Répondre à "Dieu est une invention"

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prodigal
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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par prodigal » jeu. 29 déc. 2022, 10:37

Cher aldebaran,
vous avez incontestablement raison d'en appeler à la nuance, dès lors qu'il s'agit d'interpréter la pensée très originale d'un grand philosophe.
Je précise, pour aller dans votre sens, que lorsque je dis que Spinoza en réalité est athée, cela ne signifie pas qu'il soit conforme à la caricature de l'athée moyen, à savoir un matérialiste anticlérical et hostile à toute métaphysique. Je crois au contraire que si beaucoup de gens instruits se revendiquent de lui, c'est parce qu'il offre une sorte de spiritualité rationaliste, sans obliger à croire quoi que ce soit d'une quelconque révélation. D'ailleurs, pour ne pas perdre de vue la question initiale, on pourrait se servir de Spinoza pour réfuter l'idée selon laquelle Dieu serait une invention.
Il me semble cependant que vous sous-estimez ce que vous dites vous-même, et qui est capital.
Après tout nous pensons bien chrétiens que Dieu est partout, mais pas uniquement en l'univers (transcendance versus immanence).
En effet, il n'y a pas de transcendance dans l'univers de Spinoza. Peut-on être chrétien sans affirmer a minima une transcendance? Cela me paraît impossible.
Toutefois, je reconnais que l'on peut considérer la pensée de Spinoza comme une interprétation du christianisme, qui en exprimerait la profonde vérité. Mais si l'on pense cela, c'est, me semble-t-il, que l'on n'est pas catholique. Ou alors que l'on se fait une idée très souple du catholicisme, ce qui n'est pas impossible après tout, de nos jours. :)
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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par aldebaran » jeu. 29 déc. 2022, 14:54

Cher Prodigal,
Prodigal a écrit :Je précise, pour aller dans votre sens, que lorsque je dis que Spinoza en réalité est athée, cela ne signifie pas qu'il soit conforme à la caricature de l'athée moyen, à savoir un matérialiste anticlérical et hostile à toute métaphysique. Je crois au contraire que si beaucoup de gens instruits se revendiquent de lui, c'est parce qu'il offre une sorte de spiritualité rationaliste, sans obliger à croire quoi que ce soit d'une quelconque révélation
Je pense comprendre ce que vous dites, et selon cette interprétation je serais en complet accord avec vous. Ceci dit, pour beaucoup et même dans la définition du Petit Larousse, un athée est quelqu'un qui nie l'existence d'un dieu quelconque. Le problème des subtilités, c'est que du coup on abuse le peuple (terme positif et non péjoratif) qui n'a ni le temps ni la formation pour finasser.
Je crois que nous sommes d'accord que selon cette définition brute, Spinoza n'est pas un athée. J'ajouterais que selon moi il est théiste, sans qu'il soit vraiment clair s'il reconnait un dieu personnel ou non (d'ailleurs l'a-t-il tranché lui-même?). Mais selon le passage cité plus haut dans le fil je dirais qu'il ne l'a pas écarté et même que la sagesse du Christ (et non sa divinité reconnue comme telle) lui a fait valider cette perception.
D'ailleurs, pour ne pas perdre de vue la question initiale, on pourrait se servir de Spinoza pour réfuter l'idée selon laquelle Dieu serait une invention.
Nous sommes bien d'accord, et cela appuie ce que je disais plus haut, Spinoza théiste, mais selon quel degré?
En effet, il n'y a pas de transcendance dans l'univers de Spinoza. Peut-on être chrétien sans affirmer a minima une transcendance? Cela me paraît impossible.
De nouveau en plein accord avec vous.
Toutefois, je reconnais que l'on peut considérer la pensée de Spinoza comme une interprétation du christianisme, qui en exprimerait la profonde vérité. Mais si l'on pense cela, c'est, me semble-t-il, que l'on n'est pas catholique. Ou alors que l'on se fait une idée très souple du catholicisme, ce qui n'est pas impossible après tout, de nos jours. :)
Ce serait une interprétation du christianisme vraiment très lâche, que même nos pires modernistes ne prônent pas :-D . Quasi impossible de définir Spinoza comme catholique, et même comme un protestant ou un juif croyant je ne vois pas vraiment sur quel critère, soyons juste.

