Ne pas aller voter est-ce un péché ?

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PaxetBonum
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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par PaxetBonum » lun. 07 juin 2021, 15:50

prodigal a écrit :
lun. 07 juin 2021, 11:04
Cher PaxetBonum,
permettez-moi de ne pas être d'accord avec vous.
Le bulletin blanc ne signifie rien, sinon qu'on refuse de se prononcer. L'abstention ne signifie rien non plus, sinon qu'on refuse de se prononcer. Il n'y a donc pas de différence significative entre les deux.
Certes, pour déposer un bulletin blanc il faut se déplacer. Mais ceci peut s'interpréter de façons totalement opposées. On peut avoir déposé un bulletin blanc parce qu'on refuse le principe de l'élection (par exemple aux européennes quand on est farouchement souverainiste), on peut déposer un bulletin blanc tout au contraire parce qu'on est attaché au principe de l'élection mais qu'aucun candidat ne convient.
On peut aussi ne pas se déplacer parce qu'on n'est pas d'accord avec le vote blanc, ce qui est un droit.
Deux cas de figure en guise d'exemple : 1) on sait comment le vote blanc sera interprété par les médias (par exemple si un parti et un seul a appelé à voter blanc lors d'un référendum) et ce n'est pas du tout conforme à ce que l'on veut dire (si dans mon exemple on est très hostile à ce parti).
2) puisque l'on émarge en votant, en votant blanc par exemple au deuxième tour d'une présidentielle, on laisse croire que l'on a voté pour un candidat, alors que l'on veut très clairement refuser l'un et l'autre.
Cher Prodigal,
A mon tour permettez-moi de ne pas être d'accord avec vous.
Le bulletin blanc demande une participation au vote.
Aucune personne qui se désintéresse totalement de la politique de son pays n'ira porter un bulletin blanc (sauf pays où le vote est une obligation légale). Il y a donc bien une différence pour une grande majorité de ces 2 types de vote.
La différence serait comptabilisable si l'on comptait réellement les bulletins blancs pour ce qu'ils sont : vote pour quelqu'un d'autre que les candidats officiels, enveloppe vide…

ademimo
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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par ademimo » lun. 07 juin 2021, 16:47

PaxetBonum a écrit :
lun. 07 juin 2021, 9:40
prodigal a écrit :
dim. 06 juin 2021, 17:42
C'est pourquoi, tant qu'à faire, je préfèrerais ne pas me déplacer, ce qui est une manière de s'exprimer, comptabilisée, plutôt que de me défouler un peu puérilement, et je dirai, surtout si c'est mon vieux petit fond de royalisme qui parle! :rire:
Bonjour ,

Le bulletin blanc n'est pas comptabilisé comme l'abstention.
Aller mettre un bulletin personnalisé, une enveloppe vide… dans l'urne c'est montrer que l'on ne se désintéresse pas du sort de son pays mais qu'il n'y a rien d'acceptable de proposé.
Ne pas aller voter c'est se désintéresser du bien commun.

Voter est un devoir d'état.
Bonjour Paxetbonum,

Qui a décrété que ne pas voter était une marque de désintérêt ? C'est écrit dans quelle table de loi ?

En France, ne pas voter est un droit.
À l'Assemblée, à chaque vote, bon nombre de députés s'abstiennent.

L'abstention peut tout-à-fait être un choix lucide et délibéré. Et ça l'est pour une grande majorité d'abstentionnistes.

Le fameux mythe de l'électeur qui "oublie" de voter et va à la pêche. Ce sont surtout les médias qui colportent ce bon vieux cliché.

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Jean-Mic
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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par Jean-Mic » lun. 07 juin 2021, 17:02

ademimo a écrit :
lun. 07 juin 2021, 16:47
À l'Assemblée, à chaque vote, bon nombre de députés s'abstiennent.
Visiblement, vous n'avez pas lu mon précédent message :
Jean-Mic a écrit :
lun. 07 juin 2021, 11:54
ademimo a écrit :
dim. 06 juin 2021, 22:58
Où est le problème de s'abstenir ? À l'Assemblée, des députés s'abstiennent régulièrement aux votes lorsqu'ils ne souhaitent pas se prononcer. Je ne vois pas pourquoi l'électeur n'agirait pas de même.
Il y a une grande, une énorme différence entre l'abstention à une élection citoyenne, et à l'abstention au sein d'une assemblée.

