésus fait ici ! Bref, il me semble que le pain et le vin ne sont pas ceux de la Cène.
Ce n’est pourtant pas ce que disent les textes.
Théodore a écrit :Prenons garde à ne pas attacher le Seigneur aux choses physique ; il me semble en effet que le passage contient cette mise en garde : "La chair ne sert de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et vie.".
Sauf que la chair ici ne désigne pas toute chose physique. Et je vous le redis : comment pouvez-vous dire qu’il ne faut pas attacher le Seigneur aux choses physiques, quand lui-même l’a fait ? Car encore une fois, c’est Jésus qui nous parle de la Cène et du fait de manger son corps et boire son sang.
Théodore a écrit :Quant à la scandalisation des Juifs, et à la réponse de Jésus, il me semble qu'elles sont moins liées au fait que le Sauveur leur parle de manger sa chair et boire son sang que d'affirmer que la vie éternelle leur est offerte - souvenons-nous des croyances des Juifs à ce sujet, eux qui ne croyaient pas à la vie éternelle, et pour qui toute personne prétendant l'offrir commettait un blasphème effroyable et mortel.
Ce n’est pas non plus ce que dit le texte. En l’état des choses, je ne peux que vous inviter à relire attentivement le passage en question :
Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement; et le pain que je donnerai, c'est ma chair, pour le salut du monde." Là-dessus, les Juifs disputaient entre eux, disant: "Comment cet homme peut-il donner sa chair à manger?" Jésus leur dit: "En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils de l'homme, et ne buvez son sang, vous n'avez point la vie en vous-mêmes. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle, et moi, je le ressusciterai au dernier jour. Car ma chair est vraiment une nourriture, et mon sang est vraiment un breuvage. Celui qui mange ma chair et boit mon sang, demeure en moi, et moi en lui. Comme le Père qui est vivant m'a envoyé, et que je vis par le Père, ainsi celui qui me mange vivra aussi par moi. C'est là le pain qui est descendu du ciel: il n'en est point comme de vos pères qui ont mangé la manne et qui sont morts; celui qui mange de ce pain vivra éternellement." Jésus dit ces choses, enseignant dans la synagogue à Capharnaüm. Beaucoup de ses disciples l'ayant entendu dirent: "Cette parole est dure, et qui peut l'écouter?" Jésus, sachant en lui-même que ses disciples murmuraient à ce sujet, leur dit: "Cela vous scandalise ? Et quand vous verrez le Fils de l'Homme monter où il était auparavant?… C'est l'Esprit qui vivifie; la chair ne sert de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et vie. Mais il y en a parmi vous quelques-uns qui ne croient point." Car Jésus savait, dès le commencement, qui étaient ceux qui ne croyaient point, et qui était celui qui le trahirait. Et il ajouta: "C'est pourquoi je vous ai dit que nul ne peut venir à moi si cela ne lui a été donné par mon Père." Dès ce moment, beaucoup de ses disciples se retirèrent, et ils n'allaient plus avec lui. (Jean 6, 51-64)
Théodore, vous me faites penser à ces disciples qui ne peuvent entendre la parole du Seigneur qu’ils jugent trop « dure ».
Fraternellement,