Non je pense que la position de Spinoza est très intéressante sur un théisme validé par la raison invoquée comme l'élément le plus signifiant, car vraiment il est un terrain possiblement en frontière des croyants (qui veulent bien converser avec d'autres que leur mouvance), des agnostiques et des athées (ouverts d'esprit). Chacun pourra dire certainement qu'il se reconnait au moins partiellement dans ses écrits, soit par le théisme, soit par l'importance de la raison, soit par les deux **. Sa pensée il me semble est une merveilleuse base de discussion entre tous, que l'on espère ouverte, enthousiaste et enrichissante pour chacun.
Je retiendrais chez lui, dans un discours avec un athée, son approche non matérialiste, et l'évidence d'un être peut-être immanent mais en tout cas unique (il le dit) et parfait (il le dit également).

D'ailleurs, remarque pour vous et aussi pour ChristianK, ses démonstrations de l'existence de Dieu me font beaucoup penser à la preuve ontologique de Gödel (à ne pas confondre avec le théorème d'incomplétude *!!! C'est énervant cette confusion :/ ).
D'ailleurs il me semble que Leibnitz a repris les arguments de Spinoza (vous confirmez?). Gödel, immense génie logicien, encore supérieur à Russel, a eu le mérite de le démontrer formellement sur base de logique modale : il existe forcément un être ayant toutes les caractéristiques positives. Le dieu de Spinoza. Les croyants diront ensuite qu'Il s'est témoigné aux hommes selon tel ou tel prophète, Christ, ou tel ou tel texte.

La position d'un athéisme matérialiste me parait de moins en moins tenable.

* que les gens ne comprennent pas vraiment et qu'ils devraient s'abstenir d'utiliser alors.

** les autres s'en fichent bien pour tout dire, et pensent plutôt à passer une existence la plus remplie de plaisirs possible. Pour le reste on verra bien, mais on ne va pas sacrifier la satisfaction de nos sens ou réprimer nos envies pour autant. A ceux-là, il faut plutôt les renvoyer au tonneau des Danaïdes des épicuriens. Et aussi au dam pour les mauvais, que l'on a eu tendance à gommer récemment, mais au préjudice du salut des âmes.

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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par prodigal » jeu. 29 déc. 2022, 20:09

En ce qui concerne Leibniz, ce que je peux dire est qu'il a beaucoup réfléchi sur les preuves de l'existence de Dieu, mais à ma connaissance il n'a jamais signalé une dette envers Spinoza, mais plutôt envers Descartes, qu'il a tenté de compléter.
Contrairement à Spinoza, d'ailleurs, Leibniz comme Descartes affirme l'existence de Dieu comme transcendante à l'univers. Tous deux s'affirment chrétiens sans ambiguïté, Leibniz étant protestant et Descartes catholique. Ceci peut sembler anodin, mais étant donné que Descartes et Leibniz sont sans doute les deux plus grands philosophes rationalistes - et de surcroît mathématiciens de génie - il est assez léger d'identifier, comme certains le font, foi chrétienne et goût pour l'irrationnel!
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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par ChristianK » ven. 30 déc. 2022, 4:30

aldebaran a écrit :
mer. 28 déc. 2022, 13:27
Bonjour ChristianK ,
.Mais qu'il s'était toujours défendu d'être athée, et même que selon lui les athées étaient un peu comme des brutes.
Très juste, c'est pourquoi ceux qui le disent athee voient une duplicité chez lui
J'ai l'impression que l'on fait dire beaucoup de choses à Spinoza qui dépassent sa pensée ; je trouve le procédé assez malhonnête.
IL FAUT dire que dès le 18e s.on le disait ivre de Dieu, et athée pour certains à cause du panthéisme
J'ai par contre trouvé très intéressant l'écart entre la filière lettre, très athée et de loin, et la scientifique qui parait plus équilibrée (à ma grande satisfaction). Selon vous, est-ce à dire que le marxisme est passé par là et toujours présent pour les littéraires, alors que le matérialisme perd du terrain chez les scientifiques?
J'ai plutôt l'impression que c'est pcq la science empirique est essentiellement agnostique, elle ne croit aucunement à l'inexistence de Dieu (ne pas croire c'est différent). Affirmer sur Dieu est métaphysique, et je crois que la littérature est plus proche de la philo que les sciences empiriques, sinon par la méthode, du moins par l'objet.
J'ai l'impression, mais sans données plus solides qu'un échantillonnage non représentatif de vidéos ou d'articles, que les dernières générations scientifiques sont avant tout humanistes. A vrai dire peu importe que Dieu existe, qu'il soit personnel ou non, alors que la croyance dans l'au-delà est devenue très partielle ou quasi inexistante, seul compterait pour eux ce que fait l'homme par ses propres moyens et pour son seul profit.
BIEN sûr, car l'homme est une réalité empirique. Par contre en morale la science empirique n'a rien à dire. En un sens la morale est transcendante, un peu comme Dieu
Que dieu et l'univers se confondent, toujours sur le plan pur de la logique, ne veut pas dire non plus que Spinoza soit panthéiste :-D . Après tout nous pensons bien chrétiens que Dieu est partout, mais pas uniquement en l'univers (transcendance versus immanence).
Le Dieu spinoziste n'est pas uniquement dans "notre" univers, mais dans un univers bis, au sens de tout ce qui existe (comme le Dieu xtien, sauf que celui-ci n'est pas "notre" univers). Notre Dieu est partout par son action mais la matière n'est pas un attribut divin comme chez Spinoza.


