Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Règles du forum
Forum de discussions entre personnes de bonne volonté sur la doctrine sociale, politique, économique et écologique de l'Église
Forum de discussions entre personnes de bonne volonté sur la doctrine sociale, politique, économique et écologique de l'Église
- Pneumatis
- Pater civitatis
- Messages : 1937
- Inscription : jeu. 19 févr. 2009, 17:22
- Localisation : Châteaubriant
- Contact :
Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Oups, Jean-Baptiste, nos messages se sont croisés... du coup dans le dernier vous revenez sur la notion de pouvoir et, je radote, mais j'avoue que cela m'intéresserai grandement d'approfondir cette notion de pouvoir et sa "prétendue" nécessité.
Site : http://www.pneumatis.net/
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
-
- Pater civitatis
- Messages : 3085
- Inscription : mer. 30 avr. 2008, 2:40
Re: Peut-on être catholique et socialiste ?
Oui, je crois que vous avez bien saisi la nature du débat qui se jouait entre Virgile et moi cher Pneumatis
La question de la nécessité d'un gouvernement n'est pas un sujet que j'ai beaucoup travaillé. Ma réponse va donc être brève et sans doute insuffisante.
Je crois profondément que l'anarchie, au sens strict d'absence de gouvernement constitué par une poignée d'hommes, est impossible car, tout simplement, les hommes ne désirent et ne peuvent pas tous gouverner.
Il est des hommes qui n'ont aucun désire de gouverner ; il est des hommes qui désire uniquement gouverner un petit nombre en vue de la réalisation d'objets, de biens etc. (entreprises) ; il est des hommes qui sont avant tout des "éminences grises" (conseillers) etc.
En mettant de côté la question de la difficile organisation d'une société anarchique, je la crois tout simplement impossible car les hommes sont par nature divers et n'aspirent pas aux mêmes choses dans la vie "mondaine" (ici-bas).
Et c'est précisément pour cette raison que je ne crois pas en la démocratie.
La démocratie suppose, pour bien fonctionner, que tous les citoyens se soucient du politique, du bien commun (ou de l'intérêt général aujourd'hui). Mais ce soucis n'est dans les faits pas celui de tous ! Il suffit de revoir les débats qui eurent lieu avant les dernières élections présidentielles : "Bonjour je suis alcooliques, allez-vous interdire la publicité pour l'alcool ?" ; "Bonjour je suis viticulteur, allez-vous enlever les lois qui pèsent sur la promotion de nos vins, produit culturel français ?".
Imaginez si l'Église n'avait pas de magistère ? Nous nous retrouverions dans la même situation que les protestants. D'un côté des fondamentalistes qui ont une lecture ultra-littérale de la Bible, de l'autre des libéraux qui peuvent vous expliquer qu'être chrétient et musulman c'est possible...
D'ailleurs personne ne croit en la démocratie. La démocratie n'existe pas. Prenons la France, c'est une monarchie (Président), matinée d'aristocratie (Sénat), fondée sur les élections qui lui donne une couleur de démocratie. Nous croyons que c'est une démocratie, mais structurellement ça n'en est pas une. Et ce "mensonge" est grave ! Car dans les faits l'exercice du pouvoir devient de plus en plus difficile à cause de cette croyance. Les français se croient habilités à gueuler dès que leur intérêt particulier est en jeu parce qu'ils se croient en démocratie. Cela créé des lobbys qui ne représentent même pas l'intérêt général (quand bien même cet intérêt général existerait), mais seulement l'intérêt particulier de ceux qui gueulent le plus fort.
Et ce problème est inévitable puisque l'on nous fais croire que le bien commun c'est l'intérêt général conçu comme somme des intérêts particuliers. Or, le politique ne devrait rien à voir avec les intérêts TOUT COURT. Le politique a à voir avec le bon gouvernement de la cité en vue de la réalisation de sa fin propre, de son bien propre.
La démocratie n'était possible que chez les Anciens pour qui le peuple était constitué des hommes (mâles) libres (disposant d'esclaves pour les libérer des tâches de la vie quotidienne privée) ayant tout temps à se consacrer aux affaires publiques, et ne souffrant d'aucuns besoins biologiques les poussant à agir pour leur bien particulier (dans l'idéal).
En dehors de cela la démocratie est impossible, et l'anarchie encore moins. Car, soyons clair, la pure démocratie est anarchie. Si le pouvoir est à tout le peuple, alors chaque individu dispose du même pouvoir, ce qu'est typiquement l'anarchie. Et c'est pour cette raison que dans nos pays prétendument démocratique l'autorité est inacceptable. Nous sommes dans des sociétés composés d'hommes qui rêvent sans le savoir d'anarchie parce que se croyant en démocratie, revendiquent selon les droits que leur donnent la démocratie, mais refusent les responsabilités que supposent cette forme de gouvernement.
Comme je le disais ailleurs : notre monde contemporain est une bombe atomique, pour différentes raisons il exige un surcroit de responsabilité. Et comme par hasard c'est précisément à ce moment que la déresponsabilisation s'accentue (mais c'est un autre sujet !).
La question de la nécessité d'un gouvernement n'est pas un sujet que j'ai beaucoup travaillé. Ma réponse va donc être brève et sans doute insuffisante.
Je crois profondément que l'anarchie, au sens strict d'absence de gouvernement constitué par une poignée d'hommes, est impossible car, tout simplement, les hommes ne désirent et ne peuvent pas tous gouverner.
Il est des hommes qui n'ont aucun désire de gouverner ; il est des hommes qui désire uniquement gouverner un petit nombre en vue de la réalisation d'objets, de biens etc. (entreprises) ; il est des hommes qui sont avant tout des "éminences grises" (conseillers) etc.
En mettant de côté la question de la difficile organisation d'une société anarchique, je la crois tout simplement impossible car les hommes sont par nature divers et n'aspirent pas aux mêmes choses dans la vie "mondaine" (ici-bas).
Et c'est précisément pour cette raison que je ne crois pas en la démocratie.
La démocratie suppose, pour bien fonctionner, que tous les citoyens se soucient du politique, du bien commun (ou de l'intérêt général aujourd'hui). Mais ce soucis n'est dans les faits pas celui de tous ! Il suffit de revoir les débats qui eurent lieu avant les dernières élections présidentielles : "Bonjour je suis alcooliques, allez-vous interdire la publicité pour l'alcool ?" ; "Bonjour je suis viticulteur, allez-vous enlever les lois qui pèsent sur la promotion de nos vins, produit culturel français ?".
Imaginez si l'Église n'avait pas de magistère ? Nous nous retrouverions dans la même situation que les protestants. D'un côté des fondamentalistes qui ont une lecture ultra-littérale de la Bible, de l'autre des libéraux qui peuvent vous expliquer qu'être chrétient et musulman c'est possible...