S'abstenir à une élection citoyenne, c'est dénier toute légitimité au mandat électif en jeu.
S'abstenir à un vote au sein d'une assemblée dont on est membre, c'est, tout en reconnaissant la légitimité de l'assemblée en question, signifier que LA question est mal posée ou que LA ou les réponses proposées ne sont pas adéquates.
...
...
(extrait de mon message publié au bas la page précédente, ce même jour, 7 juin, à 11:54)
Heureux ceux qui savent rire d'eux-mêmes. Ils n'ont pas fini de s'amuser !

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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par ademimo » lun. 07 juin 2021, 17:15

Jean-Mic a écrit :
lun. 07 juin 2021, 11:54
ademimo a écrit :
dim. 06 juin 2021, 22:58
Où est le problème de s'abstenir ? À l'Assemblée, des députés s'abstiennent régulièrement aux votes lorsqu'ils ne souhaitent pas se prononcer. Je ne vois pas pourquoi l'électeur n'agirait pas de même.
Il y a une grande, une énorme différence entre l'abstention à une élection citoyenne, et à l'abstention au sein d'une assemblée.

S'abstenir à une élection citoyenne, c'est dénier toute légitimité au mandat électif en jeu.
S'abstenir à un vote au sein d'une assemblée dont on est membre, c'est, tout en reconnaissant la légitimité de l'assemblée en question, signifier que LA question est mal posée ou que LA ou les réponses proposées ne sont pas adéquates.

Prenons un exemple pris volontairement en dehors du champ politique (afin d'éviter tout querelle partisane). Imaginons un club de foot amateur évoluant en Départemental 6 (13ème division !) dont vous êtes adhérent. Lors de l'assemblée générale annuelle (où, en tant qu'adhérent, vous avez droit de vote), les dirigeants du club annoncent vouloir remplacer l'entraîneur, et proposent aussitôt deux noms pour lui succéder. Vous considérez au contraire que ce remplacement n'a pas lieu d'être, et que le club a tout intérêt à conserver le même entraîneur.
Si la première question posée est : faut-il virer l'entraîneur, et le remplacer par quelqu'un d'autre ?, vous voterez logiquement : non.
La majorité des adhérents ayant voté le remplacement, (ou, ce qui revient au même, si les dirigeants ont déjà pris la décision sans consultation, ce qui est prévu dans les statuts), la question est posée ainsi : par qui le remplacer ?, trois solutions s'ouvrent à vous :
- 1/ l'abstention, qui signifie alors que vous persistez à croire que la seule stratégie possible pour le club est de garder l'ancien entraîneur, et que son remplacement est dommageable pour le club et pour l'équipe,
- 2/ voter pour l'un des deux noms proposés, puisque, maintenant que le départ de l'ancien entraîneur est acté, autant choisir le meilleur successeur possible,
- 3/ voter pour l'un des deux noms proposés, parce que vous estimez qu'avec l'autre, le club et l'équipe seront en danger.

Certes, un club de foot amateur, ce n'est ni une démocratie (où les citoyens élisent leurs représentants), ni même une assemblée élue (Assemblée Nationale, conseil municipal, ou autre). Pourtant, l'alternative au moment de chaque vote est toujours la même :
-2/ voter pour le meilleur choix possible,
-3/ voter contre un des choix, pour "faire barrage" au pire (à chacun de savoir ce qu'est le pire),
ou, ... nous y revoilà :
-1/ s'abstenir, parce que la question elle-même, ou le mandat en jeu, n'a aucune légitimité, et qu'il est préférable d'attendre que le système s'écroule de lui-même.

Soyons plus précis encore, imaginons (ce qui ne risque pas d'arriver) que la question de l'avortement fasse l'objet d'un référendum national, et que la question posée aux électeurs soit : le délai légal de l'IVG doit-il être porté de 12 semaines à 26 semaines de grossesse ?
(Merci de ne répondre à cette question dans ce fil, dont le thème est celui de l'abstention. Si vous souhaitez réagir à cette question précise, il serait préférable de créer un nouveau fil.)
Les choix qui s'offrent à moi sont alors :
1/ je m'abstiens, parce que je condamne l'avortement, et que cette question n'a même pas à être posée. D'ailleurs, lorsque nous serons au pouvoir (ça peut prendre du temps), nous y mettrons enfin bon ordre,
3/ je vote pour le maintien du délai de 12 semaines, tout en continuant à condamner le principe de l'avortement, afin de ne pas aggraver encore la situation actuelle, déjà bien assez désastreuse, et d'éviter une dérive pire encore,
2/ je vote pour un allongement du délai jusqu'à 26 semaines, parce que je pense que c'est une bonne chose,
2 bis/ je vote pour le maintien du délai de 12 semaines, parce que je suis pour la liberté de l'avortement, mais que je considère que 12 semaines c'est un délai raisonnable.