ses démonstrations de l'existence de Dieu me font beaucoup penser à la preuve ontologique
Absolument.








@prodigal
D'autre part, le Dieu de Spinoza n'est pas du tout le Dieu des religions, mais il est impersonnel, et s'identifie strictement à l'univers. Il est, en quelque sorte, le grand Tout, qui contient tout.
Pas tout à fait, sauf pour "contient". L'univers de Spinoza n'est pas l'univers de la physique, il a un aspect transcendant. Il est pas si loin du Dieu des religions.

https://www.forum-religion.org/viewtopi ... e1f54cc152

Et si l'on me pousse un peu, j'ajouterai que le spinozisme est une des deux grandes variétés de l'athéisme
Un panthéisme ne peut être athée à moins d'identifier totalement Dieu à la matière. Or Spinoza est clairement spiritualiste dabs sa conception de Dieu.

En effet, il n'y a pas de transcendance dans l'univers de Spinoza. P
Voir le lien ci haut
que l'on n'est pas catholique. Ou alors que l'on se fait une idée très souple du catholicisme, ce qui n'est pas impossible après tout, de nos jours. :)
On ne saurait mieux dire, sans parler du protestantisme libéral
il est assez léger d'identifier, comme certains le font, foi chrétienne et goût pour l'irrationnel!
CELA vient en partie de l'influence de la tendance existentielle en théologie, de pente antirationaliste. Un evêque a prétendu qu'au concile les existentiels ont pris le dessus sur les notionnels au nom de la pasto....!!!..... au nom de la pasto, j'insiste!?!

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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par aldebaran » lun. 02 janv. 2023, 16:54

Bonjour ChristianK,
Bonne et heureuse année à vous.
Merci pour toutes les précisions.

Je reviens sur ce qui me parait essentiel concernant le sujet initial:
ChristianK a écrit :On ne saurait mieux dire. Des 4 étapes de l'apologétique classique c'est la 1ere qui concerne le plus la philo :
1/théisme sous toute forme (y compris la grande majorité des panthéismes vs athéisme
2/théisme religieux (théisme + revelation) vs déisme (théisme irréligieux)
3/vraie (ou la plus vraisemblable) religion vs fausse (en partie généralement) religion
4/vraie (ou la plus vraisemblable) église représentant le plus authentiquement la vraie religion vs les autres églises de cette religion.
Si vous en êtes d'accord, le point 1 me parait le plus crucial et le plus décisif. Je suppose que quelqu'un a fait un jour un recensement sérieux et relativement complet (philo + science + signes/témoignages) de tous les raisonnements et expériences conduisant à une réponse favorable au théisme?
Selon le bon vieux théorème de Bayes, si aucun indice indirect ne permet de trancher définitivement et sans contestation, une grosse accumulation de tels indices inexplicables autrement conduit à une probabilité extrêmement favorable.
On accepte les probas en science, ce devrait être le cas en philo, en étude des religions, etc...

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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par ChristianK » mar. 03 janv. 2023, 16:52

Pour moi absolument, et pour les esprits de tournure rationaliste ou peut être scientifique au sens large. Une fois Dieu prouvé plus vraisemblable par la raison philosophique, une éventuelle révélation fait un gros bon de plausibilité. Mais en même temps je reconnais que pour les esprits de tournure existentielle ou poétique, le Dieu des philos ne dit pas grand chose et ils accentuent exagérément la différence entre les 2 Dieux, une tendance très dominante depuis le concile et une erreur pastorale.
Et oui, n'importe quel traité complet d'apologétique d'avant 1960, a tout ce qu'on désire: une apologétique hyperrigoureuse avec toutes les étapes. Par après l'oecuménisme a fait en sorte que la 4e a été systématiquement censurée.
Moi-même j'ai pris connaissance du schéma ci haut grâca à un livre publié par les lefebvristes y a t il encore une vérité

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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par ChristianK » ven. 06 janv. 2023, 20:33

Je me trompais. Le livre n'est pas y a--t-il encore une vérité mais Dieu est-il facultatif, par le P.Georges Vinson, une sorte de semi-sedevacantiste, donc non fsspx.