D'ailleurs personne ne croit en la démocratie. La démocratie n'existe pas. Prenons la France, c'est une monarchie (Président), matinée d'aristocratie (Sénat), fondée sur les élections qui lui donne une couleur de démocratie. Nous croyons que c'est une démocratie, mais structurellement ça n'en est pas une. Et ce "mensonge" est grave ! Car dans les faits l'exercice du pouvoir devient de plus en plus difficile à cause de cette croyance. Les français se croient habilités à gueuler dès que leur intérêt particulier est en jeu parce qu'ils se croient en démocratie. Cela créé des lobbys qui ne représentent même pas l'intérêt général (quand bien même cet intérêt général existerait), mais seulement l'intérêt particulier de ceux qui gueulent le plus fort.
Et ce problème est inévitable puisque l'on nous fais croire que le bien commun c'est l'intérêt général conçu comme somme des intérêts particuliers. Or, le politique ne devrait rien à voir avec les intérêts TOUT COURT. Le politique a à voir avec le bon gouvernement de la cité en vue de la réalisation de sa fin propre, de son bien propre.
La démocratie n'était possible que chez les Anciens pour qui le peuple était constitué des hommes (mâles) libres (disposant d'esclaves pour les libérer des tâches de la vie quotidienne privée) ayant tout temps à se consacrer aux affaires publiques, et ne souffrant d'aucuns besoins biologiques les poussant à agir pour leur bien particulier (dans l'idéal).
En dehors de cela la démocratie est impossible, et l'anarchie encore moins. Car, soyons clair, la pure démocratie est anarchie. Si le pouvoir est à tout le peuple, alors chaque individu dispose du même pouvoir, ce qu'est typiquement l'anarchie. Et c'est pour cette raison que dans nos pays prétendument démocratique l'autorité est inacceptable. Nous sommes dans des sociétés composés d'hommes qui rêvent sans le savoir d'anarchie parce que se croyant en démocratie, revendiquent selon les droits que leur donnent la démocratie, mais refusent les responsabilités que supposent cette forme de gouvernement.
Comme je le disais ailleurs : notre monde contemporain est une bombe atomique, pour différentes raisons il exige un surcroit de responsabilité. Et comme par hasard c'est précisément à ce moment que la déresponsabilisation s'accentue (mais c'est un autre sujet !).
- Pneumatis
- Pater civitatis
- Messages : 1937
- Inscription : jeu. 19 févr. 2009, 17:22
- Localisation : Châteaubriant
- Contact :
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Oups, je viens de répondre dans l'autre fil !!! Bref pour dire que j'avais posé il y a quelques temps cette question, restée sans réponse, ici : http://www.cite-catholique.org/viewtopi ... 173#p81173
EDIT : je recolle le contenu de ma réponse sur l'autre fil :
Je suis d'accord avec votre analyse Jean-Baptiste. Je ne parlais pas de l'anarchie comme de l'absence de gouvernement, mais comme l'absence de "pouvoir" ou d'autorité coercitive, supposant donc implicitement (c'est ma question en tout cas) qu'il puisse exister un gouvernement uniquement de droits et de devoirs.
EDIT : je recolle le contenu de ma réponse sur l'autre fil :
Je suis d'accord avec votre analyse Jean-Baptiste. Je ne parlais pas de l'anarchie comme de l'absence de gouvernement, mais comme l'absence de "pouvoir" ou d'autorité coercitive, supposant donc implicitement (c'est ma question en tout cas) qu'il puisse exister un gouvernement uniquement de droits et de devoirs.
Ben oui ben oui !!! Il existe le fil, et il attend toujours des bonnes âmes : http://www.cite-catholique.org/viewtopi ... 173#p81173Virgile a écrit :Quand à la question posée par Pneumatis, il s'agit-là d'une question très intéressante mais qui n'a qu'un rapport très indirect avec la question du fil. Mais il faudrait sans doute en ouvrir un autre.
Site : http://www.pneumatis.net/
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
-
- Pater civitatis
- Messages : 3085
- Inscription : mer. 30 avr. 2008, 2:40
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Je vais répondre à votre question ici, puisqu'elle rejoint un peu les propos de Christian.Je suis d'accord avec votre analyse Jean-Baptiste. Je ne parlais pas de l'anarchie comme de l'absence de gouvernement, mais comme l'absence de "pouvoir" ou d'autorité coercitive, supposant donc implicitement (c'est ma question en tout cas) qu'il puisse exister un gouvernement uniquement de droits et de devoirs.
Je crois qu'il faut en finir avec la liaison qui est souvent faite entre "pouvoir" et "coercition". Tour pouvoir est nécessairement coercitif et libérateur si nous concevons la liberté comme un mécanisme.
Pour libérer un objet d'un étau je dois forcer cet étau à sortir de son état initial.
La seule manière de considérer que le pouvoir est nécessairement coercitif est de penser la liberté selon le modèle mécaniste d'un Hobbes, d'un Locke etc. Or ce modèle suppose que la liberté ne peut être que liée à la coercition. Toute liberté impose une coercition, et inversement.
Dès lors l'argument qui consiste à dire que si le politique est pouvoir coercitif impose de reconnaître que le politique est pouvoir libérateur.
Mais la liberté peut-être entendue en un autre sens. Et au sens politique originel, la liberté c'est la possibilité de pouvoir s'exprimer oralement dans l'espace public et de pouvoir y agir de manière pleinement responsable. Un droit : agir et s'exprimer ; un devoir : assumer la responsabilité de son acte et de sa parole.
Un gouvernement est donc par essence fondé sur des droits et des devoirs en vue de la réalisation de la finalité de la cité, de son bien. Et le pouvoir dit "coercitif" de la police n'est normalement là que pour empêcher les infractions au droit et les manquements au devoir.
L'existence d'une Congrégation pour la doctrine de la foi vous semble-t-elle absurde ? Pourtant elle joue précisément ce rôle, entre autre, coercitif de "mise-au-pas" des doctrines non conformes à la doctrine catholique. Cette Congrégation vous semble-t-elle l'ennemi de la liberté ?
Pensez à l'Église, c'est un gouvernement.
-
- Pater civitatis
- Messages : 3085
- Inscription : mer. 30 avr. 2008, 2:40
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Ça devient un sacré bazarBen oui ben oui !!! Il existe le fil, et il attend toujours des bonnes âmes : viewtopic.php?p=81173#p81173
Je propose que la discussion autour de la notion de pouvoir continue ici.