Qui a dit que le rôle de citoyen était simple ?
(même si sur ce forum, je doute qu'on trouve grand monde de favorable aux choix 2 et 2 bis).
Le raisonnement me paraît gratuit. On peut très bien s'abstenir à une élection citoyenne sans en contester la légitimité (typiquement lorsqu'aucun des candidats ne nous convient, et que tous nous paraissent équivalents), de même qu'on peut contester la légitimité d'un vote à l'Assemblée (lorsque par exemple les débats ont été empêchés, et que l'opposition n'a pas eu l'occasion de s'exprimer, ce qui est arrivé plusieurs fois dans la législature actuelle : il est même arrivé, il me semble, que l'opposition décide de boycotter en bloc un vote et sorte de l'hémicycle).

Personne n'est dans la tête de l'électeur qui ne prend pas part au vote, et ne peut interpréter ses intentions (contester ou non une légitimité).

En outre, votre exemple de l'avortement me paraît incomplet. On peut très bien être contre l'avortement, et quand même participer au vote pour empêcher d'aggraver les lois actuelles.

Tout comme on peut être royaliste et quand même voter aux élections pour empêcher un mauvais candidat d'accéder aux responsabilités, ou au contraire voter pour lui en espérant un effondrement du régime.

Tous les cas de figure existent.

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Jean-Mic
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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par Jean-Mic » lun. 07 juin 2021, 17:43

ademimo a écrit :
lun. 07 juin 2021, 17:15
...
Tout comme on peut être royaliste et quand même voter aux élections pour empêcher un mauvais candidat d'accéder aux responsabilités, ou au contraire voter pour lui en espérant un effondrement du régime.

Tous les cas de figure existent.
Assez d'accord avec vous sur ces deux points, qui ne contredisent pas vraiment le sens de mon intervention.
ademimo a écrit :
lun. 07 juin 2021, 17:15
...
En outre, votre exemple de l'avortement me paraît incomplet. On peut très bien être contre l'avortement, et quand même participer au vote pour empêcher d'aggraver les lois actuelles.
En revanche, vous ne m'aviez pas bien lu. Ce cas est bien cité au n°3 de mon dernier paragraphe...
Heureux ceux qui savent rire d'eux-mêmes. Ils n'ont pas fini de s'amuser !

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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par Fernand Poisson » lun. 07 juin 2021, 19:45

Bonjour,

Catéchisme, n°2240 :
La soumission à l’autorité et la coresponsabilité du bien commun exigent moralement le paiement des impôts, l’exercice du droit de vote, la défense du pays
Il me semble que c'est assez clair.

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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par ademimo » lun. 07 juin 2021, 20:37

Fernand Poisson a écrit :
lun. 07 juin 2021, 19:45
Bonjour,

Catéchisme, n°2240 :
La soumission à l’autorité et la coresponsabilité du bien commun exigent moralement le paiement des impôts, l’exercice du droit de vote, la défense du pays
Il me semble que c'est assez clair.
Vu comme ça, oui. Mais comme toujours, ce genre d'avis demande à être contextualisé. Si par exemple l'armée a pour ordre de persécuter les catholiques, sous le prétexte de défendre le pays, l'exigence morale du point de vue de l'Église n'est plus la même. C'est la même chose pour le devoir de voter : cela n'a du sens, du point de vue catholique, que si le choix entre les candidats en présence a des conséquences significatives du point de vue de l'Église. Exemple : lorsqu'on a le choix entre des partis anticléricaux (radicaux, gauche en général) et des partis moins hostiles. Et c'est exactement dans ce sens que ce précepte figure au catéchisme. Lorsque Léon XIII reconnaît la République française et enjoint les catholiques français à s'engager dans la vie républicaine, c'est bien évidemment pour promouvoir les valeurs de l'Église. Mais lorsqu'on a le choix entre des candidats rigoureusement équivalents et autant délétères l'un que l'autre, ça n'a plus grand sens.