PiotrM
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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par PiotrM » jeu. 12 janv. 2023, 22:33

la notion de l'<<invention>>

https://www.larousse.fr/dictionnaires/f ... tion/44085

2.Ce qui est inventé, objet inventé : Les dernières inventions de la technique.
Synonymes :

découverte - trouvaille (familier)

3. Faculté de trouver quelque chose de nouveau, de créer par l'imagination : L'invention romanesque.
Synonymes :

fabulation - fiction - imagination - inspiration

4. Action de donner comme réel ce qui est de pure imagination ; fiction ainsi créée, mensonge : Cette histoire est une invention de Paul.
Synonymes :

conte - divagation - fable - histoire - mensonge - roman

5. Découverte d'un trésor, de reliques, d'un gisement archéologique, etc. ; les objets ainsi découverts.
--------------------
------------- on peut touver la réponse au sens 3. ) de St Tomas d'Aguin . qui je en bref aime enormemont------
------------------------------------------------
Que Dieu existe, on peut prendre cinq voies pour le prouver.
La première et la plus manifeste est celle qui se prend du mouvement. Il est évident, nos sens nous l’attestent, que dans ce monde certaines choses se meuvent. Or, tout ce qui se meut est mû par un autre. En effet, rien ne se meut qu’autant qu’il est en puissance par rapport au terme de son mouvement, tandis qu’au contraire, ce qui meut le fait pour autant qu’il est en acte ; car mouvoir, c’est faire passer de la puissance à l’acte, et rien ne peut être amené à l’acte autrement que par un être en acte, comme un corps chaud en acte, tel le feu, rend chaud en acte le bois qui était auparavant chaud en puissance, et par là il le meut et l’altère. Or il n’est pas possible que le même être, envisagé sous le même rapport, soit à la fois en acte et en puissance ; il ne le peut que sous des rapports divers ; par exemple, ce qui est chaud en acte ne peut pas être en même temps chaud en puissance ; mais il est, en même temps, froid en puissance. Il est donc impossible que sous le même rapport et de la même manière quelque chose soit à la fois mouvant et mû, c’est-à-dire qu’il se meuve lui-même. Il faut donc que tout ce qui se meut soit mû par un autre. Donc, si la chose qui meut est mue elle-même, il faut qu’elle aussi soit mue par une autre, et celle-ci par une autre encore. Or, on ne peut ainsi continuer à l’infini, car dans ce cas il n’y aurait pas de moteur premier, et il s’ensuivrait qu’il n’y aurait pas non plus d’autres moteurs, car les moteurs seconds ne meuvent que selon qu’ils sont mûs par le moteur premier, comme le bâton ne meut que s’il est mû par la main. Donc il est nécessaire de parvenir à un moteur premier qui ne soit lui-même mû par aucun autre, et un tel être, tout le monde comprend que c’est Dieu.
La seconde voie part de la notion de cause efficiente. Nous constatons, à observer les choses sensibles, qu’il y a un ordre entre les causes efficientes ; mais ce qui ne se trouve pas et qui n’est pas possible, c’est qu’une chose soit la cause efficiente d’elle-même, ce qui la supposerait antérieure à elle-même, chose impossible. Or, il n’est pas possible non plus qu’on remonte à l’infini dans les causes efficientes ; car, parmi toutes les causes efficientes ordonnées entre elles, la première est cause des intermédiaires et les intermédiaires sont causes du dernier terme, que ces intermédiaires soient nombreux ou qu’il n’y en ait qu’un seul. D’autre part, supprimez la cause, vous supprimez aussi l’effet. Donc, s’il n’y a pas de premier, dans l’ordre des causes efficientes, il n’y aura ni dernier ni intermédiaire. Mais si l’on devait monter à l’infini dans la série des causes efficientes, il n’y aurait pas de cause première ; en conséquence, il n’y aurait ni effet dernier, ni cause efficiente intermédiaire, ce qui est évidemment faux. Il faut donc nécessairement affirmer qu’il existe une cause efficiente première, que tous appellent Dieu.
La troisième voie se prend du possible et du nécessaire, et la voici. Parmi les choses, nous en trouvons qui peuvent être et ne pas être la preuve, c’est que certaines choses naissent et disparaissent, et par conséquent ont la possibilité d’exister et de ne pas exister. Mais il est impossible que tout ce qui est de telle nature existe toujours ; car ce qui peut ne pas exister n’existe pas à un certain moment. Si donc tout peut ne pas exister, à un moment donné, rien n’a existé. Or, si c’était vrai, maintenant encore rien n’existerait ; car ce qui n’existe pas ne commence à exister que par quelque chose qui existe. Donc, s’il n’y a eu aucun être, il a été impossible que rien commençât d’exister, et ainsi, aujourd’hui, il n’y aurait rien, ce qu’on voit être faux. Donc, tous les êtres ne sont pas seulement possibles, et il y a du nécessaire dans les choses. Or, tout ce qui est nécessaire, ou bien tire sa nécessité d’ailleurs, ou bien non. Et il n’est pas possible d’aller à l’infini dans la série des nécessaires ayant une cause de leur nécessité, pas plus que pour les causes efficientes, comme on vient de le prouver. On est donc contraint d’affirmer l’existence d’un Être nécessaire par lui-même, qui ne tire pas d’ailleurs sa nécessité, mais qui est cause de la nécessité que l’on trouve hors de lui, et que tous appellent Dieu.
La quatrième voie procède des degrés que l’on trouve dans les choses. On voit en effet dans les choses du plus ou moins bon, du plus ou moins vrai, du plus ou moins noble, etc. Or, une qualité est attribuée en plus ou en moins à des choses diverses selon leur proximité différente à l’égard de la chose en laquelle cette qualité est réalisée au suprême degré ; par exemple, on dira plus chaud ce qui se rapproche davantage de ce qui est superlativement chaud. Il y a donc quelque chose qui est souverainement vrai, souverainement bon, souverainement noble, et par conséquent aussi souverainement être, car, comme le fait voir Aristote dans la Métaphysique, le plus haut degré du vrai coïncide avec le plus haut degré de l’être. D’autre part, ce qui est au sommet de la perfection dans un genre donné, est cause de cette même perfection en tous ceux qui appartiennent à ce genre : ainsi le feu, qui est superlativement chaud, est cause de la chaleur de tout ce qui est chaud, comme il est dit au même livre. Il y a donc un être qui est, pour tous les êtres, cause d’être, de bonté et de toute perfection. C’est lui que nous appelons Dieu.
La cinquième voie est tirée du gouvernement des choses. Nous voyons que des êtres privés de connaissance, comme les corps naturels, agissent en vue d’une fin, ce qui nous est manifesté par le fait que, toujours ou le plus souvent, ils agissent de la même manière, de façon à réaliser le meilleur ; il est donc clair que ce n’est pas par hasard, mais en vertu d’une intention qu’ils parviennent à leur fin. Or, ce qui est privé de connaissance ne peut tendre à une fin que dirigé par un être connaissant et intelligent, comme la flèche par l’archer. Il y a donc un être intelligent par lequel toutes choses naturelles sont ordonnées à leur fin, et cet être, c’est lui que nous appelons Dieu