- Pneumatis
- Pater civitatis
- Messages : 1937
- Inscription : jeu. 19 févr. 2009, 17:22
- Localisation : Châteaubriant
- Contact :
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Ben non justement ! Elle exerce une fonction de discernement, mais ne force personne à s'y soumettre. Parlons du modèle du royaume divin : Dieu sauve l'homme mais pas malgré lui : avec lui. Il respecte entièrement sa liberté et, fondamentalement n'exerce aucune forme de coercition. J'exclus d'avance les dérives potentielles sur les nombreux exemples de l'ancien testament dont la portée est purement pédagogique pour montrer le cheminement interne à l'humanité dans sa rédemption. Contentons-nous de ce que Jésus nous enseigne, et de ce principe premier que tout catholique comprends bien : celui de la liberté, celle-là même qui permet l'existence du mal tout en ne le voulant pas, etc...jeanbaptiste a écrit :L'existence d'une Congrégation pour la doctrine de la foi vous semble-t-elle absurde ? Pourtant elle joue précisément ce rôle, entre autre, coercitif de "mise-au-pas" des doctrines non conformes à la doctrine catholique.
N'y a-t-il pas dans le gouvernement divin le modèle même d'une liberté absolue, sans coercition ? C'est sur ce principe même que repose la foi : Dieu ne se démontre pas par des évidences, Il se donne à croire pour qu'ainsi même notre liberté de le penser soit respectée.
Bref, donc l'exemple de l'Eglise justement, si vous voulez aller par là, me semble plutôt être un modèle d'anarchie (au sens où je le définis). L'Eglise n'a comme seul pouvoir que d'exclure un membre, ou de le priver de sa fonction au sein de l'Eglise. Tout comme une entreprise n'a comme seul pouvoir sur moi que de me virer (enfin je crois, arrêtez-moi si je dis une bêtise, et avant que je ne fasse une bêtise )
Je crois (pour l'instant) qu'on ne peut que déplorer la coercition. A sa place devrait être la collaboration. Bon, on n'est pas là pour se répéter sans fin ce qui est utopique ou pas, ce n'est pas le propos. Prenons l'exemple d'un corps humain. Même avec ses défenses immunitaires, mais avec une hiérarchie bien définie, tous les membres, y compris le cerveau, sont dans un rapport de collaboration et non pas de coercition. La coercition n'aurait aucun sens. C'est bien qu'à l'échelle sociale cela doit être possible, au moins dans la théorie. La difficulté avec le corps social c'est que les membres sont libres et non pas collaborateurs "a priori".
Si je ne me trompe pas, alors il faut ensuite se demander ce que cela suppose. J'avais commencé à émettre des hypothèses là-dessus : par exemple que la finalité de l'ordre social et ses mécanismes rationnels soient accessibles à l'intelligence de ses membres (même principe que pour la foi). Voilà des pistes... je vais y réfléchir encore.
En tout cas merci merci beaucoup de vous pencher avec moi sur cette question.
Site : http://www.pneumatis.net/
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
-
- Pater civitatis
- Messages : 3085
- Inscription : mer. 30 avr. 2008, 2:40
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Oui. En fait, je crois que le terme de coercition n'est effectivement pas adapté. Je l'avais pris en un sens trop large et flou, et non en son sens précis de "forcer quelqu'un a".L'Eglise n'a comme seul pouvoir que d'exclure un membre, ou de le priver de sa fonction au sein de l'Eglise.
Vous avez entièrement raison sur ce point. L'Église n'use plus de moyens coercitifs.
Dès lors, la seule solution pour nos États, la seule solution qu'ils ont pour abandonner la coercition, c'est de réhabiliter l'exil.
Et, comme par hasard, nous retrouvons le modèle antique
P.S. : en revanche je ne partage pas la vision que vous vous faites de l'anarchie. L'anarchie ne connait ni autorité, ni coercition, ni exclusion, ni privation de quoi que ce soit. L'Église n'est en ce sens absolument pas anarchique.
- Christophe
- Consul
- Messages : 7674
- Inscription : mer. 28 avr. 2004, 0:04
- Conviction : Catholique
- Localisation : Frankistan
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Dès lors que vous ne considérez l'autorité politique que comme une force coercitive - donc opposée à la liberté -, vous ne pouvez que souhaiter sa disparition. Mais l'autorité politique ne s'exerce légitimement qu'en vue du bien commun, entre autre pour protéger les droits - dont celui à la liberté - des citoyens. A l'état "apolitique", la loi commune est la loi du plus fort, où chacun peut avoir une morale mais elle n'engage que lui. Dans l'état politique, une morale est imposée non à la conscience individuelle mais aux comportements sociaux.
Dans la Cité de Dieu, il n'y a pas besoin de politique car le vice n'y a aucune place. Dans la Cité des hommes, l'autorité politique est légitime - et même nécessaire - pour faire régner l'ordre juste. Quelque soit la forme prise par ce pouvoir politique.
Mais je n'ai peut-être pas bien compris la question. Est-ce Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ? ou Un pouvoir politique est-il nécessaire ? ou L'usage de la coercition par l'autorité politique est-elle nécessaire ?
Que la Paix soit avec vous.
Christophe
Dans la Cité de Dieu, il n'y a pas besoin de politique car le vice n'y a aucune place. Dans la Cité des hommes, l'autorité politique est légitime - et même nécessaire - pour faire régner l'ordre juste. Quelque soit la forme prise par ce pouvoir politique.
Mais je n'ai peut-être pas bien compris la question. Est-ce Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ? ou Un pouvoir politique est-il nécessaire ? ou L'usage de la coercition par l'autorité politique est-elle nécessaire ?
Que la Paix soit avec vous.
Christophe
« N'ayez pas peur ! » (365 occurrences dans les Écritures)
- Christophe
- Consul
- Messages : 7674
- Inscription : mer. 28 avr. 2004, 0:04
- Conviction : Catholique
- Localisation : Frankistan
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Et encore, l'application de cette mesure nécessite l'usage d'une force coercitive...jeanbaptiste a écrit :Dès lors, la seule solution pour nos États, la seule solution qu'ils ont pour abandonner la coercition, c'est de réhabiliter l'exil.
« N'ayez pas peur ! » (365 occurrences dans les Écritures)
-
- Pater civitatis
- Messages : 3085
- Inscription : mer. 30 avr. 2008, 2:40
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Oui, c'est ce à quoi je pensais juste après ma réponse. Pensons à la Congrégation pour la doctrine de la foi et l'affaire de la théologie de la libération. Il a bien fallut que la Congrégation impose aux théologiens sa décision concernant le caractère hérétique de leurs concepts.Et encore, l'application de cette mesure nécessite l'usage d'une force coercitive...
"Reconnaissez que vos propos sont hérétiques, ou vous serez excommuniés" est une forme de coercition au sens ou quelque chose est imposé.
Je reviens donc sur ce que j'ai dit !
Dans le fond, le problème reste celui du rapport que nous entretenons, nous autres modernes, avec l'autorité Encore et toujours !