Personnellement, je me demande sincèrement si ça avait grand sens, d'un point de vue catholique, de choisir entre Hollande et Sarkozy (pour passer à un cas pratique), quoique ce soit une affaire d'opinion. C'est juste un exemple. Mais ce n'est pas toujours le cas, évidemment. Il y a aussi des cas où l'un des deux est franchement pire que l'autre. Et dans ce cas, nous avons le devoir moral de nous prononcer.

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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par prodigal » lun. 07 juin 2021, 20:52

Je crois que je vous suis très bien, cher ademimo.
En ce cas, il faut dire que l'abstention n'implique pas un refus d'exercer son droit de vote, lorsqu'elle est motivée par des raisons civiques. C'est bien cela? cela me va très bien en tous cas.
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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par ademimo » lun. 07 juin 2021, 22:05

prodigal a écrit :
lun. 07 juin 2021, 20:52
Je crois que je vous suis très bien, cher ademimo.
En ce cas, il faut dire que l'abstention n'implique pas un refus d'exercer son droit de vote, lorsqu'elle est motivée par des raisons civiques. C'est bien cela? cela me va très bien en tous cas.
Exactement, cher Prodigal. Tout est une affaire de contexte et de conscience.
Nous sommes adultes :)

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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par Kerygme » mar. 08 juin 2021, 10:17

Voter ou ne pas aller voter reste en effet du domaine de la conscience, mais je pense que cela reste la partie émergée de l'iceberg.
Ma conscience m'interroge plutôt sur : de nos jours qui fixe ce qu'est le bien commun ?

Dimanche après la messe je discutais avec une paroissienne, élue locale, qui me disait au cours d'une discussion à bâtons rompus : "en politique c'est une nécessité de mentir. Dans une même rue, le bien commun de celui qui habite en haut de la rue n'est pas le même que celui qui habite au milieu ou en bas de cette même rue. Il faut donc aller dans le sens de tous, beaucoup écouter et décider ce que sera l'intérêt commun; cela fait forcément des déçus puisque l'intérêt commun ne répondra pas forcément à ce qui reste des intérêts individuels". [NdA : il m'a semblé comprendre la soudaine transformation du bien commun en intérêt commun. L'un se tournant vers les autres, l'autre envers soi-même].

La concernant elle est catholique, croyante et pratiquante et je sais quelles valeurs humaines elle défend. Mais dans une société sécularisée, dans laquelle l'utilitarisme a pris le pas sur les valeurs morales, je renouvelle mon interrogation : qui fixe ce que doit être le bien commun ? Selon quel curseur ?

Finalement à défaut de réel bien commun, et dans une perspective de défendre les valeurs évangéliques, nous sommes peut être limités à devoir choisir entre Charybde et Scylla. Ne vouloir cautionner ni l'un ni l'autre, ne serait-ce pas prendre le risque de renforcer le pire des deux ?

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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par prodigal » mar. 08 juin 2021, 12:17

Cher Kérygme,
à votre question : "Qui fixe le bien commun?" je réponds "personne"!
C'est parce que l'homme est incapable de trouver des signes évidents du juste et du bien qu'il est condamné à la politique. Le fait qu'on se trompe souvent sur ce qu'est le vrai bien commun ne doit donc pas nous décourager de bien agir, au contraire. Si tout allait bien sans nous, nous pourrions demeurer en repos sans scrupule. :)
Mais cela implique aussi, évidemment, l'humilité de reconnaître que nous ne détenons pas la vérité.
Quant à choisir entre Charybde et Scylla, il faut se rappeler que nous ne sommes pas obligés de nous laisser enfermer dans une telle alternative. C'est si on se laisse prendre à ce piège que cela profitera au pire des deux.
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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par Kerygme » mar. 08 juin 2021, 14:07

Merci Prodigal pour votre réponse,
prodigal a écrit :
mar. 08 juin 2021, 12:17
à votre question : "Qui fixe le bien commun?" je réponds "personne"!
...
Quant à choisir entre Charybde et Scylla, il faut se rappeler que nous ne sommes pas obligés de nous laisser enfermer dans une telle alternative. C'est si on se laisse prendre à ce piège que cela profitera au pire des deux.
Si j'ai saisi le sens de votre propos - et en se basant sur un référentiel absolu - alors le bien commun ne serait que relatif même s'il est un bien meilleur ? Et inversement, sans ce référentiel il n'en serait que plus relatif car amoindri ?