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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par ChristianK » dim. 15 janv. 2023, 0:26

Ceci est la façon longue de répondre, avec lourde charge de preuve. L'idée que la notion d'invention n'implique aucune inexistence est plus efficace car elle a pour effet de retourner la charge de preuve. Pas besoin de prouver Dieu, il suffit de montrer que la conclusion d'inexistence est invalide.

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Re: Répondre à "Dieu est une invention"

Message non lu par Lejardin » jeu. 09 févr. 2023, 15:05

Le truc justement avec les atomes , c'est qu'il s'agit d'une pure invention. Un concept philosophique qui a fini par trouver un écho suffisamment important dans la science d'une époque pour que l'on puisse lui attribuer une réalité physique.

On a collé une vue de l'esprit sur le premier truc qui y ressemblait car il fallait donner un nom.

De la même façon que si un jour on arrive à mettre en évidence empiriquement l'existence d'une entité créatrice de l'univers (ou plus humblement de la terre ou de la vie ) on l'appellera Dieu car cela collera plutôt pas mal.

Cependant rien ne dit que ce "Dieu" collera a tous les concepts théologiques et métaphysiques que l'on lui attribue.

De la même façon que la définition antique d'un atome ne correspond aux atomes.


note de la modération : veuillez utiliser le correcteur d'orthographe

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