- Pneumatis
- Pater civitatis
- Messages : 1937
- Inscription : jeu. 19 févr. 2009, 17:22
- Localisation : Châteaubriant
- Contact :
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Oui du coup le terme d'anarchie n'est peut-être pas bien choisi. Je l'ai pris au strict plan étymologique. A vrai dire, j'ai commencé à réfléchir à cette idée d'anarchie en lisant sur ce forum, et en particulier je me souviens des post de Christian sur ce sujet. Pourtant je lui ai déjà objecté quelque chose (si il repasse par ici, il pourra peut-être me répondre). Comme dans son dernier message, il a cadré un peu sa conception du droit et, ce qu'on pourrait dire, des limitations de liberté : en tant qu'elles ne portent pas atteinte à l'intégrité physique d'autrui. J'ai l'impression, après toute la démonstration des principes de liberté, que de dire "sauf là" c'est un peu botter en touche. Je m'explique.
- d'abord, je l'ai déjà fait remarquer il y a quelques temps, l'idée d'une priorité de l'intégrité physique sur le droit est purement arbitraire. L'homme ne se limite pas à son physique. Donc pourquoi ne voudrions-nous pas, dans le même esprit, étendre ce principe à l'intégrité morale, spirituelle, ... Et du coup, allez hop, censurer tout acte qui pourrait nuire au salut de l'humanité.
- ça revient à dire exactement ce que dit Jean-Baptiste, c'est-à-dire que dans ses derniers retranchements le droit a nécessairement une application coercitive
J'ai l'impression que si on veut parler d'anarchie, il faut aller jusqu'au bout de l'idée, et croire (peut-être qu'il y faut la foi) que les moyens de préservation du bien des individus et de leur liberté existent sans qu'on ait à nuire au bien et à la liberté en prétendant les défendre.
Je parlais de l'intelligence : lorsque tous les membres sont dans l'intelligence des fins de l'ordre social auquel ils appartiennent, on peut imaginer qu'ils en comprennent leur fonction. Ainsi, à la contrainte peut se substituer par exemple l'obéissance. C'est le cas dans l'Eglise par exemple. C'est encore le cas dans une entreprise (dans le cas de ceux qui ne bossent pas que pour avoir un salaire à la fin du mois). C'est ce que j'appelle le sentiment d'être "tous dans le même bateau". En sociologie, on constate que ce "sentiment" est exacerbé, voire omniprésent, quand existe face au groupe un but supra-ordonné. Exemple une guerre internationale : il y a tout de suite beaucoup moins de tensions intra. Sentiment d'appartenir à un même groupe, une cause commune. Bon là, la question est de savoir si il n'y a pas des moyens un peu moins ravageurs pour conduire une société à cette forme d'unité.
Puis il y a la volonté ensuite, disons même ce le principe de liberté lui-même : c'est là qu'il entre en jeu. J'avoue en connaitre bien mal les mécanismes. Il me semble a priori que, de deux intelligences libres ayant accédé aux mêmes principes, les volontés sont nécessairement conformes. Mais cela suppose qu'il existe naturellement, dans la pleine liberté, une volonté du bien, de l'ordre, et que la volonté du désordre n'existe pas, qu'elle n'est juste qu'une forme de servitude.
Ensuite, de ce que j'ai envisagé précédemment, l'application d'une justice intra pourrait avoir plusieurs formes :
1/ soit de corriger une déviance : conduire un membre à revenir dans l'ordre. Suppose, comme vu précédemment, d'éclairer son intelligence, car si il est dans la déviance ce ne peut être que par ignorance des fins recherchées par la société à laquelle il veut appartenir
2/ soit d'éveiller sa volonté : là il s'agit d'une forme de libération. La volonté ne peut pas s'exercer que lorsqu'elle est incarcérée dans des manies, des addictions, des désirs ou toute chose qui nuit à son exercice. L'exercice de la volonté c'est justement ce que permet la liberté. Donc on peut imaginer que la justice ait des mécanismes de libération de ses membres de leurs servitudes. Et là... peut-être, pourquoi pas, même si cela parait paradoxale, imaginer des formes de prison, comme on cloisonne des drogués pour des cures de désintoxication, quand c'est surtout pour le bien et la libération de l'individu bien évidemment. Je cite cet exemple juste parce qu'il pourrait paraitre paradoxale mais qu'il ne faut pourtant pas l'exclure. C'est pour bien marquer la différence entre la technique d'application de la justice et la fin recherchée. Dans ce cas précis, emprisonner une personne pour la libérer d'un mal qui la possède, c'est comme empêcher quelqu'un de se jeter par la fenêtre, ce n'est pas coercitif, c'est libérateur. Je sens que c'est ce point qui va le plus faire débat.
3/ soit de l'exclure du groupe quand, de sa pleine volonté et en pleine connaissance de cause le membre refuse de se soumettre à l'ordre social. Il y en a qui justifient par là la peine de mort, mais je crois que le bannissement n'a rien à voir, car il souligne bien, même en retranchant à la société un de ses membres, que la personne existe par-delà même le corps social. Après, la difficulté de ce point à résoudre c'est dans le cas d'une seule société universel, d'un seul ordre social... on le met où le membre récalcitrant ? Ce qui amène la question : cette possibilité d'exclusion n'est-elle finalement pas tout simplement impossible dans le cas, typique d'un ordre universel, où la vérité qui ordonne le groupe serait LA VERITE universelle : alors il serait impossible, dans les faits et grâce à Dieu, de refuser de s'y soumettre dès lors qu'on en a l'intelligence et la liberté.
Bon voilà des pistes de réflexion. Le point 2 me semble délicat parce que pour faire la différence entre un acte contraignant et un acte libérateur, c'est exactement ce que vous disiez Jean-Baptiste, ils semblent quasi indissociables. J'avoue maintenant douter. Je crois qu'il faut absolument approfondir cette question. Par contre, ici je ne l'ai évoqué que dans le cadre du droit et de sa protection. Il me semble qu'on puisse plus facilement extraire de tous ces cas les lois coercitives type préventives.
Exemple (ce sera plus simple, je prends le premier truc qui me passe par la tête) : dans une société idéale on n'interdit pas aux gens de rouler à plus de 50km/h en ville, mais on les informe, de manière à ce qu'ils intègrent parfaitement cette notion, du danger encouru pour eux et pour les autres. On imagine alors qu'une grande majorité, ayant grandement confiance dans cet enseignement, et ayant en plus compris rationnellement les rapports de cause à conséquence, va se garder librement de dépasser cette vitesse. Cependant une personne un jour ne respectera pas ce "commandement" (enseignement) :
1/ soit qu'elle n'en aura pas été suffisamment informée
2/ soit qu'elle sera trop pressé, ou qu'elle aimera trop la vitesse, et donc qu'elle aura perdu de vue le bien commun
3/ soit que la notion de respect de la vie lui est futile et que, même si elle la comprend, elle refuse de s'y soumettre
Dans tous les cas, la première question est forcément : faut-il laisser faire jusqu'à ce qu'il arrive un drame ? Ma réponse est non.