C'est intéressant mais, et toujours si je ne pars pas aux antipodes, cela impliquerait que concernant la vie de la cité nous ne sommes pas capables de poser un bien objectif et que nous serions donc : condamnés à la politique.
Comme je considère qu'un mal ne peut qu'être objectif, alors tout bien relatif pour une majorité peut entraîner un mal objectif pour d'autres. Toute alternative serait alors un piège : celui de prétendre à un bien commun qui ne serait en fait qu'un moindre mal. Le faire en conscience ne ferait que légitimer "l'enfermement" que nous avons choisi.

Je croyais avoir entrevu une résolution possible de mon dilemme, finalement il est potentiellement inextricable et étrangement votre référence à la condamnation est apaisante.
Mais peut être n'est-ce dû qu'au fait que j'ai du mal à concevoir qu'un moindre mal puisse être acceptable comme bien commun, même relatif.
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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par prodigal » mar. 08 juin 2021, 14:44

Cher Kérygme,
il ne faut pas confondre absolu et objectif. Nos discussions en tant que citoyens à propos du bien commun peuvent très bien intégrer des données objectives, sans qu'il faille leur accorder une valeur absolue. De fait, je ne vois pas comment ce qui est terrestre pourrait être absolu.
Et donc votre suggestion me plaît. Puisque le bien commun est toujours relatif (et susceptible d'être concurrencé par un bien plus grand), alors oui, sans doute, faire de la politique c'est rechercher le moindre mal. Et le moindre mal est un bien. La victoire des alliés sur le nazisme fut un bien, malgré toutes les compromissions qu'elle impliqua par rapport au régime soviétique.
Il me semble qu'un chrétien particulièrement doit, en effet, renoncer à rechercher l'absolu dans la politique. "Nous n'avons d'autre Dieu que César" est la parole prononcée par la foule qui conduit à la mort du Christ, et condamne ceux qui la prononcent. Ce n'est probablement pas par hasard si les dérives totalitaires se sont produites après une vaste déchristianisation, qui les a rendues possibles.
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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par Kerygme » mar. 08 juin 2021, 15:45

Merci Prodigal pour votre patience qui compense mon impatience.
prodigal a écrit :
mar. 08 juin 2021, 14:44
Et le moindre mal est un bien.
Même si je comprends votre exemple, je crois que c'est avec cela que je bute. Je n'y vois qu'un oxymore et j'ai du mal à conceptualiser les deux ensemble. Dieu pouvant sortir un bien d'un mal cela je le comprends, un bien étant la résultante d'un mal, cela me cause un blocage.
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Re: Ne pas aller voter est-ce un péché ?

Message non lu par Jean-Mic » mar. 08 juin 2021, 16:31

ademimo a écrit :
lun. 07 juin 2021, 20:37
... Personnellement, je me demande sincèrement si ça avait grand sens, d'un point de vue catholique, de choisir entre Hollande et Sarkozy (pour passer à un cas pratique), quoique ce soit une affaire d'opinion. C'est juste un exemple. Mais ce n'est pas toujours le cas, évidemment. Il y a aussi des cas où l'un des deux est franchement pire que l'autre. Et dans ce cas, nous avons le devoir moral de nous prononcer.
Tout à fait d'accord ! Comme vous le dites : Il y a aussi des cas où l'un des deux est franchement pire que l'autre. C'est clairement ce qu'ont pensé des centaines de milliers d'électeurs français avec ce qu'il est maintenant convenu d'appeler "le front républicain" qui s'est produit à deux reprises au deuxième tour des Présidentielles : en 2002 avec Jacques Chirac contre Jean-Marie Le Pen, et 2017 avec Emmanuel Macron contre Marine Le Pen. On parle également dans ce cas de "faire barrage", et on pourrait le traduire plus simplement encore par "tout mais pas ça !" Il est intéressant de noter que ces votes-barrages ont été pour une large part un choix personnel des citoyens-électeurs, et non un appel des appareils électoraux des éliminés du premier tour (même s'il y en a eu).

Cet exemple montre encore une fois s'il le faut, que les choix électoraux sont d'abord des choix individuels relevant de la conscience de chacun (ce qu'on appelle dans le jargon philosophique repris par les cathos, le for intérieur). Certains diront que j'enfonce une porte ouverte en écrivant cela, mais ce n'était peut-être pas inutile de le rappeler devant les injonctions des uns (les partis) et des autres (les réseaux sociaux). :D
Heureux ceux qui savent rire d'eux-mêmes. Ils n'ont pas fini de s'amuser !

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