1/ si la personne n'a pas suffisamment compris les enjeux et les risques, il faut donc redoubler d'enseignement. Peut-on le faire de force ? non.
2/ si la personne est asservie à un comportement désordonné, il faut la délivrer. Peut-on le faire de force ? oui et non. Ici la "délivrance" est nécessairement par la force, mais une force à laquelle la personne aura librement acceptée de se soumettre. Un peu comme un drogué qui entre librement en maison de désintoxication, ou quelqu'un qui entre librement à l'hopital psychiatrique pour se faire soigner. C'est évidemment à évaluer à l'aune du premier point : dans quelle mesure la personne a-t-elle suffisamment conscience des dangers et, malgré cela, se sent emprisonnée dans un comportement dont elle aimerait se défaire ?
3/ dans les cas où, la liberté de l'individu respectée et sa conscience acquise, il n'est pas permis d'attendre de cet individu qu'il se soumettre librement aux points précédents, il s'exclue par là-même de l'ordre social auquel il appartenait (ce qu'on appelle dans l'Eglise la désobéissance ecclésiale). Il doit donc être exclu du groupe.
Là j'ai pris un exemple d'un cas qui peut porter atteinte à l'intégrité physique des personnes, mais ce cas pourrait s'appliquer à n'importe quoi. Même pour les exemples de Christian. Par exemple, fumer un joint, si le corps social a atteint dans sa quête de l'idéal à l'idée que c'était mauvais pour le corps social, alors selon le même principe, il doit en informer parfaitement et rationnellement ses membres, et si ceux-ci, informés mais n'arrivant pas malgré eux à cesser ce comportement, en appellent à une délivrance, alors mettre en œuvre les procédures permettant cette délivrance.
Évidemment je survole les situations, des problèmes très complexes, mais pour l'instant le seul pouvoir coercitif, s'il en est un, que je vois dans mon modèle, c'est celui d'exclure le membre du groupe, comme vous l'avez souligné avec Christophe. Mais on pourrait non plus le voir comme une force coercitive, dans le sens où je considère la coercition comme étant uniquement la contrainte sur un membre de l'ordre. Si le membre s'est exclu lui-même de sa propre volonté de l'ordre social, par désobéissance par exemple (on pense aux excommunication latae sententia par exemple), il appartient donc au corps social de le traiter comme un "corps étranger". L'exclusion n'est alors que la formalisation de ce fait.
Ouh la la, rien à voir, mais je viens soudain de repenser à quelque chose qui dépasse clairement la notion de droit et de devoir : la question du sacré et de l'interdit qui fonde le sacré. Cette question de la nécessité des interdits comme fondateurs du sacré, est-elle abolie dans le christianisme ? (je dirai que oui, avec notamment la levée des interdits alimentaires). Si oui, alors par analogie, une société vraiment éclairée par le bien commun n'aurait de sacré que ce qui transcende véritablement l'homme et lui serait de toute façon inaccessible. Tout interdit, dont on sait avec le recul qu'ils ont une valeur pédagogique comme un voile sur le mystère divin non encore pleinement révélé, serait forcément rendu inutile par le seul fait que tout est révélé, tout est accompli. Bref, dans ce cas, une société sans interdit ne peut être qu'une société véritablement chrétienne, car nécessairement universelle.
Dans le cas contraire, la notion de sacré vient nécessairement habiter les bornes dans lesquelles s'encadre une société non universelle, et les interdits sont rendus nécessaires comme délimitant le sacré du profane. On en revient alors aux gardiens de la cité platonicienne, qui sont aux frontières de la cité, là à l'extrême démarcation, au-delà de laquelle le profane pense que l'ordre s'arrête, tandis que l'initié, à la frontière, sait que cette frontière n'est que la limite de l'ordre de sa cité et qu'au-delà existe une autre ordre inconnu et dans lequel sa cité est potentiellement un élément de désordre.
- d'abord, je l'ai déjà fait remarquer il y a quelques temps, l'idée d'une priorité de l'intégrité physique sur le droit est purement arbitraire. L'homme ne se limite pas à son physique. Donc pourquoi ne voudrions-nous pas, dans le même esprit, étendre ce principe à l'intégrité morale, spirituelle, ... Et du coup, allez hop, censurer tout acte qui pourrait nuire au salut de l'humanité.
- ça revient à dire exactement ce que dit Jean-Baptiste, c'est-à-dire que dans ses derniers retranchements le droit a nécessairement une application coercitive
J'ai l'impression que si on veut parler d'anarchie, il faut aller jusqu'au bout de l'idée, et croire (peut-être qu'il y faut la foi) que les moyens de préservation du bien des individus et de leur liberté existent sans qu'on ait à nuire au bien et à la liberté en prétendant les défendre.
Je parlais de l'intelligence : lorsque tous les membres sont dans l'intelligence des fins de l'ordre social auquel ils appartiennent, on peut imaginer qu'ils en comprennent leur fonction. Ainsi, à la contrainte peut se substituer par exemple l'obéissance. C'est le cas dans l'Eglise par exemple. C'est encore le cas dans une entreprise (dans le cas de ceux qui ne bossent pas que pour avoir un salaire à la fin du mois). C'est ce que j'appelle le sentiment d'être "tous dans le même bateau". En sociologie, on constate que ce "sentiment" est exacerbé, voire omniprésent, quand existe face au groupe un but supra-ordonné. Exemple une guerre internationale : il y a tout de suite beaucoup moins de tensions intra. Sentiment d'appartenir à un même groupe, une cause commune. Bon là, la question est de savoir si il n'y a pas des moyens un peu moins ravageurs pour conduire une société à cette forme d'unité.
Puis il y a la volonté ensuite, disons même ce le principe de liberté lui-même : c'est là qu'il entre en jeu. J'avoue en connaitre bien mal les mécanismes. Il me semble a priori que, de deux intelligences libres ayant accédé aux mêmes principes, les volontés sont nécessairement conformes. Mais cela suppose qu'il existe naturellement, dans la pleine liberté, une volonté du bien, de l'ordre, et que la volonté du désordre n'existe pas, qu'elle n'est juste qu'une forme de servitude.
Ensuite, de ce que j'ai envisagé précédemment, l'application d'une justice intra pourrait avoir plusieurs formes :
1/ soit de corriger une déviance : conduire un membre à revenir dans l'ordre. Suppose, comme vu précédemment, d'éclairer son intelligence, car si il est dans la déviance ce ne peut être que par ignorance des fins recherchées par la société à laquelle il veut appartenir
2/ soit d'éveiller sa volonté : là il s'agit d'une forme de libération. La volonté ne peut pas s'exercer que lorsqu'elle est incarcérée dans des manies, des addictions, des désirs ou toute chose qui nuit à son exercice. L'exercice de la volonté c'est justement ce que permet la liberté. Donc on peut imaginer que la justice ait des mécanismes de libération de ses membres de leurs servitudes. Et là... peut-être, pourquoi pas, même si cela parait paradoxale, imaginer des formes de prison, comme on cloisonne des drogués pour des cures de désintoxication, quand c'est surtout pour le bien et la libération de l'individu bien évidemment. Je cite cet exemple juste parce qu'il pourrait paraitre paradoxale mais qu'il ne faut pourtant pas l'exclure. C'est pour bien marquer la différence entre la technique d'application de la justice et la fin recherchée. Dans ce cas précis, emprisonner une personne pour la libérer d'un mal qui la possède, c'est comme empêcher quelqu'un de se jeter par la fenêtre, ce n'est pas coercitif, c'est libérateur. Je sens que c'est ce point qui va le plus faire débat.
3/ soit de l'exclure du groupe quand, de sa pleine volonté et en pleine connaissance de cause le membre refuse de se soumettre à l'ordre social. Il y en a qui justifient par là la peine de mort, mais je crois que le bannissement n'a rien à voir, car il souligne bien, même en retranchant à la société un de ses membres, que la personne existe par-delà même le corps social. Après, la difficulté de ce point à résoudre c'est dans le cas d'une seule société universel, d'un seul ordre social... on le met où le membre récalcitrant ? Ce qui amène la question : cette possibilité d'exclusion n'est-elle finalement pas tout simplement impossible dans le cas, typique d'un ordre universel, où la vérité qui ordonne le groupe serait LA VERITE universelle : alors il serait impossible, dans les faits et grâce à Dieu, de refuser de s'y soumettre dès lors qu'on en a l'intelligence et la liberté.
Bon voilà des pistes de réflexion. Le point 2 me semble délicat parce que pour faire la différence entre un acte contraignant et un acte libérateur, c'est exactement ce que vous disiez Jean-Baptiste, ils semblent quasi indissociables. J'avoue maintenant douter. Je crois qu'il faut absolument approfondir cette question. Par contre, ici je ne l'ai évoqué que dans le cadre du droit et de sa protection. Il me semble qu'on puisse plus facilement extraire de tous ces cas les lois coercitives type préventives.
Exemple (ce sera plus simple, je prends le premier truc qui me passe par la tête) : dans une société idéale on n'interdit pas aux gens de rouler à plus de 50km/h en ville, mais on les informe, de manière à ce qu'ils intègrent parfaitement cette notion, du danger encouru pour eux et pour les autres. On imagine alors qu'une grande majorité, ayant grandement confiance dans cet enseignement, et ayant en plus compris rationnellement les rapports de cause à conséquence, va se garder librement de dépasser cette vitesse. Cependant une personne un jour ne respectera pas ce "commandement" (enseignement) :
1/ soit qu'elle n'en aura pas été suffisamment informée
2/ soit qu'elle sera trop pressé, ou qu'elle aimera trop la vitesse, et donc qu'elle aura perdu de vue le bien commun
3/ soit que la notion de respect de la vie lui est futile et que, même si elle la comprend, elle refuse de s'y soumettre
Dans tous les cas, la première question est forcément : faut-il laisser faire jusqu'à ce qu'il arrive un drame ? Ma réponse est non.
1/ si la personne n'a pas suffisamment compris les enjeux et les risques, il faut donc redoubler d'enseignement. Peut-on le faire de force ? non.
2/ si la personne est asservie à un comportement désordonné, il faut la délivrer. Peut-on le faire de force ? oui et non. Ici la "délivrance" est nécessairement par la force, mais une force à laquelle la personne aura librement acceptée de se soumettre. Un peu comme un drogué qui entre librement en maison de désintoxication, ou quelqu'un qui entre librement à l'hopital psychiatrique pour se faire soigner. C'est évidemment à évaluer à l'aune du premier point : dans quelle mesure la personne a-t-elle suffisamment conscience des dangers et, malgré cela, se sent emprisonnée dans un comportement dont elle aimerait se défaire ?
3/ dans les cas où, la liberté de l'individu respectée et sa conscience acquise, il n'est pas permis d'attendre de cet individu qu'il se soumettre librement aux points précédents, il s'exclue par là-même de l'ordre social auquel il appartenait (ce qu'on appelle dans l'Eglise la désobéissance ecclésiale). Il doit donc être exclu du groupe.
Là j'ai pris un exemple d'un cas qui peut porter atteinte à l'intégrité physique des personnes, mais ce cas pourrait s'appliquer à n'importe quoi. Même pour les exemples de Christian. Par exemple, fumer un joint, si le corps social a atteint dans sa quête de l'idéal à l'idée que c'était mauvais pour le corps social, alors selon le même principe, il doit en informer parfaitement et rationnellement ses membres, et si ceux-ci, informés mais n'arrivant pas malgré eux à cesser ce comportement, en appellent à une délivrance, alors mettre en œuvre les procédures permettant cette délivrance.
Évidemment je survole les situations, des problèmes très complexes, mais pour l'instant le seul pouvoir coercitif, s'il en est un, que je vois dans mon modèle, c'est celui d'exclure le membre du groupe, comme vous l'avez souligné avec Christophe. Mais on pourrait non plus le voir comme une force coercitive, dans le sens où je considère la coercition comme étant uniquement la contrainte sur un membre de l'ordre. Si le membre s'est exclu lui-même de sa propre volonté de l'ordre social, par désobéissance par exemple (on pense aux excommunication latae sententia par exemple), il appartient donc au corps social de le traiter comme un "corps étranger". L'exclusion n'est alors que la formalisation de ce fait.
Ouh la la, rien à voir, mais je viens soudain de repenser à quelque chose qui dépasse clairement la notion de droit et de devoir : la question du sacré et de l'interdit qui fonde le sacré. Cette question de la nécessité des interdits comme fondateurs du sacré, est-elle abolie dans le christianisme ? (je dirai que oui, avec notamment la levée des interdits alimentaires). Si oui, alors par analogie, une société vraiment éclairée par le bien commun n'aurait de sacré que ce qui transcende véritablement l'homme et lui serait de toute façon inaccessible. Tout interdit, dont on sait avec le recul qu'ils ont une valeur pédagogique comme un voile sur le mystère divin non encore pleinement révélé, serait forcément rendu inutile par le seul fait que tout est révélé, tout est accompli. Bref, dans ce cas, une société sans interdit ne peut être qu'une société véritablement chrétienne, car nécessairement universelle.
Dans le cas contraire, la notion de sacré vient nécessairement habiter les bornes dans lesquelles s'encadre une société non universelle, et les interdits sont rendus nécessaires comme délimitant le sacré du profane. On en revient alors aux gardiens de la cité platonicienne, qui sont aux frontières de la cité, là à l'extrême démarcation, au-delà de laquelle le profane pense que l'ordre s'arrête, tandis que l'initié, à la frontière, sait que cette frontière n'est que la limite de l'ordre de sa cité et qu'au-delà existe une autre ordre inconnu et dans lequel sa cité est potentiellement un élément de désordre.
Site : http://www.pneumatis.net/
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
- Pneumatis
- Pater civitatis
- Messages : 1937
- Inscription : jeu. 19 févr. 2009, 17:22
- Localisation : Châteaubriant
- Contact :
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Juste pour préciser qu'en ce qui me concerne, ma question c'était plutôt la 3ème : L'usage de la coercition par l'autorité politique est-elle nécessaire ?. Je viens de me rendre compte que ce n'est pas tant d'anarchie que j'aurai du parler, mais d'acratie (encore que, je ne suis pas certain) : bref, d'une hiér-archie (un ordre) sociale dont les représentant de l'autorité (mettons, la tête) n'auraient aucun pouvoir coercitif à l'égard des membres du corps social.Christophe a écrit :Mais je n'ai peut-être pas bien compris la question. Est-ce Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ? ou Un pouvoir politique est-il nécessaire ? ou L'usage de la coercition par l'autorité politique est-elle nécessaire ?
Site : http://www.pneumatis.net/
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013
- Christophe
- Consul
- Messages : 7674
- Inscription : mer. 28 avr. 2004, 0:04
- Conviction : Catholique
- Localisation : Frankistan
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Si nous nous en référons à St Paul, le pouvoir coercitif appartient à l'autorité politique en raison même de l'essence du politique, qui est de promouvoir le bien commun et de punir le mal commun. Et, quant à moi, je préfère encore que cette autorité politique soit exercée par une institution visible dont le pouvoir peut être discuté, contrôlé, contre-balancé, contesté, renversé... que par cette autorité insidieuse, autoritaire, implacable qu'est la pression sociale dans le régime anarchique. Il n'y a rien que je ne trouve aussi pervers que cette autorité anarchique !Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains (Rm 13, 1-5)
01 Il faut que tout être humain soit soumis aux autorités qui sont au-dessus de lui, car il n'y a d'autorité qu'en dépendance de Dieu, et celles qui existent sont établies sous la dépendance de Dieu ;
02 si bien qu'en se dressant contre l'autorité on est contre l'ordre des choses établi par Dieu, et en prenant cette position on attire sur soi la condamnation.
03 En effet, les représentants du pouvoir ne sont pas à craindre quand on agit bien, mais quand on agit mal. Si tu ne veux pas avoir à craindre l'autorité, fais ce qui est bien, et l'autorité reconnaîtra tes mérites.
04 Car elle est au service de Dieu pour promouvoir le bien ; mais si tu fais le mal, alors, vis dans la crainte. En effet, ce n'est pas pour rien que l'autorité tient le glaive. Car elle est au service de Dieu : en punissant, elle montre la colère de Dieu envers celui qui fait le mal.
05 C'est donc une nécessité d'être soumis, non seulement pour éviter la colère, mais encore pour obéir à la conscience.
Copyright AELF - 1980 - 2006 - Tous droits réservés
Que Dieu vous bénisse.
Christophe
« N'ayez pas peur ! » (365 occurrences dans les Écritures)
-
- Pater civitatis
- Messages : 3085
- Inscription : mer. 30 avr. 2008, 2:40
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
On peut toujours se révolter contre un pouvoir visible, en effet. C'est ici que se trouve toute la violence de l'opinion générale. L'opinion est violente car massive et pourtant impalpable, sans visage. "On" ne peut rien faire sans elle, avec elle et contre elle.
On parle souvent de dictature de l'opinion. Mais il n'y a de dictature que de forces visibles. L'oppression de l'opinion n'est pas dictatoriale, elle est, je crois, totalitaire.
On parle souvent de dictature de l'opinion. Mais il n'y a de dictature que de forces visibles. L'oppression de l'opinion n'est pas dictatoriale, elle est, je crois, totalitaire.
Re: Un pouvoir gouvernemental est-il nécessaire ?
Bonjour à tous
Cette discussion m’intéresse, mais je suis à la bourre ces temps et je ne peux y dévouer que quelques minutes volées à des tâches alimentaires. Je réponds ici en désordre à quelques idées glanées sur les deux fils de discussion, en priant les auteurs de m’excuser de ne pas citer leur nom.
N’y aurait-il pas d’autres éveilleurs dans la société que les hommes en bleu et en bottes ? Quid des églises, des philosophes, des artistes, et tout simplement des ainés ?
Et au nom de quoi, s’il vous plaît, sinon de la plus violente coercition, obliger quelqu'un à quitter ses parents, ses amis, ses biens, son emploi, le lieu de ses souvenirs et prendre le chemin de l’exil ?
Je suis autant français que n’importe quel autre français. Pourquoi est-ce moi qui doit partir et pas l’autre ? Réponse : parce qu’il a le pouvoir politique et pas moi.
Si l’un a converti l’autre, la vie de celui-ci sera changée. Par la parole, pas par la législation.
Le Pape parle avec autorité. Il doit fonder son discours sur un appel à la vérité que la raison humaine peut connaître. Le ministre n’a pas besoin d’autorité. Il a le pouvoir politique. Il signe un décret. Les contrevenants seront punis. Fin de l’exercice.
Il n’y a d’unanimisme qu’à de très courts moments (les ‘foules en fusion’ de Sartre). Il est important que ces emportements de l’opinion ne trouvent pas de relais politiques, qui les cristalliseraient et traduiraient une brève passion par des lois et des institutions pérennes.
Vous lui assignez cependant un rôle qui le légitimerait : assurer le Bien commun. C’est une bonne piste. Pour entraîner complètement notre accord, il faudrait que vous définissiez le Bien commun. Pour moi, c’est le Droit. J’ai déjà démontré plusieurs fois sur ce forum pourquoi le Droit de propriété était le Bien commun de l’humanité, je n’y reviendrai pas ici. Mais vous ne partagez pas cette vision, semble-t-il. Quant à l’Eglise, je constate que cette notion de Bien commun, qu’elle avance si souvent et à raison, ne fait même pas l’accord des théologiens dès qu’on sort des généralités inopérantes.
Voulez-vous qu’on explore ce que peut bien signifier, en pratique, le Bien commun ?
Bonne journée à tous
Christian
Cette discussion m’intéresse, mais je suis à la bourre ces temps et je ne peux y dévouer que quelques minutes volées à des tâches alimentaires. Je réponds ici en désordre à quelques idées glanées sur les deux fils de discussion, en priant les auteurs de m’excuser de ne pas citer leur nom.
‘Le pouvoir libérateur’ Voilà un bel exercice de novlangue. De quoi d’autre peut-on se libérer en société, sinon du pouvoir ?Je crois qu'il faut en finir avec la liaison qui est souvent faite entre "pouvoir" et "coercition". Tour pouvoir est nécessairement coercitif et libérateur si nous concevons la liberté comme un mécanisme.
Rousseau disait qu’il fallait forcer les hommes à être libres et les mauvais éducateurs pensent qu’il faut forcer les enfants à sortir de l’ignorance. Mais Rousseau fut l’inspirateur de bien des terroristes et il faut toute l’arrogance des hommes de l’Etat pour traiter leurs sujets comme des enfants.Pour libérer un objet d'un étau je dois forcer cet étau à sortir de son état initial
N’y aurait-il pas d’autres éveilleurs dans la société que les hommes en bleu et en bottes ? Quid des églises, des philosophes, des artistes, et tout simplement des ainés ?
Non, la solution pour abandonner la coercition c’est d’abandonner la coercition. On n’atteint la liberté que par la libertéla seule solution qu'ils ont pour abandonner la coercition, c'est de réhabiliter l'exil
Et au nom de quoi, s’il vous plaît, sinon de la plus violente coercition, obliger quelqu'un à quitter ses parents, ses amis, ses biens, son emploi, le lieu de ses souvenirs et prendre le chemin de l’exil ?
Je suis autant français que n’importe quel autre français. Pourquoi est-ce moi qui doit partir et pas l’autre ? Réponse : parce qu’il a le pouvoir politique et pas moi.
Oui, j’avais bien compris la première fois. Se marier, c’est agir au regard d’autrui et envers autrui, et inscrire cette action dans un passé et un futur dont il faut nous soucier. Avoir des enfants aussi. Travailler aussi. Et voter. Et construire une maison. Se syndiquer. Evangéliser. Fonder une entreprise. Publier. Bref, tout est politique. Je vous l’ai dit, vous commettez la même erreur que BLJP, et en ne distinguant pas ce qui fait l’essence de la politique, vous vous rendez incapable de la comprendre.Cela signifie que la politique est action. Et la politique c'est l'action dans l'espace public. L'espace public ça n'est pas un jardin ou balcon, l'espace public c'est le lieu dans lequel nous agissons au regard d'autrui et envers autrui, inscris dans un passé commun et un futur dont il faut nous soucier.
Comme Aristote et Arendt, vous êtes incapable de penser une société sans violence légalisée contre des innocents. Comme si la liberté était une concession du pouvoir. Mais la liberté, au contraire, précède le politique. Ontologiquement et historiquement. C’est le politique qui la viole, non pas lui qui l’institue. Nous sommes l’exemple qu’il peut y avoir une parole libre et qui discute de affaires de la cité, mais qui n’est rigoureusement pas politique. Car notre échange n’a pas pour but de décider qui prendra le pouvoir sur l’autre. Lorsque nous serons lassés du débat, nous retournerons chacun à nos affaires.Jean-BaptisteChristian
A l’horizon de chaque débat politique, il y a l’ombre du policier. Si elle n'y est pas, on ne parle pas politique, on discute de philosophie.
Le politique est précisément le lieu de la parole libre. Partout où la parole n'est pas libre, il n'y a pas de politique. Ce que vous décrivez ça n'est pas la politique, c'est son absence !
Si l’un a converti l’autre, la vie de celui-ci sera changée. Par la parole, pas par la législation.
Oui, c’était la fonction des camps de rééducation et des hôpitaux psychiatriques en URSS. Il s’agissait de libérer l’objecteur de ses erreurs.Si le corps social a atteint dans sa quête de l'idéal à l'idée que c'était mauvais pour le corps social, alors selon le même principe, il doit en informer parfaitement et rationnellement ses membres, et si ceux-ci, informés mais n'arrivant pas malgré eux à cesser ce comportement, en appellent à une délivrance, alors mettre en œuvre les procédures permettant cette délivrance.
Encore une fois, on ne peut prononcer une telle phrase dans le contexte de cette discussion que pour n’avoir pas compris l’essence du politique. Il existe sans doute un problème d’autorité. Mais ne vient-il pas de l’envahissement par le pouvoir de tout ce qui devrait être du domaine de l’autorité ?le problème reste celui du rapport que nous entretenons, nous autres modernes, avec l'autorité
Le Pape parle avec autorité. Il doit fonder son discours sur un appel à la vérité que la raison humaine peut connaître. Le ministre n’a pas besoin d’autorité. Il a le pouvoir politique. Il signe un décret. Les contrevenants seront punis. Fin de l’exercice.
L’opinion publique est très largement fragmentée, ce qui permet d’explorer les voies de l’avenir en confrontant les divers courants et en permettant aux gens d’adopter différents styles de vie et tester celui ou ceux qui sont les plus prometteurs. Ce que justement le politique vise à interdire, puisque la même loi contraint tout le monde.l'oppression de l'opinion n'est pas dictatoriale, elle est, je crois, totalitaire.
Il n’y a d’unanimisme qu’à de très courts moments (les ‘foules en fusion’ de Sartre). Il est important que ces emportements de l’opinion ne trouvent pas de relais politiques, qui les cristalliseraient et traduiraient une brève passion par des lois et des institutions pérennes.
Vous avez compris le problème, Christophe. Le pouvoir politique est forcément coercitif et on ne peut que souhaiter sa disparition.Dès lors que vous ne considérez l'autorité politique que comme une force coercitive - donc opposée à la liberté -, vous ne pouvez que souhaiter sa disparition. Mais l'autorité politique ne s'exerce légitimement qu'en vue du bien commun, entre autre pour protéger les droits - dont celui à la liberté - des citoyens. A l'état "apolitique", la loi commune est la loi du plus fort, où chacun peut avoir une morale mais elle n'engage que lui. Dans l'état politique, une morale est imposée non à la conscience individuelle mais aux comportements sociaux.
Vous lui assignez cependant un rôle qui le légitimerait : assurer le Bien commun. C’est une bonne piste. Pour entraîner complètement notre accord, il faudrait que vous définissiez le Bien commun. Pour moi, c’est le Droit. J’ai déjà démontré plusieurs fois sur ce forum pourquoi le Droit de propriété était le Bien commun de l’humanité, je n’y reviendrai pas ici. Mais vous ne partagez pas cette vision, semble-t-il. Quant à l’Eglise, je constate que cette notion de Bien commun, qu’elle avance si souvent et à raison, ne fait même pas l’accord des théologiens dès qu’on sort des généralités inopérantes.
Voulez-vous qu’on explore ce que peut bien signifier, en pratique, le Bien commun ?
Bonne journée à tous
Christian
Qui est en ligne ?
Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 20 invités